Il y a dans cette affaire Boualem Sansal quelque chose de profondément algérien : une certitude proclamée avec fracas, martelée pendant des semaines, exhibée comme une démonstration de force… puis réduite à un simple pschitt, un effondrement de torse, un de ces dégonflages politiques que personne n’ose assumer.
On avait promis la fermeté, la souveraineté, l’autorité. On se retrouve avec une grâce présidentielle expédiée dans le silence d’un couloir, comme on efface une bêtise en espérant que personne ne l’a remarquée.
Pendant que la machine officielle répétait, la bouche pleine de conviction, que l’emprisonnement de Boualem Sansal était un choix clair, solide, “irréversible”, la réalité préparait déjà sa gifle. Il a suffi d’un froncement de sourcil venu de Berlin pour que tout ce qui tenait lieu de posture s’évapore. Les mêmes voix qui parlaient de principe ont soudain disparu dans une brume commode. Personne n’a expliqué le virage. Personne n’a assumé l’arrière-goût de déculottée. On a juste glissé la grâce comme une petite enveloppe administrative sous la porte, en espérant que le monde applaudirait la générosité du geste.
Mais le plus spectaculaire n’est pas la grâce en elle-même. C’est le ballet qui a suivi. Toujours le même : pour compenser l’effondrement, on déploie l’intimidation. Le ministre de l’Intérieur s’est immédiatement replacé dans son rôle d’homme-de-main institutionnel, menaçant quiconque oserait contredire le « Président », comme si hausser la voix pouvait rhabiller un pouvoir pris en flagrant délit de recul. On l’a vu bomber lui aussi un torse cabossé, promettant tempête aux insolents, aux sceptiques, aux observateurs.
L’autorité par procuration : quand le pouvoir chancelle, on crie sur la foule.
Et la meute a suivi. Elle suit toujours. Ceux qui, la veille encore, justifiaient l’incarcération au nom d’une sacro-sainte cohérence nationale, se sont mis à louer la clémence au nom d’une vision stratégique “lointaine”.
Une vision lointaine… vraiment ? Cette formule a été répétée à un tel point qu’elle en est devenue un aveu : plus la vision est lointaine, moins il y a quelque chose à voir. Le pouvoir promet un horizon lumineux, pendant qu’il trébuche sur ses propres contradictions. On parle de stratégie comme on parle de mirage : ça fait illusion, ça occupe, ça rassure ceux qui ont besoin d’être rassurés.
Le plus irritant, peut-être, c’est ce mensonge collectif qui accompagne chaque geste improvisé : cette volonté obstinée de faire passer une défaite pour un acte souverain.
Comme si un pays pouvait fonder son autorité sur des contorsions successives. On aurait pu entendre un mot clair : “On s’est trompé”, “On corrige”, “On assume”. Mais non. On préfère jouer la carte du mystère, cette poudre politique qu’on jette sur le feu pour que la fumée remplace le sens.
Et pendant que Sansal sort de prison, d’autres y pourrissent. Pas des gens connus, pas des têtes passées à TF1 ou à Francfort, pas des plumes traduites en dix langues. Des jeunes. Des sans-parrain diplomatique. Des poètes de la rue, des blogueurs, des gamins qui ont cru que parler était encore un droit.
Mohamed Tadjadit, ce poète du Hirak condamné à cinq ans pour un souffle trop libre, donne à cette histoire son contraste le plus brutal. On dirait presque qu’il prolonge, à lui seul, la peine que Sansal n’a pas faite. Comme si la balance de la répression devait rester stable : un écrivain libéré d’un côté, un poète sacrifié de l’autre. La mathématique du régime : pour chaque grâce sous pression, il faut un exemple sous serrage.
C’est là que la phrase qui suit prend tout son sens, et toute son amertume : si Sansal avait été un simple citoyen, sans réseau, sans signature éditoriale, sans audience internationale, sans photographie avec un président européen, il serait encore derrière les barreaux, en attendant qu’un fonctionnaire se rappelle vaguement son nom. Car la grâce n’est pas une décision politique : c’est un réglage diplomatique. Une concession externe, pas une réforme interne. Une soupape, pas un geste de justice.
Et c’est justement là que l’affaire devient presque parfaite comme satire politique : on a voulu frapper un grand coup, on a fini par se frapper soi-même. On a menacé, grondé, promis la fermeté, et soudain tout s’est dégonflé. Reste un silence, un malaise, et l’image d’un pouvoir qui avance comme un funambule ivre, oscillant entre excès d’autorité et paniques soudaines, incapable de prévoir la conséquence de ses propres gestes.
Alors bien sûr, chacun essaie de sauver la façade. Chacun invente une justification, une logique, un fil rouge dans ce qui ressemble à une navigation au radar. Mais rien n’effacera ce que l’affaire Sansal a exposé : derrière les discours martiaux, derrière les menaces de certains ministres, derrière la mise en scène virile, il n’y a ni stratégie, ni colonne vertébrale, ni vision.
Il n’y a qu’un réflexe : plier quand la pression vient d’ailleurs, punir quand la critique vient d’ici.
Voilà la seule cohérence du système.
Le reste n’est que posture, poudre, et peur mal déguisée.
Soldats kabyles de la Première Guerre mondiale.
Crédit photo : Meziane Lechani
On sait que l’avènement de la Première Guerre mondiale ou de la Grande Guerre s’est produit à l’issue de l’assassinat de l’archiduc François Ferdinand héritier du trône d’Autriche-Hongrie et de son épouse, le 28 juin 1914, à Sarajevo, par un jeune nationaliste serbe sur fond de rivalités politiques et économiques qui animaient les puissances du continent européen.
Ce crime fut l’étincelle qui déclencha le 28 juillet 1914 le conflit militaire le plus meurtrier de l’époque moderne. Il vit s’affronter initialement le bloc allié formé de la France, la Grande-Bretagne et l’Empire russe contre la coalition composée de l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et l’Italie.
Les états-majors d’armées qui tablaient sur une issue rapide par une guerre de mouvement durent rapidement réviser leurs plans, au fur et à mesure du déroulement des affrontements et de leur enlisement dans une interminable guerre d’usure dans les tranchées consommatrice d’hommes : 10 millions, selon les auteurs, de matériels et munitions en quantités notoires.
