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lundi, 10 novembre 2025
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Mai Soixante-huit : les parfums d’une journée…politique

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Mai 1968

« La philosophie n’est… pas une science et même réfléchie, théorisée, pensée, elle reste une opinion à la différence de la démarche scientifique qui, face aux opinions, en fera ou non des données incontournables. » (Jean-Marie André) (1)

Les pouvoirs ont leurs récits, leurs acteurs et même leurs adversaires. Cela se constate dans les épreuves médiatiques auxquelles sont soumis les personnages publics.

Que pouvons-nous retenir de mai 68 au moment où les forces résistantes sont approchées par les réflexes bourgeois ? Les concepts de mai 68 sont-ils nés d’une solitude mélancolique ? « Tout concept est historique. Il serait donc convenable d’analyser tout concept dans le contexte historique où il est né. » (Besim F. Dellaloğlu) (2) 

D’abord, l’unité fantasmagorique des courants de gauche. Il y avait dans ce climat insurrectionnel une sorte de mythologie qui ne laissait aucun doute sur ses dérapages réactionnaires. Les universitaires ont, ce jour, signé la mort du politique, en assujettissant le politique à la science.

Malgré la soif de savoir qui a marqué le mouvement, le politique se démystifia et mit les clivages légitimes à l’épreuve de la sentimentalité ambiante. « Dès lors qu’il y a fête, pourquoi laisserions-nous le politique nous séparer. » auraient dit les humanistes sensationnels et les bourgeois épris de la passion occasionnelle.

Le fait de faire la communion, c’est une manière de reculer sur ses convictions politiques comprises comme des déterminants « ludiques » : c’est dire comment certains responsables politiques cèdent sur l’essentiel pour oublier l’épreuve à mener à long terme. « L’épistémologie de l’ignorance » (Godrie, B. & Dos Santos, M.) (3) a-t-elle pu s’instituer comme espace disciplinaire ?  

Ensuite, c’est la consommation du politique. Certains universitaires dont l’Existence n’a jamais rencontré le politique se sont offert l’objet public en thème politique qu’auparavant nous considérions comme relevant d’un des édifices historiques les plus fragiles et non moins lourds, à savoir la culture. Les étudiants ont tenté de revivifier le pathos judéo-chrétien en laissant le politique être écarté par des réflexes spirituels exigés par ce que la culture occidentale reprenait à la réalité idéologique. Pour ne pas exercer le politique comme science non technique, c’est-à-dire très attachée à l’idéologie humaine (ce que les masses laborieuses ont construit contre les forces nihilistes -malgré elle-), mais comme union de l’homme avec l’altérité fugace, les militants auraient choisi le camp de la clémence compassionnelle. De là, nous pourrions dire que la culture fait intervenir la morale dans la légitimité de l’opération technologique. « La technologie est intrinsèque à la créativité et à la culture humaines. » (Chellis Glendinning) (4)  

En dernier lieu, le verbe avait compris que l’unité humaine est devenue un thème périmé. Les terreurs idéologiques se sont accentuées et ont construit des systèmes de pensée radicaux. La pensée fut presque monopolisée par les actants politiques dont la militance s’est incrustée dans les pores des textes, oscillant entre le sacerdotal et le profane, entre le sacral et le profane.

Les slogans et les énoncés politiques ont radicalement scellé le sort du politique en le faisant unir à l’Existence. Le bio-civil (5) voit son arrivée : le mythe de la rébellion ontologique commence à s’instaurer, et une peur sidérante prenait place. Le politique voyait sa vocation passionnelle se réduire à néant. Les Êtres commencent à quitter l’ambiance sociale et à s’affronter à la dure réalité de l’Existence. L’usure sournoise fait taire les militants les plus intransigeants. 

Que dire d’une révolte qui a réussi à instaurer un climat politique fascinant ? Que du bien. Mais il fallait s’attendre à ce que diraient les contingences et leurs adversaires. L’action politique devient plus claire, mais peu inspirante. Les limites du politique, c’est aussi et surtout la neutralité, voire la passivité du verbe politique. « Le théâtre de la tragédie politique a fermé ses portes. » aurait avoué un philosophe à ses disciples.

Les disciples grandissent et la révolution disparaît : que pouvons-nous faire du déshonneur que nous avons récolté de nos vacillations ? Mourir dans les caniveaux de l’indignité où nous avons trouvé de la dignité.  Une faveur : l’ouverture de pistes de réflexion à celles et ceux pour qui la fin de la fête pourrait signifier le retour à la normale.

