« La vérité est non seulement une fiction, mais une fiction dangereuse et oppressive. » (1)

Maintenant que le politique devient une affaire d’Etat et un acte relevant du pénal, il est très clair que les mouvements politiques devraient exploiter leurs structures pour, tous le prétendent, construire la démocratie, laquelle exige des efforts, voire des sacrifices, de la part des directions nationales des partis. Le fonctionnement des partis par le principe du centralisme démocratique, faisant défaut, faut-il opter pour une autre modalité qui pourrait remplacer les mécanismes utilisés jusque-là ? S’adressant aux militants de son parti, Lénine écrit : « L’action politique du Parti doit être unie. Aucun « appel » détruisant l’unité d’actions déterminées n’est admissible ni dans les réunions élargies, ni dans les réunions du Parti, ni dans la presse de notre Parti.» (2)

Si l’aspiration démocratique se manifeste sans aucune réserve de la part des masses, il n’en reste pas moins que la technique peine à se voir dans les programmes des partis, malgré certaines « cogitations » utopistes, qui, nourries par des penseurs sans souci existentiel, ni intérêt social (totalement désintéressés des dividendes matériels et même politiques), ne doivent pas être abandonnées par la matière grise des partis au prétexte qu’aucun sens n’y peut être repéré.

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Les partis de gauche, interpellés tout le temps pour contrer l’hégémonie de l’Histoire, seraient les plus aptes à l’œuvre de démocratisation de la Cité. Il y a la possibilité que l’idéologie se réforme, qu’elle règle ses contradictions (il faut lire ce que dit feu Hocine Ait Ahmed du marxisme dans son ouvrage La guerre et l’après-guerre).  

Il est impératif de reconnecter les masses non seulement avec le Verbe, mais avec la posture de scansion. Scander, c’est le bruit d’un message muet ; le mégaphone est l’arme des voix tenues discrètes dans la cour des manifestations politiques. Rien ne peut justifier les avis contradictoires les uns vis-à-vis des autres concernant la question de la technique d’accès à la démocratie.

Il faut, qu’à la base, les sections des partis progressistes (surtout pas ethno-culturalistes) et celles des syndicats des différentes fonctions, organisent des assemblées générales pour débattre du projet communal.

Cela reste un rêve de candides, dès lors que la crise est plus profonde dans la mesure qu’aucun acte politique « classique » ne peut régler : le Sujet national (avec tous ses composants, surtout les officiels) doit régler son conflit avec l’Histoire. Le Sujet national doit être retiré aux abstractionnistes qui se sont introduits dans toutes les institutions de l’Etat. Que ceux qui nous disent que tel problème ou tel autre n’est pas prioritaire se taisent et que ceux qui accusent les appareils d’Etat de censure quittent leur cynisme et qu’ils clament leurs revendications sans la moindre réserve. Les cyniques laisseraient leur doctrine pourrir au fond de leurs âmes troublées par leurs viles audaces. 

Il revient aux penseurs sociaux et institutionnels d’ouvrir les débats et d’accompagner les masses pour s’auto-définir et de régler les questions humaines fondamentales et qu’elles soient exposées et réglées une bonne fois de toutes. Il reste de notre devoir, nous, Algériens, de procéder à chaque fois qu’il le faille à des révisions.

Il faut couper l’herbe sous les pieds des spiritualistes de quelque catégorie qu’ils soient. Quand les lames sont cachées, il ne faut surtout pas s’attendre à un printemps : nos traumatismes sont ouverts à toutes les lumières, fussent-elles les plus éclairantes. 

Le peuple sait que la gauche est persécutée, mais cela ne lui autorise pas la démission : nous avons vu des maires, des députés (fantômes) qui n’ont jamais accompli des tâches partisanes capables de rendre les masses éligibles à l’exercice politique, après qu’elles aient été droitisées et devenues des foules définies seulement par des réflexes qui les dégradent.

Les hommes politiques devraient incarner un régime de vérité susceptible d’être, grâce à sa clarté, à la portée des masses et capable de réduire les subtilités faussement scientifiques, sciemment employées par les « intellectomanes ». Lisons ce court passage : « Le mensonge et l’art de la tromperie font partie de la vie publique depuis des siècles. Les techniques de leurre, de ruse, de dissimulation, de production de fausses nouvelles, de propagande et de bourrage de crâne font partie de la panoplie ordinaire des chasseurs, des militaires, des hommes politiques, quel que soit le régime politique. » (3)  

La massification du politique est impérative pour l’accès à la démocratie qui exige de l’éthique et de la retenue verbale et/ou graphique. Certes, il ne nous revient pas d’être des donneurs de leçons, mais nous faisons la périphérie d’un centre qui nous oppose un déni. 

Abane Madi

Notes : 

  1. Engel, P. (2018). Foucault, la politique de la vérité et la politique de la foutaise. Diogène, 261-262(1), 158-174. https://doi.org/10.3917/dio.261.0158
  2. La « Volna » n° 22, 20 mai 1906.  Conforme au texte du journal. Œuvres t. 10, pp. 465-467, Paris Moscou. Le texte est consultable au lien suivant :https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1906/05/vil19060520.htm   
  3. Engel, P. (2018). Foucault, la politique de la vérité et la politique de la foutaise. Diogène, 261-262(1), 158-174. https://doi.org/10.3917/dio.261.0158.

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