2 avril 2025
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Suspension du DG de l’Entreprise de transport urbain de Souk-Ahras

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Souk Ahras incendie

Suite à l’incendie qui s’est déclaré, dans la nuit de vendredi à samedi,  dans le parking de bus de l’Entreprise de Transport Urbain et Suburbain de Souk-Ahras (Etussa), le wali de la wilaya a pris la décision de suspendre le directeur général de cette institution publique, a rapporté la Radio locale.

Selon un communiqué officiel, cité par Radio Souk Ahras,  cette mesure intervient dans l’attente des résultats d’une enquête approfondie visant à déterminer les causes et les circonstances exactes du sinistre qui causé la destruction de 7 bus.

 Les autorités locales  ont immédiatement ordonné l’ouverture d’une investigation pour faire toute la lumière sur cet incident qui a causé d’importants dégâts matériels.

Les habitants de la ville expriment leur inquiétude quant aux répercussions de cet événement sur le service de transport public, tandis que les autorités promettent des mesures pour assurer la continuité du service et éviter de nouveaux incidents.

L’enquête en cours devrait permettre d’identifier d’éventuelles négligences ou défaillances ayant conduit à cet incendie. Les conclusions attendues orienteront les décisions futures concernant la gestion de l’Etussa et les mesures de sécurité à renforcer au sein de l’établissement.

La rédaction

Retailleau mettra sa démission sur la table si Paris cède à Alger

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Bruno Retailleau
Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur.

Dans un entretien au journal Le Parisien publié ce samedi 15 mars, le ministre de l’Intérieur français Bruno Retailleau menace de quitter le gouvernement si Paris renonce à un rapport de force avec l’Algérie pour qu’elle accepte d’accueillir ses ressortissants en situation irrégulière en France.

Le très droitier Bruno Retailleau menace Emmanuel Macron. Il entend jouer sa carrière de ministre de l’Intérieur contre une faiblesse des autorités françaises dans leur crise avec l’Algérie.

Le refus de l’Algérie d’accepter ses ressortissants sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français, dont l’auteur d’un attentat qui a fait un mort à Mulhouse le 22 février, a fini d’envenimer des relations déjà très dégradées entre les deux pays depuis la reconnaissance en juillet par le président Emmanuel Macron de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.

« Tant que j’ai la conviction d’être utile et que les moyens me sont donnés, je serai mobilisé », fait valoir le ministre de l’Intérieur dans une interview au Parisien diffusée en ligne samedi 15 mars. « Mais », prévient-il, « si on me demandait de céder sur ce sujet majeur pour la sécurité des Français, évidemment que je le refuserais ». « Je ne suis pas là pour une place, mais pour remplir une mission, celle de protéger les Français », ajoute le ministre.

Bruno Retailleau, qui multiplie les déclarations virulentes contre Alger, notamment depuis l’incarcération mi-novembre de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, était interrogé sur le dossier algérien et « la riposte graduée » qu’il appelle de ses vœux si Alger n’acceptait pas de reprendre ses ressortissants en situation irrégulière en France.

« Je serai intransigeant et j’attends que cette riposte graduée soit appliquée »

Vendredi 14 mars, le gouvernement français a établi une première liste d’une soixantaine de ressortissants algériens qu’il souhaite expulser. « Au bout de la riposte, il y aura une remise en cause des accords de 1968 », affirme le ministre. « Je serai intransigeant et j’attends que cette riposte graduée soit appliquée. »

L’accord de 1968 donne un statut particulier aux Algériens en France, l’ancienne puissance coloniale, en matière de circulation, de séjour et d’emploi. Fin février, le Premier ministre François Bayrou a menacé de dénoncer cet accord si, dans un délai de six semaines, l’Algérie ne reprenait pas ses ressortissants en situation irrégulière. De son côté, Emmanuel Macron a joué la carte de l’apaisement en se disant « favorable, non pas à dénoncer, mais à renégocier » cet accord.

Début février, le chef de l’Etat algérien Abdelmadjid Tebboune avait dénoncé le « climat délétère » entre l’Algérie et la France, jugeant que les deux pays devaient reprendre le dialogue et avait appelé Emmanuel Macron à « faire entendre sa voix » en ce sens.

Dans cette affaire, tout le monde semble avoir oublié que la véritable raison de la crise diplomatique remonte à la reconnaissance par Emmanuel Macron du plan marocain pour le Sahara occidental. Tout le reste qu’une succession de malentendus nourris par l’extrême droite en France et une frange de nationalistes arabo-islamistes en Algérie. L’Espagne connut la même crise avec l’Algérie suite à son soutien au plan marocain pour le Sahara. Après le rappel de l’ambassadeur algérien et le gel des échanges économiques, l’Algérie finit, au bout de quelques mois, par revenir à de meilleurs sentiments sans que Madrid ne change de position. Ce qui n’est pas le cas avec la France dont le passé colonial est convoqué par Alger au moindre soubresaut. Wait and see.

Sofiane Ayache

Appel à un rassemblement le 19 mars contre les privilèges ! Contre l’arbitraire !

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Marche à Paris.
Image d'illustration de la marche du 30 juin 2019 à Paris

Trois organisations (une Alternative Démocratique en Algérie, Riposte Internationale et Révolution du Sourire) appellent à un rassemblement le 19 mars à 17h devant le consulat d’Algérie à Paris Nation.

Le 19 mars, date historique du cessez-le-feu marquant la fin de la colonisation française, est célébrée cette année dans un contexte particulièrement troublé. L’Algérie et la France, qui ont signé les accords d’Évian, sont aujourd’hui engagées dans une guerre diplomatique sans précédent.

Jamais l’histoire mal digérée entre les deux pays n’a été autant instrumentalisée, jamais autant d’algérophobie ne s’est exprimée d’un côté, et jamais, de l’autre, l’Algérie n’a autant dilapidé la grandeur de son capital symbolique révolutionnaire entre les mains de ceux qui se sont imposés comme ses représentants officiels.

Contrairement à ce qui est mis en lumière, les atteintes aux droits fondamentaux en Algérie ne se limitent pas à l’emprisonnement de Boualem Sansal. Des centaines de citoyen.nes sont injustement emprisonnés pour un simple post, un hashtag, un acte de solidarité. La répression ne date pas de quelques semaines : elle broie, depuis des années, des milliers de vies dans une indifférence complice.

Au fil des décennies, la relation algéro-française a périodiquement connu des tensions. La séquence actuelle en est l’une des plus aiguës. Derrière les postures officielles, des jeux occultes expliquent sa nature crisogène.

