Les plus jeunes ne connaissent pas son nom ni son visage. Pourtant tous les jours ils sont ses victimes lorsqu’ils ouvrent un livre, écoutent la télévision ou vont à la mosquée.
Taleb Ibrahimi, il ne pouvait avoir un nom aussi adapté, avait été celui qui a imposé et généralisé l’enseignement de l’arabe classique dans le système scolaire et dans toutes les manifestations écrites ou orales du pays.
Nous ne l’avions jamais qualifié d’islamiste car le terme était inconnu de nous tous ou très éloigné. Il était le parfait idéologue du régime militaire, en cravate et propre sur lui. C’est lui qui a introduit les germes maléfiques sous le couvert d’une approche intellectuelle de la très fantasmée civilisation arabo-musulmane.
Il avait voulu nous faire croire que c’était notre racine dans l’histoire. Il n’y avait réussi que par la terreur et la débilisation du système scolaire. Il faisait partie de ceux qui ont vanté la grandeur de la culture musulmane en voulant nous l’ingurgiter par la force. Nous avons résisté mais nous sommes prisonniers de son peuple.
Sans hurler, sans barbe ni chechia. Non, lui était le prince ordonnateur de la grandeur spirituelle, culturelle et philosophique de notre nouvelle identité imposée. Celle qui a fait éclore des plantes mortifères.
Les islamistes ne sont pas des martiens qui nous sont tombés sur la tête brusquement dans les années 90’. Ce n’est pas un peuple armé qui nous a envahis. Ce sont des guerriers de l’idéologie construite, travaillée et promue par le système éducatif que dirigeait notre Taleb Ibrahimi.
Il a fait ce qu’ils ont tous voulu faire. Ils voulaient remplacer l’élite des anciens colonisateurs par la création d’une caste nobiliaire qui voulait régner au plus haut du pouvoir politique et de la pensée. Taleb Ibrahimi a été de ceux-là, en première ligne de responsabilité.
C’est à partir de son règne de grand valet du régime militaire que tout avait commencé. C’est par lui que le régime avait trouvé un idéologue en cravate. Il est parti mais il peut avoir la satisfaction d’avoir la paternité sur une idéologie mortelle qui a tout dévasté.
Monsieur le ministre de l’Education, un ancien prof n’ira jamais rendre un hommage sur votre tombe car le souvenir de Boris Vian risque de le hanter. Et il n’a pas cette éducation de cracher.
Quant à respecter votre mort, il y a des milliers de tombes creusées à vos côtés, victimes ou responsables par votre idéologie. Vous avez beaucoup de choses à vous dire jusqu’à l’éternité, puisque vous y croyez et que vous avez terrorisé les gens pour y croire.
Ne me cherchez pas, je serai en enfer, bien plus serein car loin de vous.
Il y a des dates que même le sable ne peut recouvrir. Trente-sept ans après le soulèvement d’Octobre 1988, le pays n’a toujours pas retrouvé sa voix. Ce qui fut le cri de la jeunesse algérienne s’est transformé en murmure surveillé. La liberté d’expression, conquise dans le sang, reste prisonnière d’un pouvoir qui s’en nourrit tout en la redoutant.
Le 5 octobre 1988, l’Algérie n’a pas parlé : elle a rugi.
Des foules de jeunes, affamés de justice, ont envahi les rues pour crier leur rage, leur faim, leur vérité. Le pouvoir, fidèle à son réflexe d’Empire, a répondu par le plomb. Le sang a coulé – et dans ce tumulte, quelque chose d’irréversible est né : le droit de dire non.
Ce cri a enfanté une génération de plumes et de consciences. Une presse libre, insolente, téméraire. Le Matin d’Algérie en est le plus beau vestige : né d’un cri, élevé dans la tourmente, forgé dans la douleur. Malgré les pressions, l’emprisonnement de son fondateur Mohamed Benchicou, les interdictions, les blocages, les assauts quotidiens, il tient debout. Il encaisse, il se relève. Il reste la voix vivante d’une liberté qu’on a voulu tuer – mais qu’aucune prison n’a su enterrer.
Aujourd’hui, cette liberté ne dérange plus : elle fait peur.
La presse, jadis insoumise, s’est muée en chambre d’écho du pouvoir. Les journaux commentent au lieu de questionner. Les micros se ferment plus vite qu’ils ne s’ouvrent. Les plateaux télé ressemblent à des tribunaux où tout débat est jugé d’avance. Et pendant que le peuple se tait, le président parle d’« audience » – comme si la vérité dépendait des chiffres. « Ce sont les directeurs de plateaux qui gèrent », dit-il. Traduction : la liberté de parole est en régie.
Le FFS, par la voix de Youcef Aouchiche, l’a rappelé : l’espace public est un mirage. Les micros sont clos, les plateaux verrouillés, la contradiction bannie. Le débat n’existe plus que dans les marges, dans les cafés sans licence, dans les silences obstinés.
Les voix libres s’éteignent une à une. Liberté, pilier de la presse indépendante, a été rayé du paysage. Le RCD, interdit d’université d’été, paie pour son audace. Djilali, de Jil Jadid, a claqué la porte, écœuré. Et Belkhadem, vieux routier du sérail, ose l’avouer : les années Boumediene, que l’on croyait d’acier, laissaient encore passer un souffle d’air. C’est dire si le présent sent la rouille et la peur.
Derrière la rouille, il y a les ombres. Celles des prisonniers d’opinion, entassés pour avoir pensé tout haut ce que d’autres murmurent. Désormais, on est coupable d’intention. On soupçonne avant d’écouter. On enferme avant de comprendre. Le livre est censuré, les associations scellées, les cafés fermés, les artistes bâillonnés. On moralise jusqu’à l’absurde : les chanteurs n’ont plus le droit de chanter, les tiktokeurs sont traqués. Tout est transformé en cible d’État. Une morale officielle a remplacé la liberté ; une citoyenneté de papier a pris la place du peuple.