« Le progrès scientifique, l’usage de techniques de production et de commercialisation toujours plus raffinées, l’homogénéisation progressive des modes de consommation et de communication conduisent inexorablement vers un monde globalisé, au moins virtuellement universel. » (Serge Paugam) (6) 

Madi Abane 

  1. André, J.-M. (2020). Science et Idéologie : les sœurs ennemies… Hegel, 3(3), 274-281. https://doi.org/10.3917/heg.103.0274
  2. Dellaloğlu, B.-F.-. (2016). Le conservatisme sans mémoire. Topique, 136(3), 27-35. https://doi.org/10.3917/top.136.0027.                                                                                                                                  
  3. Godrie, Baptiste et Marie Dos Santos. « Présentation : inégalités sociales, production des savoirs et de l’ignorance. » Sociologie et sociétés, volume 49, numéro 1, printemps 2017, p. 7–31. https://doi.org/10.7202/1042804ar 
  4. Glendinning, C., Traduit de l’anglais par Lefèvre, M. (2020). La technologie est politique. Écologie & Politique, 61(2), 109-115. https://doi.org/10.3917/ecopo1.061.0109
  5. Ce mot (j’oserais dire concept si…) je l’ai créé et utilisé dans ma thèse de doctorat pour signifier les limites des marques d’identité à l’ère moderne. Mais aussi la nécessité de mettre l’accent sur l’épistémè et son importance dans la recherche universitaire algérienne. 
  6. Serge Paugam, « Les contradictions constitutives de la modernité », Sociologie [Online], N°4, vol. 3 |  2012, Online since 13 February 2013, connection on 19 April 2025. URL : http://journals.openedition.org/sociologie/1532
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Propos controversés de Belghit sur tamazight : le FFS et la fondation Amirouche dénoncent, les nationalo-islamistes se taisent

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Mohamed Lamine Belghit
Le nihiliste et raciste Mohamed Lamine Belghit

Une nouvelle polémique identitaire secoue l’Algérie après les propos controversés de Mohamed Lamine Belghit, qui a qualifié l’amazighité « d’invention franco-sioniste ». Des déclarations jugées dangereuses et clivantes, qui ont suscité de vives réactions dans les milieux politiques et intellectuels – à l’exception notable des partis nationalo-islamistes, dont le silence gêné interpelle.

Le premier à monter au créneau fut le Front des forces socialistes (FFS). Lors d’un discours prononcé à Ouargla, son premier secrétaire national, Youssef Aouchiche, a fermement dénoncé la montée inquiétante des « discours de haine et de division », dans un contexte régional et international qualifié de « hautement sensible ».

Sans nommer directement le pseudo-professeur Belghit, le FFS s’est insurgé contre « les déclarations empoisonnées » de certains « pseudo-intellectuels » qui s’attaquent aux fondements de l’identité algérienne, constitutionnellement définie comme étant composée de l’islam, de l’amazighité, de l’arabité et de la modernité.

Selon le FFS, de telles dérives ne peuvent être considérées comme de simples opinions, mais bien comme des tentatives de déstabilisation nationale, appelant à une riposte étatique ferme.

Le parti réitère son attachement à une Algérie unie dans sa diversité, affranchie des influences idéologiques étrangères, qu’elles soient moyen-orientales ou occidentales.

Plus tranchante encore, la Fondation Colonel Amirouche, par la voix de son président Nordine Ait Hamouda, a condamné frontalement les propos de Belghit et dénoncé ce qu’elle considère comme une manœuvre orchestrée par les Émirats arabes unis, qualifiés de « sous-traitants de l’agenda sioniste au Maghreb et au Sahel ».

Le communiqué va plus loin en évoquant des complicités économiques anciennes, accusant certaines élites d’avoir livré à cet État « la gestion de nos ports, des pans entiers de notre sidérurgie, et même de la Société nationale des tabacs et allumettes (SNTA)

« Les Amazighs sont les enfants autochtones et authentiques de l’Afrique du Nord », martèle la Fondation, qui voit dans les attaques identitaires une continuité de la politique coloniale de négation de l’être algérien. Un appel est lancé à la formation d’un front républicain pour faire face à ces dérives internes et aux pressions extérieures.

Mais ce qui frappe dans cette affaire, c’est le mutisme total des partis à référentiel islamiste et nationaliste, souvent prompts à se positionner sur les sujets identitaires. Leur silence face aux dérives verbales de Mohamed Lamine Belghit, pourtant connues pour leur proximité idéologique avec certaines de ses positions, soulève des interrogations sur leur rapport à l’amazighité et sur leur capacité à défendre une vision inclusive de la nation.

