AccueilPolitiqueEst-il de bon ton de critiquer Ahmed Ouyahia, le premier ministre ?

Est-il de bon ton de critiquer Ahmed Ouyahia, le premier ministre ?

On le dit depuis des semaines sur le départ

Est-il de bon ton de critiquer Ahmed Ouyahia, le premier ministre ?

Six mois après son retour aux affaires, le détenteur du record de longévité au poste de premier ministre, Ahmed Ouyahia, semble déjà sur le fil du rasoir, affirment les observateurs de la vie politique. Ses jours seraient ainsi comptés et son éviction est, semble-t-il, déjà actée et prête à intervenir à brève échéance, selon certaines personnes plus informées que d’autres du fait de leur proximité des arcanes du pouvoir. Elles laissent entendre qu’« il a dépassé les lignes rouges » ! Parmi elles, il y a Djamel Ould Abbès, le secrétaire général du FLN qui a revêtu pour l’occasion l’habit de l’«oracle» laissé vacant par son prédécesseur Amar Saâdani.

Sa sortie concernant le projet de privatisation d’entreprises publiques où il est parti jusqu’à organiser une tripartite «parallèle » en est la preuve, pour barrer la route, semble-t-il, aux « velléités » d’Ahmed Ouyahia dans son projet de vente des petites et moyennes entreprises en faillite. Sciemment orientée vers l’enjeu politique de 2019, cette rencontre a permis aussi et surtout au SG du FLN, à celui de l’UGTA et au patron du FCE de dire publiquement, que cette vente n’était pas à l’ordre du jour et aussi et surtout, de convenir et de donner lecture d’une motion de soutien pour un éventuel 5e mandat en faveur du président Abdelaziz Bouteflika. Il faut donc le croire, estime-t-on dans le milieu politique, quand il affirme « que ce n’est pas pour des considérations personnelles qu’il s’en prend à Ouyahia », dès lors que les services de la présidence de la République en sont venus à promulguer une directive interdisant toute privatisation sans l’accord du président de la République.

1. Pourquoi le premier ministre a-t-il été retoqué mais aussi rappelé à l’ordre ?

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2. Pourquoi aussi le président de la République désavouerait publiquement et par communiqué de presse son premier ministre, si ce n’est dans le but de le pousser à la sortie ?

3. Redoute-t-on, en haut lieu, que la privatisation envisagée profite aux proches du patron du RND, qui ainsi, pourrait s’attendre à un retour d’ascenseur de la part de ces derniers, en perspective de 2019 ?

4. Djamel Ould Abbès et consorts cherchent-ils à jeter en pâture un homme qu’Amar Saâdani accusait déjà de «n’être pas honnête vis-à-vis du président de la République et que son objectif est d’être candidat à la présidentielle à venir » ?

5. Faut-il comprendre par-là que le SG du FLN ne fait que traduire « la volonté de l’entourage du président de la République, d’exclure le premier ministre des centres de décision » ? Dès lors pour les observateurs qui suivent les moindres faits et gestes et surtout les déclarations de Djamel Ould Abbès, le doute n’est plus permis : le sort d’Ahmed Ouyahia est scellé et le nom de son successeur connu !

Il est vrai que l’exécutif qu’Ahmed Ouyahia dirige peine à trouver ses repères dans cette confusion des rôles et des missions des différents acteurs qui interviennent dans la gestion des affaires de l’Etat. Et ce n’est pas lui faire injure que d’affirmer que le premier ministre n’a pas, plus que tous ses prédécesseurs d’ailleurs, été nommé à ce poste pour gouverner, mais pour coordonner l’action du gouvernement et appliquer un programme revêtu du sceau de la sacralité, celui du président de la République. Ses détracteurs pensent en détenir la preuve : le président de la République ne signe plus les décrets économiques de son premier ministre ! Les coups continuent de pleuvoir sur l’homme, y compris de son exécutif avec notamment le ministre de l’industrie qui a certainement eu l’aval de qui de droit pour « contester » la liste des concessionnaires autorisés à faire du montage automobile et aussi les ministres FLN qui, « à l’unisson », se seraient « plaints de sa décision de transfert de la gestion des entreprises publique, tous secteurs confondus, sous son autorité directe ». Les choses semblent, donc, se compliquer pour Ahmed Ouyahia qui ne serait plus en odeur de sainteté, si l’on croit, bien-sûr, ce que disent de lui ses détracteurs, notamment Chakib Khelil qui, suprême ingratitude, l’a accusé ni plus ni moins de « vouloir affamer le peuple » et d’avoir été à l’origine des cadres, « injustement incarcérés sans charges précises » ! Est-ce à dire que le signal de la curée a été donné ?

