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L’anglais contre le français en Algérie : l’arabisation rampante sous couvert de modernité

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Tebboune
Une politique d'arabisation totale est menée sous l'égide d'Abdelmadjid Tebboune

La récente vague de décisions visant à écarter la langue française des institutions publiques et privées en Algérie ne relève plus du simple ajustement linguistique, mais s’apparente de plus en plus à une politique d’exclusion ciblée.

Derrière des arguments de souveraineté ou d’alignement avec les normes internationales, se cache une logique idéologique claire, portée par des cercles arabo-islamistes influents, bien implantés dans l’administration et les sphères décisionnelles. Le tout avec la bénédiction d’Abdelmadjid Tebboune et le clan qui le soutient.

Des entreprises publiques telles que la SEAAL (Société des Eaux et de l’Assainissement d’Alger) ont récemment remplacé la langue française par l’anglais et l’arabe sur leurs factures. Les facultés de  médecine  se préparent à abandonner le français au profit de l’anglais dès 2025-2026. Le secteur du sport, la compagnie nationale de transport  aérienne, Air Algérie et même les correspondances administratives suivent le pas.

À première vue, il s’agit d’un basculement linguistique stratégique, mais une lecture plus profonde révèle une volonté manifeste de rompre avec un héritage linguistique accusé d’être colonial — un procès récurrent dans les discours populistes.

Ce qui interpelle, ce n’est pas la volonté d’adopter l’anglais, langue de la science et de la technologie, mais bien la manière brutale, précipitée et sélective dont la langue française est bannie, sans tenir compte des réalités sociolinguistiques du pays. La majorité des enseignants universitaires, des professionnels de santé et des chercheurs continuent de produire et d’enseigner en français. Les bibliothèques regorgent d’ouvrages scientifiques en langue française. Pourtant, on feint d’ignorer cette réalité dans une course politisée vers un « désenvoûtement culturel » aux relents idéologiques.

Les initiateurs de cette politique ne cachent plus leur appartenance à une mouvance arabo-islamiste qui a toujours entretenu une méfiance viscérale à l’égard de la francophonie, perçue comme un vestige de domination culturelle. Le discours officiel, lui, maquille cette croisade sous les atours d’une modernisation linguistique, alors qu’il s’agit souvent d’un repli identitaire. Or, on ne construit pas une identité nationale en éradiquant une langue, surtout lorsqu’elle continue d’être un outil de savoir, de communication et de mobilité sociale pour des millions d’Algériens.

La rupture avec le français ne semble pas découler d’un processus démocratique ni d’une concertation nationale. Elle s’inscrit plutôt dans une logique autoritaire, décidée en haut lieu, et appliquée par des fonctionnaires zélés, souvent plus soucieux de leur positionnement idéologique que de l’efficacité administrative ou pédagogique. La marginalisation du français n’est pas seulement un acte symbolique : elle fragilise l’accès au savoir, aggrave la fracture linguistique, et accentue l’isolement de nombreux professionnels.

Dans une Algérie plurielle, marquée par une diversité linguistique et culturelle, la sagesse commanderait une politique inclusive, valorisant toutes les compétences linguistiques disponibles. Loin d’être une faiblesse, le multilinguisme est une richesse stratégique, que certains veulent aujourd’hui sacrifier sur l’autel d’une identité rigide et exclusive.

Samia Naït Iqbal

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La « grande guerre patriotique » russe, une réécriture de l’histoire par Poutine

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Armée rouge

Je ne sais plus par quel bout prendre ma colère pour expliquer les raisons pour les nombreux autres sujets. Les Algériens pro-Poutine n’ont jamais lu un autre livre d’histoire que celui rédigé, diffusé et obligé par le FLN.

Je ne suis pas sidéré par le niveau inexistant de leur culture en ce domaine, il faudrait inventer dans le dictionnaire un nouveau mot. Les Russes comme les Algériens nourris au biberon de la dictature continuent à se nourrir d’une histoire délirante sur la guerre patriotique russe lors de la seconde guerre mondiale.

Les défilés militaires à la soviétique la rappellent chaque année devant une foule lobotomisée et totalement acquise à la gloire de l’armée russe libératrice et de Poutine.

Poutine occulte une vérité historique pourtant accessible au moindre collégien. La Russie de Staline avait lourdement trahi ses partenaires (si on peut utiliser ce mot) en signant le 23 août 1939  un pacte germano-soviétique de non-agression, connu sous le nom d’accord Ribbentrop-Molotov, les deux ministres des affaires étrangères.  

Alors lorsque Poutine justifie son agression dans le but de combattre les Nazis du régime ukrainien, je ne sais pas s’il faut en rire ou s’en étonner devant un si gigantesque culot. 

Mais l’Allemagne nazie avait montré ce que signifiait pour elle une non-agression. L’invasion par les troupes nazies de la Pologne menaçait directement le monde soviétique. Un mois s’était seulement écoulé puisque l’invasion s’est produite en septembre de la même année. C’est seulement à cet instant que ce grand pays patriotique avait retourné sa veste.

Son récit jusqu’à aujourd’hui est qu’il a payé le prix de son engagement avec 20 millions de morts. Son armée fut la première à arriver à Berlin et la Russie ne se lasse pas de dire qu’elle a sauvé les Alliés d’une déroute. Plus c’est gros plus ça passe lorsqu’on fait face aux membres d’une secte.

Tout cela est vrai, elle a payé un très lourd sacrifice que personne ne conteste. Mais c’est le prix d’une lourde trahison et d’une attirance entre deux régimes barbares. Qui pourrait le nier avec des noms comme Hitler et Staline.

Le pacte Ribbentrop-Molotov, un tout petit oubli, sans importance, de la réécriture de l’histoire par Poutine.

Et les Algériens pro-Poutine qui ne suivent pas, ils courent.

Boumediene Sid Lakhdar

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Sétif accueille une rencontre internationale sur la ville durable

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Sétif

A Sétif, l’Université Ferhat-Abbas 1 s’apprête à accueillir lundi 12 mai une rencontre de haut niveau intitulée « Trame verte et commodités urbaines : vers une ville durable et résiliente ».

Organisé par le Laboratoire d’architecture méditerranéenne (LAM) et la fondation HCA, l’événement réunira trois figures majeures de l’architecture paysagère et de l’urbanisme, venues croiser leurs regards sur les défis de la ville contemporaine.