C’est pour remédier à cet enlisement meurtrier et ses conséquences politiques et socio-économiques désastreuses, que les belligérants européens entreprirent d’internationaliser la guerre, en cherchant de nouveaux alliés.
En France, l’idée de faire appel aux colonies revient au Général Galliéni (1849-1916), inspiré par le Général Mangin (1866-1925) promoteur de la Force noire dans un essai éponyme publié en 1910 (1),après avoir puisé dans le corps des réservistes. Ce fut ainsi un effectif près de 650 000 coloniaux qui fut mobilisé pendant quatre ans, le plus souvent de force que de gré, sur les théâtres d’opérations, dès août 1914. Parmi le nombre de conscrits, les historiens avancent les chiffres (2) de 180 000 Algériens, 40 000 Marocains, 80 000 Tunisiens, 43 000 Indochinois, 40 000 Malgache et 215 000 Noirs africains, enrôlés pour compenser les pertes militaires françaises et tenir la ligne de front large de 700 km. De fait, le corps d’armée ainsi constitué se trouva sociologiquement (au sens marxiste du mot), anthropologiquement et physiquement disparate.
Une fois leur transit par Marseille accompli, les troupes coloniales (des fantassins pour l’essentiel) s’illustrèrent courageusement sur leurs fronts d’affectation dont les mémorables batailles de Verdun ( à partir de février 1916 ) , de la Somme (depuis juillet 1916), du Chemin des Dames (avril 1917), de l’Oise (mars 1918 ) ; ou bien encore sur le front oriental, dans l’enfer des Dardanelles, de mars 1915 à janvier 1916 . Autant de noms restés gravés dans le triste panthéon des hauts lieux des victimes de guerre.
Le tribut à payer fut lourd pour les coloniaux. Il est estimé entre 85 000 et 90 000 morts ou disparus d’après le recoupement des sources de Pascal Blanchard et Gilles Manceron (2014).
Parallèlement, pour soutenir l’effort de guerre, à l’arrière, le S.T.O.C. (Service d’organisation des travailleurs coloniaux ) fut créé, en janvier 1916, pour mobiliser les travailleurs des colonies et les prisonniers de guerre dans les arsenaux et usines d’armement, sous surveillance étroite; quand leur force de travail ne fut pas employée dans des travaux agricoles pour répondre aux exigences de main-d’œuvre.
L’Armistice signé au petit matin du 11 novembre 1918, actant la défaite de l’Allemagne et de ses alliés, l’heure était au terrible bilan humain : 18 millions de morts civils ou militaires (sans compter les nombreux mutilés de guerre), et à la démobilisation, nonobstant les derniers Poilus de Silicie en Orient.
De retour en Algérie, les coloniaux rescapés de ce conflit meurtrier retrouvèrent en même temps que leurs proches soulagés, leur condition de dominés en dépit des lois libérales du gouverneur Charles Jonnart (1857-1927), votées en 1919, inspirées par un indigénophile : le ministre de la guerre Georges Clemenceau (1841-1929) (3), en reconnaissance des sacrifices des tirailleurs algériens, malgré l’hostilité du Parti colonial. Sa volonté réformatrice contenue reçut néanmoins, par pragmatisme, les faveurs du mouvement des Jeunes Algériens incarné alors par l’Émir Khaled (1875-1936) revenu du front avec le grade d’officier.
Par leur ampleur timide, les dispositions de la loi Jonnart qui visaient à accorder le droit de vote à une minorité de sujets musulmans aux élections municipales, départementales et aux délégations financières n’étaient pas de nature à rendre justice aux sacrifices des tirailleurs algériens entourés par une indifférence ingrate au moment où la société algérienne était dans un état d’affaissement historique, note l’historien M. Harbi dans 1954, la guerre commence en Algérie (Complexe, 1998).
Tandis que les parades de l’Armistice battaient leur plein dans le camp de la victoire, et que leurs camarades français du front s’organisaient pour faire valoir leurs droits par l’efflorescence d’Amicales et d’Associations d’ anciens combattants, les tirailleurs algériens furent relégués à la marge de toutes les commémorations officielles. Leurs droits ignorés. À la fraternité d’armes qu’il convient de tempérer, succéda une grande désillusion. De guerre lasse d’attendre une reconnaissance fût-elle tardive, un noyau de poilus algériens combatifs décida de pallier cette carence en fondant, en 1928, au village d’Aït Halli (4) la première Ligue de défense des combattants et mutilés de guerre kabyles, nous renseigne le journal La Presse libre d’Alger (5) :
Une ligue d’anciens combattants et de victimes de la guerre, vient d’être créée à Aït Halli (Iraten) dans la commune-mixte de Fort-National. Cette ligue a pour but de resserrer les liens de fraternité et de solidarité entre ses adhérents et les groupements similaires européens et de redresser les erreurs, les omissions, les abus et les violations des lois et règlements dont souffrent ses adhérents. Les 9/10 èmes de nos camarades n’ont pas reçu, depuis bientôt dix ans leur dû, soit par ignorance, soit par inertie administrative qu’une action individuelle n’arrive pas souvent à vaincre.
Combien parmi nous ont obtenu des prêts pour construction, exploitations agricoles ? Combien ont leurs enfants admis comme pupilles de la nation pour les faire bénéficier des avantages accordés à ceux-ci : bourses d’études, etc. ? Combien sont-ils ceux qui ont obtenu une licence de café maure ou de permis de port d’arme, qu’on semble ne réserver qu’aux agents électoraux de certains élus ? Combien d’ascendants ont reçu intégralement les indemnités qui leur sont dues ? Il faut avoir vécu dans nos milieux pour se rendre compte de cet état des choses. Il nous est donc apparu la nécessité impérieuse de nous grouper, de réunir nos énergies pour défendre les droits sacrés que nous tenons de nos sacrifices.