On évoque des révélations sur les privilèges octroyés aux décideurs algériens, mais dans les faits, peu de choses encore transparaissent. Biens mal acquis, passe-droits, statuts d’exception : la nomenklatura algérienne et ses familles ont plus bénéficié de ce qui relève d’une tactique d’un deal que de la rigueur attendue d’un État de droit.

Alors que de nombreux non ayants-droit proches du régime sont bénéficiaires d’un passeport diplomatique exempt de visa, la liberté de circulation aux frontières n’est plus garantie aux autres citoyens algériens, générant de l’appréhension à chaque voyage. Nombre de militants de l’opposition établis à l’étranger font l’objet de menaces et de chantage pour renoncer à leur activité politique pacifique en échange du respect de leur droit à la liberté de circulation.

En cette date symbolique, nous dénonçons les privilèges scandaleux dont jouit en France l’élite du régime algérien, avec la complaisance traditionnelle des autorités françaises. Nous réaffirmons notre espérance d’une relation claire et apaisée entre l’Algérie et la France : une relation d’État à État, fondée sur la transparence et l’intérêt commun, et non sur des compromissions et des faveurs indues.

Nous appelons à un rassemblement ce 19 mars 2025 devant le consulat d’Algérie à Paris Nation, à 17 h, pour :

  • La libération de tous les détenus d’opinion
  • Le respect de la garantie de la liberté de circulation aux frontières
  • Une transition démocratique et l’instauration d’un État de droit respectueux des libertés 
  • La fin des privilèges honteux et abusifs de la caste au pouvoir et de la gestion par la corruption
  • Une diplomatie légitime, au service du peuple et œuvrant pour ses intérêts
  • Une relation entre l’Algérie et la France apaisée, tournée vers l’avenir sans renier le passé et œuvrant dans l’intérêt mutuel des deux pays

Signataires

Pour une Alternative Démocratique en Algérie – Riposte Internationale – Révolution du Sourire 

Le 15 mars 1962, le fils du pauvre entre au Panthéon

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Mouloud Feraoun

Le destin a voulu que la vie du grand homme doive s’arrêter aux portes de l’Algérie indépendante. C’était  comme pour signifier que l’incarnation de la culture et de l’espoir n’y avait plus sa place dans ce nouveau monde qui lui aurait tourné le dos tant il est l’opposé de ce qu’il fut.

Mouloud Feraoun, avant de se pencher sur sa dimension politique, fut celui qui a donné par son célèbre roman Le fils du pauvre la définition de la réussite par le mérite. Tout y était, le monde extérieur et celui de ses racines profondes.   

Né en 1913, Feraoun nait en Kabylie, dans le village de Tizi Hibel sous le nom de sa communauté des Ait Chabane. Il n’a pas été épargné par l’obligation d’une attribution d’un nom choisi par les administrateurs des Affaires indigènes pour un recensement des populations et de leur état civil en Kabylie comme dans de nombreux villages isolés en Algérie.

L’écolier aux pieds nus se révèle être un excellent élève. Comme pour Albert Camus, il doit à son maître de poursuivre ses études au cours complémentaire de Tizi Ouzou après son certificat d’études. Un diplôme qui était déjà une étape très improbable pour la quasi-majorité des « indigènes » dont seulement dix pour cent bénéficiaient d’une instruction scolaire.

Par son excellence et acharnement à progresser il passe le concours des bourses qu’il réussit, ce qui lui permet d’accéder à un cursus qui va l’amener jusqu’au brevet élémentaire puis au prestigieux concours de l’Ecole normale d’instituteurs qui fut ouvert aux indigènes depuis 1928.

Mouloud Feraoun est ainsi l’exemple de la parfaite assimilation dans les deux cultures dans un équilibre parfait. Il est resté l’enfant de la culture de sa terre natale aussi bien que celui de la culture française.

Dans le premier volet de sa célèbre trilogie, Le fils du pauvre, personne mieux que lui n’avait décrit aussi justement la situation d’un petit enfant de famille très modeste qui se hisse au sommet de la littérature par la force de son acharnement à y arriver. Le fils du pauvre, un titre qui est devenu l’hymne à l’espoir et la preuve que rien n’est prédéterminé si on veut y mettre sa farouche volonté.

La terre et le sang, second volet de la trilogie, va au-delà de son assimilation aux deux cultures qui vont le forger et faire apparaitre encore plus clairement sa thématique  fondamentale, celle qui traverse son œuvre, celle à laquelle il aspirait, le lien entre toutes les cultures et religions.

Dans ce roman il témoigne du drame que subissent tous ceux qui sont au carrefour de toutes les humanités. Il fut le premier écrivain à aborder la délicate question de l’intercommunicabilité, le premier à oser briser le tabou en clamant que seuls ceux qui doutent ou ne ressentent pas leurs racines ont peur de la différence, de l’autre.

Dans le troisième volet, Les chemins qui montent, le jeune homme Amer revient de France vers son village natal et tombe amoureux d’une orpheline convertie au christianisme par les Sœurs qui l’avaient recueillie. Son rival, autant amoureux de la jeune fille, devient son ennemi.

Il continue ainsi dans la souffrance de l’écartèlement entre les cultures. Cette fois-ci le personnage est un jeune homme qui revient dans son village natal accompagné par une femme française. On imagine ce qu’il en adviendra face à la stupéfaction d’une communauté qui reste fermée à une telle initiative d’ouverture d’esprit

Avec cette personnalité si forte et assumée qui s’est confrontée à tant de barrières, il restera pourtant toujours le gentil fils du pauvre. Parmi tous les commentaires qui ont été rédigés à propos de sa personne, j’en ai retrouvé deux particulièrement significatifs.

La premier est l’éloge de la grande résistante française et ethnologue reconnue, Germaine Tillon qui dans un article publié dans Le Monde dit “Cet honnête homme, cet homme bon, cet homme qui n’avait jamais fait de tort à quiconque, qui avait dévoué sa vie au bien public, qui était l’un des plus grands écrivains de l’Algérie, a été assassiné.” 

Puis celui de Jean Daniel, écrivain et éditorialiste né en Algérie, “Il était de ces êtres comme Camus les aimait : silencieux, fins et solides, accordés à la vie.”

Mouloud Feraoun écrira plus tard que la période essentielle dans sa vie aura été celle des trois années passées à l’école normale. Il fera la connaissance de celui qui restera son ami, un Oranais, d’origine presque aussi pauvre, fils d’ouvrier, Emmanuel Roblès. De plus en plus inséré et admiratif de la culture française c’est à ce moment qu’il découvre la politique avec un autre de ses camarades, Ahmed Smaïli, qui dirigeait une section du parti communiste à l’école normale. Ce dernier animait le journal interne La lutte sociale. L’activité militante de ce dernier lui a valu un renvoi.