Le pouvoir parle de stabilité. En réalité, il s’accroche au désordre qu’il fabrique. Une instabilité rentable : elle protège les fortunes, entretient la peur, érige la médiocrité en système. On récompense les muets, on punit les lucides. On préfère la docilité au courage.
Et pourtant, la braise couve.
Le 5 octobre n’est pas mort.
Il respire dans chaque jeune qu’on empêche de se souvenir, dans chaque regard qu’on détourne, dans chaque mot qu’on efface trop vite. Il vit dans les hashtags rageurs, dans les rues silencieuses, dans les rires étouffés des cafés fermés. Il avance masqué, patient, comme la braise sous la cendre.
Cette jeunesse qu’on croit anesthésiée n’a pas oublié – on l’a simplement privée du droit de se rappeler. Mais le jour où elle le fera, ce ne sera pas une commémoration : ce sera un séisme. Aucune chaîne ne retiendra cette mémoire, aucune pseudo-opposition ne la récupérera.
Elle ne demandera pas la parole : elle la reprendra.
Car dans son ADN brûle encore la marque des siens : la révolte comme héritage, le refus comme prière, le courage made in Algérie comme ultime certitude.
Aujourd’hui, la liberté conquise dans le sang a été trahie, retournée, déguisée en “liberté d’oppression”. Mais la parole, elle, n’est pas morte. Elle veille, elle gronde, elle s’aiguise dans les marges. Et quand elle refera surface, ce ne sera pas pour dialoguer – mais pour frapper à la porte du pouvoir avec les mots du peuple, et lui rappeler :
On ne musèle pas une nation qui a appris à parler avec son sang.
C’est un Takfarinas en forme et bien en jambe qui s’est présenté, samedi soir, devant le nombreux public kabyle du théâtre Chanzy (Angers) à l’occasion d’un concert exceptionnel assuré par l’association Assirem.
C’est un chanteur généreux, joueur, taquin et bon que ce public chanceux a eu l’occasion de voir samedi 4 octobre dans cette ville de l’ouest de la France.
Même rare sur scène, Takfarinas c’est d’abord une voix à la fois chaleureuse, ample, capable de varier les registres. Son chant est expressif, puissant souvent très mélodique mais avec des passages plus rythmés, percussifs, ou avec des effets de “vous-y-yale”. Ses célèbres chansons comme Zaama, zaama, Way telha… ont quasiment mis le feu à cette salle remplie d’une jeunesse kabyle éprise de la belle chanson.
Sa musique ample, puissante à la fois enracinée dans les rythmes et modes amazighs(kabyle, chaoui, etc.) et ouverte aux influences contemporaines, ne laisse guère indifférent ce public venu faire la fête.
Au bout de deux heures d’un show à couper le souffle, Takfarinas a montré qu’il est toujours aussi incontournable, apprécié et fidèle à sa générosité légendaire. La preuve ? Cette belle invitation du jeune chanteur Arezki Ouali pour partager avec lui une chanson sur scène. Chapeau bas l’artiste !
L’Homme bien qu’il soit lui-même mortel ne peut se représenter ni la fin de l’espace, ni l’histoire du temps, ni la fin d’un peuple, il vit toujours dans un infini illusoire. Milan Kundera
Le 1er septembre 1939 le Reich allemand envahit la Pologne et déclenche la seconde guerre mondiale. Le 3 septembre ce sont la France et la Grande Bretagne qui déclarent la guerre à l’Allemagne. Pendant quelques mois c’est une “drôle de guerre” que vivent les belligérants : ils s’observent et se mesurent, les uns derrière la ligne Maginot, les autres derrière la ligne Siegfried. Le 10 mai 1940 la bataille de France est enfin engagée. Les armées allemandes percent la ligne française à Sedan, encerclent les troupes britanniques à Dunkerque, contournent la ligne Maginot et remportent la victoire.
Les élites politiques et le Gouvernement français désemparés se replient à Bordeaux et se déchirent entre ceux qui veulent négocier la paix et ceux qui désirent transférer les administrations en Afrique du Nord pour continuer la guerre. C’est ainsi que le 21 juin, une partie de ces personnalités dont 27 députés partent pour Casablanca sur le paquebot « Massilia ».
Arrivées sur le territoire le 24 juin, elles sont aussitôt arrêtées par les sbires du maréchal Pétain qui vient de signer l’armistice. Le 10 juillet 1940, l’Assemblée Nationale réunie à Vichy vote les pleins pouvoirs constituants au maréchal Pétain qui met aussitôt en marche sa politique autoritaire, antisémite et collaborationniste avec l’Allemagne nazie et ses alliés.
Du jour au lendemain, les résistants sont devenus des bellicistes, des jusqu’au boutistes, voire des traîtres et, pour Vichy, il faut les écarter du peuple comme il faut résister aux appels que leur lance de Londres le général de Gaulle. En outre, la République espagnole vient de tomber et plus de 500 000 républicains espagnols s’enfuient vers la France qu’ils pensent être la République sœur..
Mais la République française est déjà agonisante. En 1938, sous la pression de la population conservatrice et d’extrême droite elle a signé deux décrets-lois assimilant les réfugiés espagnols à des “étrangers indésirables”.
En 1939 un député demande que l’on en finisse avec le poids écrasant des réfugiés espagnols et en 1940 le maréchal Pétain qualifie ces derniers d’indésirables. Il va jusqu’ à donner son accord à un projet de ré-émigration massive alors que le régime franquiste continue le massacre d’opposants.
De 1939 à 1943, la France crée 14 camps d’internement sur son territoire et 12 au Maghreb. Des centaines de milliers de Français, d’Algériens, de Juifs, d’étrangers “indésirables” de diverses nationalités, principalement espagnols, polonais russes allemands, anciens de la guerre d’Espagne et des Brigades internationales, y sont reclus dans des conditions inhumaines : froid, faim, travaux forcés et surtout cruauté des gardiens.