Nous entendons lutter sans forfanterie ni défaillance, en usant de tous les moyens que la loi nous permet pour faire obtenir satisfaction à nos camarades lésés (…). Notre champ d’action est bien vaste mais nous avons la certitude, si nous sommes secondés, d’arriver au but que nous nous sommes assignés. La Ligue dont nous jetons les bases ne sera qu’une cellule d’une confédération d’associations d’anciens combattants kabyles (…). Le bureau est provisoirement placé dans un des locaux au café Lechani. La réunion préparatoire a désigné comme président, Lokmane ; Secrétaire, Lechani ; secrétaire-adjoint, Rekhou ; trésorier, Lateb Salem; assesseurs, Zeggane et Lechani Chabane. Nous faisons appel à tous nos camarades mutilés de la commune pour venir grossir nos rangs (…).
Cantonnée au café maure d’Aït Halli (6), la Ligue kabyle ouvrira par la suite, en 1930, une permanence dans les villes de Tizi-Ouzou et Larbâa n Aït Yiraten (anciennement Fort-National), après qu’elle s’étoffa et s’organisa par un travail de sensibilisation et de propagande auprès des anciens poilus et mutilés de Kabylie, et auprès des autorités coloniales pour faire valoir leurs droits légitimes chèrement acquis sur les théâtres de combats. Elle prit alors le nom de Ligue de défense des anciens combattants et victimes de guerre indigènes d’ Algérie. Ses activités amicalistes perdurèrent jusqu’à l’avènement du Régime autoritaire de Vichy qui mit fin à son action, comme à toutes les activités militantes politiques et syndicales de la colonie.
Alors que les anciens poilus français purent compter sur le concours d’œuvres littéraires rédigées par des plumes célèbres impliquées, pour entretenir leur mémoire et le souvenir de leurs sacrifices : comme Charles Péguy, Guillaume Apollinaire, Henri Barbusse ou bien encore Maurice Genevoix dans ses récits puissants réunis dans son ouvrage phare Ceux de 14, qui connurent un grand succès populaire (7).
Rien de tel dans les sociétés coloniales sans tradition scripturaire ou désuète. Qu’elles aient été de langue kabyle, bambara, créole ou annamite c’est par le verbe que la mémoire de cette guerre totale fut transmise, par elles, comme en porte le témoignage fragile ces vers anonymes recueillis dans les Aït Yiraten, en Haute-Kabylie, tirés de productions présentement ensevelies par l’oubli.
Tadyant yexdem uṛumi L’intrigue qu’a échafaudé le Français
Kul taddart yebna llakul En bâtissant une école dans chaque village
Yewwi arraw-nneɣ Il s’est accaparé de nos enfants
Nekkni mebɛid nettmuqul Sous notre regard impuissant
Mi meqqrit d irgazen Une fois devenus hommes
Yewwi-ten tarayul. Il a fait d’eux des tirailleurs.
Yewwet-itt Giyyum deg yigenni Guillaume (8) a bombardé ciel
Simmal d tirni Avec une force redoublée
D Leqbayel i yezwaren i rrṣaṣ Ce sont les Kabyles qui devancèrent le feu
Ɣaḍen-i(yi) leɛsaker imeɣban Ma peine va vers les malheureux militaires
Di lgirra Lalman De la guerre contre l’Allemagne
Wi immuten, yemdel di lfista-s. Leurs morts ont été ensevelis dans leur uniforme (9).
Cet épisode méconnu de l’histoire de l’Algérie contemporaine pour des raisons relevant du silence post-traumatique des acteurs qui a endigué les récits généalogiques, de l’accélération du cours de l’histoire ou encore de la sélectivité de la France officielle , témoigne de la faculté de la société autochtone d’Algérie à s’organiser, au tournant des années 1920-30, telles que les conditions de son temps le leur permettaient, grâce à une mince avant-garde inspirante pour la circulation des opinions anticolonialistes parmi les masses prolétaires sur lesquelles viendront se greffer les luttes de décolonisation.
1- La Force noire, Paris, Hachette, réédition L’Harmattan, 2011.
2- Statistiques officielles du Musée de la Grande Guerre de Meaux.
3- Surnommé pour ses qualités militaires : « le tigre », « le Père la victoire », « Clemenceau le Kabyle » pour avoir nettoyé les rangs de l’armée française avec la même ardeur que mettaient à leur tâche les travailleurs kabyles de la voirie de Paris, dans un climat de xénophobie ; ou bien encore « le Vendéen rouge » par ses adversaires colonialistes.
4- Village de cultivateurs de la confédération des Aït Yiraten de près de 600 âmes alors. Altitude 550 à 600 m. Il fut incendié, en 1857, lors de la Campagne de Kabylie pour avoir opposé une résistance énergique aux troupes du maréchal Randon.
5- Dans sa livraison du 9 septembre 1928, p. 5. 6- Lieu de sociabilité de fortune comme il y en eût dans l’Algérie rurale et miséreuse, érigé à Tazeggwart en branchages solidifiés par de la boue séchée, recouverts de chaume. Lqahwa n we3cuc, en kabyle, fut tenue par Akli Waâli et Mokrane n Ali Oubelkacem. 7- Sous Verdun (avril 1916), Nuits de guerre (décembre 1916), Au seuil des guitounes (septembre 1918), La Boue (février 1921) et Les Éparges (septembre 1921) rassemblés dans Ceux de 14, en 1949, réédition Flammarion, 2020. 8- Le Kaiser Guillaume II (1859-1941) dernier empereur allemand, général major durant la Première Guerre mondiale. Il fut affublé du titre de Hadj Guillaume dans les poésies populaires chantées, en raison de sa supposée conversion à l’islam instillée par la propagande allemande, et certains cercles turcophiles.
9- Allusion à leur enterrement privés du rite musulman et de sépulture, loin des leurs.
Quelques références bibliographiques pour aller plus loin
Antier, C. : Les soldats des colonies dans la Première Guerre mondiale, Ouest-France,2014.
D’Andurain, J. : Les troupes coloniales, une histoire politique et militaire, Passés composés, 2024.
Frémaux, J. : Les colonies dans la Grande Guerre, Combats et épreuves des peuples d’outre-mer, éd.14/18, 2006.
Gastaut, Y., Yahi, N. et Blanchard, P. : « La Grande Guerre des soldats et tirailleurs coloniauxmaghrébins », Migrations Société, 156, 2014.
Lallaoui, M. : Les Poilus d’ailleurs, Au nom de la mémoire,2014.
Manceron, G. : « Les Soldats coloniaux de 14-18, éternels oubliés ? », Mediapart, 10novembre 2014.