Et voilà Mouloud Feraoun piqué au virus de la politique en étant le disciple de son camarade. Devenu instituteur et marié, un second événement entre beaucoup d’autres va marquer son parcours, celui de sa lecture d’un reportage d’Albert Camus dans Alger républicain sous le titre « Misère de la Kabylie ». Il fut très critique envers le grand écrivain car il estimait que celui-ci passait sous silence les événements d’Algérie. Il lui écrivit en manifestant ce sentiment de déception.

Mais Mouloud Feraoun s’est lui aussi mis en situation d’être critiqué pour son attentisme. Les chemins qui montent vont effacer le doute sur son sentiment nationaliste face à la colonisation. Je pense personnellement que son profond attachement et admiration de la culture française n’était pas étranger à cette hésitation des débuts. Si ce n’est pour la conviction, certainement déjà présente dans son réveil précédent à la politique, au moins pour la modestie de son engagement.

En 1955, il dirige secrètement un journal dans lequel il dénonce la répression de la colonisation mais aussi celle du FLN auquel il n’adhère pas. C’est donc dans une position de relative neutralité qu’il aborde ce combat même s’il est désormais définitivement  rallié à l’idée d’une Algérie indépendante.

C’est lui-même qui déclarait en novembre 1958, « Je ne veux pas faire de politique. Jamais je n’en ferai. Ce n’est pas dans mes cordes ». En réalité tout son militantisme assumé prouve que c’était plus une position médiane que neutre. Elle était probablement, selon mon opinion, le résultat de son éternel désir d’alliance entre ses deux identités. J’en conclus qu’il voulait éviter la rupture des liens culturels tout en voulant la rupture du lien politique.

Dans cet état d’esprit, il fut très optimiste après la déclaration d’intention du Général de Gaulle. « La sagesse refusera l’intégration, comme on refuse une duperie, la sagesse accordera l’indépendance pour confondre toutes les folies, réparer toutes les erreurs, faire oublier tous les crimes. De Gaulle est un sage. Ça, je le crois. »  Ce qui ne laisse encore une fois aucun doute sur son sentiment politique tout en accordant une chance au maintien des liens.

Il refuse ensuite un poste au Quai d’Orsay puis collabore avec Germaine Tillon dont nous avons déjà fait référence pour une implication dans des centres sociaux.

Ce qui est arrivé devait se produire, la suspicion a été à l’égale de son parcours d’intellectuel et militant, il sera accusé des deux côtés, lui qui a voué toute sa vie à la communion des cultures.

Le fils du pauvre sera assassiné par des sicaires de l’OAS le 15 mars 1962 alors qu’il venait d’accéder à la dignité d’inspecteur des centres sociaux. Sa mort le fera accéder à plus haut, le Panthéon algérien des grands hommes.

Boumediene Sid Lakhdar

Tensions entre l’Algérie et le Maroc : l’eau d’oued Guir, nouveau point de friction

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Eau
L'eau, une source d'un énième conflit entre l'Algérie et le Maroc

Les tensions entre l’Algérie et le Maroc connaissent un nouvel épisode, cette fois autour d’un enjeu stratégique majeur : l’eau. Alors que les deux pays s’opposent déjà sur plusieurs fronts, notamment sur la question du Sahara occidental, c’est désormais la gestion des ressources hydriques transfrontalières qui attise les crispations.

L’oued Guir, une rivière au cœur du conflit

L’oued Guir, qui prend sa source dans le Haut Atlas marocain avant de traverser la frontière pour alimenter le sud-ouest algérien, est aujourd’hui au centre d’un différend croissant entre Alger et Rabat. Selon le journal Le Monde, l’Algérie accuse le Maroc d’exploiter excessivement cette ressource en amont, réduisant ainsi le débit en aval et aggravant la crise hydrique dans certaines régions algériennes.

L’élément déclencheur de cette dispute est la construction du barrage de Kaddoussa par le Maroc, d’une capacité de 220 millions de mètres cubes. Alger estime que cet ouvrage diminue l’approvisionnement en eau du barrage de Jorf Lasfar, une infrastructure essentielle pour la région de Béchar. Les médias algériens évoquent une « catastrophe environnementale », signalant la mort de poissons, la migration des oiseaux et des restrictions sévères d’accès à l’eau pour les populations locales. Certains quartiers de Béchar ne recevraient de l’eau qu’une fois tous les dix jours, selon le journal El Watan. Ce conflit rappelle un autre celui qui oppose l’Egypte et le Soudan au sujet de la rivière Nil.

L’Algérie interpelle la communauté internationale

L’Algérie a porté cette affaire devant plusieurs instances internationales. En mai 2024, lors du Forum mondial de l’eau, le ministre algérien de l’Irrigation, Taher Derbal, a dénoncé un « assèchement délibéré et systématique » causé par « les pratiques des pays voisins ». Quelques mois plus tard, en octobre, lors d’une réunion en Slovénie consacrée à la protection des ressources hydriques transfrontalières, Alger a accusé Rabat d’« obstruer » et de « détruire les eaux de surface partagées ».

Réactions contrastées et guerre médiatique

Au Maroc, les accusations algériennes sont perçues comme une tentative de détourner l’attention des problèmes de gestion de l’eau en Algérie. Le site marocain Le 360 (proche du Palais royal) affirme que « le régime algérien attaque le Maroc pour dissimuler sa gestion désastreuse de l’eau », tandis que Parlement accuse Alger de « politiser » tous les sujets, des questions environnementales aux événements sportifs.

De leur côté, les autorités marocaines restent discrètes et poursuivent leur politique de construction de barrages. Le royaume compte actuellement 154 barrages en exploitation et une vingtaine en construction.

Des enjeux économiques sous-jacents

Derrière ce conflit hydrique se cachent des intérêts économiques majeurs. L’Algérie a lancé des projets industriels ambitieux nécessitant d’importantes quantités d’eau, notamment le complexe ferrifère de Béchar, qui dépend du barrage de Jorf Lasfar pour le traitement du minerai de fer extrait de la mine de Ghar Djebilet.

De son côté, le Maroc développe l’agriculture irriguée, en particulier dans la région de Boudenib, située en aval du barrage de Kaddoussa. La culture du palmier-dattier s’y intensifie, soutenue par des investissements dans les systèmes d’irrigation artificiels.