Par exemple à Djelfa, ville située à 300 km d’Alger et 1140 mètres d’altitude, dans une steppe balayée par des vents glacés en hiver, on n’y envoie que des hommes considérés comme politiquement dangereux. De nombreuses lettres écrites par ces prisonniers dénoncent la cruauté physique et psychologique des gardiens français comme le capitaine Caboche et son sergent qui n’hésitent pas à frapper les détenus dans la figure avec une cravache.
Parmi ces détenus se trouve Max Aub, la personne qui symbolise cette histoire. C’est un jeune écrivain né en France qui à l’âge de dix ans a quitté Paris pour Valence où ses parents, un couple franco-allemand, d’origine juive, se sont installés lors de la première guerre mondiale. A partir de onze ans, il apprend l’espagnol, langue dans laquelle il écrit toute son œuvre.
Entre 1936 et 1937, il exerce les fonctions de Conseiller culturel de l’Ambassade d’Espagne à Paris ce qui lui permet de commander à Pablo Picasso le célèbre tableau de Guernica en mémoire du bombardement de cette ville par les franquistes et les troupes allemandes nazies allemandes et fascistes italiennes. Il revient ensuite s’installer à Barcelone où il se trouve en 1939 au moment de la défaite militaire des Républicains, en 1939.. Il ne peut plus rester en Espagne.
Né en France et bilingue, élevé dans la laïcité, ayant des relations avec le monde intellectuel français, il franchit la frontière en toute confiance avec l’équipe qui vient de tourner le film de son ami André Malraux, Sierra de Teruel, échappant ainsi aux humiliations de la retirada.
Dénoncé comme communiste, il est interné successivement dans les centres d’internement Roland-Garros à Paris, Le Vernet d’Ariège au sud de Toulouse et, finalement, à Djelfa,. Il s’en échappe le 18 mai 1942 avec l’aide du Consul du Mexique, d’amis français et de républicains espagnols. Après une longue attente à Casablanca, il arrive à Mexico où il s’intègre dans la communauté d’Espagnols républicains exilés où il reste jusqu’à sa mort en 1972. Pendant ces trente années d’exil, il joue un rôle important dans le développement intellectuel mexicain à travers l’université, la presse, le cinéma et la littérature tout en restant fidèle à sa patrie, la République espagnole, et au Parti Socialiste.
Parler de Max Aub et des camps d’internement au Maghreb ’est aussi parler de Bernard Sicot, docteur en études ibériques, professeur émérite de l’université Paris-Nanterre et biographe qui a publié en septembre 2009, avec Andrée Bachoud, aux éditions Mare-Nostrum, l’essai Sables d’Exil : les républicains espagnols dans les camps d’internement au Maghreb (1939 -1945) .
Le 15 mars 2016, il publie aux éditions Riveneuve, Djelfa 41-43 Un camp d’internement en Algérie avec une préface de Christian Phéline,
Quelques mois plus tard, en juin 2015, il publie, en espagnol, aux éditions Viso -libros, un recueil de poèmes écrits entre 1940 et 1970 par Max Aub sous le titre Diario de Djelfa.
Emile Martinez
Quelques poèmes de Max Aub traduits en français peuvent être lus partiellement dans la revue Cairn-Infos Article Max Aub et les paysages de Djelfa.
Dans l’imaginaire social algérien ou autre, la figure de l’enseignant est souvent réduite à une silhouette unidimensionnelle : transmetteur de savoir et autorité devant la classe. Cette vision essentialiste, aussi rassurante soit-elle, occulte la profonde complexité de la personne qui incarne ce rôle.
En effet, loin d’être un acteur social monolithique, l’enseignant est un « être de papier », selon l’expression de Lahire (2005), dont les feuillets sont constitués de multiples schémas d’action, de perception et d’évaluation, intériorisés au gré de socialisations plurielles et activés de manière différentielle selon les situations pédagogiques qu’il rencontre.
Lahire (2005), postule que l’individu est un « homme pluriel » habité par une pluralité de schèmes issus de socialisations multiples et souvent hétérogènes. Cette thèse offre un cadre théorique adéquat pour déconstruire l’unité apparente de la « la multiplicité dispositionnelle de l’enseignant ».
En effet, l’enseignant n’arrive pas en classe dépouillé de son histoire. Il est le produit d’une socialisation familiale primaire, d’une socialisation scolaire longue qui l’a conduit à ce métier, d’une socialisation professionnelle lors de sa formation, mais aussi de ses expériences extrascolaires (socialisation culturelle, sportive, associative, etc.). Chacune de ces instances a inscrit en lui des dispositions spécifiques – des manières de parler, de penser, de réagir, d’évaluer – qui forment un « répertoire » potentiel. L’enseignant en classe se transforme en une configuration spécifique de dispositions activée par le contexte.
Ainsi, l’enseignant qui anime un débat d’idées ne mobilise pas les mêmes schèmes que celui qui gère un conflit entre élèves, corrige des copies, ou participe à un conseil de classe. Il opère des « ajustements situationnels » permanents, passant de la posture de l’expert savant à celle du médiateur, du gestionnaire, du psychologue, voire du comédien. Cette plasticité est la manifestation même de sa pluralité interne. Pour Lahire (2005), l’acteur est un capital de schèmes d’action variés et disponibles qui se déploie de manière sélective.
Ainsi, dans la salle des professeurs, espace de transition et de glissements identitaires, l’enseignant endosse, souvent, le rôle du collègue solidaire, parfois, du syndicaliste militant, et tout le temps, du parent anxieux pour sa propre progéniture. N’est-ce pas une mosaïque d’appartenances sociales?
Ce qu’il faut comprendre est que le « moi pluriel » de l’enseignant n’est pas une libre combinaison de dispositions ; il est soumis à de fortes pressions institutionnelles et sociales. L’institution scolaire, par ses programmes, ses routines, ses évaluations et sa « forme scolaire » historique, tend à prescrire un certain habitus professionnel. Cette tension entre les dispositions incorporées (issues de sa socialisation) et les exigences du contexte professionnel est au cœur de l’expérience enseignante contemporaine.