Miranville, M. et Bille, S. : Poilus nègres : Soldats créoles et africains en 14/18, Dagan, 2014.
Depuis le 29 octobre 2025, Jaouhar Ben Mbarek, figure de l’opposition politique tunisienne, est en grève de la faim pour protester contre ce qu’il dénonce comme une « arrestation arbitraire » et un « procès inéquitable » dans le cadre de l’affaire dite du « complot sur la sécurité de l’État ».
En Tunisie de l’autocrate Kaïs Saïed, les prisons ne sont pas seulement des lieux de privation des droits, mais des lieux sombres où s’exercent la brutalité et la torture contre les prisonniers d’opinion pour les briser.
Le 11 novembre, des informations alarmantes ont circulé sur des violences dont Ben Mbarek aurait été victime à la prison de Belli à Nabeul. Amnesty International a exprimé sa profonde inquiétude et demandé l’ouverture immédiate d’une enquête indépendante et impartiale, ainsi que la mise en cause des responsables de ces abus. L’organisation a également exigé que Ben Mbarek et les autres détenus politiques aient un accès immédiat à des soins médicaux et soient libérés, rappelant que leur détention résulterait uniquement de l’exercice pacifique de droits politiques.
Sa sœur et avocate, Hanan Khamiri, rapporte qu’à sa visite, Ben Mbarek était dans un état de « fatigue extrême » et incapable de marcher. Elle a constaté des « contusions et une fracture d’une côte », provoquant des difficultés respiratoires. Selon elle, les violences auraient impliqué des agents pénitentiaires et d’autres détenus, et se seraient produites dans un endroit dépourvu de caméras de surveillance. « Il a été frappé, roué de coups, perdant brièvement connaissance avant de subir de nouveaux assauts », précise-t-elle. Elle a également constaté des ecchymoses et des douleurs persistantes au niveau de la cuisse.
Le père de Ben Mbarek, Ezzedine El-Hazki, s’est rendu à la prison de Belli, sans pouvoir voir son fils. Il exige un examen médical indépendant et le suivi judiciaire des auteurs de l’agression. Pour le Parti républicain, qui suit de près l’affaire, ces violences s’inscrivent dans une « politique de répression visant à faire taire toute voix critique ». Wissam Al-Saghir, porte-parole du parti, dénonce une « série de violations visant à étouffer toute expression libre » et affirme que « la bataille est devenue nationale et ne concerne plus uniquement des individus ».
Face à ces accusations, l’administration pénitentiaire tunisienne maintient qu’aucune violence systématique n’a eu lieu et conteste l’existence de grèves de la faim, accusant certains acteurs de diffuser des informations fausses. Des poursuites ont même été engagées contre plusieurs avocats pour propagation de « rumeurs ». Cependant, familles et avocats confirment que Ben Mbarek et d’autres détenus politiques poursuivent leur grève de la faim et que leur état de santé est préoccupant.
Cette affaire met en lumière un enjeu central pour la Tunisie : garantir la sécurité physique et médicale des détenus politiques, assurer la transparence des institutions pénitentiaires et protéger les droits fondamentaux dans un contexte où les accusations de répression et de pratiques arbitraires se multiplient.
Aujourd’hui, le cas de Jaouhar Ben Mbarek incarne les tensions entre les autorités tunisiennes et les acteurs politiques critiques. Il n’est malheureusement pas le seul. Sa grève de la faim et les violences subies attirent l’attention nationale et internationale, et constituent un indicateur clé de la situation des libertés et de la démocratie en Tunisie.
Dix ans après la disparition d’Assia Djebar, figure majeure de la littérature algérienne francophone, son œuvre continue de marquer les esprits et de traverser les générations.
À l’occasion du Salon international du livre d’Alger (SILA), trois de ses romans essentiels – Vaste est la prison, La femme sans sépulture et Le blanc de l’Algérie – paraissent dans une édition inédite, traduite pour la première fois en arabe et publiée simultanément en français en Algérie. Cette double édition offre une nouvelle lecture de l’écrivaine, permettant à un public plus large d’accéder à sa voix singulière, qui a su témoigner des luttes, des mémoires et des identités algériennes, en particulier celles des femmes.
Pour célébrer cette renaissance littéraire, l’Institut français d’Algérie à Constantine organise, dimanche 16 novembre à 16h, une rencontre exceptionnelle. Jalila Djennane Imalhayène, fille d’Assia Djebar, partagera un regard intime sur l’œuvre de sa mère, sa trajectoire et la manière dont son héritage se transmet aux nouvelles générations. Le poète et traducteur Hakim Miloud accompagnera cet hommage par des lectures bilingues d’extraits des romans nouvellement traduits, faisant résonner la voix d’Assia Djebar dans les deux langues et soulignant l’universalité de sa parole.
Cet événement souligne l’importance de revisiter et de rendre accessibles les grandes œuvres littéraires, tout en rappelant le rôle central de Djebar dans l’histoire culturelle algérienne. Son œuvre, à la croisée de la mémoire et de la fiction, continue de dialoguer avec le présent, offrant aux lecteurs une exploration des identités, des violences et des résistances qui traversent l’histoire du pays.
Djamal Guettala
Entrée libre – Institut français d’Algérie, 1 boulevard de l’Indépendance, Constantine
Pour d’autres, elle a laissé un goût amer, estimant que le rôle de la France n’a pas été suffisamment important pour se laisser entraîner par des comportements jubilatoires.
Il va sans dire que depuis un an, la France gère mal la situation avec des positions qui ne s’éloignent pas trop de celles d’une extrême droite revancharde. À cet égard, on peut énoncer, sans prendre le moindre risque de se tromper, que dans cette affaire, la France a pris une sacrée claque et subi une humiliation indéniable.
Depuis l’arrestation de Boualem Sansal, Français et Algériens n’ont fait que chercher le moyen d’humilier l’autre. Les empoignades verbales se sont laissées glisser le long de pentes savonneuses dangereuses, avec une surenchère effarante d’ingrédients syntaxiques qui n’honorent pas toujours leurs auteurs. Chacun cherchant à humilier l’autre sur le dos de la liberté de notre Boualem national. Toutes les tentatives de calmer le jeu se sont soldées par de grands pschitt.
