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vendredi, 31 octobre 2025
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Une délégation de la gauche française interdite d’entrée en Israël

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Drapeaux français et israélien

Une délégation de 27 parlementaires français, dont François Ruffin et Alexis Corbière, s’est vue refuser l’entrée en Israël. Cette décision intervient dans un contexte diplomatique tendu entre Paris et Tel-Aviv.

Une délégation de gauche française s’est vue refuser l’accès en Israël dans un contexte de tensions diplomatiques. La décision suscite de vives réactions.

La diplomatie française connaît un nouvel épisode de tensions avec Israël. Le 21 avril 2025, une délégation de 27 élus de gauche, comprenant des ex-LFI comme François Ruffin et Alexis Corbière, s’est vu refuser l’accès au territoire israélien. Ce coup de théâtre, survenu 48 heures avant leur départ, soulève de vives critiques et relance les interrogations sur les relations entre Paris et Tel-Aviv.

Interdiction surprise et visa annulé

L’annulation des visas, initialement approuvés un mois auparavant, a pris de court les parlementaires. « C’est une violation de nos droits fondamentaux », a déclaré François Ruffin lors d’une conférence de presse improvisée. Cette décision brutale souligne l’ultra-sensibilité du contexte politique actuel, tant en France qu’en Israël.

Contexte diplomatique tendu

Les relations entre la France et Israël sont marquées par des divergences croissantes concernant la politique israélienne à l’égard des Palestiniens. Le gouvernement français, sous la présidence d’Emmanuel Macron, a multiplié les critiques autour des mesures prises par l’État hébreu. Cette situation a ajouté une couche d’irritation dans une relation déjà fragile.

Réactions critiques

La décision d’Israël provient d’un climat d’escalade où l’opposition française, notamment représentée par ces élus, a décidé de soutenir une résolution pour la paix au Proche-Orient. Les réactions n’ont pas tardé, plusieurs voix se faisant entendre, notamment celle de La France Insoumise, qui a appelé Emmanuel Macron à réagir. « Nous ne pouvons pas rester silencieux face à une telle provocation », a déclaré Alexis Corbière. Fait à relever, il y a quelques semaines, ce sont deux dirigeants de l’extrême droite française qui ont été accueillis en Israël. Marion Maréchal Le Pen, députée européenne et Jordan Bardella, président du RN a été invité en mars par le gouvernement israélien. Laquelle invitation a été aussi critiquée par des Français juifs et les représentants de la communauté juive, comme d’une grande partie de la classe politique.

Conclusion 

Cette interdiction d’accès, qui semble davantage révélatrice des tensions diplomatiques que d’une simple problématique bureaucratique, invite à s’interroger sur le rôle de la France comme médiateur dans le conflit israélo-palestinien. À une époque où les questions de droits de l’homme et de liberté d’expression sont plus que jamais au coeur du débat international, la réponse de l’Élysée à cette situation pourrait bien être déterminante.

Rabah Aït Abache

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Tunisie : l’avocat Ahmed Souab arrêté après avoir dénoncé l’injustice

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Me Ahmed Souab

Plusieurs avocats et des proches de personnalités tunisiennes, dont des opposants au président Kaïs Saïed, condamnés samedi à de lourdes peines pour « complot contre l’État », ont dénoncé lundi  21 avril un procès « fabriqué de toutes pièces », en confirmant des recours en appel.

Parmi ces avocats de la défense figure Ahmed Souab, un ancien juge qui a dénoncé « une injustice inédite » dans cette affaire. Il a été interpellé ce lundi après avoir fait allusion aux pressions du pouvoir sur la justice en Tunisie. 

En Tunisie, Ahmed Souab a été interpellé chez lui, lundi matin à l’aube. Selon son fils, qui a donné l’alerte, dix hommes de la sécurité ont fait irruption chez lui. L’avocat a été conduit au pôle judiciaire antiterroriste avant d’être officiellement placé en garde à vue. La justice lui reproche ses critiques contre le verdict du procès dit du « complot contre la sûreté de l’État ».

