23 novembre 2024
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La pluie, le soleil et Bouteflika, Par Mohamed Benchicou

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Nous vous l’avions dit

La pluie, le soleil et Bouteflika, Par Mohamed Benchicou

 Devant ce qu’il faut bien appeler une catastrophe nationale, cette dégringolade vertigineuse des prix du pétrole, le régime algérien s’affole. N’ayant pas les réponses au drame qui s’annonce, il interdit les questions. 

C’est simple, efficace et sans appel ! Mouloud Hamrouche aurait dû y penser avant de programmer sa conférence à Sidi Bel Abbès. Dans ces heures où le gouvernement n’a rien à dire, le patriotisme consisterait à savoir s’imposer le silence. L’obligation s’applique à tous, même à lui, Hamrouche, tout ancien Premier ministre qu’il fut. Le pouvoir ne tolère les communications publiques que lorsque ses mensonges sont rôdés, c’est-à-dire assez plausibles et suffisamment charmeurs pour l’emporter sur les discours des opposants. Aujourd’hui, les dirigeants algériens sont sans recours.

Ah, qu’ils regrettent ce temps qui les fit cigales, sourds aux mises en garde, barbotant dans l’insouciance et l’imprévoyance.

C’était le temps, rappelez-vous, où l’on était sourd aux avertissements d’où qu’ils venaient, le temps où l’on chantait la gloire du parrain, où l’on promettait aux uns la lune, aux autres Mars et Jupiter, ce temps radieux où l’on jurait aux gens de Mascara qu’avec l’argent du pétrole, ils seraient bientôt Californiens et aux jeunes chômeurs qu’ils seraient bientôt riches sans avoir à faire la révolution, « pas comme ces fous de Libyens, parce que, voyez-vous chers compatriotes, ici c’est la terre bénie et la tirelire nationale y est inépuisable grâce à Dieu qui nous a envoyé la pluie, le soleil et Bouteflika ». Mais tout cela c’était avant que ne sonne le tocsin des mauvaises nouvelles : l’argent du pétrole, c’est presque fini ! Et l’Algérie d’aujourd’hui ne sait toujours rien faire d’autre que de vendre du pétrole. Du pétrole et pas autre chose. Bouteflika, à la différence de ceux qui l’ont précédé, a fait du pétrole le moteur de sa stratégie de pouvoir : le pétrole pour acheter la paix sociale, le pétrole pour inonder les souks et flatter les estomacs, le pétrole pour enrichir la pègre pétrolière internationale et s’assurer de son amitié, le pétrole pour s’offrir une réputation… Non, plus de débat public sur les immenses échecs du régime de Boteflika et l’interdiction de la confé- rence de Hamrouche augure d’un durcissement sans précédent. Il va falloir réapprendre à se taire en même temps que se serrer la ceinture ! Le clan Bouteflika est effaré par l’ampleur de ses propres échecs et donc par la sombre postérité qui se profile pour lui, celle de rester dans l’histoire comme l’équipe gouvernante qui n’aura respecté aucune de ses présomptueux engagements annoncés,tous, sur le mode de l’arrogance et de la suffisance.

M. B.

Auteur
Mohamed Benchicou

 




Idir : « Je ferai une sorte de tournée d’adieu en Algérie »

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Chanson

Idir : « Je ferai une sorte de tournée d’adieu en Algérie »

Idir signera son retour artistique en Algérie en janvier prochain. L’artiste n’est plus à présenter. Sa tournée, très attendue par ses fans, sera un peu le retour de l’enfant prodige à la terre natale. Dans ce bref entretien réalisé au téléphone, il nous a expliqué les tenants et aboutissants de sa tournée en Algérie.

 Le Matin d’Algérie : Vous allez donc chanter en Algérie. Comment va avoir lieu votre retour ?

Idir : Oui, le premier concert devait être le 12 janvier 2018 à la Coupole, mais comme je suis tenu par des engagements pour des concerts programmés auparavant en Europe, ce sera un autre jour mais ce sera bien en janvier à Alger. Je chanterai ensuite à Tizi-Ouzou, Bgayet, Batna et Bouira. Ce sera une espèce de tournée d’adieu.

Je dois cependant préciser que ce sont les éditions Izem en partenariat avec l’Onda qui sont les producteurs de cette tournée. Je ne chante pas sous le patronage d’une quelconque autorité ou président de la république.

Qu’est-ce qui vous a fait décider de faire ce retour en Algérie après 38 ans d’absence ?

Beaucoup de choses. Il y a d’abord l’âge et la santé qui est encore là. Je me suis dit que c’est le moment ou jamais d’aller chanter en Algérie pour tous ces jeunes et ces générations que je n’ai pas eu la chance de rencontrer dans les différents concerts et qui ne m’ont jamais vu sur scène. Il y a une attente mutuelle.

A quand remonte votre dernier concert à Alger ?

C’était le 25 janvier 1979 à la salle Harcha à l’occasion de la fête nationale de la radio.

Grandes retrouvailles alors avec votre public ?

Oui. Autant ici en Europe je connais les attentes du public, en Algérie, il faudra voir, beaucoup de choses ont changé. Mais j’irai pour le public. Ces derniers temps, je me suis rendu compte en fait que ce public ne doit pas être l’otage de décision qui lui échappe. Donc je chanterai tout ce que j’ai l’habitude de chanter, même les chansons les plus dérangeantes.

Entretien réalisé par Hamid Arab

Auteur
Hamid Arab

 




Noureddine Boukrouh : « Bouteflika n’est pas un homme d’Etat mais un homme de manigances » (III)

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Entretien

Noureddine Boukrouh : « Bouteflika n’est pas un homme d’Etat mais un homme de manigances » (III)

Dans la troisième partie de cette entrevue, M. Boukrouh revient longuement sur le bilan de Bouteflika qu’il qualifie ni plus ni moins de « Kach Bekhta » (friperies de Bekhta), une expression chère au président algérien, qu’il utilise pour désigner la médiocrité !

M. Boukrouh, psychanalyse le personnage Bouteflika et sa manière de gouverner, ses relations avec son entourage et ses ministres. Enfin, l’ex ministre du gouvernement Benflis, a bien voulu nous expliquer en exclusivité, les raisons qui l’ont poussées à travailler avec Bouteflika, insistant sur le fait que la relation, n’a jamais été un long fleuve tranquille.

Cependant, il refuse d’être associé éternellement au système et croit être celui qui a été attaqué le plus sur ce sujet. Il égratine au passage, Hamrouche, Ghozali, Benbitour, Benflis, Taleb Ahmed et même Saïd Saadi qu’il accuse d’avoir été « les pions du système, du premier au dernier jour de leur vie politique ».

Le Matin d’Algérie: Après 18 ans de règne, quel bilan peut-on dresser de la présidence de Bouteflika ? Ses partisans parlent d’une sage gouvernance. Partagez-vous ce jugement ?

Noureddine Boukrouh: Pour répondre impartialement à votre question et profitablement pour ceux qui nous lisent, j’aimerais que nous réfléchissions ensemble deux minutes sur le bilan des présidences qui ont marqué l’histoire de l’Algérie. Il y en a eu principalement deux, celle de Boumediene et celle de Chadli, les présidences de Ben Bella, Boudiaf et Kafi ayant été furtives, et celle de Zéroual (de février 1994 à avril 1999) intérimaire, avant de s’achever sur une démission.

L’Algérie indépendante est âgée de 55 ans. En additionnant les mandats de Boumediene (treize ans), de Chadli (treize ans) et de Bouteflika (dix-sept ans et demi), on en couvre les quatre-cinquièmes. Quand on cherche le dénominateur commun entre ces trois périodes, on s’aperçoit que l’histoire de l’Algérie, en dehors de la partie manquante correspondant à ce qu’on appelle la « décennie noire » ou rouge-sang, est en fait l’histoire de son pétrole. En particulier depuis octobre 1973 qui a vu le prix du baril passer d’un dollar à quatre en quelques semaines, en relation avec la dernière guerre arabo-israélienne.

De cette date à ce jour, nos joies et nos peines, nos moments de repos et nos moments d’angoisse, nos réalisations et nos restes-à-réaliser, nous les devons aux retournements du marché de l’énergie, à la hausse ou à la baisse des besoins énergétiques des pays acheteurs, aux décisions de l’OPEP et des pourvoyeurs hors OPEP, à la part de la fiscalité pétrolière dans le financement du budget de l’Etat, etc.

L’histoire de l’Algérie indépendante n’est donc pas celle de ses idées et de son génie, de ses élites et de ses dirigeants, de ses hommes et de son peuple, mais tout simplement, tout bêtement, l’histoire de la vente de son pétrole contre des moyens de paiement intérieurs et extérieurs.

En dehors de ce qu’il a apporté et permis, nous n’avons rien fait qui nous fasse honneur ou sur quoi nous puissions compter pour assurer notre survie, même végétative, dans l’Histoire.

L’incroyable, le plus honteux dans l’affaire, c’est que nous n’ayons créé avec les masses d’argent du pétrole aucune richesse sociale, intellectuelle, agricole ou industrielle. Il a été consommé, dilapidé et en partie volé de haut en bas de l’échelle étatique et sociale.

Regardons derrière nous : comme le dit un adage algérien, « Le chameau est passé et n’a laissé que ses crottes ».

Les idées de « révolution agraire, industrielle et culturelle » ont tourné court en laissant à la mort de Boumediene une dette extérieure de quatorze milliards de dollars pour quatorze millions d’habitants. Les slogans de Chadli, « pour une vie meilleure » et « l’homme qu’il faut à la place qu’il faut », nous ont menés tout droit à octobre 1988, nous ont légué une dette extérieure de 24 milliards de dollars pour vingt-quatre millions d’habitants, et ont vu l’Etat, censé « survivre aux évènements et aux hommes », s’écrouler comme une construction de gourbi illicite : plus de président de la République, plus d’Assemblée nationale, plus de conseils municipaux ou wilayaux… Juste l’Armée et les services de sécurité.