À l’heure où les villes algériennes connaissent des mutations rapides, cette journée d’échanges ambitionne de proposer des pistes concrètes pour l’amélioration des paysages urbains, la requalification des espaces publics et l’adaptation des milieux de vie aux réalités sociales, climatiques et culturelles actuelles.

Trois experts, trois visions complémentaires

Le programme s’ouvrira à 9h30 avec une conférence de Kamel Louafi, artiste-paysagiste de renommée internationale. Lauréat de multiples distinctions européennes, Louafi présentera ses travaux sur l’amélioration des paysages existants et l’adaptation des espaces verts aux usages contemporains. Il partagera ses expériences issues de concours internationaux, mettant l’accent sur la nécessité de revitaliser les surfaces urbaines dégradées.

À 10h30, Akli Amrouche, architecte urbaniste et rédacteur en chef de la revue Vie de Ville, prendra la parole pour aborder la requalification des espaces publics en Algérie. Il explorera les liens entre design, scénographie urbaine et activation citoyenne, plaidant pour une approche qui conjugue innovation, fonctionnalité et enracinement culturel.

Enfin, à 11h00, Amar Lounas, architecte de l’agence AL-Architecture, clôturera la matinée avec une réflexion intitulée « Architecture en mouvement : dialogue entre paysage, climat et usages ». À travers ses projets menés en Algérie, en Corée du Sud et en France, il montrera comment l’architecture peut s’ancrer dans la nature tout en s’adaptant aux mutations sociétales de notre époque.

Un rendez-vous majeur pour penser la ville de demain

Cette rencontre promet de nourrir la réflexion sur la ville algérienne de demain : plus verte, plus inclusive, et plus résiliente. Elle s’adresse aux architectes, urbanistes, étudiants et citoyens soucieux de construire un cadre de vie durable et harmonieux.

Djamal Guettala 

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Ligue 1 Mobilis : Le NCM n’est plus relégable, l’USMK respire

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Le NC Magra quitte la zone rouge
Le NC Magra quitte la zone rouge

Le NC Magra a quitté, ce samedi, l’avant-dernière place du classement, réservée au premier relégable, à la faveur de sa victoire enregistrée à domicile face à l’ASO Chlef (2-0), en match comptant pour la première partie de la 25e journée du championnat national de Ligue 1 Mobilis.

Dans une partie qui a mis du temps à se débrider, le Nedjm est parvenu à débloquer la situation juste avant la pause, par l’entremise de Djabout (42’), avant de faire le break à la 59e minute grâce à Bouzekri.

Grâce à cette victoire, le NCM se donne de l’air et passe de la 15e à la 12e position (27 pts). De son côté, l’ASO continue d’occuper la 7e place avec 32 unités.

Bonne bouffée d’oxygène pour l’USMK

À l’image du NCM, l’USM Khenchela a lui aussi réalisé un succès salvateur pour la suite de la compétition en battant le MC Oran (2-1).

Les capés de Hocine Achiou ont pris l’avantage tôt dans cette empoignade en marquant dès la 5e minute par Oukil, sur un superbe coup franc direct. Par la suite, les Hamraoua ont répliqué à la 33e minute en égalisant par l’intermédiaire de Goudjil (34’), qui a été à la conclusion d’une très belle action collective.

Toutefois, la joie des visiteurs a été de courte durée, car à la 37e minute leur capitaine, Benemara s’est rendu coupable d’une faute dans la surface de réparation à la suite de laquelle l’arbitre du match n’a pas hésité à siffler un penalty en faveur des locaux. Meilleur buteur de l’équipe, Djaouchi s’est chargé d’exécuter la sentence, à la 41e minute, signant par la même occasion son 7e but de la saison.

Ce succès permet à Ciskaoua de quitter la zone de turbulences en passant du 14e au 10e rang (28 pts). Quant au MCO, toujours aussi fébrile à l’extérieur, il pointe à la 11e place avec 27 points.

Concernant le match JS Saoura – ES Mostaganem, dernière empoignade de ce premier acte de la 25e journée, il s’est soldé sans vainqueur et sur un score blanc (0-0).

La suite dimanche et lundi

Scindée en trois parties, cette manche se poursuivra dimanche avec deux matchs au programme : ES Sétif – Olympique Akbou (17h00) et USM Alger – CS Constantine (19h00), tandis que les trois dernières rencontres, dont le très attendu CR Belouizdad – MC Alger, auront lieu lundi.

Pour rappel, ce big derby de la capitale, prévu entre le dauphin et leader, se jouera à huis clos (17h00) au stade Nelson Mandela.

Résultats partiels de la 25e journée :
USM Khenchela – MC Oran2 – 1
NC Magra – ASO Chlef2 – 0
JS Saoura –  ES Mostaganem0 – 0
Samedi :
ES Sétif – Olympique Akbou17h00
USM Alger – CS Constantine19h00
Dimanche :
CR Belouizdad – MC Alger17h00
MC El-Bayadh – JS Kabylie17h00
US Biskra – Paradou AC18h00
Classement de la Ligue 1
#EquipesPtsJ
1MC Alger     4523
2CR Belouizdad4324
3JS Kabylie4324
4ES Sétif 3523
5MC El Bayadh 3424
6USM Alger3323
7Paradou AC3224
8ASO Chlef3225
9JS Saoura3225
10USM Khenchela 2824
11MC Oran2724
12NC Magra 2725
13CS Constantine2620
14ES Mostaganem 2625
15Olympique Akbou2523
16US Biskra   2024

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Aïmen Laïhem obtient le prix littéraire Mohammed-Dib pour « Taxis »

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Aïmen Laïhem

C’est avec une émotion palpable qu’Aïmen Laïhem s’est vu décerner, ce samedi à Tlemcen, le prestigieux prix littéraire Mohammed-Dib 2025 pour son récit Taxis. La cérémonie s’est tenue dans le cadre d’un événement organisé par l’association La Grande Maison, en présence de nombreuses figures du monde littéraire algérien.