En filigrane, cette affaire révèle une fracture persistante dans la conception même de l’identité nationale. Alors que certains prônent une Algérie plurielle, enracinée dans toutes ses composantes historiques et culturelles, d’autres semblent hésiter à rompre avec une lecture exclusive et réductrice du fait national.

Samia Naït Iqbal

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Batna : Mytocrypt célèbre le cinéma fantastique et annonce de nouveaux projets

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Mytocrypt

 La Maison de la Culture de Batna a accueilli l’événement cinématographique Mytocrypt , une manifestation qui a mis à l’honneur le cinéma fantastique tout en offrant une scène vibrante aux talents batnéens. Organisé par ERA Club, le ciné-club dynamique de l’Université Batna 2, Mytocrypt s’est affirmé comme un espace de rencontre entre jeunes créateurs, artistes confirmés et passionnés du septième art.

La soirée a rassemblé de nombreuses figures artistiques locales, dont Mabrouk Ferroudji et Issam Taachit, témoignant de la vitalité culturelle de la région. L’événement a également été marqué par l’honorification de trois personnalités du monde artistique : Zola, Fifi Bahloul et Mohammed Taher Zaoui, qui ont reçu un vibrant hommage de la part des organisateurs et du public.

Outre la projection de courts métrages, notamment celle de Vantablack — œuvre réalisée par Akram Bensaid, président du club, et déjà doublement primée au Festival universitaire arabe du court métrage — Mytocrypt a été l’occasion d’annoncer deux projets d’envergure.

Le premier, intitulé THE DREAM, prévoit l’organisation d’ateliers à travers l’ensemble du territoire algérien, axés sur l’écriture de scénarios, la réalisation et l’actorat. Ces ateliers offriront aux jeunes participants la possibilité de produire leurs propres courts métrages.

Le second projet annoncé est le lancement prochain d’un festival de cinéma baptisé Cinemania, qui ambitionne de devenir une plateforme incontournable pour les cinéastes émergents et confirmés, tout en valorisant le patrimoine culturel et imaginaire algérien.

Sous l’impulsion d’Akram Bensaid et d’une équipe de jeunes artistes engagés, ERA Club continue de s’imposer comme un moteur de créativité et de renouveau pour le cinéma algérien, en particulier dans les genres encore peu explorés du fantastique et du mythe.

Avec Mytocrypt, Batna confirme sa place de carrefour culturel et cinématographique, où l’imaginaire se conjugue au présent pour dessiner l’avenir du septième art en Algérie.

Djamal Guettala

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Ghoufi Art 2025 : quand l’art et le patrimoine se rencontrent aux balcons de Ghoufi

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Balcons du Ghoufi
Balcons du Ghoufi

Dans le cadre enchanteur des Balcons de Ghoufi, au cœur des Aurès, la troisième édition de l’événement #Ghoufi_Art a ouvert ses portes le 1er mai 2025, marquant une célébration vibrante du Mois du Patrimoine. Jusqu’au 3 mai, cette manifestation artistique et culturelle invite les visiteurs à un voyage où se mêlent beauté naturelle, richesse historique et expression artistique contemporaine.

Organisée par l’Association Agir Villages Aurès, en collaboration avec plusieurs associations culturelles locales et le soutien des autorités, cette édition rassemble plus de 40 artistes plasticiens venus de différentes régions du pays. Leurs œuvres, exposées en plein air et dans des espaces aménagés sur les hauteurs de Ghoufi, offrent un panorama riche et varié de la scène artistique algérienne.

Outre l’exposition collective, Ghoufi Art 2025 propose une série d’activités destinées à tous les publics : des ateliers artistiques pour enfants, des sessions de découverte du patrimoine culturel local, ainsi que des excursions vers les sites emblématiques de la région comme Ghassira, T’kout et Djémila.

Les Balcons de Ghoufi, situés dans la wilaya de Batna, sont un site classé patrimoine national depuis 1950. Célèbres pour leurs paysages spectaculaires mêlant falaises abruptes, oasis luxuriantes et anciennes habitations troglodytiques, ces lieux incarnent la mémoire vivante de l’histoire humaine dans les Aurès. Des initiatives sont actuellement en cours pour inscrire ce site exceptionnel au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Les associations locales telles que l’Association des Amis de Medghassen et Ghoufi Tourisme jouent un rôle clé dans la promotion et la préservation de ce patrimoine. Grâce à leurs efforts conjoints, Ghoufi Art devient bien plus qu’un simple événement artistique : il s’impose comme un véritable levier de valorisation culturelle et touristique de la région.

L’événement s’achève le 3 mai, mais son impact continuera de résonner dans les cœurs des participants, qui auront goûté à l’authenticité d’un patrimoine unique, sublimé par la créativité d’artistes passionnés.