Les travaux récents sur la performance émotionnelle des enseignants (Barrère, 2017) illustrent parfaitement cette nécessité de performance identitaire : l’enseignant doit gérer et souvent masquer ses émotions pour incarner la sérénité et l’autorité attendues, mobilisant pour ce faire des dispositions qui peuvent être en contradiction avec son état intérieur.
La salle de classe devient ainsi une scène où se joue une véritable performance identitaire. L’enseignant y est un acteur dont le jeu n’est pas purement stratégique ou cynique ; il est l’expression de cette économie des dispositions en action. Selon le public (élèves en difficulté, classes préparatoires), la matière (philosophie ou autre) ou le moment de l’année, différentes facettes de sa personne seront sollicitées. Un professeur d’EPS pourra mettre de la spontanéité dans son action, tandis qu’un professeur de philosophie trouvera dans la réflexion abstraite un terrain d’expression privilégié. Pourtant, l’inverse est tout aussi vrai et révélateur de la pluralité : le même professeur d’EPS devra faire preuve d’une rigueur administrative pour gérer les notes et le temps dédié à la pratique, et le philosophe devra développer une forme d’extraversion de situation pour captiver son auditoire. Cette adaptabilité n’est pas une faiblesse, mais la preuve d’un répertoire dispositionnel riche et d’une intelligence situationnelle aiguisée.
Aujourd’hui, l’enseignant expert est justement celui qui sait puiser avec justesse dans son répertoire pour répondre de manière ajustée à la singularité de chaque situation pédagogique. Il est un « sujet pluriel » naviguant en permanence entre ses dispositions incorporées, ses inclinations personnelles et les contraintes d’un contexte professionnel exigeant et multifacette. Reconnaître cette pluralité est un impératif tant scientifique que pratique. Pour la recherche, il s’agit d’aborder l’enseignant dans sa globalité d’être social. Pour la formation, il s’agit d’abandonner le mythe du profil unique et d’aider les futurs enseignants à prendre conscience de leur propre répertoire dispositionnel, pour apprendre à le gérer, l’enrichir et l’ajuster avec flexibilité et résilience.
C’est en assumant la symphonie, parfois dissonante mais toujours vivante, de ses identités multiples que l’enseignant peut le mieux remplir sa mission, non comme un automate du savoir, mais comme une personne humaine, riche, complexe en relation avec d’autres personnes, en perpétuelle co-métamorphose.
Dr Hamaizi Belkacem, ENS de Sétif
Références
Barrère, A. (2017). Au cœur des malaises enseignants. Armand Colin.
Lahire, B. (2005). L’homme pluriel: les ressorts de l’action. Armand Colin.
Lahire, B. (2006). La Condition littéraire. La double vie des écrivains. La Découverte.
Avec Ces lignes qui tracent mon corps, Mansoureh Kamari signe un premier album qui frappe par sa puissance et la sincérité de son trait. Auteur, dessinateur et scénariste de son récit, Kamari publie cet ouvrage chez Casterman, le 10 septembre 2025, dans la collection Romans Graphiques.
Ce récit graphique dépasse le simple témoignage : c’est un geste de réappropriation, un acte d’émancipation où le corps devient territoire de mémoire, de résistance et de liberté retrouvée.
Née à Téhéran et réfugiée en France depuis 2006, Mansoureh Kamari raconte une enfance et une adolescence plongées dans un contexte patriarcal et religieux où le corps féminin est constamment surveillé et contrôlé. Selon la loi islamique, le père détient un pouvoir absolu sur ses enfants, et les hommes jouissent d’une impunité quasi totale. Dans cette société, rire, chanter, danser ou aimer devient un acte de transgression. Les mariages précoces, les agressions sexuelles répétées, les humiliations quotidiennes et la peur constante façonnent une vie où la liberté des femmes est systématiquement brimée.
Le dessin de Kamari traduit cette tension avec une force rare. Traits tremblés, lignes sèches, contours nerveux : chaque planche restitue l’émotion brute, la fragilité et la force, le vertige du souvenir et le poids du silence. Le corps devient à la fois témoin et vecteur de mémoire. « Écrire cet album a été une thérapie. J’ai eu besoin de revisiter certains souvenirs pour m’en libérer », confie l’autrice. Ici, le dessin n’est pas seulement narratif : il est un instrument de réappropriation, un espace où chaque geste restitue l’histoire personnelle et collective et affirme la dignité.
L’exil marque un tournant dans ce récit. Loin d’être une fuite, il devient un espace de reconstruction. Kamari ose enfin se redessiner, poser nue pour ses cours de dessin, affirmer son identité et ses choix. Chaque planche raconte cette métamorphose : de la peur à la création, de la survie à la liberté. Le corps et la parole se retrouvent, et le lecteur suit pas à pas ce chemin de délivrance et de résilience.
Son récit s’inscrit dans la tradition des grandes autobiographies graphiques féministes, de Persepolis de Marjane Satrapi à Le Piano oriental de Zeina Abirached, mais il se distingue par la centralité du corps et la puissance émotionnelle de l’expérience. Kamari ne parle pas seulement pour elle : elle devient la voix de toutes les femmes contraintes au silence. Chaque planche est un cri silencieux, chaque ligne un geste de résistance et de réaffirmation de soi.
L’album ne se limite pas à la dénonciation de l’oppression patriarcale. Il explore aussi la mémoire, le temps et la transformation. Les souvenirs douloureux deviennent matière créatrice, et le lecteur est invité à ressentir, comprendre et partager ces expériences. La lecture est éprouvante, mais nécessaire : elle transforme la douleur en lumière, le silence en parole et l’effacement en affirmation de soi. Kamari restitue non seulement sa propre histoire, mais celle de milliers de femmes confrontées à des lois et des normes sociales qui confisquent leur existence.
Ces lignes qui tracent mon corps est également un hommage à la force de l’art et de la narration graphique. À travers le geste de Kamari, le dessin devient une arme contre le silence, un instrument de réappropriation et de transmission. Chaque ligne, chaque planche, chaque corps dessiné participe à ce travail de mémoire et de libération. C’est un album qui ne laisse pas indifférent, qui émeut, choque et inspire.