« Nelson Mandela disait « la personne libre devient esclave si elle se tait face à l’injustice ». Notre peuple et la révolution nous ont donné la liberté. Ne nous taisons pas face à l’injustice. L’injustice et l’humiliation que j’ai vues dans ce dossier sont sans précédant », réagissait Ahmed Souab samedi dernier après le verdict.

Selon le porte-parole du pôle judiciaire antiterroriste, Ahmed Souab pourra ensuite être transféré dans un centre de détention après l’ouverture d’une information judiciaire pour « un ensemble d’infractions terroristes » et de « crimes de droit commun ». « Il va rester cinq jours en détention provisoire et les deux premiers jours, il ne pourra même pas communiquer avec ses avocats », a déploré Samir Dilou, avocat dans le cadre de la même affaire. En tant qu’avocat des accusés dans le cadre de cette affaire, son intervention devant le tribunal à l’annonce du verdict a été remarquée.

Une manifestation organisée pour dénoncer son arrestation

Selon les médias locaux, Ahmed Souab a été placé en garde à vue pour « soupçons de menace de crimes terroristes » après ses déclarations de samedi où il a estimé symboliquement que l’épée de la justice n’était pas sous la gorge des accusés, mais sous celle du juge qui a émis le verdict, faisant allusions aux pressions du pouvoir tunisien sur la magistrature.

Des protestataires ont organisé lundi soir une manifestation sur l’avenue Habib Bourguiba dénonçant l’arrestation de cet ancien juge et réclamant la liberté pour les accusés dans l’affaire du complot contre l’État. Les slogans brandis mentionnaient le refus d’utiliser la justice et la sécurité pour viser les opposants en Tunisie.   

Pour rappel, le tribunal de première instance de Tunis a infligé des peines allant de 4 à 66 ans de prison à l’encontre d’une quarantaine de personnes de l’opposition, des hommes politiques, des avocats, des journalistes, des hommes d’affaires et d’anciens ministres. Les accusés ont été reconnus coupables de « complot contre la sûreté de l’État » et « d’appartenir à un groupe terroriste ». 

RFI

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Le scribe de la mairie d’Oran

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Ecrivain public
Image par Waldryano de Pixabay

Cette chronique rappelle combien le niveau d’instruction de la population algérienne, tout au moins de lecture et d’écriture, a fait un bond spectaculaire si on s’en tient aux seuls fondamentaux que je viens de citer. Quant au reste, ce n’est pas le lieu pour nous fâcher. 

Comme toujours lorsque je raconte une histoire du passé à Oran en support à mon analyse, je demande au lecteur de valider ou de réfuter mon souvenir. Mais au fond, qu’importe pour celle-ci car le personnage avait bien existé même si ne n’était pas aux portes de la mairie.

On les nommait les écrivains publics. Ils ressemblaient à l’une des statues égyptiennes les plus célèbres du monde de l’art exposée au musée du Louvre, soit le Scribe rédigeant un texte sur une feuille de papyrus. 

Alors que ce dernier est accroupi, les nôtres étaient assis sur un tabouret ou sur une chaise.   Comment le seraient-il autrement après cinq mille ans qui les séparent du scribe Égyptien ? Quant au papyrus, allez trouver des tiges d’une ancienne plante africaine à Oran ! 

Ils avaient une posture imperturbable, aussi raide que la fierté, car ils savaient qu’ils portaient le savoir au bout de leur plume. Pour les demandeurs ils étaient l’ultime pont entre eux et ce qui leur semblait être le pouvoir inatteignable de l’administration.

C’était sur eux qu’on plaçait la charge de trouver le bon mot, la bonne tournure ou le bon argument. Ils étaient conscients qu’ils déposaient dans leurs mains l’espoir que leur dossier, lettre de supplique ou de réclamation, ne se retrouverait pas en dessous de la pile.

Tout reposait sur le scribe car seule la confiance en lui pouvait les rassurer. Ils n’étaient pas aussi savants pour en contrôler la bonne qualité d’écriture, autant dans sa lisibilité que dans ses tournures.