S’ensuivit une décennie de « tag âala men tag » sur tous les plans au bout de laquelle le protagoniste gagnant », l’Armée et les services de sécurité qui dirigeaient en fait le pays, jugèrent qu’en guise d’ouverture d’une ère nouvelle il n’y avait pas mieux que de placer à sa tête un homme qui avait été l’un des principaux hommes forts du pouvoir entre 1957 et 1979, qui n’entendait rien à l’économie, ne croyait pas à la démocratie, ne faisait confiance à personne en dehors de sa fratrie et de sa région et ne lâcherait pas le pouvoir tant qu’il vivrait.

Les dix-huit années que cet homme a passé au pouvoir ont coïncidé avec une période financière faste où il est arrivé que le prix du pétrole dépassât les 130 dollars le baril. Je me contenterai de juger sa gouvernance à travers un seul indice : si elle avait été « sage », c’est-à-dire prévenante et prévoyante, on ne serait pas aujourd’hui contraints de payer les salaires des fonctionnaires et les émoluments des députés avec de la fausse monnaie.

Tout ce qu’a dit ou promis cet homme, tout ce à quoi il a touché, relevait de la tambouille et de l’embrouille, ou, comme il aime à dire, de la politique de « Kach Bekhta ».

Je vous propose de poser la question autrement : qu’aurait été aujourd’hui l’Algérie si elle avait eu à sa tête, avec la manne financière de 800 milliards de dollars passés entre ses mains, un autre homme que Bouteflika ? Un homme de la génération de l’indépendance, élevé hors de la mentalité du système, rationnel et maîtrisant les questions économiques… L’histoire de l’Algérie n’aurait plus été écrite par le jeu de yo-yo des prix du pétrole, mais faite par ses hommes, ses idées et ses autres ressources naturelles.

Quel genre d’homme est Bouteflika, quelle est sa manière de gouverner ?

Comme tout homme, Bouteflika est le produit de son histoire personnelle et de son parcours. Il est né et a grandi au Maroc sous une monarchie absolutiste. On ne sait pas comment il a intégré la révolution algérienne, mais c’est dans l’entourage de Boumediene, un homme au parcours aussi mystérieux que le sien, qu’il a été aperçu à chacune de ses apparitions ou à l’évocation de son nom.

A l’indépendance, il est devenu ministre à 26 ans sans avoir jamais travaillé ou acquis une quelconque expérience dans aucun domaine.

Mais il n’était pas le seul dans ce cas ; pratiquement aucun de ceux qui ont pris le pouvoir par la force et la ruse à l’indépendance n’avait travaillé auparavant.

Boumediene, Ben Bella, Bouteflika et beaucoup d’autres n’ont exercé aucun métier ou fonction de gestion qui les aurait préparés à diriger une nation. Le seul titre dont ils se prévalaient était celui de « révolutionnaires », de « moudjahidine », qualités n’exigeant ni titre, ni expérience, ni justificatifs. Ceux qui, par contre, avaient un niveau intellectuel ou une expérience politique qui les prédestinait à la qualité d’« homme d’Etat » ont été assassinés, mis en prison ou condamnés à l’exil extérieur ou intérieur. Le prétendu « amour du pays » des usurpateurs et autres Djouha s’est avéré dans la réalité plus destructeur que constructeur…

Libérer un pays n’est pas le gérer. Pour construire un Etat, une société, une économie, il faut un peuple éduqué et organisé, des élites sociales et des visionnaires pour conduire la marche générale. Il y en avait quelques-uns au temps de la révolution, mais ils ont été écartés avant et après l’indépendance.

C’est un Rédha Malek qui était aux négociation d’Evian, mais c’est un Bouteflika qui est devenu ministre des Affaires étrangères de 1963 à la mort de Boumediene.

Ferhat Abbas était bon pour présider le Gouvernement au temps de la révolution, pour faire pièce à de Gaulle, mais ce sont Ben Bella, Boumediene et Chadli qui, loin d’avoir son niveau, son intelligence, sa probité et son parcours, sont devenus chefs d’Etat.

Alors qu’il avait été un lion sous le colonialisme, ils l’ont enfermé dans une cage et réduit au silence de l’indépendance à sa mort en décembre 1985 par les plus vils moyens.

Bouteflika a « gouverné » comme ont « gouverné » Ben Bella, Boumediene et Chadli en termes de concentration des pouvoirs, mais en pire sur le plan des valeurs morales et de l’intérêt général. Il a systématisé le régionalisme, toléré et encouragé la corruption, avili les institutions, piétiné la Constitution et dilapidé une manne financière qui ne se représentera plus. Il a délibérément laissé passer l’occasion de développer l’économie du pays, de créer un Etat de droit et de moderniser les mentalités car il n’est pas un homme d’Etat mais un homme de manigances.

Il a « gouverné » en déployant la plus vive vigilance envers ce qui favorisait son maintien au pouvoir, et la plus grande suspicion envers ce qui pouvait le mettre en péril.

En matière de politique économique, il décidait en ayant dans la main droite une carte de la géographie mentale des Algériens, et dans la main gauche les chiffres relatifs au prix du baril de Brent et des réserves de change.

C’étaient ses instruments de navigation et non de gouvernance, sa boussole et son sextant pour rester à la manœuvre jusqu’à ce que Dieu hérite de son âme. Il sait d’instinct ce qui est bon pour sa pérennité au pouvoir, comment sacrifier le long terme au court terme, comment privilégier ce qui plait sur ce qui déplait, quel que soit son coût, le tout étant de ne pas perdre son poste. C’est cela son critère du « halal » et du « haram ».

Beaucoup s’interrogent sur les raisons de votre présence dans son gouvernement entre 1999 et 2005 ?

Oui, je sais, des lecteurs et des amis de ma page Facebook n’ont eu de cesse de m’interpeler ces dernières années sur mon entrée au gouvernement, me reprochant l’abandon de mon parti, une contradiction avec mes idées et principes, et concluant à une perte de crédibilité. Il en est qui le faisaient innocemment, parfois sans se rendre compte qu’ils colportaient à leur insu rumeurs, mensonges et ragots, mais il en est qui le font dans le but de me discréditer, d’empêcher mes idées de se diffuser à une large échelle.

Je crois qu’aucun homme politique n’a été autant que moi critiqué d’avoir été au gouvernement.

Même pas ceux qui ont accompli toute leur carrière au service du « système » (Hamrouche, Ghozali, Benbitour, Benflis, Taleb Ahmed, etc), ou qui ont été ses pions du premier au dernier jour de leur vie politique (à l’instar de Saïd Saadi selon les témoignages télévisés de Mokrane Aït Larbi et de Nordine Aït Hamouda).

Hamrouche s’est lui-même qualifié à maintes reprises de « fils du système » et Ghozali de « harki du système » dans une interview qui avait choqué, mais c’est moi qu’on accable et qu’on voudrait faire passer pour le géniteur du « système ».

Tous les partis politiques présents sur la scène politique dans les années 1990 et 2000 ont, à un moment ou à un autre, fait partie du Gouvernement (FIS, FFS, RND, RCD, HAMAS, NAHDA, PRA, ANR) ainsi que toutes les « personnalités nationales ».

Je n’ai vu aucun d’entre ceux-là poursuivi par ce reproche avec le même acharnement. Sauf si la raison en est qu’ils n’ont aucune « crédibilité », ce qui serait en ma faveur, mais je n’irais pas jusqu’à en remercier mes contempteurs.

Je suis sidéré par le fait que personne n’ait vu dans mon entrée au gouvernement quelque chose de sain, mais forcément quelque chose de malsain. J’ai semé pourtant assez d’indices pour amener ceux qui s’intéressent à la question à réfléchir en faisant des recoupements : le fait que j’étais contre la candidature de Bouteflika en 98/99 ; que je ne l’ai pas rencontré malgré son insistance; que je lui ai envoyé une lettre le jour de son investiture dans laquelle je le mettais en garde contre lui-même (rendue publique en 2014 dans les deux langues et disponible sur sa page Facebook) ; que j’ai soutenu la position de la direction du PRA en faveur de la candidature de Benflis en 2004…

Pourquoi ai-je éprouvé une certaine réticence à en parler jusqu’ici ? Parce que cette vérité n’engageait pas que moi, et qu’il était difficile de trouver le chemin entre dire le maximum et préserver au mieux le respect dû à l’Etat algérien que j’ai servi en toute bonne foi, probité et dignité.

Je ne sais pas si M. Sid-Ahmed Ghozali voudrait ou non se souvenir d’une rencontre à laquelle il m’avait invité chez lui, dans son domicile à colonne Voirol, en 1998. Les rumeurs circulaient déjà sur la candidature de Bouteflika, et il venait d’avoir un entretien sur le sujet avec le général Toufik.

M. Ghozali, m’a rapporté qu’il avait dit au général Toufik, que si l’Armée venait à « choisir Boukrouh il accepterait de travailler avec lui, mais pas avec Bouteflika ».

J’ai lutté autant que j’ai pu contre le choix de Bouteflika par ceux qu’on appelait alors les « décideurs ».

Ce sont ceux qui lui ont proposé la présidence qui m’ont proposé, huit mois après son élection, d’intégrer le gouvernement pour aider à mettre en place dans l’intérêt du pays les réformes promises publiquement (Etat, Education, Justice, Economie, implication dans les institutions économiques internationales), et qu’il fallait pour cela des « hommes d’Etat » issus de la nouvelle génération.

J’avais quitté officiellement la présidence du parti dès le mois de mai 1999, après en avoir informé le Bureau national et le Conseil national, procès-verbal de succession à l’appui, décision qui a été entérinée par le congrès de Chéraga. Il n’a été question de mon entrée au gouvernement qu’à la fin du mois de décembre 1999. J’avais retrouvé mes activités dans le secteur privé, et ne comptais plus revenir à la politique.