Publié en octobre 2023, Taxis s’impose comme une œuvre singulière et subtile qui explore, avec douceur et lucidité, les déambulations d’un Algérois à travers les rues de la capitale. Le récit met en scène un narrateur énigmatique — dont on ne connaît ni le prénom ni les contours exacts de la vie — qui emprunte chaque jour les taxis d’Alger. Ces trajets deviennent bien plus que de simples déplacements : ils sont autant de fenêtres sur un monde en mutation, peuplé de chauffeurs volubiles, de passagers inattendus, de conversations improbables et de silences pleins de sens.

Entre appels de sa mère, échanges de textos avec une amie installée à Tunis, et une échappée vers Montréal, le narrateur se fait le témoin discret d’une société algérienne oscillant entre tradition et modernité. Dans cette Alger volontairement floutée, Laïhem interroge aussi bien les jeunes générations que les réalités administratives, les relations humaines ou encore les petites absurdités du quotidien.

Sous des airs d’anti-héros moderne, le personnage incarne tour à tour le passager, l’observateur et le commentateur de sa propre vie. Taxis s’impose ainsi comme une chronique douce-amère, une parenthèse poétique sur la quête de soi et l’appartenance.

Né en 1998 à Alger, Aïmen Laïhem est architecte diplômé de l’École Polytechnique d’Architecture et d’Urbanisme (EPAU) d’Alger. Actuellement étudiant en urbanisme à Paris, il a entamé l’écriture de Taxis en 2019, dans le sillage du mouvement du Hirak. Ce premier livre révèle une voix littéraire prometteuse, attentive à la texture du quotidien autant qu’aux soubresauts de la société.

Le jury du Prix Mohammed Dib a salué « une œuvre sobre, précise et empreinte d’une délicate ironie, qui renouvelle le regard porté sur Alger et ses habitants ». Avec cette distinction, Aïmen Laïhem s’inscrit déjà dans la lignée des jeunes écrivains qui donnent un nouveau souffle à la littérature algérienne contemporaine.

Djamal Guettala

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Affaire Belghit : le réveil des braises pan-arabistes

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Mohamed Lamine Belghit
Le négationniste Belghit.

Alors que l’Algérie tente de panser ses fractures identitaires, une organisation parisienne relance le débat en honorant une figure controversée du nationalisme arabe. Derrière le geste symbolique, certains voient une manœuvre idéologique aux relents d’un panarabisme excluant.

Le Centre Zourah d’études et de recherches, une structure peu connue installée à Paris, a récemment créé un prix baptisé « Bouclier Mohammed El-Amine Belghit pour le courage de l’opinion ». Officiellement, l’initiative vise à célébrer la liberté d’expression. Mais la désignation de l’historien auto-proclamé, Mohamed Lamine Belghit comme premier lauréat suscite une vive controverse.

Poursuivi en Algérie pour atteinte à l’unité nationale et incitation à la haine, le négationniste Mohamed Amine Belghit devient, à travers ce prix, une figure honorée et même glorifiée. Une décision perçue comme provocatrice par nombre d’observateurs, qui y voient moins un geste de solidarité qu’un retour en force d’un discours idéologique daté.

Un hommage aux relents de provocation 

En décorant un intellectuel aux positions radicales, le Centre Zourah ne se contente pas de soutenir un homme ; il ravive les fondements d’un panarabisme dogmatique, longtemps accusé d’avoir marginalisé les voix amazighes et pluralistes dans le monde maghrébin. Cette idéologie, sous couvert d’unification culturelle, a souvent imposé une lecture unique de l’identité nationale, niant la richesse linguistique et culturelle de sociétés comme l’Algérie.

Le contexte n’est pas anodin. L’Algérie est engagée, depuis plusieurs années, dans un difficile travail de reconnaissance de sa diversité interne. Cette initiative, venue de l’étranger, est une forme d’ingérence et de provocation visant à compromettre les  efforts menés pour construire un pacte national plus équilibré et représentatif de toutes ses composantes.

Une institution engagée, mais contestée

Le Centre Zourah, actif principalement via les réseaux sociaux, se donne pour mission de promouvoir la pensée nationaliste arabe et les arts du monde arabe. Il organise des événements culturels, et affirme défendre la liberté d’expression à travers des gestes symboliques comme ce prix. Pourtant, son engagement est critiqué pour son manque de nuance : en exaltant des figures clivantes, il alimente les tensions plus qu’il ne les apaise.

Loin de favoriser un débat serein sur la liberté d’opinion, le prix décerné à Mohamed Amine Belghit apparaît comme un outil de réactivation idéologique. Il projette sur la scène publique un discours centralisateur et exclusif à rebours des aspirations de  larges pans de la population algérienne avide de pluralisme, de reconnaissance mutuelle et d’unité dans la diversité.

La rédaction

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Le RCD s’oppose aux lois jugées liberticides et appelle à la résistance démocratique 

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RCD
Photo RCD.

Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), lors de sa réunion du 9 mai à El-Biar, a tiré la sonnette d’alarme quant à la situation critique que traverse l’Algérie sur les plans politique, économique et social. Le parti a réaffirmé avec force sa détermination à résister à ce qu’il considère comme un pouvoir autoritaire et a lancé un appel pressant aux forces vives de la nation pour s’unir autour d’une alternative démocratique.

Sur le plan interne, le RCD s’est félicité de la dynamique positive de ses campagnes d’adhésion à travers le pays, y voyant un signe encourageant de l’engagement citoyen en faveur d’un projet de changement. Le succès des récentes rencontres de proximité, notamment à Sidi Aïch, témoigne, selon le parti, d’un ancrage croissant au sein de la société algérienne.

Le RCD continue également de renforcer ses liens avec la diaspora, prévoyant deux conférences publiques au Canada, à Montréal le 10 mai et à Ottawa le 17 mai. Cette initiative vise à élargir le débat démocratique au-delà des frontières nationales et à consolider les liens avec les Algériens de l’étranger.

Le parti a annoncé la tenue d’un meeting à Alger le 24 mai, tout en dénonçant le silence des autorités face à ses trois demandes officielles d’obtention d’une salle. Le RCD interprète ce silence comme une nouvelle manifestation de la politique de verrouillage imposée par le régime en place.