Ils maniaient les gestes de la main comme le cordonnier à son ouvrage, le peintre à son œuvre ou le professeur à son tableau. L’image du passé est floue pour être certain qu’ils s’étaient convertis à la machine à écrire (je suppose que oui). Celle qui vous réveillerait un mort à chaque frappe sur une touche. Quant à la manette qui faisait faire un retour au rouleau pour aller à la ligne, on aurait dit le claquement d’un fusil.  

L’illettrisme de nos aînés semblerait aux jeunes d’aujourd’hui une montagne à gravir pour accéder aux besoins les plus élémentaires au regard du monde de communication autour de ces malheureux.

Pourtant ils semblaient ne pas en être autant perturbés qu’on aurait pu le penser. Sans doute parce que la majorité d’entre eux avait toujours près d’eux un parent, un voisin ou un passant, qui leur traduisait ou leur expliquait ce dont il s’agissait lorsque l’inscription ou la démarche supposait de passer par l’écrit ou l’oral de la langue française. Mais hélas, tous n’avaient pas cette opportunité, le scribe n’aurait pas existé dans ce cas.

Les écrivains publics de la mairie d’Oran étaient ceux qui leur ouvraient les portes de leur illettrisme, ils étaient des ponts, des passeurs et les porteurs des clés.

Je ne me rappelle plus s’ils étaient préposés uniquement à la rédaction de documents administratifs ou également à celle du courrier privé. Dans ce second cas, les clients devaient parfois confesser l’intime, ce qui était inavouable aux autres.

Puis ils disparurent car la généralisation de la lecture et de l’écriture était manifeste. Quant aux dernières victimes innocentes de l’illettrisme, ils trouvaient davantage d’aide de proximité. Les écrivains publics sont les derniers témoins du brouillard dans lequel se trouvait la majorité des habitants.

Ils ne sont plus que dans nos mémoires mais nous savons combien ils furent un service public d’une grande utilité. L’écrivain public détenait le savoir, il ne pouvait que disparaître car il n’aurait pas pu supporter que celui-ci leur soit infidèle par la généralisation de l’instruction.

Ils en sont morts dans la dignité d’avoir pu être les mains et le langage de ceux qui n’avaient pas eu cette chance d’en avoir car ils étaient les oubliés de la société, ceux qui en étaient à la marge lorsqu’il s’agissait de lire ou d’écrire.

Mais l’instruction a-t-elle permis à tout le monde de sortir du brouillard ? Car dans pour les deux ou trois générations qui ont succédé aux scribes, le savoir n’est plus seulement dans l’écriture et la lecture. Mais nous l’avons dit au départ de cette chronique, ce n’est pas l’endroit pour me fâcher avec beaucoup. 

Boumediene Sid Lakhdar

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Printemps 1980 à Constantine : un étudiant témoigne

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Le 20 avril 1980, à Constantine, commémoration ou continuation. Quelle était l’atmosphère générale dans la capitale de l’Est, Cirta la Numide ?

L’air était à la morosité. Après un intermède qui a duré presque 18 ans, période durant laquelle le butin de guerre, ce grand gâteau, a été « gentiment » distribué à l’ombre de la baillonette, au nom d’un client, d’une région, d’une alliance ou d’une traîtrise. Tout a été enjolivé par l’idéologie forte du 20ème siècle : le socialisme. Il en fallait pour les maîtres d’Alger ! Mais le leur était spécifique.

Un socialisme travesti et dépravé : il s’inspirait de tout, sauf de la philosophie de ses réels théoriciens. On était dans l’air des temps. La capitale Numide avait mangé son pain blanc. Elle arrive à saturation.

Les nouvelles couches urbaines bousculent l’esprit citadin. Le colonel Abdeghani ancien chef de la 5ème région militaire et Hadj Yala, le préfet du beurre, sont passés par là. Ils ont dilapidé les biens vacants, l’immobilier et le foncier. Tahar Laâdjal, CNP (commissaire national du parti FLN) réactionnaire virulent, traître à son ami Chaâbani, trônait en grand gardien du temple des voleurs et ripoux. Son remplaçant arrivait directement d’une caserne avec le grade de commandant au moment où le Calife de « gauche » confiait la direction de la boîte FLN à un colonel du baâth local, je nomme Yahiaoui.