On nous avait fait croire que dans les coulisses les choses étaient différentes avec des échanges sages, courtois et matures. Les services secrets étant plus aguerris à ce genre de tractations.
Côté algérien, il n’est pas difficile d’imaginer le plan d’attaque élaboré par nos limiers, et qui consiste à convaincre les Allemands d’intervenir avec la promesse que leur demande serait honorée. Le résultat serait double, et il l’a été : humilier la France et redorer quelque peu le blason du régime d’Alger. Force est de constater que le coup est réussi. Pour preuve, tout le monde semble gober cette histoire de raisons humanitaires !? S’il y avait un peu d’humanité chez ces gens-là, ils ne se seraient pas permis de jeter en prison pour cinq ans, un jeune poète de 31 ans, juste pour avoir trouvé une symbiose fulgurante entre sa poésie et le Hirak. Comble d’ironie, ou de machiavélisme de haute facture, la condamnation de Mohamed Tadjadit a été prononcée au même moment que la libération de Boualem Sansal. Machiavélisme quand tu nous tiens !
À force d’avoir laissé s’exprimer les nuls, la France en a eu pour sa tronche. Un an d’envolées verbales, parfois frisant l’insulte -un terrain sur lequel en comparaison avec les affidés de notre système, la France peut aller se rhabiller, quoique …- n’ont fait que montrer la faiblesse du sérail politique français et la force diabolique du régime algérien. Ce n’est pas pour rien que les Généraux occupent le pouvoir depuis 1962 !
Au moment où ces lignes sont confectionnées, on apprend que Bruno Retailleau, encore lui, parle de capitulation après la suspension des régimes des retraites. Monsieur Retailleau serait mieux avisé de faire son Mea Culpa sur l’affaire Boualem Sansal, dans laquelle il a fait preuve d’un amateurisme sidérant sur fond de haine chronique inutile. Mais nous le savons tous, ces gens-là ont toujours raison.
Pour rester dans l’infantilisme qui a prévalu depuis un an et pour résumer les choses : France 0 – Algérie 1 (but de l’Allemagne).
Un ensemble de géoglyphes visibles sur les images satellites a récemment été signalé dans la région de Takish, wilaya d’In Salah, au cœur du Tanezrouft, vaste désert aride du Sahara algérien. Ces tracés au sol, étendus sur plusieurs centaines de mètres, suscitent déjà l’intérêt de chercheurs indépendants et d’amateurs de la civilisation amazigh.
Coordonées : Google maps : 28.164952,2.644157
Un site composé de symboles variés
Les géoglyphes identifiés présentent plusieurs catégories de formes : Des motifs géométriques (lignes, cercles, spirales, compositions angulaires) -des figures anthropomorphiques, -des formes animales possibles, Ainsi que des signes rappelant des caractères tifinagh et des motifs graphiques associés à la tradition amazigh (formes angulaires, symboles présents dans les tatouages, etc.).
L’ensemble évoque, pour certains observateurs, un langage symbolique structuré plutôt qu’un simple assemblage aléatoire de tracés.
L’apparition de symboles manifestement modernes
L’un des points les plus frappants tient à la coexistence, sur la même zone, de motifs d’apparence “traditionnelle” et de symboles manifestement plus contemporains. Parmi ces derniers ont été relevés notamment : Un tracé correspondant au logo du club de football allemand Borussia Dortmund (coordonnées : 28°09’49″N, 2°38’35″E) ;
Un motif proche d’un sticker du Rally de Dakar couramment visible sur les 4×4 sahariens (coordonnées : 28°09’58″N, 2°38’34″E) ;
Un symbole de type yin-yang (coordonnées : 28°09’55″N, 2°38’40″E).
Un logo représentant un dromadaire et un soleil, très courant dans la communication touristique saharienne
(coordonnées : 28°09’55″N 2°38’44″E).
La présence, sur un même site, de signes rappelant l’iconographie amazigh et de logos modernes facilement identifiables constitue une première source d’incohérence apparente et rend la lecture du corpus plus complexe.
Selon les archives satellitaires : un décalage chronologique
L’examen de l’historique des images satellitaires disponibles fait apparaître un autre élément important :
Dans les images datées de 2013, seul un groupe restreint de symboles semble visible, correspondant aux motifs les plus proches de l’iconographie amazigh (formes angulaires et signes apparentés au tifinagh) ;
A partir de 2019, apparaissent de nouveaux tracés, dont les symboles modernes mentionnés ci-dessus.
Ce décalage temporel suggère au minimum une superposition d’interventions : un premier ensemble de géoglyphes antérieur à 2019, puis l’ajout ultérieur de nouveaux motifs d’inspiration contemporaine. En l’état, il n’est pas possible de déterminer, sur la seule base des images satellites, si les motifs “anciens” sont eux-mêmes récents, ni si les ajouts ultérieurs relèvent d’un simple geste ludique ou d’une démarche plus construite.
Hypothèses actuellement envisageables
Sans trancher, plusieurs hypothèses de travail peuvent être formulées :
1-Œuvres contemporaines Les géoglyphes pourraient être des créations récentes (par exemple par des groupes de voyageurs ou de populations locales), mêlant références amazighs, logos modernes et symboles universels comme le yin-yang. Dans ce cas, il s’agirait d’un corpus globalement homogène mais étalé dans le temps, à dominante artistique ou ludique.
2.Superposition d’ensembles de nature différente Une autre possibilité est celle d’un premier ensemble de tracés, potentiellement plus ancien, ultérieurement complété par des motifs modernes. Cette configuration compliquerait toute tentative de datation ou d’interprétation symbolique, faute de distinguer clairement les phases.
3-Problèmes liés aux données ou à leur interprétation Enfin, il n’est pas exclu que certains détails soient liés à des artefacts d’imagerie ou à la résolution des clichés. Seules des investigations de terrain permettraient de confirmer la réalité, l’ampleur et l’état de conservation des tracés.
A ce stade, toute conclusion définitive serait donc prématurée.