Djamal Guettala

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Tunisie : la paranoïa judiciaire d’un régime en perdition

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Moncef Marzouki
Moncef Marzouki

Le régime tunisien franchit une nouvelle étape dans la répression politique en instrumentalisant une fois de plus la justice pour faire taire les voix dissidentes. 

Un nouveau procès, d’évidence politique, vient d’être lancé contre des figures de l’opposition et de la société civile : Moncef Marzouki, ancien président de la République, Imed Deymi, ancien directeur de cabinet de Moncef Marzouki, candidat injustement écarté par l’ISIE à l’élection présidentielle d’octobre 2024, Abderrazak Kilani, ancien bâtonnier de l’Ordre national des avocats,Abdennacer Ayed Limam, président de l’Association des victimes de la torture en Tunisie (AVTT), Adel Mejri, secrétaire général de l’AVTT,  Cette offensive judiciaire fait suite à une conférence tenue le 9 mars 2024 à la Maison des associations de Genève, organisée par l’AVTT.

L’événement portait sur les violations du droit à un procès équitable et sur l’absence d’indépendance du pouvoir judiciaire en Tunisie. À cette occasion, les intervenants ont annoncé leur intention de porter plainte devant les instances internationales, notamment onusiennes, contre 54 magistrats accusés de collusion avec le pouvoir dans ces violations. 

L’ouverture des poursuites n’émane pas des magistrats prétendument visés, mais du ministère public, agissant sur ordre direct de la ministre de la Justice — preuve manifeste de l’immixtion de l’exécutif dans les affaires judiciaires. Ce procédé illustre la dérive autoritaire d’un pouvoir obsédé par la neutralisation de toute contestation, même symbolique. 

Il convient de rappeler que Moncef Marzouki et Abderrazak Kilani font déjà l’objet de condamnations par contumace dans d’autres affaires fabriquées de toutes pièces, ce qui confirme leur statut de cibles privilégiées d’un régime répressif aux abois. 

Face à cette nouvelle mascarade judiciaire, le CRLDHT :

Dénonce avec la plus grande fermeté cette manœuvre de persécution politique par voie judiciaire, qui trahit la fébrilité du régime en place.

Exprime sa pleine solidarité à l’égard de toutes les personnalités poursuivies pour avoir exercé leurs droits fondamentaux à la liberté d’expression, d’association et de critique du pouvoir.

Considère ce procès comme un aveu involontaire de la validité des accusations portées contre certains magistrats : la réaction disproportionnée de l’exécutif, par l’entremise du parquet, accrédite la pertinence des dénonciations exprimées lors de la conférence de Genève.Réaffirme son soutien sans faille aux magistrates et magistrats qui refusent de se soumettre aux injonctions de l’exécutif et qui défendent avec courage l’indépendance de la justice, condition essentielle de toute démocratie digne de ce nom. 

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L’exil politique à l’ère des réseaux sociaux

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Image par Thomas Ulrich de Pixabay

Des régimes autoritaires nourrissent encore l’illusion qu’ils peuvent anéantir l’opposition politique et faire taire leurs détracteurs en recourant à la répression, en muselant les libertés et en verrouillant le champ politique et médiatique.

De nombreux opposants sont contraints, souvent pour avoir simplement exprimé des idées, des opinions ou adopté des postures politiques dissidentes, de fuir leurs pays respectifs et chercher refuge sur des terres d’asile afin d’échapper à la répression et à l’arbitraire d’une justice politique. Loin d’être un choix volontaire, cet exil s’impose à eux comme une nécessité de survie, un ultime recours pour échapper à la prison, à la torture, voire à la peine capitale. 

Très souvent, ce sont les régimes autoritaires eux-mêmes qui, en cherchant à se débarrasser de leurs opposants les plus en vue, provoquent ou facilitent leur départ, soucieux d’éviter le discrédit qu’entraînerait leur incarcération aux yeux de l’opinion nationale et internationale. L’exil devient alors une alternative soigneusement orchestrée à la détention, une manière plus subtile de les écarter. Bannir ses opposants, dans le dessein de les isoler de leur peuple et les réduire à l’oubli, plutôt que de les enfermer devient ainsi une stratégie pour les neutraliser, et de préserver la quiétude du régime à moindre frais. 