Dans le panorama de la rentrée littéraire et graphique 2025, l’album s’impose comme une œuvre majeure : intime, universelle, et profondément nécessaire. En se dessinant, Mansoureh Kamari se délivre — et à travers son geste, c’est toute une génération de femmes que l’on entend enfin. Ces lignes qui tracent mon corps est un récit de vérité, de courage et de résistance, où le corps, la mémoire et la parole deviennent des instruments de liberté.
Déjà reconnue pour son ouvrage précédent, Stylo et pinceau, Yasmine Madaoui confirme avec ce nouveau recueil, publié par Aframeg éditions à Bejaïa, une œuvre où l’art et la prise de position sont indissociables. Le recueil de poésie « Elle, Entre colères et passions » de Yasmine Madaoui s’inscrit résolument dans la lignée des voix littéraires algériennes engagées, confirmant l’auteure, déjà reconnue pour son ouvrage précédent Stylo et pinceau, comme une figure majeure de la littérature contemporaine.
Le titre même annonce la dualité et la complexité de l’expérience féminine, historique et politique qu’elle choisit d’explorer. L’utilisation du pronom « ELLE » confère à la poétesse une dimension universelle et archétypale, lui permettant d’incarner une pluralité de destins féminins algériens. Ce n’est pas seulement la voix d’une femme que l’on entend, mais l’écho des luttes, des silences et des espoirs de toutes celles dont l’existence a été façonnée par les soubresauts de l’Algérie, de l’indépendance aux mouvements sociaux contemporains.
Le livre dépasse l’acte poétique : il devient un témoignage poignant et nécessaire d’une citoyenne dont l’intégrité irrigue chaque vers. En juxtaposant les « colères » et les « passions », Madaoui construit une dialectique puissante qui sert d’ossature narrative et émotionnelle à l’ensemble de l’œuvre. D’un côté, les colères dénoncent les trahisons historiques, les violences politiques et les injustices sociales, notamment la condition féminine. De l’autre, les passions exaltent l’ancrage culturel, le lien filial et la force vitale qui permettent de survivre et de créer malgré le désenchantement. Cette structure bipolaire ne cherche pas l’apaisement, mais la confrontation lucide entre douleur et espoir, faisant du recueil un miroir complexe et vibrant de l’âme algérienne.
Ce recueil est avant tout un cri poétique porté par la colère, une ferveur historique et politique exprimée sans détour face à la faillite des idéaux post-indépendance. Madaoui évoque avec des mots puissants le traumatisme des années 1990, ces « années de sang » où le rêve initial s’est mué en cauchemar, ravivant l’épisode personnel de l’assaut de son véhicule à Alger en 1992, symbole de l’onde de choc ayant mené tant de citoyens à l’exil. Ce récit intime devient un mémorial des victimes de l’intégrisme, transformant l’expérience personnelle en archive collective de la douleur.
Sa colère est aussi un plaidoyer ardent pour l’égalité juridique et la dignité féminine : elle dénonce avec virulence la condition de la femme, qu’elle décrit comme un « demi-être humain qu’on malmène », et s’attaque frontalement aux interprétations religieuses et au Code de la famille qui la marginalisent en matière de droit, notamment sur l’héritage ou la validité du témoignage. Fidèle à la tradition militante, elle rappelle son engagement courageux dans la marche pour l’identité amazighe d’avril 1980, soulignant la continuité des luttes pour les libertés et l’identité. Cette ferveur se heurte toutefois au désenchantement face au Hirak de 2019, qu’elle analyse avec lucidité comme potentiellement récupéré par des « pouvoirs occultes ». Par cette critique amère, elle illustre la persistance et la complexité des obstacles au changement réel, faisant de sa poésie une arme de dénonciation tranchante qui ne cherche pas l’adhésion, mais la confrontation à la vérité historique et sociale.
Face à ces désillusions, les passions deviennent l’ancrage vital et la source d’intégrité qui permettent à l’auteure de continuer à créer. Le recueil est traversé par les thèmes de l’amour, souvent déçu, mais surtout par l’attachement filial, notamment l’hommage au Père disparu, symbole du temps et des origines. La passion s’exprime aussi dans l’ancrage culturel : la Kabylie et sa « vallée » sont évoquées comme des lieux sacrés qui nourrissent son identité et sa culture amazighe, conférant au texte une dimension lyrique et essentielle. Cette ferveur s’incarne enfin dans le style même, Madaoui utilisant des images et des métaphores riches pour transformer le récit personnel en une leçon de vie sur la résilience.
L’autre versant du recueil est entièrement dédié aux passions, qui témoignent d’une connexion profonde et inébranlable à ses racines et à son humanité. Le cœur de cette ferveur réside dans l’attachement filial et la quête de sens. L’hommage vibrant au Père disparu représente non seulement l’être aimé, mais aussi un repère stable face au chaos politique, incarnant la tradition et les origines.
Cette passion se manifeste également dans l’ancrage culturel et géographique. La Kabylie et sa vallée sont décrites comme des havres de paix, des lieux sacrés qui structurent l’identité de l’auteure. Cet attachement viscéral à la terre, à la nature (le « Zéphyr ») et à la culture amazighe enrichit le recueil d’une beauté rédemptrice, contrastant avec la brutalité des dénonciations politiques.
Enfin, la passion se reflète dans l’écriture elle-même. Madaoui ne cherche pas l’apaisement, mais la transformation. Par des images et des métaphores puissantes, elle transcende les événements bruts. Son récit devient une leçon de vie sur la résilience et l’intégrité, transformant la douleur en acte de création, faisant de l’écriture une thérapie salvatrice qui honore la vie malgré les colères.