Un impact environnemental et scientifique nuancé

Selon un chercheur français cité par Le Monde, le Maroc utilisait auparavant environ 8 millions de mètres cubes d’eau par an grâce aux systèmes d’irrigation traditionnels. Avec le barrage de Kaddoussa, ce chiffre est monté à 30 millions de mètres cubes. Toutefois, l’expert souligne que l’oued Guir reçoit d’autres affluents, ce qui limite l’impact global sur les ressources algériennes.

Une rivalité persistante entre Rabat et Alger

Cette crise s’inscrit dans un contexte de tensions diplomatiques exacerbées entre les deux pays. Depuis la rupture officielle des relations diplomatiques par l’Algérie en 2021, les désaccords se multiplient, notamment sur le dossier du Sahara occidental. Cette « guerre de l’eau » s’ajoute désormais aux nombreux contentieux qui opposent les deux voisins.

L’escalade rhétorique et médiatique autour de l’oued Guir illustre une fois de plus la fragilité des relations entre Alger et Rabat, et souligne l’importance croissante des ressources hydriques comme enjeu géopolitique majeur en Afrique du Nord.

Samia Naït Iqbal

« Le Seigneur des rats » : une dystopie visionnaire renaît en bande dessinée

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Le seigneur des rats

Le 15 mars en Tunisie, puis le 28 mars en France, paraîtra Le Seigneur des Rats, une bande dessinée exceptionnelle qui revisite une œuvre phare de la littérature carcérale tunisienne.

Publiée par Nirvana Éditions en Tunisie et par Alifbata en France, cette adaptation graphique est le fruit d’une rencontre entre deux figures majeures de la Tunisie contemporaine : le dessinateur de presse et cyberactiviste Z. et l’intellectuel et militant Gilbert Naccache.

Ce projet a pu voir le jour grâce à l’implication d’Azza Ghanmi, veuve de Gilbert Naccache, militante engagée. Elle a joué un rôle clé dans la publication de l’ouvrage, permettant à cette œuvre d’être redécouverte sous une nouvelle forme et de toucher un public plus large.

Une rencontre entre deux esprits engagés

Dans le paysage politique et intellectuel tunisien, rares sont les figures aussi marquantes que Gilbert Naccache. Ancien militant de gauche, prisonnier politique sous Bourguiba, écrivain et observateur aiguisé de la société tunisienne, il a laissé une empreinte indélébile sur la mémoire collective. Parmi ses écrits, la nouvelle Le Seigneur des Rats, rédigée en prison en 1976 et publiée en 2005 dans Le Ciel est par-dessus le toit, se distingue par sa puissance allégorique et sa portée visionnaire.

C’est en détention que Naccache a imaginé cette histoire, inspirée par un mystérieux rat venu s’inviter dans sa cellule. Ce récit est un miroir des dérives autoritaires qui gangrènent les sociétés, une réflexion sur le pouvoir et la servitude.

Face à lui, Z., connu pour son blog Débat Tunisie, incarne une nouvelle forme de contestation : celle du dessin satirique. Son flamant rose, figure emblématique de son univers graphique, observe l’actualité politique avec un regard acéré et un humour corrosif. L’adaptation de cette nouvelle dystopique en bande dessinée devient ainsi un dialogue entre deux générations d’engagement, entre la plume du prisonnier et le crayon du caricaturiste.

Un récit d’anticipation troublant

« Je suis sûr de ne pas avoir rêvé. Pourtant… les événements de la nuit dernière m’ont laissé une impression angoissante, comme s’ils annonçaient autre chose de plus terrifiant encore… »

Ainsi s’ouvre la première page d’un vieux carnet manuscrit retrouvé sur une plage, dans une boîte à pharmacie. Il y est question d’un professeur d’histoire, d’un chat nommé Nénuphar et de rats — beaucoup de rats. Quelle est cette invasion soudaine de rongeurs décrite dans le carnet ? Et comment, au fil des pages, échappe-t-elle à tout contrôle ?

Le Seigneur des Rats plonge le lecteur dans une dystopie où un régime autoritaire exerce un contrôle total sur la population, manipulant les foules et instaurant un climat de peur. Écrite il y a près d’un demi-siècle, l’œuvre de Naccache résonne aujourd’hui avec une acuité troublante, alors que la Tunisie traverse une période d’incertitude politique marquée par des restrictions croissantes des libertés.

Z., à qui Gilbert Naccache avait confié l’adaptation graphique de sa nouvelle avant sa disparition, se réapproprie ces pages visionnaires avec brio. Son trait incisif amplifie la force du récit, faisant de cette bande dessinée une œuvre percutante qui fait écho aux catastrophes actuelles et aux dérives autoritaires des sociétés contemporaines.

Une sortie événement

Distribuée par MAKASSAR, Le Seigneur des Rats sera disponible en Tunisie dès le 15 mars, puis en France à partir du 28 mars. Cette double sortie souligne l’importance du livre dans le contexte tunisien tout en lui offrant une reconnaissance bien au-delà des frontières.

Des rencontres et événements accompagneront cette publication, notamment en Tunisie, où la mémoire de Gilbert Naccache reste vive et où Z. continue d’animer le débat politique par son trait incisif.

Avec Le Seigneur des Rats, une part essentielle du patrimoine contestataire tunisien refait surface sous une forme accessible et contemporaine. Grâce à l’engagement d’Azza Ghanmi, cette œuvre bénéficie d’un écrin éditorial à la hauteur de son message. Un livre à lire, à partager et à méditer.

Djamal Guettala

Nos communs malheurs : lettre de Mouloud Feraoun à Albert Camus

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Mouloud Feraoun.
Mouloud Feraoun, un écrivain de cœur et de talent. assassiné par l'OAS

En mars 1962, la politique de la terre brûlée menée par l’OAS venait d’atteindre le sommet de l’horreur avec l’assassinat, le 15 de ce mois, de Mouloud Feraoun, à tout juste 49 ans, avec cinq collègues des Centres sociaux.

Parler de Dda El Mouloud c’est plonger dans les souvenirs de nos premiers livres d’école, lesquels contenaient de nombreux textes de notre écrivain. Dès les premières années de scolarité, nous étions déjà bien imprégnés des personnages du « Fils du pauvre ». Coincés entre « Nos ancêtres les gaulois » et « Ces femmes roulent le couscous » défilaient gaiement les personnages Fouroulou, Ramadan, Lounis, Tassadit, Fatma, Baya, Nana, Halima, etc. L’éveil de nos consciences venait de commencer. Nous ne nous endormirons plus.