Au cœur de son analyse politique, le RCD critique vivement une gouvernance qu’il qualifie de répressive, marquée par la restriction des libertés fondamentales et l’exclusion. Il exprime une vive inquiétude quant aux menaces pesant sur l’unité nationale, citant notamment les propos récents d’un « prétendu historien » accusé de révisionnisme et de négation de l’amazighité, valeurs considérées comme fondamentales pour l’identité algérienne.

La situation économique n’est pas épargnée par les critiques du RCD, qui dénonce une inflation galopante, une érosion significative du pouvoir d’achat et des politiques gouvernementales jugées inefficaces, voire populistes, à l’image de la récente annonce d’importation de moutons pour l’Aïd. Le manque de perspectives claires, exacerbé par la baisse des prix du pétrole, suscite de profondes inquiétudes quant à la stabilité macroéconomique du pays.

Le RCD a également marqué le mois de mai en rendant un hommage solennel aux victimes des massacres du 8 mai 1945, soulignant que la souveraineté nationale est indissociable de la souveraineté populaire. Dans cette perspective, le parti critique l’opacité de la politique étrangère algérienne et met en garde contre les menaces sécuritaires à ses frontières, notamment la présence de forces étrangères dans les pays voisins.

Un point central de la mobilisation du RCD réside dans sa ferme opposition à deux textes législatifs en cours : la loi sur la mobilisation générale, qu’il juge particulièrement inquiétante dans le contexte actuel, et le projet de réforme du code de procédure pénale, qui, selon lui, porte gravement atteinte au droit à la défense.

Dans un appel vibrant à la mobilisation, le RCD exhorte les citoyens, les forces politiques et la société civile à rejeter la résignation et à unir leurs efforts pour construire une alternative démocratique, sociale et véritablement souveraine pour l’Algérie. Dans une scène politique formolisée et vassalisée, ce parti est le dernier à tenir un langage d’opposant et porter la voix du fait accompli autoritaire imposé par le régime. C’est dire que tout n’est pas totalement perdu face au désordre rompant.

Samia Naït Iqbal

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La FAF adopte l’arabisation totale !

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FAF

Le dernier étage de l’arabisation de tout le pays est en marche. Sur instruction d’Abdelmadjid Tebboune, les dernières poches où subsistait toujours la langue française sont en train d’être réduites à néant. Le bureau fédéral de la FAF a d’acté l’arabisation totale de cette institution.

La Fédération algérienne de football (FAF) a décidé d’imposer l’arabisation des documents officiels dans le cadre des activités footballistiques, à compter de la saison 2025-2026. À travers une instruction formelle, l’instance fédérale exige désormais que tous les procès-verbaux et la correspondance émanant des clubs ou des ligues soient rédigés en arabe.

Cette obligation, précisée dans l’instruction n° 662/A.E./F.G.K.Q./2025 datée du 7 mai 2025 et adressée aux responsables des associations, prévoit que le Secrétaire général de la Fédération devra rédiger en arabe standard les procès-verbaux des commissions de discipline, les désignations d’arbitres ainsi que les rapports liés à la programmation. Sont également concernés les échanges administratifs, qu’ils soient internes ou destinés à des organismes officiels.

Cette mesure fait suite à la réunion du Bureau fédéral du 30 avril 2025 et s’inscrit dans une démarche plus large visant à renforcer la place de la langue arabe dans les institutions sportives du pays.

Cette politique de défrancisation n’est pas dénuée d’arrière-pensées. Elle s’inscrit dans la lutte décidée par le courant arabiste contre cette langue, un courant largement porté par le chef de l’Etat. En effet, derrière l’introduction de l’anglais sourd une volonté manifeste d’une arabisation totale des institutions du pays et de l’enseignement.

La rédaction

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Arabisation à tout-va : un étranger dans son propre pays !

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Le président de la FAF.
La FAF adopte l'arabisation totale de ses moyens de communication et de diffusion.

La Fédération algérienne de football vient de bannir le français dans ses documents officiels. Voilà un autre fragment de la muraille qui s’effondre pour moi. Je ne peux pratiquement plus lire ni comprendre, chaque jour davantage, les moindres faits ou documents de mon pays natal.

Il me faudrait un traducteur pour y vivre comme nous l’étions pour nos grands-parents qui étaient à cette époque des illettrés malgré eux. La différence est que, nous, nous sommes allés à l’école. J’écoute le journal télévisé, je ne comprends pas. J’écoute un discours, il est aussi opaque pour moi que si j’étais en voyage à l’étranger. Et les exemples ne manquent pas pour me signifier en permanence que je suis devenu un étranger dans mon pays. 

L’effet est absolument le même lorsqu’on réside à l’étranger car le contact avec mon pays est naturellement constant, par les médias, par les amis et en ce qui me concerne, par mon Algéroise. Certains m’accusent de parler en espagnol avec elle. Je plaide non coupable, je sais à peu près bien le parler mais elle, absolument pas sinon pour négocier les prix. 

On me répond à chaque fois, ce sera probablement la même chose si mon interlocuteur était la FAF, c’est la langue nationale inscrite dans notre constitution. Je cours la lire et je lis effectivement dans son art. 3. — L’arabe est la langue nationale et officielle. 

Mais cela, je le sais, je parle arabe depuis ma tendre jeunesse. Je ne comprends pourtant pas celle qu’on me dit être langue nationale et officielle, ni dans sa lecture, ni dans son prononcé. Ou alors, peut-être, on m’aurait caché que mes grands-parents et parents étaient des Suédois. Il faut parfois cacher certaines vérités aux enfants. 

Que dire en plus de nos compatriotes berbérophones qui, eux, sont garantis par l’article 4 de la constitution qui nous dit que  tamazight est également langue nationale et officielle. Moi je suis exclu de la constitution mais eux devraient théoriquement bénéficier de la lecture de documents avec une langue reconnue comme nationale et officielle. 

Tu es coupable me dit-on également, c’est de ta faute de ne pas savoir la langue arabe classique. Je plaide coupable d’être né en 1955 dans une Algérie sous administration française. Mes parents sont coupables car ils m’ont obligé à aller à l’école où le français était au programme. Que voulez-vous, on ne peut pas choisir ses parents qui se rendent coupables d’avoir scolarisé leurs enfants.