L’histoire abonde de figures d’opposants contraints à l’exil, forcés de quitter leurs patries sous la pression de régimes autoritaires. Ce phénomène d’exil est propre aux Etats despotiques. Des nations telles que l’Iran, Cuba, la Russie, le Venezuela, l’Afghanistan, la Syrie, ou encore la Turquie comptent parmi les principaux foyers de cet exil politique contemporain.  L’Algérie, malheureusement, s’est récemment inscrite dans cette logique, notamment à travers une législation répressive, en particulier l’article 87 du code pénal, qui entretient une confusion entre activisme politique et terrorisme.  À l’inverse, aucun État véritablement démocratique ne connaît ce phénomène. Car la démocratie, en garantissant les libertés d’expression, d’opinion et d’organisation, offre un cadre où l’opposition peut s’exprimer librement, s’organiser légalement, et prétendre au pouvoir par la voie des urnes.

Stigmatisés, diabolisés, persécutés, ces dissidents sont souvent voués à l’opprobre public, affublés de l’étiquette infamante de traîtres à la nation. Et si leur fuite leur permet d’échapper à la répression immédiate, l’exil n’a pas toujours été un havre de paix. Certains ont été traqués jusque dans leurs terres d’asile, parfois même assassinés par des agents clandestins des régimes qu’ils ont dénoncés.

On se souvient du sort tragique qu’a connu l’ancien président iranien Bani Sadr, le journaliste saoudien Jamal Khashoggi, le signataire des accords d’Evian Krim Belkacem, l’avocat Ali Messili, et tant d’autres encore dans le monde dont les noms composent une longue liste de victimes de l’arbitraire transnational. 

Cependant, il n’est pas rare que certains de ces exilés politiques, ayant échappé à la purge, retrouvent de leur vivant leur patrie sous les acclamations. Ils la retrouvent soit à la faveur d’une ouverture politique démocratique souvent arrachée dans le sang ou en répondant à l’appel de la patrie en proie à une crise qui submergent les tenants du despotisme. Ceux-là même que l’on avait donc qualifié de traitres sont parfois réhabilités, érigés en héros, en libérateurs, voire appelés à prendre la tête du pouvoir qu’ils avaient autrefois combattu. Les traitres d’hier deviennent alors soudainement les patriotes d’aujourd’hui.

Autrefois, l’exil politique est perçu comme une défaite. Les opposants réfugiés à l’étranger ont été privés de tout canal d’expression. La raison d’État, les intérêts économiques ou diplomatiques poussaient bien souvent les pays d’accueil à restreindre leur liberté de parole, voire à se rendre complices de leur mise au silence. Les médias, eux aussi, demeuraient frileux à leur ouvrir leurs tribunes, les reléguant à la marge du débat public. 

Mais aujourd’hui, l’exil politique peut devenir, grâce aux réseaux sociaux, un véritable levier d’action. Ces outils ont profondément bouleversé la donne. En brisant les frontières physiques et politiques, ils offrent à ces voix longtemps étouffées une plateforme d’expression puissante. Depuis l’étranger, et comme s’ils n’avaient jamais quitté leur pays, les dissidents peuvent désormais porter leur message dans leur pays d’origine, et bien au-delà, tout en jouissant de la liberté d’expression garantie par les démocraties qui les hébergent. Leur parole, affranchie des entraves de la censure, se diffuse largement et maintient la pression constante sur les pouvoirs en place. Ainsi, loin de les affaiblir, cette expulsion orchestrée tend à ériger ces opposants en figures emblématiques de la résistance, d’autant plus écoutées qu’elles incarnent, au-delà des frontières, l’expression d’une liberté confisquée.

Toutes les tentatives visant à faire taire ces exilés échouent. Les demandes répétées d’extradition, qui s’apparentent souvent à des tentatives de les faire livrer à leurs bourreaux, formulées par les régimes d’origines, se heurtent à l’intransigeance d’une justice indépendante et aux principes de l’Etat de droit en vigueur dans les pays d’accueils. 

Face à cette impasse, les régimes autocratiques n’hésitent plus à recourir à leur instrumentalisation à des fins géopolitiques, voire les utiliser comme objets de chantage diplomatiques, pour faire pression sur les démocraties. Il n’est d’ailleurs pas rare que certains États conditionnent leur coopération migratoire, notamment le contrôle des flux en partance de leurs territoires, à l’extradition de ces opposants politiques.

Une telle posture met les démocraties hôtes dans une situation délicate, confrontées au dilemme de protéger les exilés au nom des droits fondamentaux ou de ménager les régimes despotiques pour préserver les relations bilatérales sensibles et tiraillées entre la défense du droit d’asile et les impératifs de la realpolitik.

Ainsi, loin de faire taire les voix contestataires, la répression et l’entrave aux libertés fondamentales n’ont fait que déplacer le centre de gravité du débat politique et projeter les crises et les fractures internes sur la scène internationale. L’exil forcé de dissidents politiques conduit à une véritable internationalisation des conflits domestiques, suscitant des tensions récurrentes avec les pays d’accueil, souvent accusés par les régimes autoritaires de complaisance, voire de complicité.

