2 mai 2024
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Coups de force et mises en scène pour imposer une présidentielle

OPINION

Coups de force et mises en scène pour imposer une présidentielle

Les grosses pointures de l’État qui défilent en ces moments devant les juges d’instruction nous renseignent clairement qu’une trêve est rompue entre les différents clans qui se négocient habituellement le pouvoir pendant des années.

Cette fois-ci, le peuple réclame sa part du lion, il réclame un pouvoir sans partage et sans concession. Cette exigence a forcé certains chefs de l’ombre à sortir de leurs terriers imprudemment pour faire barrage à la volonté du citoyen algérien. La rencontre de Toufik avec Said Bouteflika révélée au grand jour par Zeroual et Nezzar, en tous cas pour le moment, est fatale pour le clan dit présidentiel.

Cette révolution qui est en marche a provoqué de grandes secousses au sein des structures opaques de l’État.

Le partage des pouvoirs qui s’effectuait entre elles au détriment de la nation algérienne aurait-t-il une fin tumultueuse? Probablement oui à voir les profils des inculpés, la plus grande majorité d’entre eux ont soutenu le cinquième mandat politiquement et financièrement. Et la nouvelle présidentielle proposée par le commandement militaire tutélaire proclamé du pays est un enjeu majeur, cependant il faudrait bien être aidé, faire des victimes et sacrifier des personnes pour la réussir et éviter à n’importe quel prix une transition démocratique !

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Les sacrifiés, les complices et les victimes

Par le souci de se protéger et protéger le système et avec l’espoir d’associer le peuple, les arrestations d’Ouyahia, Sellal, Kouninef, Haddad, Tahkout et d’autres qui ont gravité autour des Bouteflika n’ont aucunement provoqué des liesses en faveur de Gaïd Salah, au contraire, au seizième vendredi, les millions d’Algériens réclament sa tête et celles qu’il protège.

Un autre détail qui soulève encore des doutes, les islamistes ne sont pas admis dans la débâcle judiciaire. Jusqu’à aujourd’hui, on les a épargnés surement pour d’éventuels soutiens à une feuille de route bien établie par l’état major. C’est une forme de complicité que certains partis politiques et quelques personnages falots qui ont déjà exprimé leurs intentions pour adhérer au projet séditieux de Gaid Salah.

Avec une justice soumise aux ordres des militaires, d’autres arrestations ont provoqué de l’indignation et de la consternation. La détention d’Issad Rebrab dépasse le cadre juridique, elle est abusive.

C’est une affaire politique qui suscite plus qu’une inquiétude, car le projet d’EvCon et l’appétence des Émiratis à avoir pignon sur rue au pays pour accéder au marché algérien sont des indices révélateurs. Sinon, le seul motif aberrant qu’on lui reproche pour le mettre en prison est une infraction douanière pour sur une machine unique importée de l’étranger. Aucune magnanimité n’est appliquée à son égard, alors qu’il mérite de la haute considération en termes de ses engagements en matière d’investissement et de création d’emploi. Reconnu mondialement pour son sérieux, il est l’image positive de l’Algérie de demain.

Un autre fait grave, la détention arbitraire d’une responsable politique notamment Louisa Hanoune. Pour ses fréquentations avec un des anciens cadres des services, elle est accusée de conspiration contre l’État. Mérite-t-elle un tel châtiment ? La justice n’est pas juste pour son cas, la détention provisoire à la prison militaire de Blida est une mesure très lourde, et au minimum elle doit bénéficier d’une présomption d’innocence. Cette sévère mesure interpelle beaucoup de personnalités françaises, algériennes et les partis politiques, ils appellent à sa libération. Selon le bureau politique du PT, sa santé est sérieusement détériorée, son cas nécessite de quitter son lieu détention au plus urgent.     

Une justice inique et à un sens unique

Les citoyens d’Annaba ont en beaucoup à dire sur une organisation familiale qui domine les marchés de l’agroalimentaire et de l’immobilier de leur wilaya. Donc, une justice en faveur d’un clan, ce n’est pas ce que souhaite le peuple algérien qui bat le pavé depuis 4 mois.