Et Bouâbellou le fédéral ne jurait que par la mise à mort des mécréants démocrates et pissenlit de gauche. Déjà en 1978, Boumdiène était à l’aéroport Ain El Bey et les CRS avec leurs chiens encerclaient l’usine Sonacome et menaçaient physiquement les salariés en grève ! ces mêmes salariés et syndicalistes ont été déférés devant le procureur de la République, dont une femme syndicaliste enceinte de plusieurs mois.

À la mort du Calife (je le nomme ainsi parce qu’il a remplacé les préfets de la République par des Wali (de « el wala =allégeance), la période de répis a pris fin. Sans consulter le peuple, les chefs janissaires, dans un conclave, que eux seuls savent concocter, ont désigné le nouveau dey : un colonel muet.

Son prédécesseur avait la verve, le langage de la ruse paysanne, le jargon poli des voyous et la métaphore des haineux. Le nouveau chef était aphone. Il s’exprimait mieux dans le silence qu’en parlant. Il nomma un premier ministre, colonel lui aussi, premier flic d’Algérie sous le moustachu Calife, et ancien prince de la rapine dans la grande province de Constantine, Ben Ahmed Abdeghani. Un grand initiateur de la campagne anti-fléaux, comprendre un lâcher de flics sur les trottoirs des villes pour apeurer le peuple et interdire les couples. Un nouveau virage. Ils doivent pouvoir s’allier à d’autres forces. Celles de la mort !

Le consensus d’après coup d’état de juin 1965 est fissuré. Le peuple, fatigué par des siècles de colonisation, a consenti à beaucoup de choses qu’il jugeait mineures par rapport à sa quête de repos et de reconstitution. La masse ne croyait plus à l’éternité du gouvernant. Le calife venait de quitter le monde et son remplaçant ne faisait pas l’unanimité. S’ensuit la bataille pacifique des blagues, apparemment dans la jovialité mais profondément significatives du marasme général. Le peuple étouffait !

L’Algérie de l’indépendance a laissé la place à celle de 16 millions alors que le butin s’est vu fondre comme du beurre au soleil.

En ville, ils ont placé, à l’entrée du souterrain, un aveugle qui psalmodiait , à tue-tête, le coran au premières heures de la journée. La musique voulait d’autres partitions.

À l’université, le climat était à la suspicion. Le niveau scientifique reculait au profit du charlatanisme. Constantine du savoir est prise à la gorge par la horde des ténèbres. Les brilliants étudiants, les enseignants qualifiés étaient en quantité. Seulement ils ne pouvaient rien devant les détenteurs des manettes pédagogiques et les forces répressives qui imposaient les idéologies et les manipulations politiques. L’université n’était pas encore un mourroir mais l’érection des abbatoirs était visible.

L’université de Constantine qui a porté très haut les nobles idéaux de progrès, de justice, d’ouverture et de culture, a vu naître de grandes inquiétudes. Les reculs flagrants et l’approche du ravin. Les syndicats étudiants sont harcelés. Les comités pédagogiques et de cité sont bâillonnés, la commission culturelle n’est plus soutenue.

Et au moment où les syndicats étudiants reculaient, la droite fasciste soutenue par la police politique pointait du nez et prenait place : les mosquées/réduits en sous-sol ou en salle des fac proliféraient, une littérature abrutissante envahissait les espaces scolaires et publics.

L’agressivité tolérée par le gouvernant est devenue l’arme de l’étudiant zombie. Dans ce climat délétère, la gauche officiellement organisée, faisait toujours la bêtise de soutenir le pouvoir au lieu de pondre sa propre politique et sa propre théorie.