J’ai été coupable en 1962, à l’âge de sept ans, d’avoir continué l’infamie avec une scolarisation en français. Je suis coupable des accords d’Evian qui ont permis aux professeurs français de continuer à enseigner dans mon pays. Je suis coupable des accords de coopération et n’avoir eu qu’un seul professeur algérien, en classe de terminale. Pas de chance, l’unique que j’avais eu était lui également aussi coupable que moi de ne connaître que la langue du colon.

On me rappelle toujours à ma supposée mauvaise foi car j’oublierais que des professeurs d’arabe, nous en avions eu par centaines. Ils étaient venus de pays lointains qui eux-mêmes étaient à cette époque empêtrés dans leur recherche identitaire postcoloniale.

Je ne sais pas comment ils les avaient choisis mais là, mes chers amis, je ne plaiderai pas coupable même avec la menace de me faire arracher la langue. Je laisse témoigner à ma place les algériens de ma génération. Attention, permettez-leur un traducteur car ils sont aussi étrangers à l’arabe classique que moi au chinois.

Ces professeurs nous regardaient avec les yeux du reproche et nous disaient, nous sommes venus pour vous remettre dans le droit chemin de vos racines (absolument incroyable mais incroyablement véridique, au mot près). Mes chers lecteurs, nous aurions dû avoir un GPS pour retrouver ce chemin.

Voilà comment on s’est senti progressivement reclus au statut d’étranger. Car qu’est une personne qui ne comprend pas la langue officielle de son pays sinon un étranger, ce que nous dit le dictionnaire.

Que doit-on faire ? Accepter l’exclusion de notre nationalité algérienne, le bannissement du pays ou nous emprisonner pour des cours obligatoires ? À nos âges, il faut inventer une période d’incarcération plus longue que la perpétuité car il y a du boulot.

Si nous revenions à la décision de la FAF, il me reste encore un souffle de force pour lui faire une explication de texte de la constitution. L’article 3 parle de la langue arabe nationale et officielle.

J’ai dû ne rien comprendre au cours de droit constitutionnel pendant mes études. C’est peu probable car c’était dans la même langue étrangère que la mienne. Les qualificatifs, nationale et officielle, ne concernent que les actes des autorités administratives et les discours politiques publics. Ainsi que tout ce qui dépend directement des prérogatives de l’état comme les programmes scolaires.

Or, la FAF est une association de droit privé de type association. Elle est certes reconnue d’utilité publique, notamment par la loi n°12-06 du 12 janvier 2012 relative aux associations, ce qui justifie et légitime un financement de l’Etat à ce titre. Mais elle reste une entité de droit privé.

Aucune disposition de la Constitution algérienne ne l’obligeait à supprimer le français comme langue d’usage en même temps que la langue arabe classique. Ou alors vouloir avec acharnement notre déchéance de nationalité, notre exclusion de notre pays. C’est un souhait aussi contestable qu’impossible car on n’arrache pas un citoyen du lien avec sa terre natale. On peut le faire souffrir seulement, c’est ce qui est acté depuis longtemps déjà pour cette histoire de communication. Personne autant que moi ne peut ressentir cette terrible colère de ne pas comprendre l’expression écrite et orale de son pays natal.

Cet acte n’était donc pas obligé de la part de la FAF. Je souhaite qu’elle me respecte car le français est une langue d’usage, la seule que je puisse encore comprendre. Est-ce ma faute si l’arabe de chez nous n’a pas été choisi. Dans ce dernier cas, nous aurions été d’excellents citoyens pour la FAF. 

Je fais un appel vibrant au secrétaire national de cette organisation en le suppliant d’attendre notre mort avant de bannir la langue française comme seconde langue dans les documents. Ma génération est la dernière à compter en son sein des algériens exclusivement francophones si on exclut l’arabe courant national.

Ayez la décence de patienter jusqu’à ce moment. En attendant je m’accroche à ma citoyenneté algérienne, en dehors des proches, avec le seul outil de communication qu’il me reste, ce journal francophone. 

Et je l’en remercie.

Boumediene Sid Lakhdar

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Cheikh Khaled Bentounès : figure marquante du soufisme, défenseur du dialogue interculturel

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Cheikh Khaled Bentounsi

Cheikh Khaled Bentounès est une figure respectée du soufisme contemporain et un fervent défenseur de la paix. Né à Mostaganem, en Algérie, il est le guide spirituel de la confrérie soufie Alâwiyya, fondée par son ancêtre Cheikh Ahmad al-Alawi. Cette confrérie est reconnue pour son approche spirituelle centrée sur l’amour, la tolérance et la quête intérieure.


Cheikh Bentounès a joué un rôle déterminant dans la promotion de la paix à l’échelle mondiale. Il est l’initiateur de la Journée Internationale du Vivre Ensemble en Paix, adoptée par l’ONU, qui vise à encourager la coexistence harmonieuse entre les peuples. Il a également fondé les Scouts Musulmans de France, une organisation qui promeut les valeurs de respect, de solidarité et de citoyenneté auprès des jeunes.

Son engagement dépasse les frontières religieuses. Il a participé à de nombreuses rencontres internationales, notamment les rencontres d’Assise, où il a plaidé pour un dialogue entre les traditions spirituelles. Il a aussi créé l’association Terre d’Europe pour renforcer les liens entre l’Islam et le monde occidental, et il est l’un des fondateurs du Conseil Français du Culte Musulman.

Cheikh Bentounès met l’accent sur une spiritualité universelle, accessible à tous, indépendamment des croyances religieuses. Pour lui, la spiritualité est un moyen de surmonter les divisions et de construire une société basée sur la dignité humaine et la fraternité. Son enseignement est profondément enraciné dans les valeurs soufies, qui prônent la méditation, l’amour divin et le service à autrui.

En tant qu’écrivain, il a publié plusieurs ouvrages sur la spiritualité, la paix et le vivre ensemble. Ses écrits invitent à réfléchir sur notre rôle dans le monde et à adopter une attitude de compassion et de responsabilité. Cheikh Bentounès incarne une vision d’un Islam ouvert, inclusif et tourné vers l’avenir, et son travail continue d’inspirer des milliers de personnes à travers le monde.

Cheikh Bentounès est reconnu pour son travail en faveur de la paix. Il est l’initiateur de la Journée Internationale du Vivre Ensemble en Paix, adoptée par l’ONU, et continue de promouvoir une culture de coexistence pacifique.

