La pasionaria algérienne, leader du Parti des travailleurs depuis un quart de siècle, va « encore » se présenter à l’élection présidentielle. Elle ne se fatigue jamais, s’accroche et veut terrasser le régime militaire, ce qu’elle a toujours prétendu.
Certains se taisent, d’autres s’expriment, haranguent les foules ou murmurent en allusions, Louisa Hanoune hurle. Je n’ai jamais connu Louisa Hanoune, depuis ma période militante, autrement que dans un langage de hurlements.
La description n’est pas exagérée mais véritablement ce que j’en ai retenu. Louisa Hanoune veut conquérir la citadelle en grimpant avec une échelle fournie par les maîtres de la citadelle. C’est tout de même étonnant de vouloir s’attaquer à un régime autoritaire en le légitimant par la participation à ses élections.
Louisa Hanoune combat le régime mais veut passer par un sacre des institutions de ce régime. Elle veut signifier qu’elle peut battre le dictateur par la volonté des urnes. Mais le despote n’est là que par la volonté des mêmes qu’elle prétend vouloir convaincre.
Eux-aussi hurlent et tombent dans l’hystérie lorsqu’ils sont touchés par la grâce divine de celui qu’ils voient ou écoutent. La grande différence est qu’il a les arguments pour les convaincre, ils sont le résultat de sa création.
Louisa Hanoune me fait rappeler les hurlements d’Arlette Laguiller, championne des participations à l’élection présidentielle. Elle a été si caricaturale qu’elle a fini par être une icône française, comme une figure qui est finalement devenue une image de leur quotidien. Louisa en est à sa quatrième participation.
La grande différence est la démocratie dans un pays et son absence dans l’autre. La participation éternelle aux élections d’Arlette Laguiller ne légitimait en rien ce qu’elle combattait. Pour Louisa Hanoune, on ne m’enlèvera jamais de l’esprit qu’elle nous casse les oreilles depuis trente ans en voulant nous prouver que le régime algérien est une dictature.
Drôle de façon de combattre une dictature en voulant se reposer sur l’un de ses paravents et habillage, la constitution. Elle s’est toujours posée comme le rempart contre tout ce qui était liberticide envers les femmes. Drôle de façon de vouloir atteindre le pouvoir dans les conditions juridiques d’une constitution qui place la femme au rang de « chose », d’un ventre à reproduire.
Non seulement elle hurle et ne parle jamais sur un ton convaincant mais elle est totalement hors du temps, le hurlement est une pratique ancienne et éculée des grands tribuns. Il n’y a que Mélenchon qui est le survivant de cette espèce aussi agaçante que contre-productive.
Même le Hirak, que j’ai si souvent fustigé pour sa stratégie, a accompagné ses hurlements par des chants et des youyous. Ne comptez pas sur Louisa pour l’humour, elle est aussi austère qu’un prêche de jésuite.
Louisa Hanoune est le muezzin de l’Algérie, elle sort à heures fixes pour crier l’incompréhensible. Elle est Jonas qui, sur les remparts de Ninive, avertit et menace la foule du courroux de Dieu si elle ne revenait pas aux vertus des commandements. Le souci est que Louisa Hanoune ne sort hurler que lorsqu’on l’autorise à sortir.
Mais non, Louisa, je te respecte infiniment. C’est que je suis désespéré que tu aies pris le même chemin que mes anciens camarades politiques, celui qui mène vers la légitimation des élections en y participant.
Je te respecte mais mes oreilles n’en peuvent plus. C’est dommage que tu aies pris cette route car je t’ai connue avec des convictions beaucoup plus combattantes que la participation aux élections qui est la meilleure façon de passer sous les fourches caudines du pouvoir despote.
Mes anciens camarades se sont également vautrés dans la compromission mais, eux, c’est dans le silence de l’oubli général. Aucune oreille ne les écoute ni ne souffre de leurs hurlements qui ne feraient même pas frétiller un seul sourcil d’un général.
Louisa joue le rôle des candidats « autorisés » par Poutine pour légitimer l’écrasante victoire du patron. Elle lui sert de lièvre, le lecteur reconnaîtra cette image.
Louisa, je t’en supplie, arrête ! Un Président d’une dictature militaire, ça fait hurler les autres. Tu n’as rien compris.
Boumediene Sid Lakhdar