L’impact du recueil dépasse largement la sphère littéraire pour toucher au cœur des enjeux sociaux et historiques de l’Algérie. S’il est d’abord une thérapie pour l’auteure, comme l’ont relevé certains commentateurs, il constitue surtout une contribution essentielle à la littérature féminine maghrébine engagée, qui refuse le silence.
L’ouvrage donne une voix puissante à toutes les femmes oubliées, marginalisées, ou dont l’engagement — y compris celui des maquisardes pendant la guerre d’Indépendance — a été minimisé après l’indépendance. Il agit comme un mémorial des luttes et des désillusions algériennes, offrant un témoignage précieux et non censuré sur les cicatrices de la décennie noire et les trahisons politiques successives. Il est indispensable pour comprendre les angoisses et les aspirations d’une génération d’intellectuels et de militants.
L’apport formel de Madaoui réside dans sa manière de renouveler l’écriture de la colère. En utilisant la poésie non comme contemplation lyrique, mais comme arme de dénonciation, elle s’impose comme une voix qui ne cherche pas le consensus, mais la confrontation lucide à la vérité historique et sociale. Elle refuse la normalisation de l’injustice et fait de son œuvre un cri de guerre, garantissant que ses aspirations — tout comme les luttes pour l’identité et les libertés — ne seront jamais ignorées sur « l’autel des libertés ». Elle transforme ainsi la douleur intime en force collective.
« ELLE, Entre colères et passions » est une œuvre dense, vitale et intensément personnelle, où Yasmine Madaoui réussit le pari de mêler l’intime et le politique. Ce croisement structurel est la clé de sa puissance littéraire et de son impact sociétal.
Le livre s’affirme comme un appel vibrant à la mémoire active et à l’intégrité. En revisitant ses propres traumatismes — l’assaut à Alger en 1992, le désenchantement face au Hirak — et ses ancrages vitaux — l’hommage au Père, l’amour pour la Kabylie — Madaoui forge une poésie qui est à la fois archive et bouclier. Elle exige la reconnaissance pleine et entière de la femme dans la société, se posant en héritière des luttes et en critique implacable des interprétations religieuses et légales qui la marginalisent.
Par sa verve et son courage, Madaoui s’impose comme une gardienne de la mémoire qui refuse le silence et la résignation. Elle mobilise la puissance des mots pour s’assurer que ni ses aspirations, ni celles de son peuple — notamment les revendications d’identité et de liberté — ne seront jamais ignorées sur « l’autel des libertés ». Ce recueil n’est pas un point final, mais un point de départ pour la réflexion, une œuvre essentielle qui garantit la pérennité de la flamme militante et poétique en Algérie.
Je suis bouleversé et anéanti. Des juges tunisiens viennent de condamner un père de famille à mort pour un crime de haute trahison pour ce qu’il avait publié sur Facebook.
Les pays arabo-musulmans sont arrivés au fond du gouffre de l’horreur humaine. Je me fiche totalement de ce qu’il a écrit, je n’ai pas lu et n’irai pas le lire.
Lorsqu’on condamne à mort un être humain pour des propos sur un réseau social, c’est la peine de mort qui est l’événement abject, pas ses écrits. Il n’y a jamais de justification pour la peine de mort dans une civilisation humaine des temps modernes. C’est dire combien le niveau de barbarie est élevé lorsque le crime est une écriture de mots.
A-t-il assassiné une personne ? Non et si c’était les juges qui l’ont condamné, on pourrait presque l’innocenter.
A-t-il écrit des propos diffamatoires contre le régime politique tunisien et son armée ? Je militerais presque pour rétablir la peine de mort contre ce régime et ses soldats.
A-t-il commis un acte criminel de pédophilie ? Il faudrait couper la tête à la moitié des prêtres de l’Église et des Imams.
A-t-il divulgué à un pays étranger des secrets d’état ? Lesquels ? Si la Tunisie projetait d’entrer en guerre, c’est la protéger d’un suicide que divulguer ce secret. Sa seule expérience dans les armes est de les avoir brandies contre les manifestants dans la rue.
A-t-il vidé les caisses de l’État en organisant une corruption massive ? Les crânes des têtes tranchées par condamnation à mort des hommes au pouvoir déborderaient dans les cimetières.
Etait-il sain d’esprit lorsqu’il avait écrit des propos qu’on considère être dangereux pour l’intégrité et la sécurité tunisienne ? La condamnation aurait été tout autant contraire aux principes fondamentaux du droit. Une personne dépourvue de discernement ne peut être ni jugée ni condamnée. On imagine alors ce qu’est une condamnation à mort d’un homme sans conscience de ses actes.
Je suis bouleversé et anéanti car je n’ai plus de mots pour qualifier ces régimes arabo-musulmans qui n’ont comme projet d’avenir que la terreur, la mort et la corruption.
Dans ma conscience profonde, je ne suis ni arabe, ni berbère, ni musulman, ni quoi que ce soit sinon ce que j’ai décidé d’être, un algérien libre et humaniste (en tout cas qui essaie), bouleversé par une condamnation immonde. Je n’ai rien à avoir avec ces monstres qui prônent un nationalisme des comptes bancaires et une religion au nom de laquelle le crime est un acte de dévotion.
Dans tous ces pays, dont le nôtre, ceux qui ont voté, se faire élire ou applaudir seront les mains qui exécuteront ce père de famille pour avoir rédigé sur Facebook…des mots.
Le lieu de l’exécution à mort ne pourra jamais contenir des dizaines de millions de bourreaux.
Lettre de Médéa. A 80 kilomètres au sud d’Alger, la ville millénaire de Médéa, autrefois havre de paix et de villégiature, un carrefour civilisationnel amazigho-arabo-andalou-ottoman, de raffinement et de rayonnement culturel et cultuel avec ses auteurs-poètes et ses imams,l ’historique capitale du Titteri et de la Wilaya 4, ne semble pas trop s’en faire aux changements de walis, des directeurs d’exécutif, de ses sénateurs et « dépités », ses élus des assemblées populaire.