En fait, je m’étais mis en retrait en juin 1997, après la grande fraude électorale orchestrée pour asseoir le RND. En mai 1998, j’ai publié une série d’articles pour dénoncer le vote par le parlement d’une loi l’autorisant à fixer les salaires des députés, la cession des villas de Moretti à des responsables, et les magouilles du général Betchine.

Hamrouche, qui est encore en vie, peut témoigner que j’aurais pu entrer au gouvernement dès 1989. A peine avait-il été nommé en qualité de chef du Gouvernement, en septembre 1989 et avant la désignation du gouvernement, qu’il m’invitait à une rencontre au Palais du gouvernement qui a duré sept heures pendant lesquelles il a tout fait pour m’impliquer dans l’équipe. C’était bien évidemment sur instruction du président Chadli. Je n’étais pas venu seul à cette rencontre, et le témoin qui m’accompagnait, un membre de la direction de mon parti, est encore de ce monde.

En guise de réponse à sa question « Que pouvons-nous faire ensemble ? », je lui avais montré du doigt le portrait officiel de Chadli accroché au mur en répondant : « Faire partir cet homme ! ».

Benbitour, de décembre 1999 à août 2000, et Benflis de 1999 à son départ du gouvernement, peuvent témoigner de mon comportement envers Bouteflika ou ses hommes lors des réunions du conseil du gouvernement et du conseil des ministres. Benflis m’a plusieurs fois dit pendant l’exercice de ses fonctions et après, qu’il témoignerait que « jamais il ne lui avait été donné de voir un homme aussi courageux que Boukrouh face au président Bouteflika ». Les deux hommes sont encore en vie. Benflis peut aussi témoigner du dépôt de ma démission en 2002 et des conditions de son retrait.

(À suivre)

Entretien réalisé par Hebib Khalil

Auteur
Hebib Khalil

 




Noureddine Boukrouh : « Le jour fatidique approche pour l’Algérie » (II)

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Entretien

Noureddine Boukrouh : « Le jour fatidique approche pour l’Algérie » (II)

Dans la deuxième partie de cette longue entrevue, Noureddine Boukrouh nous parle de la jeunesse algérienne et livre ses impressions sur l’état de désarroi dans lequel elle se trouve, sa démission de la vie publique et son désir inlassable de quitter le pays.

Par ses idées, souvent aux antipodes de la pensée ambiante, M. Boukrouh secoue, bouscule et interpelle les consciences pour provoquer ce qu’il appelle un « déclic national ».

À ceux qui veulent devenir « harragas », il démontre que partir n’est pas un acte de révolte, mais une « idée de fuite », tout en accablant les dirigeants du pays qui en « ont fait un paradis pour eux et un enfer pour les autres ».

Aux islamistes, il explique qu’un viol de la Constitution, un coup d’État ou une présidence à vie, est bien plus grave qu’une simple caricature sur le Prophète qui « pourtant, les indigne et les jette sur la rue par centaines de milliers ».

Et malgré son initiative, l’ex-candidat aux présidentielles de 1995, ne se pose pas en homme providentiel, en « zaïm ». Il dit souhaiter la réussite de son projet « révolutionnaire » mais que sa personne « importe peu » du moment que le but serait atteint.

Le Matin d’Algérie : Trouvez-vous que la jeunesse algérienne ne s’indigne pas assez, qu’elle n’est plus habitée par l’esprit de révolte ? Un peuple révolutionnaire peut-il perdre du jour au lendemain son âme révolutionnaire ? Si c’est le cas, pourquoi ? L’ignorance, l’inculture, l’illettrisme ?

Noureddine Boukrouh: Si on devait prendre des exemples concrets, on constaterait que la jeunesse algérienne est effectivement habitée par l’ »esprit de révolte », mais pas le même. Ni dans sa philosophie, ni par ses objectifs. Remontons le fil de notre histoire depuis l’indépendance, et arrêtons-nous aux événements les plus saillants.

1) Il y a eu d’abord octobre 1988 dont la facture a été de cinq cents morts. Vous souvenez-vous personnellement d’une revendication formulée, d’une banderole brandie, d’un slogan scandé, du premier mot d’un programme hypothétique ? A l’étranger, on l’avait appelée la « révolte de la semoule », et à ce jour on n’arrive pas à trancher sur la spontanéité et la nature véritable de cette « révolte » sans philosophie ni objectifs : haine du pouvoir, nihilisme, manipulation des « Services » dans le cadre d’une lutte de clans ?

2) Trois ans plus tard ce sont des centaines de milliers de jeunes qui manifestent dans la rue, exigeant l’instauration d’un Etat islamique. Prêts à en découdre pour cet « idéal » dont ils ne savaient absolument rien, beaucoup d’entre eux ont pris quelques mois plus tard les armes et le chemin du maquis dont des dizaines de milliers ne sont pas revenus, tombés dans cette « révolte » encore vivace puisque Ouyahia supplie les « derniers égarés » de revenir à la société en échange des avantages matériels prévus par la loi sur la « réconciliation nationale » toujours en vigueur.

3) En 2001, plus d’une centaine de jeunes Algériens sont tombés en Kabylie et à Alger sous les tirs des services de sécurité dans une révolte motivée par la défense de la cause amazighe et des idées consignés dans la « Plateforme d’El-Kseur ».

Presque personne ne s’est solidarisé de leur cause dans les autres wilayas, leur donnant l’impression de ne plus appartenir au même pays.

4) En 2011, dans le sillage des révolutions arabes, des révoltes disparates ont éclaté à travers le pays que les autorités ont vite circonscrites en faisant baisser en urgence le prix de l’huile et du sucre.

S’agit-il, dans ces quatre exemples, de la même jeunesse, du même « esprit de révolte », de la même philosophie et des mêmes objectifs ? Manifestement, non. Il ne s’agit donc pas de jeunesse lettrée ou illettrée, savante ou ignorante, cultivée ou inculte, mais d’homogénéité intellectuelle, culturelle, linguistique, sociologique et même ethnique du peuple algérien. En 1988 et 2011, on retrouve des facteurs socioéconomiques à l’origine des troubles. Mais l’Etat islamique (1992) et l’amazighité (2001) sont deux idées que presque rien ne rapproche, deux causes que presque tout oppose. J’ajouterai que ces deux causes existaient avant le déclenchement de la Révolution du 1er novembre 1954 et qu’elles ont juste été mises entre parenthèses pendant la guerre de libération puis sous le parti unique avant de réapparaitre simultanément à la fin des années 1970.

  • Voir aussi : Noureddine Boukrouh : vers un nouveau 1er Novembre 1954
  • Une analyse qui ignore cette donnée fondamentale ou la masque comme l’a fait le pouvoir algérien depuis l’indépendance n’a aucune valeur et ne sert à rien. C’est sur cette diversité ethnique, linguistique, culturelle, qu’il faut construire le socle de la nouvelle Algérie. L’ancien schéma monolithique a conduit à l’impasse et ne permettra aucune solution viable, durable. Il faut sortir du blocage par le haut, en faisant en sorte que les Algériens de toutes les sensibilités puissent vivre à l’aise et en paix dans leur pays, à l’ombre d’un Etat garant, efficace, régulateur, moderne, démocratique et social.

La jeunesse algérienne exprime son indignation à chaque occasion : dans les stades, sur les réseaux sociaux, et récemment en boycottant massivement les dernières législatives ? La conscience collective est bien présente non ? Comment la canaliser, la drainer ?

Vous vous méprenez sur le sens de ces réactions qui n’évoquent pas la conscience collective, mais exactement son contraire. Ce que vous prenez pour de l’indignation en vous référant à la violence dans les stades n’est en réalité que du nihilisme. Quant au boycott électoral, je n’y vois pour ma part qu’une indifférence à l’intérêt général, de l’irresponsabilité en matière sociale et politique, une abdication devant le devoir collectif, une dérobade devant l’aiguillon de la conscience citoyenne, toutes choses qui renforcent le despotisme et le laissent faire ce qu’il veut de nous.

La notion d’« indignation » popularisée par Stéphane Hessel dans son fameux petit livre qui a ému le monde n’a pas partout les mêmes résonances, et encore moins dans un pays comme l’Algérie commandé au plan émotionnel par une philosophie sociale d’essence populiste et nihiliste et une religiosité bon marché qui ont joint leurs effets pernicieux pour donner un homme détaché de la marche du monde, errant dans un désert culturel et politique.

J’ai demandé, au moment de répondre à votre question, à un excellent arabisant de me donner les traductions possibles en langue arabe du mot « indignation ». Il m’a donné « ghadhab », « intifadha akhlakiy », « istinkar », « rafd », « tandid »… On voit bien qu’il y a un problème, un gap, que ça ne colle pas tout à fait, que nous sommes dans des sens voisins mais inaptes à restituer ce que visait Stéphane Hessel dans « Indignez-vous ! ».

Voulant pousser dans ses retranchements mon traducteur, je lui ai demandé de traduire « dignité » et il m’a répondu par « karama », « charaf », « izza », sentiments renvoyant à l’intériorité individuelle, au ressenti personnel, alors que l’indignation que cherche à provoquer Stéphane Hessel en appelle au sentiment collectif, à la sensibilité commune ; elle s’adresse au « Nous » commun et non au « moi » de chacun. C’est l’équivalent du « common sense » auquel appelait Thomas Payne les Américains du XVIIIe siècle pour se libérer du despotisme britannique dans son livre qui porte ce titre.

C’est exactement ce qui manque aux Algériens qui ont vécu côte à côte pendant des millénaires, très rarement les uns avec les autres ou les uns des autres, d’où leur histoire tourmentée et leur colonisation répétée. Il leur a toujours manqué un sens commun, une vision d’eux-mêmes et du monde commune, le sentiment d’être un « Nous » insécable, la connaissance des raisons et des buts du « Nous ».

