23 novembre 2024
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Jean-Luc Rogge : « Je suis un révolté, optimiste lucide, donc désespéré »

Jean-Luc Rogge est un écrivain passionné qui se démarque et émerveille par un style fluide qui accapare le lecteur, le retient pour ne plus le lâcher, tant la force de la narration est grande, jonglant entre le récit, le roman, la fiction et la nouvelle avec une dextérité rare qui attire l’admiration.

Jean-Luc Rogge est un écrivain belge. Il a vécu et grandi à Mouscron, cette petite ville enchanteresse francophone de Belgique située en Wallonie picarde, qui touche à la fois la frontière française et la frontière linguistique.

Mouscron est à 110 kilomètres à l’ouest de Bruxelles, à l’ouest de la province de Hainaut depuis le 1er septembre 1963, à la frontière entre la Belgique et la France. Avant cette date, elle faisait partie de la province de Flandre-Occidentale. Les villes françaises de Roubaix et Lille se trouvent respectivement à 9 et 23 km de Mouscron.

Déjà enfant introverti et rêveur, avide d’évasion, il trouve dans la littérature une raison d’être transfigurant les paraitres et les voiles pour appréhender le réel, le vrai, pour échapper aux monde des illusions et des incertitudes pour atteindre un équilibre et une harmonie dans la création, dans l’écriture, en donnant libre cours à une imagination déjà fertile où les idées sont prêtes à germer.

Jean-Luc Rogge a publié sept livres, six recueils de nouvelles, un genre qui lui tient tout particulièrement à cœur qu’il essaie de valoriser, et un roman, une sorte de thriller familial. Mes personnages sont à l’image des gens qui peuplent ce monde, se plaît-il à dire. C’est effectivement vrai, chacun peut se reconnaître dans ces livres tant les protagonistes nous paraissent proches et familiers sous plusieurs angles d’un abord facile, partageant le flot émotionnel immergeant les sens.  

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Le Matin d’Algérie : Vous êtes un écrivain de talent, vos livres en témoignent, qui est Jean-Luc Rogge ?

Jean-Luc Rogge : Parler de soi est toujours difficile. Comme vous l’avez déjà précisé, je suis Belge mais, comme de nombreux habitants de Mouscron, ancienne cité textile, ville frontière contiguë à Tourcoing, j’ai de la famille tant en Belgique qu’en France. Mais j’aime surtout me définir comme un simple citoyen du monde qui, comme tant d’autres, tente de se frayer le meilleur chemin possible dans ce monde chaotique.

J’aime lire, écrire, épier, observer, comprendre. La lecture et l’écriture ont toujours fait partie de mon quotidien mais ce n’est que lorsque ma carrière professionnelle a touché à sa fin que j’ai enfin trouvé le temps nécessaire pour assouvir pleinement ma passion et que j’ai pu franchir le pas vers l’édition.

Ami des animaux et de la nature, je déteste les simagrées, la perfidie, la turpitude, l’abus de pouvoir, l’extrémisme. Je suis un révolté, optimiste lucide, donc désespéré.

Le Matin d’Algérie : Vous semblez jongler aisément avec les genres littéraires, le récit, le roman, la nouvelle, la fiction, comment arrivez-vous à cette prouesse ?

Jean-Luc Rogge : À l’aise dans le format court, le changement de format ne me pose cependant pas de problème. Tout dépend, en fait, de l’histoire que j’ai à développer. Tantôt celle-ci ne nécessitera que quelques pages, tantôt bien plus. J’essaie, de toute manière, d’éviter tout paragraphe superflu.

Au départ de la plupart de mes histoires, des instantanés de vie qui m’ont interpellé et auxquels j’ai imaginé une suite incertaine. Au gré de mon imagination, je me laisse emporter vers des horizons divers et sans limites par chacun de mes personnages. J’aime alors que ceux-ci arrivent à me surprendre, et donc à surprendre le lecteur.