La biographie de Dda El Mouloud est largement présente sur internet. Nous ne la reproduirons donc pas, préférant nous focaliser sur ses échanges avec Albert Camus, le fils de l’autre pauvre. La lettre de 1958 est particulièrement révélatrice de la colère qui gagnait notre écrivain, à l’approche de la fin de la guerre :

La source de nos communs malheurs (lettre à Albert Camus)

Par Mouloud Feraoun

Je suis, peut-être, moins surpris que vous-même du silence qui entoure votre dernier livre et finira par l’étouffer. Auriez-vous, par hasard, le désir d’éteindre l’incendie en faisant la part du feu, prétendriez-vous interposer entre ceux qui se battent au lieu d’encourager les vôtres tout en cherchant à décourager les miens ?

Avouez, monsieur, que si votre attitude étonne, l’accueil réservé à votre ouvrage n’a, lui, rien de surprenant, car si depuis quatre ans on a cessé de réclamer, de solliciter, d’exiger votre opinion, il est clair que cette opinion, en fin de compte, devait être celle de tous, fermement installée dans les têtes, dans les cœurs — les ventres, ajouterai-je. Il est clair qu’on vous demandait de condamner les uns, d’approuver les autres, même de trouver quelques bonnes raisons pour cela. Quelques bonnes raisons qui auraient échappé jusqu’ici, parce que vous êtes un grand esprit, que c’est une grande chose pour la France d’avoir des hommes tels que vous et une veine pour les politiciens de s’appuyer sur vos arguments. On ne vous demandait rien d’autre. Qu’avez-vous fait, monsieur ?

Non seulement vous dites ce que vous pensez de ce que l’on a décidé d’appeler le problème algérien mais vous pensez juste et vous dites bien. Et cette pensée juste vous a conduit précisément à refuser d’approuver les vôtres et de condamner les miens.

Voilà pourquoi, monsieur, de cette Algérie qui souffre, que vous aimez bien, vous du moins, je vous adresse un salut amical, avec toute l’admiration que l’on doit à un esprit lucide, à un homme courageux.

N’ayant ni votre talent ni votre courage, pourrais-je garder l’anonymat afin de dire, à mon tour, très brièvement, très simplement mais en toute franchise, ce que je pense de ce problème ? Sachez pourtant que je suis instituteur « arabe », que j’ai toujours vécu au cœur du pays et depuis quatre ans au centre du drame. Le mot « arabe » n’est d’ailleurs pas très exact. Pourquoi ne pas préciser après tout ?

Il me revient à la mémoire une anecdote qui remonte au 9 mai 1945. C’était en Alsace. Pour annoncer les événements qui, la veille, avaient commencé d’ensanglanter le constantinois, un journal local étalait ce titre en première page et en gros caractères : « Révolte arabe des kabyles ! » Mettons que vous recevez aujourd’hui une lettre arabe d’un kabyle et vous avez du même coup toutes les précisions désirables.

En 1958, je sais, on s’intéresse davantage à l’Algérie. Mais hélas ! à l’Algérie seulement, le Sahara avec, bien entendu. En tout cas, on ne s’intéresse aux arabes ou aux kabyles que pour les tuer, les mettre en prison, les pacifier ou, depuis quelque temps, pour intégrer leurs âmes, dans la mesure où ils en ont une de soigner leurs corps souffreteux, plus ou moins couverts, plus ou moins couverts de loques.

Vous êtes bien jeune, monsieur, quand le sort des populations musulmanes vous préoccupez déjà. À cette époque-là, moi qui suis de votre âge, je m’exerçais à faire correctement ma classe et je gagnais sans doute plus que vous. Vous étiez bien jeune et votre voix bien faible, il m’en souvient. Lorsque je lisais vos articles dans Alger Républicain, ce journal des instituteurs, je me disais : « Voilà un brave type. » Et j’admirais votre ténacité à vouloir comprendre, votre curiosité faite de sympathie, peut-être d’amour. Je vous sentais tout près de moi, si fraternel et totalement dépourvu de préjugés ! Mais déjà aussi, je vous assure, je ne croyais pas en vous, ni en moi-même, ni en tous ceux qui s’intéressaient à nous et qui étaient si peu nombreux ; car tout le mal qui pouvait nous venir des autres, personne n’avait pu l’empêcher d’être fait. À cette époque-là, enfin, nous avions conscience de notre condition de vaincus et d’humiliés et depuis longtemps nous ne tenions plus que le langage de vaincus, tandis que les vôtres, tout naturellement, tenaient plus que jamais le langage de vainqueurs. Non pas que nous ayons renoncé à tout espoir, mais le salut, nous ne l’attendions plus que de l’imprévisible — ou de l’inéluctable, ou encore du temps qui s’écoule. Nous en étions là, tous les résignés, préoccupés des seuls soucis de l’heure, du seul combat pour une existence difficile. Il y avait parmi nous des privilégiés, oui, des instituteurs par exemple. Ils étaient satisfaits, respectés et enviés. Ils s’appliquaient à bien conduire leurs leçons en vue d’obtenir de beaux succès au certificat d’études.

Mais ce langage de vaincus, nous vous le tenions comme une réplique définitive à votre langage de vainqueurs. Cela nous permettait de solliciter des réformes et le droit de vous ressembler. Lorsque vous vous en êtes rendu compte, vous, Albert Camus, le cri pathétique que vous avez poussé et qui vous honore à jamais n’a pas été entendu. Non seulement on n’a rien voulu entendre mais on vous a chassé de ce pays qui est le vôtre, parce que vous étiez devenu dangereux. Plus dangereux que les vaincus que personne ne prenait au sérieux.

Ces privilégiés, à vrai dire, que l’on pourrait appeler des semi-évolués, des évolués ou enfin des intellectuels, étaient à mi-chemin entre vous et les leurs, chacun sait qu’ils ne demandaient qu’à venir à vous, à s’assimiler tout à fait, fût-ce au prix de quelque ultime reniement, de quelque dernière humiliation, mais, de toute manière, une fois au sein de la famille adoptive, un peu de patience aurait arrangé les choses et, aux nouvelles générations, il eût été facile de perdre tout complexe, de se débarrasser de toute arrière-pensée, de perdre leur personnalité pour ainsi dire.

Mais, à côté des bourgeois et des gens instruits, des camelots vagabonds qui avaient parcouru la France et des ouvriers de Saint-Denis ou d’ailleurs, il y avait la masse que vous ignoriez et qui vous le rendait bien. Cette masse ne faisait pas que vous ignorez : l’ignorance était son état.