Dans leur culture, tout est subordonné au prisme religieux issu non pas du Coran ou de la pratique du Prophète mais du « ilm al-qadim ». Ce que vous appelez « révolte » est rendu par « isyan » en arabe, et la connotation religieuse est donc la toute première à se présenter à l’esprit quand on utilise ce terme. Il est connoté négativement, comme quelque chose de « haram » plutôt que comme une incitation au meilleur, à la démocratie, à la liberté…

Il n’y a rien dans la culture islamique issue du vieux savoir religieux qui incite à disposer d’une Constitution politique (vous vous rappelez sans doute du slogan « la doustour, la mithaq, kala lah kal raçoul », brandi par le FIS), ou qui soit destiné à combattre le despotisme. Le gouvernant ne peut être contesté que dans un seul cas : s’il s’attaque frontalement à l’exercice de la religion. Or la culture islamique n’est pas le fait du Coran ou du Prophète, mais à 90% le fait du « ilm al-qadim » en application des orientations des despotes qui se sont succédé dans l’histoire de l’islam presque sans exception depuis Moawiya.

Une caricature sur le Prophète indigne, jette les gens dans la rue par centaines de milliers, prêts à tuer, mais pas le viol de la Constitution, pas un coup d’Etat, pas le despotisme, pas les affaires de corruption, pas la présidence à vie, pas la fraude électorale…

Peut-être que cette indignation pour exprimer ce mal-être, cette inertie, n’a pas encore trouvé dans notre pays une figure, une personne, un guide, pour la transformer en mouvement ? Pensez-vous incarner cette figure ? En avez-vous l’ambition ?

Une des leçons essentielles que j’ai retenue de l’enseignement de Bennabi c’était, entre 1969 et 1973 (date de sa mort), la différence existant dans leur définition et leur fonction entre le monde des choses, le monde des personnes et le monde des idées.

Les Algériens adorent suivre les guides, les « cheikhs », les « zaïms », les marabouts et, de nos jours, les charlatans et les guérisseurs. C’est ce qui les a perdus et les perdra encore. Pour eux, dans leur subconscient, les idées doivent être incarnées par des personnes qui doivent être imitées, suivies au doigt et à l’œil. Ces idées sont le bien de ces personnes et eux de simples exécutants. On voit, là encore, l’influence du prisme religieux dans leur montage intellectuel. Ne vaut à leurs yeux que ce qui est sacré, vénéré, mystique et mystérieux, alors que seul le rationnel, le méthodique, l’objectif, le mesurable et le reproductible peuvent les servir et les faire avancer dans l’Histoire.

Le mythique Djouha a été le premier à déceler l’aubaine dans cette disposition de l’esprit algérien et, depuis, il n’a cessé à travers les siècles, sous un nom ou un autre, sous une apparence religieuse ou politique, d’exploiter cet inépuisable gisement renouvelable d’astuces, de ruses et de diableries pour vivre aux dépens des pauvres Algériens. Jusqu’à ce jour, et avec les remerciements et la gratitude éternelle des bernés, des victimes, du « ghâchi ».

Ce n’est certainement pas moi qui vais me poser en « zaïm » ou en homme providentiel pour leurrer mes compatriotes.

Je leur parle d’idées en essayant de distinguer les bonnes des fausses (comme l’islamisme), je m’emploie depuis un demi-siècle à leur livrer à domicile, à travers mes écrits, les quelques idées que j’ai comprises afin qu’ils en tirent profit pour se hisser au rang de nation pacifiée, stabilisée, développée…

Que mes écrits suscitent de l’intérêt, je ne peux espérer mieux, mais ce que je demande à mes compatriotes c’est d’en adopter les bonnes pour les adapter au cas algérien, de leur donner corps, d’en faire des réalités sociales et politiques. Ma personne importe peu, elle n’est pas le but mais juste le support, le moyen, le véhicule. Je peux aider, je crois l’avoir fait substantiellement jusqu’ici, et je suis disposé à continuer jusqu’à mon dernier souffle. C’est ce que j’ai fait sans relâche depuis 1970 et continuerai à faire avec l’espoir de laisser quelque chose d’utile après moi. Bla mziya !

Le phénomène des Harraga (brûleurs, une forme de suicide), est-il l’ultime forme de révolte de la jeunesse algérienne ? Contrairement à ce qu’on peut penser, ce phénomène, n’est-il pas l’expression d’un profond amour pour le pays et ses habitants ? Les « Harraga » disent ainsi, « je préfère brûler les frontières et risquer de mourir que brûler le pays, comme se sont embrasées la Libye ou la Syrie » ? Êtes-vous d’accord avec cette analyse ?

Vous persistez dans vos définitions ? Je persiste dans les miennes : mieux que dans tout autre exemple, la « harga » n’est pas un acte de révolte, mais la meilleure traduction de l’idée de fuite. On fuit son pays parce qu’on n’y trouve pas son compte ; on le quitte parce qu’on n’y a pas de vie, de travail, de présent, d’avenir. Ce ne sont pas les « harragas » qui sont à blâmer, mais les dirigeants du pays qui en ont fait un paradis pour eux et un enfer pour les autres, en particulier parmi les nouvelles générations qui ont, notamment, le sentiment de faire des études pour rien.

Lorsque l’Algérie deviendra un Etat véritable, transparent, avec une Constitution servant l’intérêt de ses citoyens et non exclusivement celui de ses dirigeants, lorsqu’elle sera dirigée par des hommes compétents, propres, ouverts à ses enfants où qu’ils se trouvent dans le monde, alors il n’y aura plus de « harragas », ce sont ceux qui sont partis qui voudront revenir.

Le jour fatidique de la faillite du pays, le peuple n’aura que faire des problèmes moraux et d’une révolution citoyenne pacifique, l’urgence sera de survivre et à n’importe quel prix ? Il faudrait peut-être agir au plus vite pour que cela ne dégénère pas en violence ?

Oui, vous avez raison, le jour fatidique approche. Nous en sommes à fabriquer des billets de banque, à émettre légalement de la fausse monnaie pour payer les fonctionnaires et les députés. Si ce n’est pas cela la faillite, qu’est-ce que c’est ?

Nous sommes dans la situation de la victime de Barbe Bleue qui demande à sa sœur Anne si elle ne voit rien venir de son donjon, visant le monstrueux Barbe Bleue. Vous et moi sommes sur le donjon et voyons au loin l’ouragan se lever. Combien de temps mettra-t-il à arriver ? C’est l’unique question qui vaille. Il faut se préparer à contrer le choc, à lui résister, à survivre, à reconstruire ce qui aura été détruit.

L’initiative que j’ai lancée ne m’appartient pas, elle vous concerne autant que moi, autant que n’importe quel Algérien soucieux de l’avenir de son pays. Je continuerai de mon côté à l’alimenter comme annoncé et à recueillir commentaires et propositions. Elle est appelée à devenir l’affaire du plus grand nombre possible d’Algériens et d’Algériennes, et son contenu programmatique et organisationnel sera précisé étape après étape.

(À suivre)

Entretien réalisé par Hebib Khalil

Auteur
Hebib Khalil

 




Noureddine Boukrouh: « C’est l’occasion ou jamais de se débarrasser du « système » » (I)

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Entretien

Noureddine Boukrouh: « C’est l’occasion ou jamais de se débarrasser du « système » » (I)

Dans cet entretien fleuve, c’est l’intellectuel auteur de plusieurs livres, et journaliste que nous voulions interpeller en premier. M. Noureddine Boukrouh, qui vient de lancer un appel à une révolution citoyenne, n’a pas été avare en explications : il tient à son initiative et ça se sent. Dans chacune des formules qu’il utilise, chacune de ses phrases, transparaissent le souci du détail et l’envie d’expliciter sa démarche.

Dans ce ring de la politique algérienne où il a fait ses armes, ses réponses, sans esquives, sont à la hauteur de ses talents de puncheurs. Qu’on aime ou qu’on déteste, Noureddine Boukrouh a le mérite d’être clair : il clame haut et fort son refus d’abdiquer, et s’oppose ouvertement au clan des Bouteflika.

Dans cette première partie, le natif d’El Milia, (wilaya de Jijel), nous propose d’analyser son projet révolutionnaire, en portant une réflexion plus profonde sur sa faisabilité.

Le Matin d’Algérie : Vous avez lancé une initiative politique préconisant une révolution citoyenne pacifique . Dans un pays qui a comme modèle la Révolution du 1er novembre 1954, comment convaincre qu’une révolution pacifique puisse être la solution ? La non-violence n’est-elle pas culturellement étrangère aux Algériens ?

Noureddine Boukrouh : Les Algériens ne forment pas un conglomérat d’hommes et de femmes invariable, égal et pareil à lui-même au fil des ères historiques mais, comme les autres peuples, un ensemble humain qui se renouvelle à travers le mouvement de la vie rythmé par les départs et les arrivées. Les générations se succèdent, intègrent les changements de mode de vie et de pensée de leur temps, et se plient aux évolutions mondiales.

Nous ne sommes plus au temps de la guerre froide où de grandes puissances se combattaient par pays interposés clivés en régimes progressistes et régimes libéraux.

Les pays dits révolutionnaires ont disparu de la surface de la terre à quelques exceptions près comme Cuba, le Venezuela, la Corée du nord et l’Algérie où règnent des despotes au nom d’une idéologie soi-disant « révolutionnaire » mais en fait dictatoriale et prédatrice.

Il est vrai qu’en nous penchant sur l’histoire récente de l’Algérie on constate qu’entre 1954 et aujourd’hui elle a été par deux fois au moins le théâtre d’importantes violences dont le les bilans sont estimés à un million et demi de morts pour la première, et à plus de deux cent mille pour la seconde. Si je devais adopter le langage de la philosophe de l’histoire, je dirais que le sacrifice des premiers a été le prix payé pour s’arracher à la colonisabilité, et le sacrifice des seconds le prix payé pour éviter à l’Algérie de connaître le sort de l’Afghanistan des Talibans.