Enjeux scientifiques, patrimoniaux et précédents nationaux
Si une partie des symboles devait être confirmée comme ancienne et authentiquement liée à des pratiques graphiques amazighs, ce site pourrait devenir un élément important pour l’étude des systèmes symboliques sahariens, la compréhension des modes d’occupation du Sahara à différentes périodes, ainsi que la cartographie des manifestations monumentales (tracés au sol, architectures, systèmes hydrauliques anciens) dans la région. La question de la reconnaissance institutionnelle d’un tel site s’inscrirait alors dans un cadre plus large, déjà illustré par d’autres dossiers en Algérie. Un exemple souvent cité est celui de la nécropole mégalithique de Bounouara, près de Constantine, où plusieurs milliers de dolmens préhistoriques ont été signalés comme menacés par des activités d’exploitation minière. Un article de presse spécialisé rappelait en 2019 l’importance de cette nécropole (estimée entre 3 000 et 4 000 dolmens) et alertait sur l’intervention d’engins de travaux publics réduisant des mégalithes en gravier, sur la base de témoignages et de photographies, ce qui avait suscité une forte mobilisation autour de ce patrimoine en danger. Babzma
À la suite de ces alertes relayées sur les réseaux sociaux et par certains médias, le Ministère de la Culture et des Arts a publié un communiqué indiquant avoir dépêché une équipe composée d’archéologues, d’experts et d’architectes, en coordination avec les autorités locales, afin de vérifier l’état du site. Selon ce communiqué, les périmètres assignés aux exploitations minières auraient été respectés et le site archéologique protégé n’aurait pas été directement visé. Le ministère y annonçait également un inventaire systématique des sites concernés et une actualisation de leurs périmètres de protection, réaffirmant la priorité donnée à la sécurisation du patrimoine culturel. Ministère de la Culture
Ce précédent montre comment une alerte citoyenne et médiatique peut attirer rapidement l’attention sur un site à forte valeur patrimoniale, et que les autorités culturelles peuvent être amenées à intervenir, documenter et clarifier la situation, voire à adapter les dispositifs de protection. Pour les géoglyphes de Takish, une dynamique comparable (signalement, médiatisation, expertise in situ) pourrait, le cas échéant, conditionner leur reconnaissance et leur prise en charge officielle, si leur valeur archéologique venait à être confirmée.
Un avenir incertain pour le site de Takish L’exemple des dolmens de Bounouara montre que la combinaison d’alertes publiques, de relais médiatiques et de prises de position officielles peut aboutir à des mesures de clarification et de protection renforcée de sites sensibles. Ministère de la Culture+1
Reste à savoir si les géoglyphes de Takish suivront un parcours comparable – vers une reconnaissance scientifique et patrimoniale formalisée – ou s’ils demeureront, pour un temps encore, à la frontière entre curiosité géographique, hypothèse de recherche et sujet de débat au sein des communautés spécialisées et du grand public.
Je n’ai pas attendu la dernière crise ni aucune autre entre les deux pays pour m’en prendre au roi du Maroc et à son système politique alors que des wagons entiers de touristes algériens s’y rendaient. Mais dans cette dernière, je ne ressens pas seulement un suivisme obsessionnel derrière le régime algérien mais une détestation viscérale envers un pays et sa population qui est condamnable et inacceptable.
Oui, le roi et son régime ont toujours été aussi violents que moyenâgeux. La police politique et le musèlement dans les libertés n’ont rien à envier à ceux qui sévissent en Algérie. La dévotion à un roi et à sa dynastie tournent le dos aux principes modernes de lien entre un régime démocratique et son peuple.
La dévotion est mystique tout autant que la crainte. Le critiquer frontalement est pour une bonne partie des citoyens marocains non seulement un réel risque mais un crime de lèse-majesté qui leur semble être un acte de damnation éternelle. Le roi, son ascendance comme ses descendants, sont honorés du titre de Commandeurs des croyants par cette grande fraction du peuple qui est soumise au silence et à la dévotion.
Oui, des opposants politiques ont été incarcérés ou exécutés par charrettes entières pendant de nombreuses décennies. La terreur a toujours été dissimulée sous le tapis d’une image idyllique et « orientaliste » de ce pays qui fascine les touristes. Oui, cette façade est hautement condamnable et doit l’être sans retenue.
Oui, le Sahara occidental et son peuple ont été spoliés de leur droit de propriété sur leur terre ou, du moins, dans leur droit à l’autodétermination. C’est incontestable et ce n’est pas moi qui le contredirais.
Mais l’épouvantable ne se combat pas par une autre. Le Maroc est le premier allié du régime algérien. Des centaines de fois j’ai rappelé dans mes articles deux piliers de renforcement des dictatures. Le premier est la religion au nom de laquelle on écrase les peuples soumis et le second est le piège millénaire du danger par l’appel à combattre « l’ennemi extérieur ». Plus il est évoqué, du matin au soir, plus la majorité du peuple algérien (comme marocain) tombe dans le piège et fait corps avec un état qui les protégerait contre cet ennemi extérieur qui est accusé de vouloir détruire la nation.
Pour cette seconde raison, la majorité des Algériens ne marchent pas derrière lui, ils courent. Et à chaque relance de la crise, le pouvoir algérien est de nouveau légitimé comme une locomotive qui ne peut avancer sans l’alimenter constamment.
L’argument classique des Algériens qui mordent à l’hameçon prend prétexte sur le sempiternel argument « nous ne sommes pas contre le peuple marocain mais contre son régime ». Je ne peux en principe contrer cet argument qui est légitime et fondé. Mais si je m’insurge aujourd’hui est qu’il y a de plus en plus de dérapages condamnables pour désigner ce peuple dans sa globalité.
Lui aussi, dans sa grande partie ne fait que reproduire le même discours en réponse à l’appel de propagande. Nous sommes ainsi emprisonnés dans un cercle vicieux qui nous emmène tous vers le gouffre de l’intolérable.
Je lis et j’entends des propos qui sont clairement dans la haine de l’autre. J’insulterais mon honneur en y participant.
Il faut que les Algériens critiquent, et même combattent, les deux manipulateurs qui sont les seuls responsables du malheur de nos deux pays. Il faut cesser les invectives ambigües contre les Marocains, jusqu’à l’inacceptable.
Et cela me semble être ce qu’il se passe. Bon sang, quand les Algériens penseront-ils par eux-mêmes et décideront qui sont leurs ennemis ou leurs amis ?