Elle continuera, comme à l’accoutumé, à attendre sans rien attendre, tels les bateaux nauvragés dans le triangle des bermudes, en bon grégaire,les aînés et les jeunes de la cité continueront à plonger leurs crève-coeur,leurs désespoirs et leurs ambitions ratées dans cette géométrie quotidienne que leur impose l’ignorance et l’absence des autorités, censés leur assurer le bien-être social, pourtant garanti par la constitution.
La population se défonce comme elle peut pour s’assurer un semblant de vie heureuse. Balançant leurs personnes d’un angle à l’autre du triangle tracé par les vicissitudes de leurs quotidiens : entre le bain-maure El hammam, la mosquée et le café, leurs faisant office de défouloir pour les uns, et pour d’ autres, noyant leurs peines et leurs misères dans toutes sortes de psychotropes et autres dépravations. Au centre de cette figure géométrique, un vide sidéral interpellant biens de consciences, ou du moins ce qu’il en reste.
Ici point de parc public, point de jardins, point de cinémas, point d’hôtels, point de cafés maures chics, point de banc public pour nos aînés, point de poubelles, point d’activités ludiques, exacerbées davantage par la fermeture de l’OPOW omnisports pour sa rénovation qui s’installe dans la durée excluant de facto, bon nombre de jeunes sportifs à la rue.
Dès lors, que deviennent ces âmes angéliques dans ce tourbillon de démi-mesures les poussant à l’oisiveté, mère de tous les vices ?
En un mot, point de vie tout court, un vague à l’âme envahissant en maître de céans. Mue en un grand village depuis l’exode rurale de la décennie noire, l’absence et la démission quasi-totale des notables et des mal élus des affaires de la cité, larguée à vau l’eau, voilà,des années, aux vandales administrateurs saccageant tout ce qui est historique sur leurs passages, les mosquées défigurés de leurs beauté n’ont plus leurs charmes historiques d’antan, leurs nouvelles façades donnent à l’étranger de passage que la religion musulmane est récente à Médéa, même la gare ferroviaire a été démolie pour les besoins d’un hôpital Mère et enfants, qui peine à venir, sous d’autres cieux, cette structure aurait pu être sauvé, réaffectée et protégée vu son caractère historique, et finalement intégré dans le plan architectural initial.
En bons gestionnaires de la mal vie et de la mélancolie, la direction de l’environnement semble faire sienne le slogan d’antan : « Pile Wonder, ne s’use que si l’on s’en sert… », engoncée jusqu’aux cou par la saleté, les ordures méphitiques et autres relents nauséabonds, la ville de Médéa, ses habitants, en bons élégiaques, assistent impuissants, leurs ville, au passé mille fois mieux que son présent, offre un spectacle de désolation, périclitant et se dégradant à vue d’œil, ses places publics accaparées impunément, n’offrant aucun banc pour les retraités, généralement utilisateurs des lieux, le jardin de la place du 1er-Novembre s’est mué en un dépotoir d’ordures des figues de barbarie et un réceptacle de saletés, laissés par les vendeurs à la sauvette. Ses fleurs et ses plantes ne sentent plus la rose.
Aucun projet de développement environnemental. La place des martyrs, abritant le musée des Arts populaire, n’est pas du reste, devenue par la nonchalance et le laisser-aller des autorités locales, un marché aux puces, un salmigondis hétéroclite, autorisé le week-end, devenu quotidien, et sitôt terminé, un lieu d’immondices, de déchets, et de détritus sur toute la place, encombrant davantage la grande poubelle en plastique faisant face à l’entrée du Musée, livrant au final un spectacle hideux et honteux pour les visiteurs locaux et étrangers. A quand son déplacement et le remplacement de ces poubelles vétustes de plastique en des réceptacles en fer et acier (Dans tous les pays du monde, c’est le cas), plus durable, plus lourde et difficile d’être charriée par les pluies diluviennes s’abattant sur la cité.
Le pusillanime flagrant et la prévarication des responsables ont encouragé la main basse sur cette place emblématique et symbolique, qu’est la place des martyrs de la révolution.
La forêt récréative de Ben-chicao, quant à elle offre une image pitoyable de ce qu’elle était, close depuis plus d’une décennie,par un wali, promu ministre, dont le seul fait d’armes notable de son passage à Médéa, a été l’agrandissement de la piscine de sa résidence, elle continue de se dégrader sans que cela n’émeuve ces messieurs de l’environnement.
A quelques encablures de leur siège, au pôle urbain, une vue pittoresque sur les montagnes de Chréa et de l’autoroute est inexploitée, il suffirait d’organiser les lieux, placer des bancs public et offrir aux citoyens un lieu d’évasion, tout comme le versant Nord des bâtiments de Teniet El hadjar, et en faire un jardin suspendu avec la même vue. Y-a-t ’on pensé ? J’en doute, empiriques gestionnaires qu’ils sont…Point de vision !
Bien silencieuse, depuis l’arnaque de la privatisation de la société étatique EPRC aux 11 hectares de Draa Esmar, spécialisée dans les tuiles et briques,soldé à 42 milliards en 2006, à un privé, avec un cahier de charge contraignant, à savoir le paiement de 10% (Actions des travailleurs) qui a été payé, le maintien de l’activité et un investissement à hauteur de 20% de son prix d’achat, ne voilà-t-il pas que machineries et équipements se sont volatilisés et transférés à Biskra, sa wilaya d’origine, entraînant la fermeture de l’usine, et le renvoi de pléthores de chefs de famille au chômage, et cerise sur le gâteau 90% du prix de vente de l’usine n’a toujours pas été, semble-t-il, payé à ce jour. La direction de l’industrie de Médéa est-elle consciente des fermetures inexpliquées depuis longtemps de l’Enaditex, de la Sonelec et de l’ENIE à la même période, aggravant davantage le taux de chômage des jeunes de la wilaya ? Quelle vision industrielle pour Médéa et sa seule zone industrielle de Draa Esmar, quasiment déserte, à quelques exceptions près des fabricants de chaussure.