Ainsi, le destin national, censé se dessiner uniquement dans les arènes nationales, se reconfigure désormais depuis l’étranger, du fait de leur verrouillage, à partir de plateformes numériques accessibles à tous, mais échappant à tout contrôle des États. Cette internationalisation de la contestation fragilise l’autorité des pouvoirs en place, en révélant à l’opinion publique internationale, mais aussi nationale, les dérives et les abus qu’ils s’efforcent de dissimuler.

Plus inquiétant encore, le vide béant laissé par une opposition démocratique muselée et un paysage médiatique souvent déconnecté des réalités sociopolitiques ouvre la voie à l’émergence de figures marginales. Propulsés sur le devant de la scène politique en acteurs majeurs, en lieu et place d’alternatives structurées, ces figures se substituent aux véritables porteurs de projets politiques.

Profitant des libertés garanties par les démocraties d’accueil, ces délinquants politiques investissent l’espace public à coups de désinformation, d’attaques personnelles, d’étalage de vie privée et de mises en scène de leurs images. Se familiarisant avec les codes des réseaux sociaux, ils s’érigent en leaders autoproclamés, se distinguant non par la rigueur du propos ou la clarté de la vision, mais par la polémique, le dénigrement systématique et la recherche du sensationnalisme.

En définitive, les Etats despotiques ne parviennent plus à réduire leurs opposants au silence. Les exilés, désormais dotés de moyens puissants et d’une liberté retrouvée, deviennent les vecteurs d’un contre-discours qui fragilise l’autorité des régimes en place. Pensant pacifier la scène politique en éradiquant toute forme d’opposition visible, ces régimes n’ont fait que déplacer le champ de la contestation. Celle-ci s’exprime désormais depuis l’étranger, avec une portée démultipliée, échappant à leur contrôle, et exacerbant les vulnérabilités du système qu’ils s’évertuent à verrouiller.

Dès lors, si l’on veut éviter que l’espace politique ne soit accaparé par des figures opportunistes ou détourné à des fins purement sensationnalistes par des influenceurs courant après des abonnés, il est impératif de rouvrir les canaux d’expression légitimes et de garantir un véritable pluralisme. Seule l’instauration d’un cadre démocratique, fondé sur l’État de droit, la liberté d’expression et le respect des droits fondamentaux, permettra de confiner le débat politique dans la sphère nationale, en lui restituant sa dignité, sa rigueur et sa profondeur. 

Ouvrir le champ politique, loin d’être un signe de faiblesse, constitue aujourd’hui une exigence de stabilité. Car un pouvoir durable n’est pas celui qui étouffe les voix discordantes, mais celui qui accepte la contradiction comme moteur de progrès et de légitimité.

Mais cette stratégie de relégation, censée affaiblir les opposants en les coupant de leur ancrage national, produit souvent l’effet inverse. L’exil ne les réduit pas au silence ; il transforme leur parole. Il la libère des entraves de la censure et l’amplifie à travers les canaux transnationaux. Loin de les marginaliser, l’exil les érige parfois en figures emblématiques de la résistance, d’autant plus écoutées qu’elles incarnent, au-delà des frontières, l’expression d’une liberté confisquée.

De plus, en contraignant leurs opposants à l’exil, les régimes autoritaires contribuent à déplacer le centre de gravité du débat politique. Celui-ci ne se joue plus uniquement dans les arènes nationales verrouillées, mais se déploie désormais depuis l’étranger, sur des plateformes accessibles à tous, dans un espace numérique qui échappe au contrôle des États. Cette transnationalisation de la contestation fragilise l’autorité des pouvoirs en place, en révélant à l’opinion publique internationale, mais aussi domestique, les dérives et les abus qu’ils s’efforcent de dissimuler.

Hamid Ouazar, ancien député de l’opposition

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Belghit ou l’anti-kabylisme primaire

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Mohamed Lamine Belghit
Le négationniste Belghit.

Les déclarations du « douctour » Mohamed Lamine Belghit ne sont en rien surprenantes. Elles sont le prolongement naturel d’une cabale sans nom contre tout ce qui est kabyle ou amazighe.

Les vociférations ou insultes des autres Naima Salhi et consorts de même que les reniements de Bengrina et cie, restés impunis pendant des années, sont un encouragement implicite à ce genre d’attaques exprimant en fait une haine viscérale de soi.

Ce sieur qui se dit spécialiste en histoire ayant réitéré ses origines chaouies, et donc amazighes, dans une déclaration faite auparavant.