Que les Marocains qui ne participent pas à la même meute aveugle soient assurés de mon amitié et à mon respect. Je continuerai à combattre violemment les deux régimes politiques qui nous manipulent mais je ne tomberai jamais dans la haine par la psychose introduite dans les esprits.
Monsieur le roi du Maroc (majesté est un mot impossible dans ma bouche, nous sommes des citoyens mas pas des adorateurs d’un homme non élu) et Monsieur Tebboune, vous pouvez vaincre par la terreur mais vous ne pourrez jamais vaincre le réveil des deux peuples qui se produira un jour ou l’autre.
Et plus cela est long à venir plus votre chute sera fracassante.
Aujourd’hui, partir est devenu le sport national préféré. La fuite des cerveaux n’est plus une exception, ni même un choix douloureux : c’est une évidence.
Les jeunes, et même les moins jeunes, n’aspirent plus seulement à réussir chez eux, mais à fuir ailleurs.
À une époque, quand on demandait à un enfant : « Que veux-tu faire plus tard ? », il répondait : médecin, ingénieur, footballeur, pilote… Aujourd’hui, posez la même question : la réponse est souvent directe, désarmante —
« Je vais avoir mon bac, puis je pars en France ou au Canada. »
Ce n’est plus seulement un projet professionnel : c’est un plan de sauvetage personnel. Et pendant ce temps, ceux qui détiennent les leviers de décision semblent vivre dans un autre monde, à distance des angoisses du quotidien.
Leurs enfants, souvent déjà installés à l’étranger, ne connaissent pas les mêmes incertitudes, ni la même précarité. Ce décalage, plus que la volonté, explique sans doute pourquoi le désespoir de ceux qui partent reste si peu entendu. Car pendant qu’une génération s’en va, c’est tout un pays qui se vide lentement de ses forces vives.
Récemment, j’ai vu les images d’une sortie de promotion de 270 médecins à la faculté de médecine de Tizi Ouzou.
J’étais sincèrement heureux et fier de voir autant de jeunes diplômés, autant de talent et d’effort récompensé. Mais en même temps, une pensée m’a traversé l’esprit : « Tous ces jeunes médecins vont partir ailleurs. »
Nous formons ici des compétences d’exception… pour faire le bonheur des autres.
Et pourtant, nous ne nous faisons pas d’illusions : la France n’est plus l’Eldorado d’autrefois. Là-bas aussi, les temps ont changé — chômage, manque de logements, précarité, solitude.
Beaucoup découvrent que l’exil ne guérit pas le mal-être, il le déplace simplement. Mais quand on ne voit plus d’avenir chez soi, même l’inconfort ailleurs paraît plus supportable que l’attente ici.
Cette hémorragie silencieuse a un prix humain immense : des mères qui vieillissent dans le silence, des pères qui attendent des appels qui se font rares, des villages et des villes où l’on ne voit plus que des visages fatigués.
On parle d’économie, de développement, de “nouvelle Algérie”… Mais qui parle de cette douleur-là ? De ce vide affectif qu’aucune promesse d’avenir ne peut vraiment combler ?
Il est temps de poser les vraies questions. Pas seulement : « Pourquoi partent-ils ? » Mais surtout : « Qu’avons-nous fait pour qu’ils veuillent tous partir ? »
Parce qu’au fond, la fuite des cerveaux n’est pas une fatalité — c’est un symptôme. Celui d’un pays qui n’écoute plus ses enfants, qui ne croit plus en son propre avenir.
Et si, à force de laisser partir ses meilleurs esprits, notre pays se vidait de sa “carte grise” — de son savoir, de sa jeunesse, de son intelligence ? Parce que sans jeunesse, sans espoir, sans confiance… que restera-t-il ?
Lors de la Foire internationale de Marseille, sur le stand de l’Algérie, nous avons rencontré Chaïma Bencharef, apicultrice passionnée et fondatrice de la marque Bee Royal.
À travers son travail minutieux et son discours empreint de conviction, elle incarne une nouvelle génération d’entrepreneures algériennes engagées dans la valorisation du miel naturel, le respect de la biodiversité et la promotion d’une apiculture durable.
Le Matin d’Algérie : Pouvez-vous nous raconter l’histoire de Ruchers Chaïma et comment est née l’idée de Bee Royal ?
Chaïma Bencharef : L’aventure Bee Royal est née d’une passion profonde pour la nature et d’un amour sincère pour les abeilles, symboles d’équilibre et de générosité. Depuis mes débuts dans l’apiculture, j’ai toujours rêvé de créer une marque qui allie savoir-faire traditionnel et approche moderne, offrant un miel pur, noble et authentiquement algérien.
C’est ainsi qu’est née Bee Royal, une marque qui incarne l’excellence, la transparence et la beauté naturelle de notre terroir.
Le Matin d’Algérie : Quelles sont les valeurs et la mission de Bee Royal ?
Chaïma Bencharef : Bee Royal repose sur trois valeurs fondamentales : 1.Pureté absolue : préserver la nature sans intervention chimique ni transformation.
2.Engagement : respect de l’abeille, de la nature et du consommateur.
3. Excellence : offrir un produit haut de gamme, alliant qualité et élégance.
Notre mission est de promouvoir la culture du miel naturel comme aliment et remède, tout en encourageant une apiculture durable et responsable en Algérie.
Le Matin d’Algérie : Quels types de miel produisez-vous et quelles sont leurs particularités ?
Chaïma Bencharef : Nous produisons plusieurs variétés de miel pur, issus des régions florales riches d’Algérie : Miel de jujubier (sidr) : rare, puissant et reconnu pour ses vertus médicinales. Miel de thym : idéal pour renforcer le système respiratoire et l’immunité. Miel d’eucalyptus : bénéfique pour la gorge et riche en antioxydants. Miel de déranger : léger, aromatique et énergisant. Miel de montagne : pur, aromatique et fortifiant, récolté sur les fleurs sauvages des hauteurs. Miel de chardon de chameau : un miel rare au goût intense, renforçant l’immunité et soutenant la santé respiratoire et digestive. Miel de Labbina : apaise les allergies respiratoires, renforce l’immunité et facilite la respiration. Chaque miel reflète la diversité de notre nature et l’authenticité de son origine.