Il a participé à de nombreuses rencontres internationales et fondé des associations, comme Terre d’Europe, pour renforcer le dialogue entre les cultures et religions, et il œuvre pour une meilleure compréhension de l’Islam en France.

Convaincu que l’éducation est un outil puissant pour un avenir pacifique, il a fondé les Scouts Musulmans de France pour inculquer aux jeunes des valeurs de respect et de solidarité.

Son enseignement soufi est basé sur une spiritualité accessible à tous, sans distinction de croyances religieuses, et cherche à éveiller une conscience intérieure et à promouvoir des valeurs de fraternité et d’amour.

Cheikh Bentounès plaide également pour une approche spirituelle de la protection de l’environnement, soulignant l’importance de vivre en harmonie avec la nature.

Cheikh Bentounès a eu un impact profond dans plusieurs domaines, notamment la spiritualité, la paix mondiale, et le dialogue interculturel. Son influence est reconnue à travers diverses distinctions, et son travail continue d’inspirer des initiatives locales et internationales pour construire un monde plus pacifique et inclusif.

Cheikh Khaled Bentounès, en tant que guide spirituel, humaniste et défenseur de la paix, est une figure de grande influence dans le monde du soufisme et au-delà. À travers ses initiatives, telles que la Journée Internationale du Vivre Ensemble en Paix, il incarne une vision d’un islam ouvert, inclusif et profondément ancré dans les valeurs de fraternité et de coexistence. Son enseignement spirituel, centré sur l’universalité et l’harmonie, a inspiré des milliers de personnes à travers le monde.

Dans cet entretien, nous explorons les sources de son engagement et les aspirations qui nourrissent sa vision d’un avenir fondé sur la paix, l’unité et une spiritualité partagée.

Le Matin d’Algérie : Qu’est-ce qui vous a conduit à devenir le guide spirituel de la confrérie soufie Alâwiyya, et comment cette responsabilité a-t-elle influencé votre vie ?

Cheikh Khaled Bentounes : Né à Mostaganem, en Algérie, dans un milieu soufi, j’ai d’abord fui cet héritage spirituel en partant étudier en Europe, puis en menant une vie mondaine à Paris, entre contestation et mode. Mais en 1975, à la mort de mon père, le Cheikh Hadj al-Mahdi Bentounes, les sages de la confrérie m’ont désigné comme successeur. D’abord réfractaire, j’ai vécu une profonde crise intérieure avant d’accepter cette mission. Ce retour à la spiritualité a marqué le début d’une transformation : ce qui était un héritage intellectuel est devenu une initiation vivante, révélant une sagesse profonde et accessible à qui sait la reconnaître.

Le Matin d’Algérie : Quelles étaient vos motivations pour initier La Journée Internationale du Vivre Ensemble en Paix, et quel impact espérez-vous qu’elle ait sur les générations futures ?

Cheikh Khaled Bentounes : Face à la montée des conflits, de l’extrémisme violent, de la haine et de la méfiance entre peuples, cultures et religions, la communauté internationale est confrontée à une urgence : construire une paix durable par le dialogue, la tolérance et la reconnaissance mutuelle. L’absence de compréhension entre civilisations alimente l’exclusion, le repli sur soi et les discriminations, menaçant la cohésion mondiale.
C’est dans ce contexte que le concept de la Journée Internationale du Vivre Ensemble en Paix a émergé comme réponse pour dépasser ces fractures. Il vise à créer du lien, encourager la fraternité, la solidarité, et reconnaître la richesse des différences dans un esprit de coexistence pacifique.

Initiée en 2014 lors du congrès international Féminin, Parole aux femmes, à Oran, l’idée a été soutenue par des ONG, des personnalités engagées et des institutions internationales, jusqu’à être portée à l’ONU avec le concours de la diplomatie de l’Algérie. Cette journée internationale a été pensée comme un outil symbolique et pratique pour mobiliser chaque année les États et les citoyens autour des valeurs de paix, d’unité et de respect mutuel, afin de prévenir les radicalisations et promouvoir une humanité réconciliée.
Cette Journée a été adoptée par la Résolution A/RES/72/130 à l’unanimité des 193 États Membres des Nations Unies, le 8 décembre 2017.

Le Matin d’Algérie : Selon vous, quels sont les principaux défis et opportunités du dialogue interreligieux dans le monde d’aujourd’hui ?

Cheikh Khaled Bentounes : Le but ultime de tout être humain conscient est de vivre en paix et en sécurité, dans le respect des différences. Pour y parvenir, le dialogue interculturel et interreligieux est une voie essentielle : il permet de dépasser les clivages, de mieux se comprendre et de s’encourager mutuellement vers le bien. La Parole divine nous y invite clairement. Le Coran dit :
ٰﯾَٓﺄَﯾﱡﮭَﺎ ٱﻟﻨﱠﺎسُ إِﻧﱠﺎ ﺧَﻠَﻘْٰﻨَﻜُﻢ ﻣِّﻦ ذَﻛَﺮٍ وَأُﻧﺜَٰﻰ وَﺟَﻌَﻠْٰﻨَﻜُﻢْ ﺷُﻌُﻮﺑًﺎ
وَﻗَﺒَﺎٓﺋِﻞَ ﻟِﺘَﻌَﺎرَﻓُﻮٓا۟ إِ ﱠن أَﻛْﺮَﻣَﻜُﻢْ ﻋِﻨﺪَ ٱ ﱠِÜ أَﺗْﻘَٰﯨﻜُﻢْ إِ ﱠن ٱ ﱠَÜ ﻋَﻠِﯿﻢٌ ﺧَﺒِﯿﺮٌ
Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus pour que vous vous entre-connaissiez. Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allah, est le plus pieux. (Coran 49:13) Ce verset nous rappelle que la diversité n’est pas une menace, mais une richesse voulue par Dieu pour favoriser la connaissance de l’autre.
De même, il est dit :
وَﻟَﻮْ ﺷَﺎٓءَ ٱ ﱠُÜ ﻟَﺠَﻌَﻠَﻜُﻢْ أُ ﱠﻣﺔً ٰوَﺣِﺪَةً وَٰﻟَﻜِﻦ ﻟِّﯿَﺒْﻠُﻮَﻛُﻢْ ﻓِﻰ ﻣَﺎٓ ءَاﺗَٰﯨﻜُﻢْ
ﻓَﭑﺳْﺘَﺒِﻘُﻮا۟ ٱﻟْﺨَﯿْٰﺮَتِ إِﻟَﻰ ٱ ﱠِÜ ﻣَﺮْﺟِﻌُﻜُﻢْ ﺟَﻤِﯿﻌًﺎ ﻓَﯿُﻨَﺒِّﺌُﻜُﻢ ﺑِﻤَﺎ ﻛُﻨﺘُﻢْ
ﻓِﯿﮫِ ﺗَﺨْﺘَﻠِﻔُﻮنَ