Cela dit, il ne faut pas confondre entre les deux phénomènes. La révolution du 1er novembre 1954 était une lutte de libération nationale contre une occupation étrangère et ne peut donc pas être rangée dans la catégorie des violences. Le mouvement national a essayé de parvenir à l’indépendance par les voies légales, la politique et la non-violence, mais le colonialisme ne lui a laissé d’autre choix que la lutte armée à laquelle il faut joindre l’action diplomatique dont on a tendance à sous-estimer l’importance.

Par contre, le mouvement terroriste déclenché par le FIS à partir de mars 1992 dans l’espoir de prendre par la violence ce qu’on l’avait empêché de prendre par la voie pacifique a inutilement ensanglanté le pays et continue. Il n’a pas réussi alors qu’il était lourdement armé, qu’il a mobilisé des dizaines de milliers de militants et qu’il a été soutenu par l’étranger.

La lutte de libération nationale a réussi parce que c’était une cause nationale, tandis que le terrorisme islamiste était une fausse cause, une fausse idée, celle de « l’Etat islamique ». C’était Daech avant la lettre.

Je ne crois pas que la non-violence soit « culturellement étrangère » aux Algériens, et la révolution citoyenne à laquelle j’appelle est aux antipodes des idées de violence révolutionnaire ou terroriste. Elle se veut une rupture avec le mode de pensée sur lequel repose le « système » qui est devenu un danger pour la pérennité de notre nation, un blocage de notre histoire, un despotisme mafieux qui est en train de vider le pays de ses ressources morales, intellectuelles et économiques. C’est un appel à la raison, à la conscience patriotique des Algériens du dedans et du dehors, à l’esprit de responsabilité vis-à-vis d’eux-mêmes et de leur histoire.

Le pays ne peut pas continuer à être dirigé comme il l’est, il faut préparer le passage à une nouvelle période, à une nouvelle mentalité, à de nouvelles modalités d’exercice du pouvoir, démocratique et transparent. Si les citoyens ne le font pas, personne ne le fera pour eux : ni la Providence, ni l’armée, ni les partis politiques, ni l’étranger, ni un homme providentiel. Le défi qui leur est posé est d’engager l’action collective qui les fera passer du statut d’habitants de l’Algérie à celui de citoyens d’Algérie, ses vrais propriétaires et ses gestionnaires effectifs à travers le système électif.

L’initiative que j’ai lancée n’est pas épuisée. Je n’en ai dévoilé que les préliminaires pour polariser l’attention sur l’idée essentielle que notre salut viendra de notre mobilisation autour d’objectifs et d’actions à mener d’ici la prochaine élection présidentielle en avril 2019.

C’est l’occasion ou jamais de se débarrasser du « système ». Si on le veut, ça se fera. Si chacun continue de compter sur l’autre pour que ça se fasse sans lui et qu’il en profite gratis, tout le monde sombrera.

L’indépendance n’a pas permis de parachever la révolution, bien que le but principal (la liberté) fût atteint. Un gouvernement révolutionnaire a pris place à la tête du jeune Etat alors que la révolution était censée se terminer le jour de l’indépendance. Comment faire pour se normaliser et sortir de la révolution chronique ?

La lutte de libération nationale visait la libération du territoire, la reconquête de la souveraineté nationale, le timbre, l’hymne et le drapeau, mais pas les libertés citoyennes considérées comme un luxe, comme des lubies de bourgeois. Les partis et associations du mouvement national ont restreint leur combat à la conquête de droits politiques nationaux, pas à la préparation des Algériens à remplir des devoirs citoyens pour construire leur Etat, leur nation et leur économie.

A l’époque, le monde était partagé en deux visions politiques antagoniques : la vision démocratique impliquant la participation du peuple dans la conduite des affaires publiques à travers des représentants élus et nécessitant par conséquent une éducation civique et l’affirmation des valeurs de la citoyenneté, et la vision « révolutionnaire » qui considérait que c’est à ceux qui ont lutté contre l’occupation qu’il revenait de diriger le pays sans implication des citoyens, sans élections et donc sans nécessité de favoriser la culture de la citoyenneté, ce qui aiderait à maintenir le peuple dans un état de docilité inconditionnelle.

Ce qui s’est produit en 1962, c’est la prise du pouvoir par la force, une usurpation de pouvoir par la violence. Le parti unique et l’économie administrée étaient des instruments idéaux pour exercer le despotisme avec les remerciements et la gratitude des victimes. Le discours « révolutionnaire » véhiculant un populisme sorti en droite ligne de l’idéologie marxiste-léniniste n’était qu’un catalogue de slogans projetant des chimères pour tromper les peuples et les asservir à moindre frais aux intérêts d’une nomenklatura.

C’était juste bon à savonner la pente au culte de la personnalité, au mythe du « moudjahid » et de l’homme providentiel derrière lesquels se cachaient des mégalomanes ignorants se comportant en propriétaires du pays hérité des colons.

L’Algérie est l’un des derniers pays où ce système est encore en vigueur sous les apparences d’une démocratie pluraliste. Nous vivons sous un despotisme ni oriental, ni communiste, mais crapuleux.

Après s’être accaparé du patrimoine laissé par la colonisation, biens vacants, terres agricoles et autre, ils ont dilapidé les ressources énergétiques trouvées dans le sous-sol dans des politiques dont il n’est rien resté puisqu’on en est à imprimer des billets de banque pour payer les salaires des fonctionnaires et des députés. L’Algérie est à refaire de fond en comble, en commençant par la reconstruction de l’homme à partir d’un enseignement épuré de l’idéologie totalitaire du despotisme et du charlatanisme qui se nourrissent l’un de l’autre. Sinon, l’indépendance n’aura servi à rien.

La révolution à laquelle vous appelez est un peu une révolution façon Camus qui cherchait à construire une conscience collective exprimée dans son cogito : « Je me révolte donc nous sommes ». Vous l’exprimez à travers les « Non » qui ponctuent votre appel. Camus écrit dans « L’homme révolté » : « Qu’est-ce qu’un homme révolté ? C’est un homme qui dit non ! ». Est-ce une coïncidence ?

C’est une coïncidence pour celui qui croit la déceler dans ma démarche alors que j’ai les pieds sur terre, en Algérie, et que je rêve d’une évolution à notre portée, qui a trop tardé, et non à une révolution aventureuse, dangereuse et coûteuse en vies humaines et destructions du patrimoine public. Je ne me situe pas dans cette problématique philosophique propre à la culture française et liée à une conjoncture historique qui a engendré l’existentialisme comme réponse au « sentiment tragique de la vie » et au sentiment d’absurde inspiré par deux guerres mondiales en un quart de siècle.

Je note que lorsque la réalité a frappé à la porte de Camus, le sommant de choisir entre un idéal (la Justice) et sa mère, c’est cette dernière qu’il a choisie en tout conformisme, en tout conservatisme, loin de tout esprit de « révolte ». L’homme révolté a dit, en l’occurrence, « Oui ! » à la colonisation d’un peuple par un autre ; il ne s’est pas insurgé contre cette anomalie, il a, au contraire, qualifié de « terroristes » ceux qui s’étaient révoltés pour conjurer ce sort injuste. Cette philosophie a rendu son dernier soupir en mai 1968.

Si je devais prendre exemple sur Camus, ce serait pour m’inscrire prosaïquement dans la réalité philosophique, politique et sociologique de mon pays qui s’est libéré du colonialisme pour édifier un Etat moderne et qui se retrouve coincé entre le mauvais et le pire, ballotté entre un despotisme de douar et une tentation théocratique, l’un et l’autre étant une réclusion à perpétuité dans le passé cruel et archaïque.

La révolution citoyenne à laquelle j’appelle mes compatriotes est de type moral, psychologique et intellectuel, et destinée à le doter de la volonté et de la conscience collective dont vous parlez.

Avec l’arrivée de nouvelles générations et la mise à leur disposition de moyens de communication, de contact, de rencontre, d’échange et d’action concertée, ils tiennent les outils moraux et matériels avec lesquels ils peuvent se libérer de l’emprise d’un pouvoir qui rappelle la gérontocratie soviétique à la veille de l’effondrement du mur de Berlin.

Je les exhorte à s’élever pacifiquement mais résolument contre le sort fait à leur pays par une poignée d’aventuriers sans idéologie, sans philosophie, sans politique, sans programme, sans horizons, gouvernant le pays à vue, au jour le jour, échouant et recommençant comme si de rien n’était, envers et contre tous.

Si cette révolution devait se mettre en branle, qu’est ce qui garantit qu’elle ne déviera pas de la trajectoire que vous lui assignez ? Vos mots d’ordre ( Non à un cinquième mandat pour Bouteflika, non à une succession arrangée d’en haut !) ne sont pas un programme, un but, un idéal… La prise de conscience c’est bien, mais autour d’idées essentielles comme la liberté, justice ou bonheur, ce qui va au-delà d’un simple appel au refus d’obtempérer.

Les Algériens ont eu tout loisir ces dernières années et décennies de suivre sur leurs écrans de télévision le déroulement de plusieurs révolutions citoyennes en Europe, en Amérique du sud, en Afrique et même tout près de chez eux (Maroc et Tunisie). Ils ont vu que lorsqu’un certain nombre de citoyens (au maximum 5 % de la population ce qui donnerait, dans notre cas, deux millions de personnes) se mettaient en mouvement avec des revendications claires, raisonnables, de nature politique et sans violences, ils ont à tous les coups obtenu gain de cause.

Demander la tenue d’une élection régulière, transparente, avec toutes les garanties de sincérité, est en soit une cause, un idéal, car si cette revendication est satisfaite, le peuple aura recouvré son principal pouvoir souverain, celui de choisir ses représentants.