Elle s’accrochait toujours à la théorie d’Oulianovsky « la Révolution nationale démocratique » ou le développement non capitaliste conduit par les démocrates révolutionnaires tels que les gouvernants algériens et à leur tête Chadli Bendjedid.

Sadek Hadjeres et Benzine, vieux militants et anciens capés du PPA de Messali, n’ont pas compris que cette théorie d’Oulianovsky a été rejetée par un comité central du PCUS en 1975 déjà. Mais Benzine et son équipe sont plus marxistes que Souslov et Trotsky réunis.

De ce brouillard idéologique et politique s’ensuit une hémorragie terrible dans les rangs du PAGS, dominant à l’université. Les dissidents se comptaient par dizaines en cette année 1980. Ils étaient tous des activistes des différents comités universitaires. Ils n’acceptaient plus la ligne du parti infiltré par la police politique et dirigé par des clandestins coupés de la réalité populaire.

L’université de Constantine de l’époque a été toujours tolérante de la diversité. Elle était l’unique université de l’Est si on ne prenait pas en compte 2 instituts à Batna et deux petits centres à Setif et Annaba. Nous étions 9000 étudiants de toutes les wilaya de l’Est. Toutes les diversités culturelles étaient représentées, de Ouargla à Annaba en passant par les hauts-plateaux,le nord-constantinois, la kabylie et l’immense pays chaoui.

Beaucoup d’étudiants kabyles venaient de bejaïa, Setif, bordj Bouarreridj et aussi de Constantine et des petites villes environnantes. Jamais nous n’avions vu ou entendu parler de conflits. Nous étions organisés en courants politiques. Nous avions des amis et des adversaires parmi les étudiants de nos propres régions. Le fascisme éthniciste n’était pas dans les rangs de la majorité des étudiants. Il se préparait de l’autre côté. Dans les caves des suprématistes : »la meilleure nation sortie au monde ».

Au Resto à l’heure du déjeuner, Douja, l’étudiante chargée de la diffusion de la musique, nous passait du Djamel Allam, Chenoud, Idir et toute la belle musique universelle, de Demis Roussos à Abdehalim Hafez.

Dans les cités, les étudiants kabyles animaient les soirées artistiques. Un grand groupe kabyle de l’époque, les Abranis, est venu au Resto central animer un très beau bal. On était nous.

Je reprends le fil, pour vous dire qu’en ce mois d’avril une secousse politique est venue en réaction à la politique de l’étouffement pratiquée par les janissaires.

Au départ c’était l’interdiction d’une conférence. C’est à dire une répression du droit à l’expression et un coup d’arrêt à la liberté d’apprendre et de diffuser une information. Jusqu’à maintenant nous sommes toujours dans le cadre des concepts universels généraux.

Ensuite, interdire une conférence sur la poésie est un crime qui n’a d’égal que les autodafés. Et la meilleure de toutes, c’est interdire à des étudiants de prendre connaissance de leur propre littérature ancestrale ! jusque-là, l’identité et la région n’ont rien à voir avec le délit condamnable par toutes les justices du monde. L’incident est une preuves que le régime des janissaires interdit tout acte qu’il ne peut maîtriser ou tolérer sur tout le territoire qui se trouve sous ses bottes.

Le printemps berbère de 1980 est une forme de résistance nationale à la dictature jacobine.

Les étudiants de Tizi voulaient être libres. Kabyles, ils le sont déjà. Sauf que la police politique avait inversé l’équation pour lui donner une connotation ethniciste sinon raciste.

Vers le début mai 1980, sur l’esplanade de l’université de Constantine, nous étions surpris par un sit-in « improvisé » par de nombreux étudiants d’origine kabyle. Parmi eux le meilleur de mes amis. Ils étaient tous là. Arabisants scolaires, francisants, syndicalistes étudiants actifs ou en rupture, artistes amateurs et autres étudiants non visibles à l’année.

Malgré un climat de grande peur et de répression, ces braves étudiants ont fait acte de grand courage et de détermination. La police politique comptait sur des réactions racistes. Que nenni ! Le sit-in a eu une grande sympathie parmi la communauté universitaire.