À cette époque, monsieur, la femme du Djebel ou du bled, quand elle ne voulait pas effrayer son enfant pour lui imposer silence, lui disait : « Tais-toi voici venir le Bouchou ». Bouchou, c’était Bugeaud. Et Bugeaud, c’était un siècle auparavant ! Nous étions encore là, en 1938, alors que, de votre côté, vous écriviez cette page que je ne peux m’empêcher de reproduire comme le plus solennel avertissement qu’un homme de cœur ait pu donner à son pays :

« Les Kabyles réclament des écoles comme ils réclament du pain… Les Kabyles auront plus d’écoles le jour où on aura supprimé la barrière artificielle qui sépare l’enseignement européen de l’enseignement indigène, le jour enfin où, sur les bancs d’une même école, deux peuples faits pour se comprendre commenceront à se connaître. »

 » Certes, je ne me fais pas d’illusions sur le pouvoir de l’instruction. Mais ceux qui parlent avec légèreté de l’inutilité de l’instruction en ont profité eux-mêmes. En tout cas, si l’on veut vraiment d’une assimilation, et que ce peuple si digne soit français, il ne faut pas commencer par le séparer des français. Si j’ai bien compris, c’est tout ce qu’il demande. Et mon sentiment, c’est qu’alors seulement la connaissance mutuelle commencera. Je dis ‘commencera’ car elle n’ a pas été faite. « 

Ainsi, il y a vingt ans, deux communautés vivaient côte à côte depuis un siècle, se tournant délibérément le dos, totalement dépourvues de curiosité et, de ce fait, aussi peu susceptibles de se comprendre l’une que l’autre, n’ayant de commun que leur mutuelle indifférence, leur entêtement à se mépriser et cet inhumain commerce qui lie le faible au fort, le petit au grand, le serviteur et le maître.

Telle était la situation. Telle restera jusqu’au début de la révolte.

Ceux qui étaient « assimilables » étaient aussi des utopistes croyant pouvoir s’évader de leur condition pour adopter la vôtre. Mais ni la cravate ni le complet ne firent oublier chechia et saroual dans un pays où il n’y avait rien d’autre. Pour bien faire, il eût fallu, au contraire, que le costume disparût pour laisser place à la gandoura et au seroual et le peuple algérien, tout entier en burnous, eût à coup sûr retrouvé son unité : celle qu’il avait eue au long des siècles, en dépit des divisions intestines, de la multitude des langages et de la diversité des genres de vie. Car il y avait bien cette unité nord-africaine imposée au moins par le climat, le milieu, la nécessité de vivre dans cette « île de l’occident », et que ni les Phéniciens, ni les Romains, ni les Vandales, ni les Arabes ne réussirent à disloquer. Tous ces conquérants, au contraire, s’adaptèrent au soleil du Maghreb, aux steppes de ses plateaux, à la rude existence des montagnes, s’amalgamèrent, fusionnèrent dans le désordre, les disettes et l’anarchie, si bien que lorsque les français arrivèrent, ils ne trouvèrent qu’un seul peuple. Ils purent sans doute s’aimer ou se détester mutuellement, s’allier ou s’entre-déchirer avec toute la cruauté dont l’homme est toujours capable. Il y eut sans doute des castes, des privilégiés, des vaincus et des vainqueurs. Mais tout cela se passait entre eux, se trouvait entre eux, les unissait au moment même où ils se dressaient les uns contre les autres : affaires intérieures auraient à l’ONU les grands stratèges des deux mondes !

En réalité, il n’y avait d’autre assimilation possible que celle des nouveaux par les anciens et cette assimilation, dans l’ordre naturel des choses, a commencé de se faire à notre insu et malgré vous. Peu à peu, depuis un siècle, le peuple algérien d’origine européenne s’est détaché de l’Europe au point de devenir méconnaissable et de ne plus ressembler qu’à lui-même, je veux dire aux autres Algériens qu’il méprise mais dont il partage l’accent, les goûts et les passions.

Aujourd’hui, je sais comme vous, cher monsieur, que les Français d’Algérie « sont, au sens fort du terme, des indigènes ». Je souhaite seulement qu’ils en aient conscience et qu’ils n’accusent pas trop la France lorsqu’il lui arrive de les oublier, parce que chaque fois que « la mère-patrie » répond à l’appel de ses enfants abandonnés, c’est pour tancer vertement ces autres indigènes qu’elle n’a jamais voulu adopter et qui, dans le fond, n’ont jamais cru à une impossible filiation.

Impossible, pourquoi ? Parce que la seule condition qui l’aurait rendue effective n’a jamais été réalisée : celle qui aurait consisté à transplanter purement et simplement les Algériens en France pour en faire des Français. Car un Algérien, en Algérie, quel que soit son origine, ne saurait être qu’un Algérien.

L’erreur de la France, je crois, c’est d’avoir voulu faire des Algériens des Français par devoir. Nous, les vaincus, il a bien fallu que nous nous inclinions, mais vous qui êtes ses enfants, vous réclamiez aussi vos prérogatives, vous les obteniez à nos dépens, vous les exerciez sur nous, et cette démocratie, qui vous autorisez à demander justice, devenait pour nous une tyrannie.

Mon propos n’est pas de dresser aujourd’hui un nouveau réquisitoire contre un régime dont tout le monde connaît les tares et que, pour ce qui vous concerne, votre vie, de même que votre œuvre tout entière ont totalement condamné. Je ne voudrais pas non plus accabler mes compatriotes d’origine européenne qui, je sens, je le pense, en dépit des cruelles apparences, sont aussi près de moi que n’importe quel autre habitant de ce pays. Mais il faut bien reconnaître qu’ils ont tiré tout bénéfice d’une ambiguïté soigneusement entretenue, que nous n’avons jamais eu la possibilité de dénoncer, nous contentant, avec plus ou moins de véhémence, plus ou moins d’illusions, plus ou moins de bonheur, de réclamer notre part de ce bénéfice comme prix de notre attachement (forcé) à la France. Cette équivoque, à mon avis illégitime, est la source de nos communs malheurs.

Lorsque les Algériens d’origine européenne nous disent qu’ils sont Algériens, nous entendons qu’ils sont d’abord Français, puis Algériens de surcroît. Voilà ce que nous comprenons, ce que depuis toujours ils ont voulu nous faire entendre. En vertu de quoi ils sont les maîtres. En vertu de quoi, aussi, répétons-le, toute contestation inquiétante de notre part les fait se tourner vers la métropole qui, consciente de ses devoirs, vient consolider leur position.

« Les Arabes peuvent du moins se réclamer d’une appartenance non à une nation, mais à une sorte d’empire musulman, spirituel ou temporel. » Que reste-t-il d’autre à faire ? Toute fois leur ambiguïté, à eux, ne confère aucun pouvoir réel, n’en conférera sans doute jamais.