La direction du commerce, en bon velléitaire, a fini par jeter le manche après la cognée, dans sa lutte conjoncturel du marché informel, donnant libre cours à l’anarchie,la ruée des spéculateurs et champions de l’évasion fiscale ne s’est pas faite attendre, au grand dam des commerçants légaux payant l’impôt, et à qui mieux-mieux, ériger un enchevêtrement de baraques et d’étals hétéroclites,squattant trottoirs,rues et ruelles, et même les entrées des maisons voisines y attenantes, bloquant la libre circulation des véhicules et des piétons, Médéa est devenu l’espace d’un temps l’EDEN du marché informel, créant un melting-pot de misères et de mercantilisme, où l’on fait son shopping en enjambant la vase et l’ordure, cherchant du coude à se frayer un passage dans cet indescriptible tohu-bohu que des âmes sensibles préfèrent autant que se peut s’en abstenir.
La circulation automobile s’est encore plus aggravé par le non respect du codes de la routes et des interdictions, le port du casque obligatoire des motocyclistes- chauffards, exacerbé par le transport dangereux d’enfants mineurs non protégés et mis devant, les exposant gravement aux traumatismes crâniens et autres fractures, impactant leurs futures biomécaniques et leurs impacts (paralysie, décés), et occasionnant des pertes colossales à l’Etat dans leurs prise en charge médicale (occupation des lits, chirurgie et rééeducation physiques). L’interdiction nocturne des motos, crachant le feu et bravant tous les interdits doit être renforcée.
Il est aberrant qu’aucune initiative n’ait été prise pour la protection des enfants et l’interdiction formelle de leurs transports à motos. Les actions conjoncturelles de la police et des gendarmes suffisent-elle à freiner cette frénésie hors-la-loi. Dura lex sed lex, la loi est dure,mais c’est la loi,doit être implantée et instaurée en tout temps,et en tout lieu.
Un bien triste constat d’une anomie criarde d’une ville broyant du noir depuis des décennies, chaque nouveau wali s’affiche à ses débuts comme l’homme idoine pour sortir, Médéa et ses contrées proches et lointaines, de sa torpeur organisant, à tour de bras, rencontres et meetings avec la société civile, des garrulités sans importance, longuement applaudis par les thuriféraires du puissant du moment pour être dans ses bonnes grâces, ceux-là même que le wali-bâtisseur Abdelkader Zoukh abhorrait, bonne ou mauvaise était sa gestion.
Mais au demeurant il a laissé derrière lui un héritage architectural très conséquent, redorant son blason pour un temps. Et du coup, se rappeler qu’aucun projet étatique de développement n’a été alloué à la wilaya sinistrée qu’est devenu Médéa, grâce à l’oubli de ses sénateurs et ‘’dépités’’, affairistes affairés, beaucoup plus enclins à penser à leurs intérêts qu’à ceux de leur région.
M. le wali, ne vous fiez pas aux flagorneurs et zélateurs de tous bords, aux mal élus qui gèrent les mélancolies, les misères et la mal vie, et les conditions qui rendent la vie dure à vos citoyens, sortez incognito, sans tambours, ni trompettes et constatez par vous-même, et tâtez le pouls de la cité, censée être la vitrine toute flamboyante de capitale politique de la région. Vous présidez aux destinées de cette ville et de ses contrées proches et lointaine, vos administrés placent en vous mille espoirs et aspirations, rééditez et réalisez le grand travail de Tizi-Ouzou et laissez derrière vous des empreintes architecturales pour la postérité.
Le Dr Ahmed Taleb Ibrahimi, fils du cheikh Mohamed Bachir Ibrahimi, s’est éteint le dimanche 5 octobre 2025, à l’âge de 93 ans. Médecin de formation, il a consacré sa vie à la réflexion, à l’écriture et à la transmission de la mémoire.
Ahmed Taleb Ibrahimi a été arrêté par Ahmed Ben Bella à la suite des déclarations de son père. Après huit mois passés en prison il est libéré après le coup d’État du 19 juin 1965 mené par le colonel Houari Boumediene et le clan d’Oujda. Il sera plusieurs fois ministre sous les règnes de Houari Boumediene et Chadli Bendjedi. Il a ainsi été ministre de l’Éducation (1965-1970), de l’Information et à la Culture (1970-1977) et ministre des Affaires étrangères (1982-1988). De 1977 à 1982, Ahmed Taleb Ibrahimi occupe la fonction de ministre-conseiller auprès des présidents Boumediène et Bendjedid. Lors de la présidentielle d’avril 2019, il arrive 2e après Abdelaziz Bouteflika malgré son retrait ainsi que d’autres candidats, comme Hocine Aït Ahmed. La fin de règne de Bouteflika fut chaotique.
Avec Rachid Benyellès et Ali Yahia Abdennour, l’ancien ministre lance un appel le 8 octobre 2017, pour déclarer l’état d’incapacité du président Bouteflika, victime d’un AVC en 2013. Deux ans plus tard, arrive le Hirak. Profitant de ce mouvement de dissidence populaire le général Gaïd Salah actionne l’article 102 de la constitution et pousse Bouteflika à la démission.
Dans la foulée, Ibrahimi appelle avec Ali Yahia Abdennour et Rachid Benyellès au report des élections présidentielles.
Avant sa disparition, il a pris soin de rédiger ses mémoires, éclairant sa propre vie ainsi que l’héritage de son père, figure majeure du mouvement national et de la pensée algérienne.
Son parcours témoigne d’un engagement constant pour la culture, l’histoire et le partage des connaissances, offrant un repère précieux aux générations actuelles et futures.
Le Dr Taleb Ibrahimi laisse derrière lui une empreinte durable dans la mémoire collective algérienne, faite de curiosité, de questionnement et de volonté de transmettre.
L'inquiétude ne cesse de grandir sur l'ampleur des exactions commises par les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) dans la ville d'El-Fasher, aujourd'hui...
L'inquiétude ne cesse de grandir sur l'ampleur des exactions commises par les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) dans la ville d'El-Fasher, aujourd'hui...
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