Un étudiant de sociologie d'origine skikdie, un libertaire, est venu me voir spontanément pour me dire : "Kados, nous devons être tout le temps aux côtés de nos amis kabyles. C'est notre combat à tous, la liberté". Ce sit-in kabyle à Constantine est pour la liberté de tous les Algériens puisqu'il est pour la liberté d'expression et contre la répression.

Ce sit in de grande portée sur les consciences, m’a suggéré une amplification par un apport quantitatifs dans les rangs des resistants. J’ai pensé à un renfort. La conscience parmi les étudiants des autres régions était présente, même à l’état primaire, mais éparse.

Les soutiens n’étaient certes pas écrits, ni bruyants et manifestes mais sont logés dans ces regards admiratifs des étudiants qui venaient au « cercle des résistants ». La grande lame de résistance était latente. Et c’est là le grand génie populaire.

J’étais franchement blessé dans mon amour propre, moi le Chaoui, qui dans les moments difficiles, carbure à l’émotion, par le fait que le meilleur de mes amis et de mes camarades ne m’avait pas mis dans la confidence de cet acte politique. Je ne lui ai rien demandé, ni reproché. Mais cette blessure m’a accompagnée pendant 20 ans, jusqu’au jour où j’ai gagné d’ autres épaisseurs en maturité.

Cet ami, loin de ne pas me faire confiance, il avait beaucoup plus peur que l’affaire soit ébruitée et par conséquent, dans un climat policier renforcé, échouer lamentablement avec toutes les conséquences graves pour les organisateurs. Un vrai acte digne du courage de Fellaga (guérilleros de la révolution algérienne).

Ce groupe d’étudiants kabyles, ont mis leurs vies et leurs libertés en danger. Ils étaient d’une dignité et d’un courage insondable. Ils avaient la détermination de l’histoire et l’obstination de l’ancêtre qui refuse de s’abaisser. Ils ont hissé la tête de la nation hors de l’eau.

Cet ami et camarade qui m’a caché le secret du sit in, je ne cesse de l’aimer.

Kada Sabri

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ANIRA : dérives dans deux programmes de la chaîne El Heddaf

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El Haddaf
El Haddaf, une multirécidiviste

L’Autorité nationale indépendante de régulation de l’audiovisuel (ANIRA) a affirmé, mardi dans un communiqué, qu’elle continue de constater certaines dérives professionnelles s’écartant de l’analyse sportive, et ce, en dépit de ses mises en garde sur la nécessité de respecter les dispositions légales et réglementaires encadrant le traitement de l’information sportive, et c’est le cas pour deux programmes sportifs diffusés par la chaîne « El Heddaf ».

« Bien qu’elle ait souligné à maintes occasions, et à travers les médias nationaux, la nécessité de respecter les règles et dispositions juridiques relatives au traitement de l’information sportive dans les différents programmes et émissions des chaînes télévisés, l’ANIRA continue néanmoins de constater certaines dérives professionnelles qui s’écartent de l’analyse sportive », précise le communiqué.

« L’un des analystes sportifs intervenant sur la chaîne El Heddaf TV, dans les émissions +Belmekchouf+ du 17 avril et +VAR El Heddaf+ du 15 avril 2025, s’est écarté des principes de neutralité et d’objectivité », note  l’ANIRA soulignant que cela « va à l’encontre des dispositions de la loi organique n 23-14 relative à l’information, de la loi n 23-20 relative à l’activité audiovisuelle, et  du décret exécutif n 24-250 fixant le cahier des charges général applicable aux services de communication audiovisuelle ».

L’Autorité rappelle à cet égard que « le journalisme sportif n’est pas un moyen de gérer les émotions ou semer le doute, mais un partenaire dans la construction de la conscience collective et la promotion de l’esprit de compétition loyale, et il est tenu de ce fait de faire preuve de responsabilité, d’activer les mécanismes d’autorégulation et de suivi des analystes sportifs, afin de garantir l’exactitude et la modération dans la transmission et l’analyse de l’information, loin du sensationnel injustifié ou de l’hyperbole susceptibles d’attiser les émotions plutôt que de les tempérer, et de compromettre ainsi l’essence même du sport et les hautes valeurs qu’il véhicule ».