Pour écrire, j’utilise principalement la technique du récit à la première personne qui est particulièrement immersif et fait vivre les histoires au plus profond de ce que ressentent les personnages. Ceci implique que j’adapte mon écriture et mon vocabulaire au niveau de pensée de ceux-ci, ce qui engendre des récits à la liberté de ton et au franc-parler certain, et dont les protagonistes sont tantôt drôles, tendres et touchants, mais d’autres fois, aussi, pernicieux, diaboliques ou choquants.

Le Matin d’Algérie : Quels sont les écrivains qui vous influencent ?

Jean-Luc Rogge : Bien que je le sois probablement inconsciemment, j’essaie de ne pas me laisser influencer par quiconque pour ne pas tomber dans une sorte de mauvaise copie de style d’un écrivain. Mais il est évident que des auteurs comme Philippe Djian et Olivier Adam, ou encore la Belge Barbara Abel et l’Américain Raymond Carver pour les nouvelles, sont mes maîtres littéraires pour mon écriture.

Le Matin d’Algérie : Vous aimez les chats, beaucoup d’écrivains, Charles Baudelaire, Théophile Gautier, Colette, Jean Cocteau, Victor Hugo, Émile Zola, Ernest Hemingway, Kipling, Mallarmé, Malraux, Maupassant, Perrault, Poe, Prévert, George Sand, ont eu une grande passion pour les chats. Il est vrai que cet animal totem a une symbolique liée au mystère, à l’inconnu, à ce qui est caché, il peut être une grande source d’inspiration pour les créateurs, pouvez-vous nous en parler ?

Jean-Luc Rogge : Ma relation a toujours été forte avec les chats, ces êtres sauvages, solitaires, curieux, distants parfois, méfiants souvent, mais à la tendresse infinie et à la confiance illimitée dès lors qu’ils vous ont adopté. Mon vieux chat, âgé de 17 ans, m’a signifié l’importance de la conscience de l’instant présent. Chaque fois que je m’installe à ma table d’écriture, il se couche à mes côtés, la tête posée sur mon avant-bras et, par ses ronronnements, par ses demandes de caresse, me détend et m’apaise s’il m’arrive de buter sur un mot, une phrase ou une suite à donner. Pas de doute, pour moi, comme pour de nombreux auteurs, le chat est bien le meilleur ami de l’écrivain, source inépuisable d’inspiration.

Le Matin d’Algérie : La France, le pays des lumières, vient de vivre un moment crucial de son histoire où l’extrême droite a failli prendre le pouvoir. Le monde se refroidit, on s’éloigne du vivre ensemble, quel regard portez-vous en tant qu’écrivain sur la montée de la haine un peu partout dans le monde et particulièrement en Europe ?

Jean-Luc Rogge : La France, l’Europe, le monde est en crise. Face à leur misère croissante, aux inégalités qu’ils subissent, au sentiment d’abandon qui prédomine, et en l’absence de réponses à leurs appels de détresse de la plupart de leurs dirigeants, enfermés dans leurs tours d’ivoire, de nombreux citoyens se tournent, hélas, vers les extrêmes, non seulement sinistres xénophobes et vendeurs d’illusions, mais surtout danger pour toutes les nations.

Personnellement, en tant qu’écrivain, auteur de fiction, je ne puis que, de temps à autre, aborder indirectement ces sujets dans mes livres, mais, tous, comme citoyens, il nous faut tenter de ramener à la raison les égarés.

L’autre n’est pas un danger mais un enrichissement !

Le Matin d’Algérie : Avez-vous des projets en cours et à venir ?

Jean-Luc Rogge : De gros soucis, sur lesquels je ne m’attarderai pas, m’ont empêché de poursuivre normalement mon travail d’écriture ces derniers mois. Mon prochain livre ne devrait donc pas paraître avant l’année prochaine.

Le Matin d’Algérie : Un dernier mot peut-être ?

Jean-Luc Rogge : Ce fut un réel plaisir de répondre à vos questions. Je vous remercie chaleureusement pour cette interview. Et, surtout, que vive la littérature !

Entretien réalisé par Brahim Saci

https://www.jeanlucrogge.com

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