Lorsque le musulman dit qu’il est Algérien, chacun sait qu’il n’est que cela. Mais cela même, il ne l’est que dans une certaine mesure qui marque son infériorité et l’habille irrémédiablement comme d’une livrée étroite.

Mais il n’est pas nécessaire de supposer puisque tout se passe comme si l’Europe avait confié à la France le soin de veiller sur ses enfants, comme si la France était chargée de veiller sur les chrétiens et les juifs, dans un pays où la majorité est musulmane. Pour notre part, nous ne pouvons lui en vouloir, car, à côté de cette mission qui la diminue à nos yeux, elle en a rempli une autre plus grande et plus belle auprès de nous, une noble mission qui fera que toujours, malgré tout, nous serons à notre manière des enfants.

Si nous poussons la simplification jusqu’à son expression irréductible, nous dirons qu’il y a d’une part une communauté plus importante qui voudrait demeurer française en droit sinon en fait, d’autre part une communauté plus importante qui demande à être pleinement ce qu’elle est.

Le problème ainsi posé peut apparaître aux uns comme une absurdité, aux autres comme une lapalissade mais, depuis quatre ans, il nous a précipités dans un drame affreux dont tout le monde fait les frais.

Oui, monsieur, devant l’ampleur de ce drame et son injustice, devant les souffrances de notre peuple, sa destruction qui pourrait aboutir à son extermination, on voudrait renoncer à son orgueil, à sa susceptibilité, on voudrait renoncer à être Algériens-Français, ou Algérien tout court, ou même Français, pour être simplement humain, cesser de tuer, cesser de détruire, recommencer d’aimer. Devant la cruauté et le mensonge déchaînés sur l’homme devenu innocent parce qu’il n’arrive plus à comprendre, on voudrait renoncer à tout pour que se taise définitivement la bête et que soit réhabilité l’homme. Mais de quelque côté que se tourne désespérément le regard, nous ne voyons pas l’issue de l’insondable tunnel où nous voilà tous plongés.

Il est possible après tout que les stratèges aient raison et que s’accomplisse la conquête, ou la reconquête, même au prix de l’extermination.

Il est possible aussi que le peuple des villes, des djbels et des campagnes, à la fois l’enjeu et le champ de bataille des nobles idées qui s’affrontent et au nom de quoi on le piétine sans pitié, il est possible que ce peuple, las d’être martyrisé, prenne sur lui, un jour, de refuser la souffrance ; cela ne voudra nullement dire qu’il accepte les nobles idées des uns et rejette désormais celles des autres : le problème restera entier et d’autres générations auront à le poser à leur tour.

Ne vaudra-t-il pas mieux éviter de leurrer et de se leurrer en assumant loyalement la tâche de combattre soi-même son propre malheur ? Ne vaudra-t-il pas mieux tenter de créer les conditions d’une véritable fraternisation qui n’aurait rien à voir avec celle du 13 mai ?

Cette tâche, ce n’est pas aux stratèges de l’accomplir, mais aux Algériens eux-mêmes, tous ceux qui se piquent d’avoir de nobles idées. Et qui feraient d’abord leur examen de conscience.

M. Feraoun

« La source de nos communs malheurs », lettre à Albert Camus, Preuves, Paris, Congrès pour la liberté de la culture, n. 91, septembre 1958.

On ne peut lire un texte aussi lucide sans avoir une pensée pour Boualem Sansal, assassiné à petit feu, sous nos yeux impuissants, par les héritiers de l’OAS.

Kacem Madani

100 Algériens expulsables : un test de fermeté française face aux autorités algériennes

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Centre de rétention administrative

La France s’apprête à transmettre aux autorités algériennes une liste de ressortissants qu’elle souhaite expulser vers leur pays d’origine. Selon l’Agence France-Presse (AFP), cette liste concernerait moins de 100 personnes  considérées comme présentant un risque sur  l’ordre public.

Une première liste de 80 noms, sur plusieurs centaines de ressortissants «dangereux» à expulser en priorité, transmise par la France, rapporte le Figaro.

Mais au-delà des chiffres, cette démarche revêt une dimension stratégique pour Paris, qui entend tester la volonté d’Alger de coopérer sur les expulsions de ses ressortissants en situation irrégulière.

Un premier test de fermeté pour Paris

Depuis plusieurs mois, le gouvernement français affiche sa volonté d’accélérer les expulsions, notamment en direction de l’Algérie, qui constitue l’un des principaux pays d’origine des étrangers en situation irrégulière en France. Cette nouvelle liste s’ajoute à celle de 700 personnes en détention administrative annoncée récemment par le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. Au total, Paris souhaiterait expulser près d’un millier de ressortissants algériens.

En transmettant cette première liste, la France entend jauger la réaction d’Alger et tester l’efficacité de son nouveau discours de fermeté. Pour Paris, l’acceptation rapide de ces expulsions par l’Algérie constituerait un signal positif, témoignant d’une volonté de coopération. À l’inverse, un refus ou une inertie prolongée placerait la relation franco-algérienne dans une impasse.

Un risque de blocage du côté algérien

«Cette liste sera un moment de vérité. Soit l’Algérie accepte ces accords […] soit, elle ne le fait pas, et nous mettrons en œuvre […] la stratégie de riposte graduée qui peut aller jusqu’à la remise en cause de l’ensemble de nos accords» a insisté Bruno Retailleau, le ministre de l’Intérieur français. Il a affirmé que «c’est un principe de réciprocité, de respect mutuel qui doit nous guider».

Or, les premières réactions algériennes laissent présager une fin de non-recevoir. L’Algérie a récemment décidé de suspendre toute coopération consulaire liée à ses ressortissants détenus ou en situation irrégulière en France. Cette mesure, qui concerne trois consulats à Nice, Marseille et Montpellier, complique l’identification des personnes à expulser et retarde l’émission des laissez-passer consulaires indispensables à leur renvoi.

Le gouvernement algérien refuse catégoriquement d’accueillir des ressortissants expulsés sans un examen minutieux de leur situation. Les exigences algériennes ne sont pas dénuées d’arrière-pensées évidemment. Cette position constitue un obstacle majeur à la politique française, qui repose sur une coopération active des pays d’origine.

Un énième bras de fer diplomatique en perspective

Dans ce contexte, la France met Alger face à ses responsabilités. Le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Noël Barrot, a récemment rappelé que le refus de l’Algérie d’accueillir ses citoyens en situation irrégulière constitue une violation des accords bilatéraux. Il a insisté sur la nécessité d’un dialogue clair et ferme pour éviter une détérioration des relations entre les deux pays.