Etant donné l’architecture pyramidale de notre système institutionnel en l’état actuel de la Constitution, c’est par le haut qu’il faut commencer, par la présidence de la République où sont concentrés les pouvoirs et d’où partent les impulsions vitales, sans dire qu’il est plus facile de contrôler une présidentielle qu’une législative.

Il faut se préparer à vouloir cette revendication, il faut communiquer cette volonté au plus grand nombre possible de compatriotes, il faut réfléchir à la manière de s’organiser pour l’imposer.

Le jour où les Algériens auront mis à la présidence de la République celui qu’ils auront librement choisi, ce jour-là ils commenceront à goûter aux fruits de l’indépendance qui viendront dans le sillage de cet acte de liberté, de souveraineté. Ils effaceront de leur conscience le souvenir douloureux des luttes fratricides et des assassinats pour la prise du pouvoir, et se réconcilieront enfin avec leurs institutions, condition d’un nouveau départ dans l’Histoire.

(À suivre)

Entretien réalisé par Hebib Khalil

Auteur
Hebib Khalil

 




Noureddine Boukrouh appelle les Algériens à la Révolution

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Débat

Noureddine Boukrouh appelle les Algériens à la Révolution

INITIATIVE POLITIQUE DE M. NOUREDDINE BOUKROUH. APPEL AUX ALGÉRIENS ET ALGÉRIENNES POUR UNE RÉVOLUTION CITOYENNE PACIFIQUE. L’Algérie s’achemine lentement mais sûrement vers un tournant critique de son histoire qui peut déboucher sur son salut ou son basculement dans l’inconnu. Les deux options sont ouvertes devant elle et ont des chances égales de s’imposer, à moins qu’une puissante volonté populaire ne tranche résolument en criant : ce sera le salut !

L’ETAT DE LA NATION

Un demi-siècle après la reconquête de sa souveraineté nationale grâce à la révolution du 1er novembre 1954 déclenchée par 22 jeunes Algériens, le peuple algérien, renouvelé par l’arrivée à maturité de nouvelles générations, est en capacité de revendiquer son statut de source de tous les pouvoirs et son droit constituant que lui ont reconnu les constitutions algériennes depuis 1962 mais que ses dirigeants imposés ne lui ont jamais permis d’exercer.

L’Algérie est devenue indépendante sans savoir ce qu’elle allait faire de son indépendance, sans répondre à des questions fondamentales comme celle de l’identité, sans impliquer le peuple et ses élites éclairées dans la prise de décision à travers des institutions véritablement démocratiques et opérationnelles. Elle fut soumise pendant tout ce temps à une longue série d’essais et d’erreurs qui ont conduit à l’impasse économique et politique actuelle.

Notre pays et son économie ont été placés dans une totale dépendance des hydrocarbures, une richesse non renouvelable. Les mois et années qui viennent vont être difficiles alors que le pays n’est plus gouverné sur la base de la raison et de l’intérêt général, mais d’un attachement maladif au pouvoir et d’intérêts personnels.

Notre devoir est de réagir intelligemment et dans la légalité devant la dérive qui est en train de nous conduire à la catastrophe, en ayant à l’esprit la fidélité aux idéaux pour lesquels les « chouhada » sont morts. Le moment est venu de donner à ces idéaux les formes concrètes d’un Etat de droit « démocratique et social » selon les termes de la Déclaration du 1er novembre 1954.

A QUI S’ADRESSE CET APPEL ?

Cet appel s’adresse à la conscience algérienne, à tous les actionnaires de la maison Algérie qui se trouvent sur le territoire national ou en n’importe quel endroit du monde, à toutes les générations d’hommes et de femmes engagées ou non dans l’activité politique ou associative, dans toutes les institutions ou à la retraite, à toutes les catégories sociales, dans toutes les régions, de toutes les langues et de toutes les confessions.

QU’EST-CE QU’UNE REVOLUTION CITOYENNE ?

Une révolution morale est la prise de conscience, quand tout va mal et de travers, quand on sent qu’on est cerné par le danger et qu’on est sur une mauvaise route, qu’on doit changer sa vision des choses et de direction. C’est une prise de conscience collective et simultanée. On ressent alors le besoin de faire mieux, d’aller vers mieux, de construire un autre modèle de vie que celui qui a été sanctionné par l’échec.

Une révolution citoyenne est le mode opératoire qu’on adopte pour changer pacifiquement l’état de choses en question. La communion dans un sentiment commun s’accompagne de l’évidence que nul ne peut à lui seul créer le changement, qu’il doit être l’œuvre du plus grand nombre possible, et avoir pour finalité le bien de tous.

SE LEVER ET NON SE SOULEVER

Le défi que nous devons relever est d’agir en contournant les risques d’exposer notre pays à une nouvelle tragédie alors que les séquelles de celle des années 1990 sont encore visibles. Nous devons nous réveiller à notre devoir envers notre patrie et ne pas attendre que la catastrophe soit là pour nous révolter dans l’improvisation et l’anarchie, nous attaquant aux services publics, aux forces de l’ordre ou aux biens publics et privés.

Nous pouvons agir chacun à partir du lieu où il se trouve.

D’autres voies et moyens que la violence, les troubles à l’

ordre public, les manifestations dans la rue ou la désobéissance civile sont proposés par les nouvelles technologies de l’information et de la communication (réseaux sociaux, médias électroniques, vidéos, courriels, smartphones…)

On peut agir de concert sans se connaître, sans se rencontrer, sans se réunir et par des procédés uniquement légaux et démocratiques. Il existe aujourd’hui des techniques plus efficaces que les armes, l’action clandestine ou les tracts pour faire connaître sa cause, convaincre les autres de sa justesse, en débattre et mobiliser autour d’elle.

SE LEVER POUR QUOI FAIRE ?

Nous devons converger vers un but commun qui est de dire « Non ! » à la situation actuelle en attendant le moment de le faire par les urnes. L’élection présidentielle prévue à l’échéance d’avril 2019 offre l’opportunité historique d’en finir avec le « système », mais il ne faut pas exclure qu’elle soit précipitée par une cause quelconque.

Le délai qui nous en sépare suffira à peine pour donner à cette révolution citoyenne pacifique toutes ses chances de succès car il s’agit de remplacer un mode de pensée par un autre pour enfin arriver à remplacer le « système » par un Etat de droit.

Tout Algérien ou Algérienne doit marquer une pause de réflexion, procéder à son examen de conscience et se dire : « Je dois cesser de penser comme avant ! Je dois faire quelque chose pour mon pays et mes compatriotes ! Mon exemple sera suivi par d’autres ! Je vais le faire parce que l’autre va le faire aussi et que j’en profiterai ! ».

Au sentiment de résignation qui nous paralysait jusqu’ici, à l’attitude démissionnaire à laquelle nous étions acculés, à la passivité justifiée par la formule populaire (« takhti rassi !»), opposons avec force une autre formule populaire (« rassi w rassek fi chachiya wahda ! »).

Il faut vaincre notre inertie car elle est le principal obstacle à notre libération mentale. Il faut libérer la volonté algérienne du fatalisme véhiculé par le charlatanisme et l’esprit du douar. Chacun doit effectuer un travail de proximité dans sa famille, son quartier, son lieu de travail ou d’étude, sur les réseaux sociaux pour généraliser l’éveil et élargir la résolution d’agir pour changer notre état et notre Etat.

PAR QUOI COMMENCER ?

Une cause, une nation, naît dès le moment où un idéal soude ses membres et les met en mouvement vers un objectif commun. Focalisons-nous dans une première étape sur ces quatre mots d’ordre que chacun et chacune doit répercuter par tous les moyens accessibles :

– Non au recours à la planche à billets pour payer les salaires !

– Non à un cinquième mandat !

– Non à une succession arrangée d’en haut !

– Non à l’instrumentalisation de l’ANP, des collectivités locales, des services de sécurité et de la justice pour pérenniser un pouvoir devenu illégitime et nuisible à l’intérêt du pays !

Les Algériens et Algériennes qui veulent construire une nouvelle Algérie doivent proclamer dans leurs échanges, leurs commentaires et leurs écrits que le temps de la cooptation d’un candidat à l’élection présidentielle par des forces occultes, puis sa « consécration électorale » par la fraude est terminé. Nous ne l’accepterons plus, nous sommes assez mûrs pour décider par nous-mêmes, pour nous-mêmes et pour nos enfants.

Ensemble, et avec l’expertise nécessaire dont il faudra s’entourer le moment venu, nous travaillerons à la mise au point d’un dispositif capable de garantir la transparence totale et la sincérité absolue des résultats des urnes.

Nous devrons, enfin, prendre à témoin le monde qu’en Algérie une lutte pour la liberté, la démocratie et le libre exercice de la souveraineté populaire s’est ouverte et qu’elle ne cessera pas avant d’avoir atteint ses objectifs : la conquête de notre citoyenneté et de notre dignité.

PROTEGER CETTE INITIATIVE

La meilleure façon de garder un secret est de ne pas en avoir. Cette initiative est publique, ses objectifs clairs, son mode opératoire pacifique et son but l’intérêt de l’Algérie et des Algériens. Pour la protéger, il faut d’abord partager la matière postée sur cette page Facebook avec des milliers d’autres pages et sites.

QUELLE SERA LA SUITE ?

Cet Appel est en soi un lieu de rassemblement. Il faut lui assurer la plus large diffusion en arabe, tamazight, français et anglais. Il est aussi un lieu de réflexion, de débat et de propositions sur les actions à préparer à partir de maintenant pour réaliser la convergence populaire en vue de construire une nouvelle Algérie avec un esprit et des institutions rénovés. Il sera suivi d’autres, en fonction de l’évolution des événements.

Auteur
Noureddine Boukrouh

 




« Maghreb » des polices ou Tamazgha des peuples ?

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Alger-Rabat

« Maghreb » des polices ou Tamazgha des peuples ?