L’histoire, va-t-elle se répéter pour lui ? Va-t-il se laisser abattre, de nouveau ? Est-ce à dire que l’homme est fini politiquement ? Certes, il a été rappelé à l’ordre concernant son discours « anxiogène » qui a effrayé la population, mais lui, « l’homme des sales besognes », est à l’image du système : manœuvrier, maniant à la perfection la langue de bois et aussi capable de « virer sa cuti » au gré des circonstances. N’est-il pas passé de l’ultralibéralisme dont il s’était fait le chantre par exemple, au patriotisme économique pour ensuite défendre, bec et ongles, la privatisation des entreprises publiques ? Ce procès en inconstance (banal en politique) aurait pu en rester là s’il ne se doublait d’une crainte (profonde et réelle) de voir le premier ministre mais néanmoins patron du RND, acculé par la concurrence du FLN de Djamel Ould Abbès, abattre la dernière digue qui le sépare de ce dernier, pour faire cavalier seul en direction d’El Mouradia. Il sait pourtant qu’il n’est pas le plus fort des candidats pour 2019 et il doit se dire que dans ces conditions on peut gagner à condition de savoir jouer sans ballon, par la science du placement et du remplacement. En évitant, autant se faire que peut, de se mettre en position « d’hors-jeu » !

Pour l’heure, dans la sphère politique, on a peur d’Ahmed Ouyahia parce qu’il se dit prêt à aller à la conquête d’El Mouradia dans le cas où le président en exercice ne se présenterait pas lui-même ou plus encore ne viendrait à en parrainer un autre candidat. En fait, l’ambition présidentielle qu’on lui prête, ce sont les autres qui en parlent au moment où, lui-même, balaie d’un revers de main cet avenir qui lui est prédit par ses soutiens qui ont eu à le côtoyer durant sa longue carrière.

Aujourd’hui, il a cependant d’autres soucis. Il est le chef d’un gouvernement qui fait face à l’une des plus graves crises de pétrole qui impacte gravement le pays et les citoyens. Et le mode de financement non conventionnel qu’il a mis en œuvre pour sortir le pays de la crise financière est même critiqué par le FMI ! Il le sait, les orientations économiques et sociales qu’il a définies ne prendront effet qu’à la faveur d’un retournement de la conjoncture, d’un sursaut du baril de pétrole à au moins 100$. 

Il lui faut savoir attendre et surtout durer au gouvernement ou s’accrocher dans la périphérie du pouvoir, même si certains dans la sphère politique ou même dans les cercles du pouvoir qui estiment qu’il est de bon ton de critiquer l’homme, aimeraient bien le voir emprunter « la porte de sortie » ! Et leur virulence à son encontre, facilitée par l’anonymat que leur garantit la presse, surpasse celle qui s’est déchainée contre lui en 2012 quand il a été remercié par le président de la République. Il est d’autant plus attaqué qu’il est (aussi) devenu le prétexte idéal pour certains de justifier leur ralliement passé ou à venir au président de la République à qui on prête la volonté de se succéder à lui-même en avril 2019. Ahmed Ouyahia en a conscience et paradoxalement, il a besoin de la confiance, peut-être aussi de la défiance de la classe politique, tous partis confondus.

Le rejet de cette classe politique dans la population est tel que bénéficier de sa défiance peut devenir, allez savoir, un atout ! Insensible aux rumeurs, Ahmed Ouyahia encaisse sans brancher car « il aurait développé des écailles aussi solides que celles d’un crocodile » aux dires d’un journaliste. Mais dans l’avion qui l’emmène à Kigali, au Rwanda où il représentera Abdelaziz Bouteflika au Sommet Africain qui s’y tient, il ne pourra pas s’empêcher de penser à son avenir à la tête du gouvernement, sachant que des présidents, Donald Trump par exemple, en sont venus à dégommer leurs ministres par un simple tweet ! 

Auteur
Ali Cherif

 




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