La pression monte également du côté du Premier ministre français, François Bayrou, qui a menacé fin février de révoquer l’accord franco-algérien de 1968 si Alger ne faisait pas preuve de davantage de coopération dans les six semaines. Cet accord a, en réalité, été vidé au fil du temps de l’essentiel de son contenu.

Face au risque d’un blocage persistant, le président Emmanuel Macron a tenté d’adopter une posture plus mesurée, se déclarant favorable à une « renégociation » de cet accord plutôt qu’à son annulation pure et simple.

Un enjeu diplomatique majeur

Ce bras de fer autour des expulsions constitue un test crucial pour la politique migratoire française. Un refus algérien affaiblirait la crédibilité du gouvernement dans sa volonté de fermeté et compliquerait ses relations avec d’autres pays d’Afrique du Nord. À l’inverse, une coopération algérienne ouvrirait la voie à une gestion plus fluide des retours, tout en apaisant les tensions diplomatiques.

Dans les jours à venir, la réponse d’Alger sera donc scrutée de près. Elle déterminera non seulement l’avenir des expulsions, mais aussi l’évolution des relations entre la France et l’Algérie sur un sujet hautement sensible.

Au-delà de ces affrontements diplomatiques, il est pour le moins curieux qu’un pays n’accepte pas l’accueil de ses citoyens expulsés par un autre pays ! En tout cas s’il y a des bénéficiaires de cette crise, ce sont bien tous les délinquants algériens vivant en France.

Samia Naït Iqbal

Grande Mosquée d’Alger : pris la main dans le sac… ou plutôt le pied dans la chaussure !

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Grande Mosquée d'Alger

C’est une histoire qui aurait pu passer inaperçue… si elle ne s’était pas déroulée dans l’un des lieux les plus sacrés d’Algérie ! La Grande Mosquée d’Alger a été le théâtre d’un crime aussi cocasse qu’inattendu : un vol de chaussures en plein lieu de prière !

L’affaire commence lorsqu’un fidèle, probablement plus soucieux de la sécurité de ses pieds que de son âme à ce moment précis, se rend compte que ses précieuses chaussures de sport ont disparu. Ni une ni deux, il alerte le service de sécurité de la mosquée, déclenchant une véritable enquête policière… sur une paire de baskets !

Grâce aux caméras de surveillance (oui, même les chaussures sont sous haute protection !), les forces de sécurité ont rapidement mis la main sur le « Cendrillon » du jour, qui, au lieu de fuir avec ses souliers dérobés, s’est fait cueillir en plein cœur de la mosquée.

Le plus ironique dans cette histoire ? Le suspect n’a même pas eu le temps de profiter de son butin avant de se faire arrêter. En un temps record, il a été présenté devant le procureur pour répondre de son forfait.

Moralité : mieux vaut prier pour son salut que pour une nouvelle paire de chaussures… surtout sous l’œil vigilant des caméras !

Samia Naït Iqbal

France : que voulait faire le jeune arrêté par la DGSI ?

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policiers

Le suspect a été interpellé lundi près d’un établissement scolaire de Lure (Haute-Saône) alors qu’il était armé d’un couteau. Un adolescent de 17 ans est soupçonné d’avoir projeté une action violente « pendant le ramadan ».

Le jeune suspect a été mis en examen et placé en détention provisoire, jeudi 13 mars, conformément aux réquisitions du Parquet national antiterroriste (Pnat), a précisé le ministère public, qui avait ouvert une information judiciaire pour association de malfaiteurs terroriste criminelle. 

Il a été interpellé en possession d’un couteau

Le suspect a été repéré lundi par la gendarmerie devant un établissement scolaire de Lure (Haute-Saône), a appris franceinfo auprès d’une source proche du dossier. Il a été interpellé en possession d’un couteau de grande taille. L’enquête est dirigée dans un premier temps par le parquet de Vesoul, avant que le Parquet national antiterroriste ne se saisisse de l’affaire le lendemain. Le suspect de 17 ans a donc été placé en garde à vue mardi par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) jusqu’à sa présentation à un juge antiterroriste jeudi soir. Le Pnat a requis son placement en détention provisoire.

Le renseignement le surveillaient

Le suspect était connu des services de renseignement. Il était suivi par les renseignements territoriaux entre 2022 et 2024 au titre de la radicalisation, a appris franceinfo de source proche du dossier. Si ce suivi a été levé au début de l’année 2024, l’adolescent est ensuite revenu dans le viseur de la DGSI début mars 2025 à cause d’une conversation par messagerie cryptée où il laissait supposer son intention de passer à l’acte, a appris franceinfo auprès de cette même source.

Le suspect est très jeune, comme c’est désormais le cas dans la majorité des dossiers terroristes, a expliqué Céline Berthon, directrice générale de la DGSI, sur franceinfo. Depuis 2023, 70% des personnes interpellées pour terrorisme par la DGSI avaient moins de 21 ans.

« Mon client est mineur, c’est donc un enfant au sens de nombreuses conventions internationales »

, a réagi son avocat Réda Ghilaci. « C’est un enfant particulièrement fragile. Il n’est pas radicalisé et ses velléités de passages à l’acte relèvent d’une volonté de mettre fin à ses jours pour stopper un mal-être profond et non d’une volonté de commettre une action terroriste. »

L’enquête devra déterminer quelle était sa cible

Les cibles de l’adolescent, qui se revendique de l’organisation Etat islamique, ne sont pas connues avec précision à ce stade. « Les investigations à venir sur commission rogatoire permettront de confirmer les cibles exactes du projet d’action violente et son imminence », ajoute le Pnat dans un communiqué adressé à franceinfo et à l’agence Radio France.

Le maire de Lure, Eric Houlley, a tenu à « rassurer » la population, auprès de « ici Belfort-Montbéliard »(Nouvelle fenêtre). « J’accueille ça comme une nouvelle positive. Les forces de sécurité ont fait leur travail en déjouant, sans doute, une menace grave », a-t-il ajouté, évoquant un jeune « radicalisé ». La ville avait déjà été agitée par l’assignation à résidence d’un fiché S, frère d’un terroriste du Bataclan, finalement déplacé dans une autre commune fin février.

Il s’agit du premier projet d’action violente déjoué depuis le début de l’année 2025. Le début de l’année a aussi été marqué par deux attentats islamistes : en janvier, un Français de 32 ans avait blessé au couteau une personne en criant « Allah Akbar » dans un supermarché d’Apt (Vaucluse),et le 22 février, un Algérien de 37 ans a tué à l’arme blanche un passant et blessé six autres personnes près d’un marché à Mulhouse (Haut-Rhin).

Avec Francetvinfos

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