L’accusation est sans ambiguïté : « crime graves liés à la constitution d’une association de malfaiteurs… crime et homicide volontaire, de corruption et de trafic international de stupéfiants ». Ils n’ont pas hésité à charger la barque !

En fait de terroristes, il s’agissait de militants mozabites, militant dans le mouvement pacifique pour l’autonomie du Mzab qui avaient réussi à échapper à la police de Ghardaïa (qui avait alors pris le parti des agresseurs du Djound El Khalifa), et de militants du mouvement pacifique du Rif, le Hirak, qui s’étaient réfugiés aux Pays-Bas (1).

On ne dit jamais assez que l’ADN des dictatures c’est le mensonge, quel que soit l’habillage « démocratique » qu’on y applique.

Ces militants pacifistes menacés d’expulsion n’ont pas fait exploser les bombes de Marrakech et de l’aéroport d’Alger, n’ont pas attaqué le poste de Guemmar et l’école de police de Soumaâ, n’ont pas massacré les habitants de Raïs, Bentalha, Beni Messous, n’ont pas assassiné Tahar Djaout, Boucebci, Tigziri, Yefsah, Katia Bengana, Matoub, Hervé Gourdel,…. La liste est trop longue malheureusement pour pouvoir citer les plus de 200 000 morts, les dégâts et traumatismes causés par les véritables terroristes islamistes.

Cette démarche concertée ou non des polices marocaines et algériennes pour réprimer leurs opposants respectifs n’est pas nouvelle. Ce cynisme et cette complicité n’ont pas cessé de fonctionner depuis des décennies, déjà sous Hassan II et Boumediène.

Au plus fort de la tension entre les deux pays, après l’annexion par le Maroc du Sahara Occidental, et les terribles expulsions du territoire algérien des 45000 Marocains (2), principalement dans l’Oranie, les services de polices s’échangeaient leurs prisonniers, opposants politiques pris de part et d’autres des frontières !

Les autorités du Makhzen marocain et du Conseil de la révolution algérien se faisaient la guerre, par les ondes et par les armes, mais collaboraient pour protéger leurs pouvoirs respectifs.

La fermeture actuelle de la frontière n’a d’autres finalités que d’asseoir la logique guerrière et pénaliser ce peuple qui se trouve de chaque côté de la frontière. Par ailleurs, cette fermeture n’empêche nullement les trafics divers (drogue, armes, essence, cheptel, produits subventionnés, …) ainsi que le nouveau trafic d’être humains, impactant les réfugiés subsahariens. Ils se poursuivent au vu et au su des autorités des deux pays.

La France coloniale avait édifié la ligne Morice, barrage électrifié et de champs de mines, Le Maroc et l’Algérie font mieux aujourd’hui en construisant un mur en dur ou fossé en excavation, pour une situation … durable. C’est cela la coopération « maghrébine » des syndicats de chefs d’États de l’arabo-islamisme, pour… la préparation de l’avenir !

Il faut se rendre à l’évidence que l’union des pays nord-africains ne sera jamais faite avec les pouvoirs en place.

Rappelons que les frontières actuelles sont issues des guerres de pouvoirs entres des chefs locaux suite à l’effondrement des grands mouvements unificateurs, tels les Almohades et les Almoravides. Les pouvoirs qui leur ont succédé n’ont donc survécu que par opposition à leurs voisins et par leur vassalisation à l’arabo-islamisme des dynasties orientales qui les instrumentalisaient. Les pouvoirs issus de la décolonisation ont malheureusement suivi ce chemin (Mohamed V au Maroc, Ben Bella en Algérie, Bourguiba en Tunisie, plus tard Gadafi en Libye).

L’union, puis l’intégration des pays d’Afrique du Nord n’a comme perspective que sa construction par la base, hors (ou contre) des pouvoirs en place, par des échanges et visions communes, pour avancer dans le sens de l’Histoire, afin de faire tomber ces frontières dans une Tamazgha unificatrice.

Les pionniers de l’Etoile Nord Africaine (E.N.A.) avaient tracé le chemin. Ils étaient peut-être en avance sur leur temps.

Aumer U Lamara, écrivain

Notes :

(1) Les personnes connues sont Salah Abbouna pour le MAM (Mouvement pour l’autonomie du Mzab), arrêté puis relâche en Espagne, et Saïd Chaou pour le Hirak rifain, ancien député d’El Hoceima/Taghzut.

(2) L’immigration rifaine en Oranie date des premières fermes de la colonisation française. Ils venaient alors travailler en saisonniers. Après l’indépendance de l’Algérie, beaucoup s’y sont fixés et fondé des familles, souvent mixtes. Le 18/12/1975 Boumediène avait décidé d’expulser 45000 Rifains, en représailles suite à l’annexion du Sahara Occidental par le Maroc (l’annexion était déjà actée en 1973, donc un simple prétexte). Des familles ont été séparées, spoliées de leurs biens et mises dans des bus en direction de la frontière. Durant tous ces mois de chasse au Marocain, les autorités locales organisaient à Oran le pillage des domiciles abandonnés par leurs propriétaires, et des milliers d’objets étaient revendus au marché informel de Mdina Jdida. Des témoignages existent. Au quartier Es-senia, c’était le garde-champêtre le chef de bande pour les razzias.

A ce jour, les Marocains n’ont pas été indemnisés par l’Algérie.

Auteur
Aumer U Lamara

 




Pourquoi Bouteflika a désigné Ahmed Ouyahia Premier ministre ?

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Remaniement

Pourquoi Bouteflika a désigné Ahmed Ouyahia Premier ministre ?

C’est la troisième fois qu’Ahmed Ouyahia est nommé à la chefferie du gouvernement; une fois par Liamine Zeroual et deux fois par le président Bouteflika. 

Si les spéculations sur l’état de santé du président se font insistantes, les dernières décisions en haut lieu ne laissent pas tout autant indifférent. Et la nomination d’Ouyahia laisse pantois. En effet, qu’est-ce qui a bien poussé le président Bouteflika à « redésigner » Ahmed Ouyahia Premier ministre après l’avoir limogé deux fois, d’abord en 2006 puis en septembre 2012 ? N’y a-t-il donc plus personne de nouveau pour diriger le 18e gouvernement Boufeflika en 18 ans ? Sans pouvoir donner de réponse précise, il est manifeste que quelque chose ne tourne pas rond en haut lieu. Ces changements à la pelle augurent de sérieuses lignes de fratures.

La rente s’épuisant, le vertige du désordre s’installe. Le limogeage brutal et précipité de Tebboune, voire toute cette affaire autour des attaques contre des hommes d’affaires et sa visite inopinée et « informelle » à Matignon, puis un improbable voyage dans un pays improbable qu’est la Moldavie semblent cacher autre chose que ce qu’on veut bien nous dire. Y aurait une volonté de brouiller le tableau de bord ? Ou s’agit-il là du résultat d’une dégradatiion de la santé du président disparu des écrans depuis plusieurs semaines et donc, la précipitation du calendrier, d’où cette fuite en avant ? Cela voudra-t-il dire qu’Ouyahia, homme du sérail, est chargé de préparer une présidentielle anticipée ? Ou tout simplement la suite logique d’une « guéguerre » perdue contre les « hommes d’affaires » ? Beaucoup de questions sur un système qui a perdu forme de transparence dans son centre de décision.

En vrai, on n’est plus dans la direction d’un pays, mais dans l’acharnement sur un corps malade. Des institutions fragilisées, un président malade et invisible, des décisions venues d’en haut, censées être officielles relayées par des canaux officieux, des ministres impuissants devant les magnats, un peuple qui n’a plus confiance ni espoir …

Le traitement chaotique et la montée en cadence, depuis un mois, des tirs de barrage contre l’ex-premier ministre laisse croire que les détenteurs du « pouvoir de l’argent » « voulaient sa peau » à tout prix. Souvenons-nous, alors que le pays affrontait les incendies et la crise se fait aiguë, Abdelmaldjid Tebboune réserve sa première sortie officielle à la grande mosquée d’Alger pour presser les Chinois de la terminer même en partie avant la fin 2017 pour permettre au président de l’inaugurer. Comme si c’était la question la plus capitale à traiter. Très vite, il est rattrapé par l’urgence des dossiers. il se déclare décidé à séparer le monde de l’argent de la politique. C’est son deuxième faux-pas, et c’est le frère du président qui le lui fait comprendre. Tebboune ne sera resté que 80 jours au palais du gouvernement, passant la moitié du temps à démentir les informations distillées ici et là. Il n’aura participé qu’à un seul conseil des ministres, le seul d’ailleurs de l’année 2017. C’est dire que le président est au minimum de sa forme contrairement à ce que distille régulièrement Ould Abbès dans ses messes médiatiques.

Ouyahia, comme une fatalité ?

Tout comme la nomination de Tebboune en mai dernier, personne ne s’attendait en effet au retour Ahmed Ouyahia. On l’avait même dit en froid avec le clan des Bouteflika avant son retour en mars 2014 comme chef du cabinet du président. Mais il est surtout connu pour être un serviteur zélé, un homme qui ne répugne pas à mettre les mains dans le cambouis et pour qui les arcanes du pouvoir ne sont pas de la science fiction. Mais qu’est-ce qui a bien présidé à ce retour précipité ? s’interroge la rue déjà bien en peine en cet été caniculaire. L’accélération de l’agenda présidentiel ? La crise économique ? L’inquiétude des capitales occidentales ? La montée en puissance des hommes d’affaires ?

Pour ceux qui le connaissent, Ouyahia n’est pas Abdelmadjid Tebboune. Ce dernier s’est laissé isoler en s’attaquant frontalement à la nomenklatura des affaires, sans réussir. Madré mais impopulaire, Ouyahia l’a fait avec succès par le passé en se débarrassant notamment d’Orascom en 2012, un groupe pourtant qui avait accès au président. Réussira-t-il a tenir tête au groupe qui tient le Forum des chefs d’entreprises, devenu un puissant lobby d’argent ? Homme des rouages rompu à la négociation et habitué à évoluer dans les capitales occidentales notamment, Ouyahia est manifestement cet homme qui pourrait rassurer Washington et Paris et le milieu d’affaires.