Si Dieu avait voulu, Il aurait fait de vous une seule communauté. Mais Il veut vous éprouver en ce qu’Il vous donne. Concurrencez donc dans les bonnes œuvres. (Coran 5:48)

Cela nous enseigne que nos différences ne doivent pas nous diviser, mais plutôt nous pousser à œuvrer ensemble pour le bien commun. En somme, il ne s’agit pas de s’opposer, mais de dialoguer. C’est dans cette reconnaissance mutuelle que réside la clé d’une humanité réconciliée, fidèle à l’esprit de paix que prône le message divin.

Le Matin d’Algérie : Comment le soufisme peut-il répondre aux besoins spirituels des individus dans une société moderne et souvent matérialiste ?

Cheikh Khaled Bentounes : On vient au soufisme lorsque naît en nous un besoin profond de sens, de spiritualité et de compassion. Mais cette quête ne se limite pas à une simple recherche intérieure : elle tend à réconcilier l’humain avec sa véritable nature. Car avant d’être croyant, savant ou même pratiquant, il s’agit d’être humain. Et l’humanité n’est pas un simple état, c’est une qualité qui se cultive.

L’homme, comme tout être vivant, naît, grandit et agit. Mais l’humanité — cette capacité à aimer, à comprendre, à servir — se construit. Elle se forge dans l’expérience, à travers les épreuves, la patience, les échecs et les sacrifices. C’est ce lent façonnement de l’âme qui, tel un artisan, polit la pierre brute jusqu’à la révéler dans sa beauté.

Notre époque, malheureusement, semble emprunter un autre chemin. L’ego y est érigé en modèle, le culte du « moi-je », du plus fort, du plus visible, s’impose comme norme. Dans ce contexte, méditer, prier, revenir à soi devient un acte de résistance. C’est une manière de retrouver l’essentiel, de se rappeler que la vie est précieuse, fragile, et qu’elle doit être vécue avec sens, conscience et responsabilité.

Et lorsque viendra le moment de quitter ce monde, que restera-t-il de nous ? L’empreinte que nous aurons laissée. Non pas celle de nos paroles, mais celle de nos actes. Une trace humaine, écologique, spirituelle. Une famille aimée, des enfants éduqués, un jardin planté, une paix semée. Ce que les autres diront de nous résumera tout : « Celui-là a fait le bien », ou bien « Celui-là a causé du tort ». Dans la voie soufie, la quête de Dieu n’est pas un isolement mystique.

Elle n’a de sens que si elle s’inscrit dans le lien, dans le partage, dans le service. Car chercher Dieu pour soi seul est une illusion. Le véritable chemin spirituel, c’est de se mettre au service du divin en chaque être, et non de se servir de Dieu pour nourrir son ego.
Celui qui vit cet amour avec sincérité devient un être profondément sociable. Tous ceux qui croisent son chemin ou entendent parler de lui l’estiment, parce que Dieu l’aime — et aussi parce que l’amour l’a transformé. Il devient doux, généreux, joyeux, honnête, humble et lumineux. Il est ennemi du mensonge et de toute forme de domination.

C’est dans cet esprit que le maître soufi Shakik al-Balkhi, décédé en l’an 165 de l’Hégire (782 AD), décrivait la dimension sociale de cette spiritualité : une élévation de l’âme qui se traduit concrètement dans la relation à l’autre. Quant à l’Envoyé de Dieu (ssp), d’après Ahmad b. Hanbal, quand on l’interrogea pour connaître la religion la plus aimée de Dieu, il répondit : « Le monothéisme primordial et indulgent ».

Le Matin d’Algérie : Vous parlez souvent de la nécessité de protéger la nature. Comment la spiritualité peut-elle contribuer à une prise de conscience écologique globale ?

Cheikh Khaled Bentounes : La spiritualité nous invite à prendre conscience des liens profonds qui nous unissent à la nature, et à reconnaître le miracle discret mais constant de ses bienfaits quotidiens.

Car la nature n’est ni une marchandise, ni une simple ressource à exploiter. Elle est notre mère nourricière, source de vie, d’équilibre, de beauté et d’inspiration. Elle nous offre la force, le réconfort et le rêve. La considérer uniquement à travers le prisme de l’utilité ou du profit revient à trahir notre lien originel avec elle. Il nous revient donc d’adopter une posture de gardiens responsables, et non de prédateurs insatiables. En nous plaçant en tant que gestionnaires conscients, nous comprenons que protéger la nature, c’est en réalité protéger notre propre avenir.

En observant la diversité infinie de ses formes, de ses rythmes et de ses cycles, se révèle un principe fondamental : celui de l’unité dans la diversité. Tout dans la nature est issu des mêmes éléments, recyclés dans une harmonie parfaite. L’économie de la nature est circulaire, sans gaspillage, sans déchet. Le Coran nous le rappelle dans un verset empreint de sagesse et d’humilité : أُﺧْﺮَٰى ﺗَﺎرَةً ﻧُﺨْﺮِﺟُﻜُﻢْ وَﻣِﻨْﮭَﺎ ﻧُﻌِﯿﺪُﻛُﻢْ وَﻓِﯿﮭَﺎ ﺧَﻠَﻘْٰﻨَﻜُﻢْ ﻣِﻨْﮭﺎ

C’est d’elle (la terre) que Nous vous avons créés, en elle Nous vous ferons retourner, et d’elle encore Nous vous ferons sortir une fois de plus. (Coran 20:55)

Ce rappel spirituel nous pousse à faire émerger une conscience écologique globale, fondée sur le respect et la préservation de la sacralité de la vie. Car en prenant soin de la Création, c’est aussi notre lien avec le Créateur que nous honorons.