Le Matin d’Algérie : Comment garantissez-vous la qualité et la pureté de vos produits ?
Chaïma Bencharef : Nous contrôlons rigoureusement chaque étape : choix des ruchers dans des zones non polluées, extraction manuelle du miel, et filtration naturelle sans chauffage ni additifs.
Des analyses en laboratoire agréé certifient la qualité et la conformité de nos produits.
Le Matin d’Algérie : Quelle est votre méthode d’élevage des abeilles et de récolte du miel ?
Chaïma Bencharef : Nous pratiquons une apiculture respectueuse et durable, centrée sur le bien-être des abeilles et la préservation de l’écosystème. Le miel est récolté à maturité, à la main, afin de conserver toutes ses propriétés nutritionnelles et thérapeutiques.
Le Matin d’Algérie : Qu’est-ce qui distingue Bee Royal des autres producteurs de miel en Algérie ?
Chaïma Bencharef : Bee Royal se distingue par sa combinaison unique de savoir-faire traditionnel et méthodes scientifiques rigoureuses.Elle propose des mélanges thérapeutiques naturels, destinés à renforcer l’immunité ou soulager les affections respiratoires, tout en garantissant la pureté et la qualité grâce à des analyses en laboratoire certifiées.
Le design soigné et l’identité visuelle élégante incarnent la devise de Bee Royal : « Du producteur au consommateur », symbole de transparence et de confiance.
Le Matin d’Algérie : Avez-vous développé des produits spécifiques pour la santé et le bien-être ?
Chaïma Bencharef : Oui, absolument. Nous avons développé des gammes naturelles à base de miel pur, gelée royale, huiles essentielles et plantes médicinales, conçues pour soutenir l’immunité, l’énergie et l’équilibre du corps. Ces formules ciblent les enfants, les sportifs et les femmes enceintes, avec des mélanges spécifiques pour la vitalité et le système respiratoire.
Le Matin d’Algérie : Quels sont les principaux défis auxquels vous êtes confrontée ?
Chaïma Bencharef : Les défis majeurs concernent les variations climatiques imprévisibles, qui impactent la floraison des plantes nectarifères, et donc la qualité et la quantité de miel. S’ajoutent la hausse des coûts des matières premières et un manque de sensibilisation des consommateurs à la valeur du miel naturel. Malgré tout, je m’efforce de maintenir une production responsable, durable et traçable, valorisant le miel algérien à travers certification et participation aux salons nationaux et internationaux.
Le Matin d’Algérie : Quels sont vos projets de développement pour l’avenir ?
Chaïma Bencharef : Bee Royal poursuit une stratégie d’expansion avec de nouvelles gammes apithérapeutiques, associant miel, huiles essentielles et gelée royale.
Nous renforçons la production grâce à des technologies modernes de conditionnement et de traçabilité, et visons l’export pour faire rayonner le miel algérien authentique à l’international.
Le Matin d’Algérie : Qu’est-ce qui vous passionne le plus dans l’apiculture ?
Chaïma Bencharef : Ce qui me passionne, c’est la complexité scientifique et écologique du rôle de l’abeille.
Elle assure 75 % de la reproduction des plantes cultivées et sauvages, participant à la sécurité alimentaire mondiale.
Travailler avec les abeilles, c’est observer un modèle parfait d’organisation et de coopération, reflet de la création. Ma conviction : préserver les abeilles, c’est préserver la vie elle-même, en conciliant production, biodiversité et responsabilité environnementale.
Propos recueillis par Djamal Guettala
Foire internationale de Marseille, stand de l’Algérie
L’international tunisien Hannibal Mejbri, milieu de terrain du club anglais Burnley, se retrouve au cœur d’une polémique qui agite la Premier League. La Fédération anglaise de football (FA) a annoncé, lundi 11 novembre, l’ouverture d’une procédure disciplinaire contre le joueur de 22 ans, accusé d’avoir craché en direction des supporters de Leeds United lors du match disputé le 18 octobre dernier à Turf Moor.
Selon la FA, Mejbri est suspecté d’avoir “enfreint les règles du jeu ou adopté un comportement inapproprié, abusif ou obscène”. L’incident présumé se serait produit à la 67e minute, alors que le milieu de terrain s’échauffait sur la ligne de touche avant son entrée en jeu, intervenue à la 83e minute.
L’affaire a pris une tournure officielle après la plainte déposée par un supporter de Leeds, amenant la police du Lancashire à ouvrir une enquête préliminaire. Le dossier a ensuite été transmis à la Fédération, qui a donné au joueur jusqu’au 28 novembre pour répondre aux accusations.
Aucun des deux clubs, ni Burnley ni Leeds United, n’a souhaité réagir pour le moment, malgré les sollicitations répétées de la presse britannique, notamment la BBC.
Arrivé à Burnley en août 2024 en provenance de Manchester United pour un montant avoisinant 9,4 millions de livres sterling, Hannibal Mejbri s’était imposé comme l’un des jeunes talents les plus prometteurs de la formation dirigée par Vincent Kompany. En cinquante matchs disputés, il n’a inscrit qu’un but, mais sa combativité et sa vision de jeu lui avaient valu la reconnaissance du public et de ses coéquipiers.
Cette affaire tombe au plus mauvais moment pour le milieu tunisien, dont la carrière semblait prendre un nouvel élan. En cas de confirmation des faits, il risque une amende et une suspension, des sanctions qui pourraient compromettre sa régularité avec Burnley et, plus encore, sa présence avec la sélection tunisienne, qualifiée pour la Coupe du monde 2026.
Au-delà du simple incident, cette polémique souligne la fragilité de l’image publique des jeunes footballeurs, souvent observés et jugés au moindre geste. Dans un championnat aussi médiatisé que la Premier League, le comportement d’un joueur, même en dehors du jeu, peut rapidement devenir un enjeu moral et symbolique.
Reste désormais à savoir si Hannibal Mejbri sortira de cette tempête blanchi… ou marqué à jamais par cette accusation.
Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a réagi pour la première fois à la controverse suscitée par la libération de l’écrivain Boualem...
Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a réagi pour la première fois à la controverse suscitée par la libération de l’écrivain Boualem...
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