Cela s’appelle de l’auto-flagellation.

Le fait qu’il se soit exprimé sur une chaîne émiratie nous rappelle un autre épisode : celui de l’interdiction de l’emblème identitaire amazighe, invisible actuellement même au stade Hocine-Aït-Ahmed de Tizi-Ouzou.

Une interdiction, dit-on, suggérée par les Emirats arabes unis.

Il ne s’agit ni plus ni moins que d’un appel « officiel » qui ne dit pas son nom à tout un peuple de se renier, sachant que toute l’Afrique du Nord est amazighe.

L’Orient « panarabiste » méprisant manifestement tout ce qui rappelle les racines millénaires de tout un vaste territoire que les différentes invasions n’ont pas réussi à faire disparaître comme c’est malheureusement le cas pour d’autres civilisations, incas ou aztèques entre autres, redoublent périodiquement de férocité pour asseoir leur hégémonie sur les populations de cette région naïvement acquises à leurs interprétations exclusivistes de la religion.

Il en ressort des conflits identitaires interminables qui déstabilisent les pays nord-africains sur fond d’idéologies prônant le rejet de l’autre et une vision rigoriste de l’Islam.

Et plus, eux, ils font tout pour en sortir et se projeter dans la modernité, comme le fait le roi Ben Salman en Arabie Saoudite, plus ils font le forcing à travers leurs médias propagandistes très suivis en Afrique du Nord afin de maintenir les populations amazighes dans le déni, la haine de soi et la soumission.

Sans prise de conscience à la fois étatique et populaire, la situation restera explosive et manipulable à souhait par des « puissances » maléfiques agissant sous couvert de la religion.

L’Algérie a tout à gagner en y faisant face avec détermination ; et en effectuant un retour aux sources salutaire.

Aucun arbre ne peut survivre à une transplantation contraire à la nature de nouvelles racines.

Youcef Oubellil, écrivain

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Lamine Belghit arrêté : la justice algérienne réagit à des propos xénophobes sur Sky News

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Mohamed Lamine Belghit
Le nihiliste et raciste Mohamed Lamine Belghit

C’est une décision saluée comme un tournant. Après la diffusion sur la chaîne émiratie Sky News Arabia d’une intervention de Mohamed Lamine Belghit — qui s’autoproclame historien — accusant les Amazighs de faire partie d’un « projet franco -sioniste « , la justice algérienne a réagi avec une fermeté rare mais bienvenue. Le parquet d’El Harrach a annoncé son arrestation et l’ouverture d’une enquête judiciaire pour atteinte à l’unité nationale et incitation à la haine raciale.

Les propos de Belghit, jugés profondément xénophobes, attentatoires aux principes constitutionnels et a l’unité nationale, ont provoqué une onde de choc sur les réseaux sociaux. En s’en prenant à une composante fondamentale de l’identité algérienne, à savoir la culture amazighe, et en alimentant un discours de division, il a ravivé des blessures encore sensibles liées à la marginalisation historique de la Kabylie et de tamazight.

Dans son communiqué officiel, le parquet dénonce « une violation manifeste des valeurs fondamentales de la société algérienne, fondées sur l’unité nationale », et considère que ces propos s’attaquent directement aux « symboles de la nation, à son unité, et aux repères de l’identité nationale ».

Présenté devant le procureur le 3 mai, Belghit a été placé en détention provisoire sur décision du juge d’instruction, dans le cadre d’une information judiciaire pour « atteinte à la sécurité de l’État » et « diffusion de discours haineux à travers les technologies de l’information ».

Sur les réseaux sociaux, de nombreux Algériens ont exprimé leur soulagement face à ce qu’ils considèrent comme la fin d’une impunité dont bénéficiaient trop longtemps certains discours racistes. « Cela fait des années que des figures comme Lamine Belghit insultent en toute liberté tamazight et ses défenseurs. Il était temps que la République réagisse », écrit une internaute sur Facebook.

Pour les défenseurs des droits culturels et linguistiques, cette affaire illustre la nécessité de veiller à ce que la diversité culturelle algérienne, reconnue par la Constitution, soit effectivement protégée face à la haine et à la manipulation idéologique. Car au-delà d’un fait divers médiatique, c’est la cohésion nationale et le respect du pluralisme identitaire qui sont en jeu.

La réponse judiciaire envoie ainsi un message clair : dans l’Algérie d’aujourd’hui, aucun discours de haine, aussi travesti soit-il sous des apparences pseudo-intellectuelles, ne saurait se substituer au débat d’idées dans le respect de la dignité humaine et de l’unité du peuple.

