27 avril 2024
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Lettre ouverte à Abdelaziz Bouteflika

Pour vos 20 ans de pouvoir

Lettre ouverte à Abdelaziz Bouteflika

« Mais je ne veux pas remuer de cendres. C’est vous qui m’avez posé la question » Noureddine Saadi – Dieu-le-fit

Cher Président,

Je sais que le moment choisi pour t’écrire est largement dépassé puisque j’aurais dû le faire il y a quelques années déjà. Mais même si la date de péremption est derrière nous, il est impératif que je m’adresse à toi comme à un vieux frère.

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D’abord tu sais bien que vingt ans, c’est long pour un pays de supporter un même chef d’Etat quel que soit les compétences et le talent de ce dernier. Je te rappelle quand même que tu es arrivé à la tête de l’Algérie très précisément le 27 avril 1999 et donc que ça fera précisément vingt ans dans moins d’un semestre. Te rends-tu compte que le quart de la population algérienne n’a pas connu d’autre président de la République que toi ? Je disais que vingt ans, c’est interminable même lorsque le maître absolu possède du talent mais toi, non seulement tu n’en as aucun, mais pire, tu as fait de ce pauvre pays la chasse gardée des clans mafieux qui le dirigent, tu as accepté que les assassins de mes amis Tahar Djaout et Youssef Sebti soient graciés et que ces grands poètes ne voient jamais leurs meurtriers comparaitre pour être jugés au nom du peuple algérien.

Vingt ans à humilier cette pauvre patrie d’abord par une politique à l’emporte-pièce qui a fait de cette terre si riche une terre de harragas qui ne pensent qu’à déserter les lieux au risque même de leurs propres vies, vingt ans à vider les caisses de cet Etat dont les coffres débordaient de richesses sonnantes et trébuchantes et qui a dû faire marcher la planche à billets à hauteur de plus de 30 milliards de dollars pour satisfaire les besoins immédiats, ce  qui ne fait que reculer l’énorme crise à venir.

Apparemment, c’est le cadet de tes soucis, Monsieur le Président, puisque tu sais que tu ne seras pas là pour la gérer.

En fait, tu n’as jamais rien géré. Peut-être la réduction des libertés individuelles et la construction à l’échelle industrielle de mosquées qui n’ont apporté aucune richesse à la jeunesse algérienne – sans parler de cette énorme mosquée qui portera forcément ton nom et qui est d’ores et déjà comme une plaie dans le flanc de ce pauvre pays.

Vingt ans, c’est long, c’est vrai mais il faut préciser que tu es là depuis plus longtemps encore puisque par la grâce de Boumediene, un autre président ignare et violent, tu as été ministre des Affaires étrangères de 1963 à 1979 – un bail ! Vingt ans, c’est si long surtout quand on te voit depuis des années sur ta chaise qui ne roule que parce que certains la poussent, avec des gestes saccadés de vieillard fatigué, sans avoir prononcé un seul discours depuis des lustres, sans avoir visité la moindre ville de l’intérieur, sans avoir assisté à un évènement important, sans avoir guidé ton peuple vers des chemins qui lui auraient évité cette impasse dans laquelle tu l’as mis.

Vingt ans, Monsieur le Président, c’est toute une génération qui n’a pas connu autre chose que la privation et le manque, la restriction et le dénuement, vingt ans à vivre dans l’indigence et dans le dénuement.

Alors que pendant ce temps, les ministres de clan des pourris et les caciques de ce FLN rance, décomposé et putride n’ont pas cessé de s’enrichir, de se construire des palais en Espagne ou ailleurs, de s’offrir des appartements de luxe dans les beaux quartiers de Paris ou de Rome, de jouer avec l’argent de cette population qui n’en peut mais…

Vingt ans, c’est l’âge d’un jeune homme qui se retrouve sur les bancs d’une université désorientée ou aux commandes d’une machine dépassée dans une usine moyenâgeuse, c’est le sourire d’une jeune fille qui n’a plus d’autre possibilité que de mettre sur la tête une serpillière bariolée pour échapper aux milices islamistes que tu as encouragées par ta passivité.

Vingt ans, c’est juste trop. Et tous les signaux de fumée qui nous viennent de notre pays natal nous indiquent que tu serais prêt à rempiler pour un cinquième mandat – ou plutôt que le clan pourri qui te sert de gouvernement a décidé de repartir, derrière ton statut, pour un autre mandat qui lui permettrait de se garantir une impunité quant à la corruption et aux détournements dont il est l’auteur depuis ta prise de pouvoir – et même avant !

Vingt ans, c’est trop long, vieux frère. J’ai le défaut de penser, à l’instar de millions d’Algériens, qu’il est grand temps que tu ailles te reposer pour ne pas entraîner tout un peuple dans ta tombe. J’ose espérer que tu écouteras les conseils, ne serait-ce qu’une fois, le frère cadet que je suis.

Ton petit frère qui pense à notre maison commune.

Auteur
Kamel Bencheikh

 




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