“Quand j’étais petit, on m’a dit que n’importe qui pouvait devenir président. Je commence à le croire.” Clarence Darrow
Ça ne se voit pas mais les élections présidentielles françaises se dérouleront dans trois semaines à peine ! Près de quarante huit millions d’électeurs seront appelés à se déplacer pour mettre un bulletin dans l’urne et élire le futur président de la République, le futur étant très certainement l’actuel chef de l’État.
En France, on est venu définitivement à bout de la monarchie en guillotinant Louis XVI le 21 janvier 1793, même si la monarchie de Juillet est revenue hanter les palais parisiens, en 1830, à la suite des Trois Glorieuses.
Depuis des années, la République a de nouveau installé un monarque qui décide de la totalité de la politique du pays tout en s’entourant d’un parlement de godillots à sa botte. Ce souverain règnera sur le pays durant les cinq années à venir.
Mère de la démocratie, la France, en cette veillée d’élections si importantes, manque cruellement d’explications démocratiques. La pandémie a pratiquement laminé toute contestation. Et voilà que la guerre en Ukraine est venue donner le coup de grâce à tout débat public.
Pendant que l’actuel (et futur) président, qui est en même temps le chef des armées, parle avec ses confères de Russie et d’Ukraine, il ne consent pas à descendre dans l’arène politique nationale pour disserter sur le logement, sur la pauvreté endémique d’une partie de la population, sur la sécurité, sur la laïcité qui est malmenée depuis si longtemps, sur l’amélioration des services publics qui est si attendue par beaucoup…
Et s’il condescend à parler du social, c’est plus pour caricaturer les plus fragiles en demandant, par exemple, aux bénéficiaires du RSA (Revenu de Solidarité Active) de travailler une vingtaine d’heures par semaine, ce qui amoindrirait considérablement la valeur du SMIC, et qui culpabiliserait des allocataires déjà usés par les échecs.
Parce que c’est d’un vrai travail que ces gens ont besoin. Voilà donc un président-candidat, ou candidat-président, qui élude tout face-à-face avec les onze adversaires qui n’attendent qu’à en découdre avec lui sur un bilan catastrophique et ce même bilan deviendra certainement la feuille de route calamiteuse de ce même futur locataire de l’Elysée.
À l’évidence, la guerre joue pour Emmanuel Macron. Ce qui lui donne une sorte de légitimité pour ne pas descendre dans l’amphithéâtre au milieu des autres gladiateurs. Il n’y aura donc aucune possibilité pour les autres candidats de discuter avec le président sortant sur son bilan et sur son projet.
Fermez le ban.
Circulez, il n’y a rien à voir !
Kamel Bencheikh, écrivain