De passage à Paris pour une conférence au siège de la BRTV sur la situation politique en Algérie, Dr Sadi, l’ancien leader du RCD, a affirmé que «la justice est prise en otage par des règlements de comptes et des stratégies de manipulation médiatique et de captation de marchés», et il poursuit «ceux qui sont arrêtés ne sont pas tous des voleurs et tous les voleurs ne sont pas arrêtés».

Par opportunisme ou par ignorance, dommage pour certains qui n’arrivent pas à saisir le danger de telles dérives. Faire de l’éloge et applaudir une telle démarche est une erreur à éviter, sans pour autant défendre certaines personnes incarcérées à la prison d’El-Harrach qui sont connues dans les milieux d’affaires et sur leurs activités douteuses. Des contrats juteux de réalisation et de fourniture de matériel et services leur ont été attribués sur instruction présidentielle pour des raisons communes de tous.

Il n’est un secret pour tout le monde, la corruption a été institutionnalisée en haut lieu et depuis des années, donc les arrestations qui sont de l’œuvre du haut commandement militaire dirigé par Gaïd Salah qui était aux côtés de Bouteflika depuis 2004 ont deux objectifs bien précis : se protéger et protéger le système. A la lumière de ces faits notables, il y a lieu de souligner que choses ont trop duré sous ses yeux pour lui accorder une certaine confiance.

Une justice qui a laissé sciemment mourir dans des conditions dramatiques le militant des droits de l’Homme de Ghardaia, Kameleddine Fekhar, sera-t-elle du jour au lendemain une justice équitable ? Être incarcéré pour un délit d’opinion et être victime d’une arnaque judiciaire tendancieuse décidée en haut lieu sont des raisons suffisantes pour se démarquer des discours incantatoires annonçant la lutte contre la corruption.

Vers le contrôle total de l’outil judiciaire

Dernièrement, le juge d’instruction et le procureur du tribunal de Sidi-M’hamed ont été remplacés au moment des auditions des anciens ministres. Le président du Syndicat National de la Magistrature, Issad Mabrouk, a qualifié ce geste d’ »immoral ». C’est une manœuvre qui suscite des interrogations.

D’autres changements à connotation politique ont été opérés par Bensalah à l’administration du ministère de la Justice en l’occurrence la Cour suprême qui aura le rôle d’examiner les cas d’Ouyahia, Sellal, Tou, Benyounes et d’autres cadres de l’État cités dans des affaires de corruption et de malversation. Des recrutements prédestinés, en même temps, pour démanteler les leviers à risques de Tayeb Louh qui pourraient agir à tout moment.

Un autre fait effarant est la dissolution par le gouvernement via le Conseil des nations, le Sénat, ce jeudi, le 20 juin, de l’Office central de Répression de la Corruption (OCRC)(1), un service central opérationnel de la police judiciaire spécialisé dans les investigations et les enquêtes sur les affaires de corruption, et pour le remplacer avec un pôle pénal financier. Selon l’association algérienne de lutte contre la corruption (AACC) dirigée par Djilali Hadjadj, est un « complot qui ne dit pas son nom »(2). Et c’est le tribunal de Sidi M’hamed et le tribunal criminel d’Alger qui seront chargés de juger les affaires instruites par ce pôle. Donc, de fil en aiguille, on peut comprendre l’objectif des changements effectués au préalable (3).

D’ailleurs, l’AACC s’est exprimée tout au début des arrestations, elle préconise de prendre «des mesures conservatoires» vis-à-vis des personnes politiquement exposées (PPE) qui «pourraient être prises en charge par un gouvernement de transition issue du «mouvement populaire».

Que l’opinion publique ne se trompe pas sur cette grande mise en scène. C’est du pipeau pour donner une certaine légitimité aux acteurs des prochaines manœuvres, déjà mises en œuvre pour opérer un changement sans passer par une transition démocratique. En fait, Gaïd Salah cherche désespérément un président pour sauver le système.

Messaoudene Mahfoudh

Notes

http://www.ocrc.gov.dz/index.php/fr/publication/139-le-role-de-l-office-central-de-repression-de-la-corruption.

https://www.inter-lignes.com/dissolution-de-loffice-central-de-repression-de-la-corruption-laacc-denonce-un-complot-du-gouvernement

https://www.tsa-algerie.com/lutte-contre-la-corruption-ce-que-prevoit-le-nouveau-projet-de-loi

 

Auteur
Messaoudene Mahfoudh

 




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