Pied-de-nez au FLN

Le limogeage comme la désignation d’un Premier ministre devrait se faire après consultation du parti majoritaire, autrement dit le PFLN. La constitution est claire sur le sujet. Dans son article 90 alinéa 5, la constitution est clair, le président « nomme le Premier ministre, la majorité parlementaire consultée, et met fin à ses fonctions ».

Le RND est arrivé deuxième aux dernières législatives, il n’est donc pas majoritaire. Si on était dans un fonctionnement normal des institutions, Ouyahia n’aurait pas été désigné Premier ministre. dans ce cas comme dans celui du limogeage de Tebboune, il est très peu probable qu’Ould Abbès ait été consulté. Dans cette affaire comme dans le reste, on sait que la Constitution n’a jamais été ce texte fondamental, intouchable et au-dessus du président.

Par ailleurs, il faut rappeler que même si les deux partis sont liés au pouvoir, il y a une ligne invisible entre le FLN et le RND. Ouyahia n’a jamais en réalité été dans les bonnes grâces des dirigeants du FLN. Et en dépit de leur appartenance à ce fameux groupe appelé un temps la « majorité présidentielle », on se souvient des amabilités qu’avait lancées Amar Saadani contre Ahmed Ouyahia. En cela, cette nomination est un coup de canife dans le dos de ce PFLN dont le président « d’honneur n’est autre que Bouteflika.

Auteur
Yacine K.

 




L’ancien patron du DRS victime d’un malaise

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Renseignement

L’ancien patron du DRS victime d’un malaise

Le général à la retraite, Mohamed Mediene, ancien patron du Département du renseignement et sécurité (DRS) a été hospitalisé d’urgence dans le week-end à l’hôpital militaire d’Ain Naadja. 

Que peut bien avoir le général de corps d’armée Mohamed Mediène dit Toufik ? L’ancien tout puissant patron du DRS a été hospitalisé, ce week-end, à l’hôpital militaire de Ain Naadja à Alger, révèle maghrebemergent. Selon ce journal en ligne, le général Toufik a eu un malaise dans la soirée de mercredi.

Evacué vers Aïn Nadja, le staff médical lui a fait subir une série d’examens poussés. Puis il a dû passer 24 heures en observation. En retraite, de nombreux médias ont justifié pour autant cette hospitalisation urgente par un surmenage. Agé de 73 ans, Mohamed Mediene a été mis en retraite de son poste de chef des renseignements le 13 septembre 2015 par le président Bouteflika. Il a été remplacé par le général Athmane Tartag. Fin janvier 2016, le président Bouteflika a signé le décret de dissolution du DRS pour le remplacer par la Direction des affaires sécuritaires (DAS).

Secret, réservé et ne donnant jamais aucun entretien à un média, le général Toufik a été pressenti sur le retour au devant de la scène par de nombreuses sources ces dernières semaines. Pour autant, l’homme reste dans l’ombre, fidèle à sa légende.

Auteur
La rédaction

 




Bouteflika-Macron : beaucoup de bavardage pour peu de choses

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Alger/Paris

Bouteflika-Macron : beaucoup de bavardage pour peu de choses

Le président Bouteflika peut partir tranquillement en vacances. Après avoir attendu 15 jours, il vient de recevoir la réponse d’Emmanuel Macron à sa lettre envoyée pour la célébration du 14 Juillet. Quelle vaine !

Disons-le tout de suite, l’Algérie de Bouteflika n’a pas reçu de lettre de félicitations pour le 5 Juillet de la part du nouveau locataire de l’Elysée comme s’est empressé de le faire le locataire d’El Mouradia pour le 14 Juillet. La précision expédiée, revenons à ce courrier dont se gargarise les voix officielles du pays depuis 24 heures.

« Je vous remercie pour votre courrier à l’occasion de la fête nationale du 14 juillet et je saisis cette occasion pour vous transmettre, au nom de la France et en mon nom personnel, un message chaleureux d’amitié et de respect », s’enthousiasme le président français dans un courrier très touchant que la presse officielle s’est empressée de rendre public.

Cependant, cette missive d’Emmanuel Macron tombe au moment où le Sénat français rend un rapport des plus critiques sur la gouvernance Bouteflika qu’il soupçonne, au passage, de vouloir rempiler pour un 5e mandat après 20 ans au pouvoir. Rien que ça !

« Il n’existe pas de réelle pression populaire en faveur d’une évolution du régime, en dépit de l’impression de sclérose que peut dégager le pouvoir en place », persiflent les auteurs du rapport qui ont auditionné, (selon Tsa qui a rendu publique l’information), plusieurs personnalités algériennes et françaises dont Abdelkader Bensalah et Saïd Bouhadja, respectivement président du Conseil de la Nation et président de l’APN.

En réalité, le rapport des sénateurs français sonne comme un démenti à son courrier empreint de beaucoup de complaisance : « La nature des échanges commerciaux laisse de fait apparaître une dissymétrie entre l’Algérie, État rentier n’exportant que ses hydrocarbures, et l’Union européenne, puissance commerciale au panel de produits plus développé », laisse douter les sénateurs français. Et d’enfoncer le clou des certitudes de leur président : « L’ouverture attendue, matérialisée par l’accord d’association […] n’a pas encore produit tous ses effets ». Puis de lâcher cette vérité économique que tout Algérien, au demeurant connaît : il est « possible de s’interroger sur la réelle appétence des autorités algériennes pour le libre-échange, en l’absence de diversification de l’économie locale. Le pays n’exporte in fine que de l’énergie ». Malgré les promesses serinées depuis 20 ans par les autorités : « 99,7 % des exportations de l’Algérie vers l’Union européenne en 2015 consistaient en énergie et dérivés du pétrole et 0,3 % en produits agricoles », précise le rapport.

Nous sommes fondés à croire que le président français n’ignore rien de l’état lamentable de l’économie algérienne. Mais pour lui, comme pour les précédents présidents français, l’Algérie est avant tout un souk pour écouler la marchandise produite dans l’hexagone, au mieux un puits de pétrole qui assurera éventuellement l’énergie en cas de crise avec le géant russe. Le reste n’est que cynisme diplomatique car quand Emmanuel Macron salue « votre engagement (s’adressant à Bouteflika) décisif dans le développement du partenariat d’exception qui unit la France et l’Algérie. Votre impulsion dans la refondation engagée en 2012 avec mon prédécesseur a permis des avancées spectaculaires dans tous les domaines », il pense marchés et débouchées au profit des entreprises françaises et non la création de richesses en Algérie. Que d’envolées ! Seulement on sait que concrètement (pour reprendre les termes de l’auteur), il n’y a aucun partenariat d’exception en perspective comme d’ailleurs le promettaient en leur temps Nicolas Sarkozy et François Hollande avant. La preuve ? La dernière mesure discriminatoire prise par l’ambassade de France en Algérie en direction des étudiants algériens souhaitant poursuivre leurs études en France.

La colonisation : cette mémoire de la discorde !

Dans son message, à l’occasion du 5 Juillet, le président Bouteflika s’est laissé tenter encore une fois par l’invocation du passé colonial. « Notre peuple exige toujours une reconnaissance de ses souffrances de la part du colonisateur d’hier, la France ».

Mais Emmanuel Macron, lui, préfère insister pour « assumer notre mémoire commune dans sa vérité et son intégrité. Vous connaissez mes convictions et ma détermination à assumer cet héritage partagé dans un esprit de lucidité et d’apaisement ». Ce « grand ami de l’Algérie » comme l’a qualifié Bouteflika laisse encore ouvert son robinet d’eau tiède. « Il nous faut faire de ce regard sur notre passé le point d’appui d’un nouvel élan vers l’avenir pour notre partenariat bilatéral. Plus que jamais, celui-ci doit se construire sur des projets concrets, structurants et mutuellement bénéfiques », a-t-il professé. D’une chiquenaude, le président français veut ramener son destinataire à une réalité plus prosaïque. Avant lui, François Hollande et Nicolas Sarkozy ont passé leurs mandats aussi avec le même président Bouteflika à parler de « partenariat d’exception ». En pure perte.

En perte de popularité dans son pays (-9%), il annonce ce qu’il appelle « le projet de grande visite officielle que je serais très heureux et honoré d’effectuer en Algérie, au moment qui vous conviendra ».

Le décalage entre les deux présidents est décidément cosmique. L’un est élu démocratiquement, l’autre a tripatouillé deux fois la Constitution pour rester deux décennies au pouvoir. L’un dirige une démocratie, l’autre une kléptocratie. Aussi, bien malin celui qui saura ce que dira ce jeune président de 40 ans à cet autre de 80 ans qui aura connu tous les présidents de la 5e république française.

Par ce courrier enflammé, Emmanuel Macron rallonge le manche qui cogne sur les libertés en Algérie. Pire : il flatte celui là même qui a conduit l’Algérie aux portes de la faillite et fait d’elle la risée du monde.

Pour ce jeune président, comme ses prédécesseurs finalement, la démocratie s’arrête en Corse. Plus au sud, c’est la Françafrique et ses « valeurs ». Les républiques bananières des autocrates qui meurent au pouvoir. Qu’importe la liberté ! Alors soutenir Bouteflika, ou encore Idriss Deby, Paul Kagamé, Joseph Kabila relève des habitudes bien françaises.

Par ses silences – de la realpolitik, diront les spécialistes – l’histoire des deux pays se souviendra du président Macron comme celui qui aura porté les derniers coups de marteau au cercueil d’une démocratie bien mal emmanchée ces dernières années. Pour sa gouverne, tout porte à croire qu’il débute sa première année avec un déplacement à Alger qui restera dans les annales. Le reste est un simple bavardage de circonstance.

 

Auteur
Yacine K.

 




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