Le Matin d’Algérie : Quels conseils donneriez-vous aux leaders et aux citoyens pour promouvoir la paix dans un monde marqué par les conflits et les divisions ?

Cheikh Khaled Bentounes : C’est en effet une grave question qui s’impose à nous aujourd’hui face à la gouvernance du monde. Je me sens bien modeste pour prétendre conseiller ceux qui dirigent les affaires planétaires. Pourtant, si l’on me demandait mon avis, je dirais que l’état actuel de notre planète devrait à lui seul suffire à nous alarmer.

Il est temps d’adopter une nouvelle approche : chercher, individuellement et collectivement, des remèdes et des solutions aux défis qui nous assaillent. La gravité de la situation nous invite à une profonde introspection.

Ce constat nous touche au plus intime de nous- mêmes. Il nous rappelle que l’humanité, avant d’être une appartenance à une culture, une religion ou une nation, est d’abord un état de conscience. Une conscience élargie devient indispensable pour faire face aux enjeux colossaux de notre époque – qu’ils soient sociaux, politiques, écologiques, climatiques, économiques ou spirituels.

Il nous faut une nouvelle vision, capable d’ouvrir en chacun de nous un espace où l’autre a pleinement droit à sa place et à sa dignité. Cette vision seule peut susciter une remise en question salutaire : de nos systèmes, de nos ambitions, de notre rapport au monde. Pour vivre et prospérer, notre société a besoin d’une orientation commune, d’un idéal fédérateur porteur de sens et de cohésion.

Alors, chacun pourra prendre conscience qu’il fait partie d’un tout, d’un même corps. Et qu’en œuvrant pour le bien commun, il agit aussi pour son propre avenir.

Le Matin d’Algérie : Selon vous, comment la spiritualité peut-elle contribuer à libérer les sociétés des inégalités et des divisions

Cheikh Khaled Bentounes : Sortir de notre inconscience est un facteur clé pour atteindre la paix avec soi, avec l’autre et avec le reste du vivant. En affirmant le choix de notre interdépendance et de nos responsabilités envers les autres êtres humains et envers la planète Terre, nous pouvons agir de manière plus éthique et plus respectueuse, favorisant ainsi la justice, l’égalité, la coopération. Cet effort impératif doit contribuer à réduire les tensions, les conflits et les violences. Il devient un guide vertueux universel pour promouvoir des décisions capitales qui préservent l’avenir des jeunes générations tout en nous réconciliant les uns avec les autres.

Le Matin d’Algérie : Avez-vous des projets en cours ou à venir ?

Cheikh Khaled Bentounes : Le projet est clair : sortir de la culture du « Je » pour entrer dans celle du « Nous ». Placer la paix au cœur des enseignements et des apprentissages — voilà l’objectif auquel je consacre aujourd’hui tous mes efforts et tout mon espoir. Car si nous aspirons sincèrement à la paix, alors nous devons investir pleinement dans sa construction.

Et pourtant, il n’existe aujourd’hui ni ministère, ni académie, ni université, ni école véritablement dédiée à cet enjeu, alors même que les conflits et les guerres s’intensifient partout dans le monde. C’est précisément pourquoi l’Éducation à la Culture de Paix, dès le plus jeune âge, est essentielle : elle porte en elle la promesse d’une nouvelle conscience.
Atteindre un état de paix durable implique de réfléchir en profondeur aux conséquences de nos choix — individuels et collectifs — et d’engager une transformation de nos comportements, de nos mentalités et de nos politiques, à tous les niveaux : local, national et global.

Comme le rappelle le préambule de l’Acte constitutif de l’UNESCO, adopté à Londres le 16 novembre 1945 : « Les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix. »

La conscience humaine, siège de notre bien- être, peut devenir un levier puissant pour développer l’empathie, la tolérance, la coopération et une véritable économie de paix. Intégrer la complexité et la diversité des réalités sociales, culturelles et politiques nous aide à mieux comprendre les enjeux actuels, et à construire ensemble une culture qui valorise l’engagement citoyen et la participation active à un vivre-ensemble pacifique et équitable.
La Paix – Salam, à laquelle j’invite et consacre toute ma dévotion.

Le Matin d’Algérie : Un dernier mot peut- être ?

Cheikh Khaled Bentounes : Je souhaite que dans notre pays la Journée Internationale du Vivre Ensemble en paix soit célébrée le 16 mai de cette année dans les écoles et les universités afin que nos enfants puissent construire leur avenir l’un avec l’autre et pas l’un contre l’autre.

Dans le cadre de la célébration de la 8ème édition de la célébration de la JIVEP 2025, la Fondation Méditerranéenne du Développement Durable, Djanatu al Arif à Mostaganem, quant à elle organise un colloque international en partenariat avec la Fondation Konrad Adenauer sur le thème : Médiation et Culture du Vivre Ensemble en Paix.

Je voudrais féliciter l’Organisation Mondiale du Mouvement Scout qui a adopté la Résolution 2024-J « Vivre Ensemble en Paix » lors de sa 43ème Conférence Mondiale du Scoutisme, au Caire, 13-23 août 2024 et qui par cette action engage plus de 50 millions de jeunes scouts dans le monde.

Pour changer les choses, il faut investir en premier lieu dans l’éducation. L’éducation est un devoir sacré et nous ne pouvons fuir cette responsabilité vis-à-vis de nos enfants. Mettre nos savoirs, nos avoirs, nos connaissances et notre technologie en synergie au service du bien commun et de l’avenir. Agir ensemble pour la paix, le Vivre ensemble, la justice et la dignité. Chacun de nous est une cellule d’un même corps. Ce corps s’appelle Humanité.

Élaborée lors du colloque au Palais des Nations, la Déclaration de Genève pour l’Éducation à la Culture de Paix a été proclamée à l’occasion de la célébration de la 7ème édition de la Journée Internationale du Vivre Ensemble en Paix, le 16 mai 2024. Elle permet de rassembler toutes celles et ceux qui s’engagent dans la promotion de l’Éducation à la Culture de Paix dans les programmes scolaires.

Entretien réalisé par Brahim Saci

Liens

https://www.change.org/DeclarationGeneve

https://16mai.org/

www.cheikh-bentounes.com

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