Samia Naït Iqbal

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Echorouk News suspendue pour propos racistes envers des migrants africains

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Coup de tonnerre dans le paysage audiovisuel algérien. L’Autorité nationale indépendante de contrôle audiovisuel (ANICA) a ordonné ce jeudi la suspension immédiate de la chaîne de télévision Echorouk News pour une durée de dix jours.

En cause : la diffusion d’un terme jugé « ouvertement raciste » visant des migrants africains en situation irrégulière. La sanction prend effet dès ce soir, à minuit.

Dans un communiqué au ton ferme, l’ANICA dénonce une « violation grave de l’éthique journalistique » et pointe une « irresponsabilité éditoriale inacceptable ». Le contenu incriminé, selon l’autorité, alimente un climat de haine, attise le racisme et bafoue les valeurs fondamentales de la République algérienne.

« L’Algérie partage avec l’Afrique une histoire, un avenir, et des liens de solidarité indéfectibles. Il est inconcevable que de tels propos soient tolérés sur une chaîne nationale », martèle l’ANICA, exigeant des excuses publiques et explicites de la part des responsables de la chaîne.

Cette suspension, symboliquement forte, intervient dans un contexte de tensions autour des questions migratoires et de montée des discours xénophobes. 

L’ANICA appelle tous les organes audiovisuels à faire preuve de rigueur, de professionnalisme et à respecter les lois de la République, qui proscrivent toute forme de discrimination. Les médias, rappelle-t-elle, ont la responsabilité de refléter les valeurs d’un pays attaché à l’inclusion, à la dignité humaine et au vivre-ensemble.

Par ce geste salutaire, les autorités affirment clairement leur volonté de tracer des lignes rouges infranchissables : racisme, haine et stigmatisation n’ont aucune place dans les médias algériens.

Espérons que la justice fasse preuve de la même fermeté à l’égard de tous ceux qui propagent la haine, que ce soit sur les réseaux sociaux ou sur les plateaux de certaines chaînes de télévision.

Samia Naït Iqbal

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Propos haineux de Mohamed Amine Belghit : un test pour la justice algérienne

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Mohamed Lamine Belghit
Le nihiliste et raciste Mohamed Lamine Belghit

Mohamed Amine Belghit, historien autoproclamé et chantre d’un révisionnisme aux relents dangereux, a une nouvelle fois défrayé la chronique. Habitué des sorties polémiques, il a franchi un cap inquiétant lors de son intervention, le soir du 1er mai, sur la chaîne arabe Sky News. 

Sur le plateau, ce fervent défenseur d’une idéologie  arabo-islamiste à tendance suprémaciste a déversé un flot de propos haineux d’une violence rare à l’encontre des Amazighs et des émigrés algériens en France, qu’il a caricaturés avec un mépris à peine voilé. Bien loin de la simple opinion, ses déclarations relèvent d’un véritable discours de haine, ciblant deux piliers de l’identité nationale et de la diaspora algérienne.

Dans un pays où l’unité nationale repose sur la reconnaissance de sa diversité culturelle et historique, de telles prises de parole constituent un danger réel. Les Amazighs, peuple autochtone de l’Algérie, ont vu leur langue et leur culture arrachées à l’oubli grâce à des décennies de lutte. Le tamazight est aujourd’hui langue nationale et officielle, fruit d’un combat pacifique mais déterminé. Les émigrés algériens, quant à eux, représentent non seulement une force vive de la nation, mais aussi un trait d’union inestimable entre l’Algérie et le monde. Les stigmatiser, c’est non seulement nier leur apport, mais aussi fracturer le lien social et nourrir des tensions identitaires délétères.

L’intervention de Mohamed Amine Belghit ne peut être réduite à une simple dérive individuelle. Elle s’inscrit dans un climat plus large où les discours identitaires radicaux cherchent à réécrire l’histoire, à exclure, et à diviser.

Face à cette dérive, la justice algérienne est aujourd’hui interpellée. Peut-elle se permettre de rester silencieuse face à des propos qui bafouent la Constitution, incitent à la haine, et violent les principes élémentaires du vivre-ensemble ?

L’État de droit ne peut se construire sur la complaisance. L’impunité offerte aux prêcheurs de haine est un poison pour la République.

La réaction des autorités judiciaires face à ce dérapage public constituera un signal fort : soit celui d’une rupture nette avec les discours de division, soit celui d’un silence coupable qui autorise toutes les dérives.

Le peuple algérien, dans toutes ses composantes, mérite mieux que d’être pris en otage par des voix qui prétendent parler en son nom tout en foulant aux pieds ses valeurs fondamentales.

La rédaction

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