La chaine El Haddaf TV est une récidiviste, elle a déjà été rappelée à l’ordre par l’ex-ARAV.

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Un dinar en déroute pour une Algérie « victorieuse »

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Mohcine Belabbas

Le dinar algérien ne vaut plus grand-chose. Ni sur le marché, ni dans le cœur des citoyens. Ce n’est plus une monnaie, c’est un aveu de faiblesse.

Dans les rues des grandes villes du pays ce sont l’euro et le dollar qui dictent leur loi. Et pendant que la Banque d’Algérie publie un taux officiel sans surprise, le vrai taux se négocie à l’ombre, en espèces, dans un marché parallèle devenu norme. Voilà l’état de notre souveraineté monétaire : une fiction administrative, démentie quotidiennement par la réalité économique.

Officiellement, le marché informel est combattu. Officieusement, il est toléré, parfois même utile pour désamorcer la colère populaire. Officiellement, le dinar est stable. Officieusement, il ne permet plus de changer une voiture vieillissante ou d’acheter un mouton pour l’Aïd. Officiellement, nous parlons de “relance économique”. Officieusement, nous stagnons depuis quatre décennies. Le citoyen algérien, lui, n’a pas besoin de rapports officiels : il le voit à la caisse du supermarché, dans les frais scolaires de ses enfants, dans son pouvoir d’achat en ruine.

Soyons clairs : cette situation n’est pas née d’une malédiction économique. Elle est le produit d’un système fondé sur la rente, sur l’importation comme modèle de croissance, et sur une gouvernance qui préfère l’improvisation aux réformes structurelles. Dans un pays aussi riche en ressources et en talents, l’érosion du dinar n’est pas une fatalité, mais une responsabilité politique.

Oui, des contraintes extérieures existent. La dépendance historique aux hydrocarbures pèse lourd, les instabilités régionales ajoutent des incertitudes, et les marchés mondiaux ne font pas de cadeaux. Mais justement : c’est dans ces moments que les nations souveraines tracent leur propre voie. Ce que nous vivons n’est pas une conséquence de la mondialisation, mais de notre incapacité à la préparer et à y répondre avec lucidité.

Revaloriser le dinar n’est ni un slogan technocratique, ni une utopie nationaliste. C’est un projet politique exigeant, qui passe par la reconquête de la confiance – à la fois des citoyens et des investisseurs. Il implique un changement de cap économique : production locale, transformation industrielle, exportations hors hydrocarbures, réforme fiscale équitable, bancarisation intelligente, lutte réelle contre la fuite de capitaux. Cela suppose aussi de véritablement libérer l’initiative privée, contrôler les mouvements de capitaux sans asphyxier l’économie réelle, et de faire confiance à la société civile dans sa capacité à créer de la valeur.

Une monnaie nationale n’est pas un simple outil de transaction. C’est un miroir de la solidité d’un État, de la cohérence de sa politique, de la confiance qu’il inspire. Lorsque le dinar perd sa valeur, c’est le contrat de confiance entre l’État et ses citoyens qui se fissure. Il ne s’agit donc pas seulement d’économie, mais de justice. Car une monnaie faible, c’est une inflation forte. Et cette inflation, comme toujours, frappe d’abord les plus modestes. Ceux qui ne peuvent pas thésauriser en euros, ni ouvrir un compte offshore.

Redonner sa valeur au dinar, c’est rétablir l’égalité des chances. C’est garantir l’accès équitable aux soins, à l’éducation, à la mobilité. C’est mettre fin à l’économie à deux vitesses, où les plus favorisés accèdent à la devise et les autres s’enfoncent dans la précarité.

Enfin, redonner au dinar sa place, c’est affirmer que notre souveraineté n’est pas un mot vide. C’est admettre que l’Algérie ne peut prétendre à une place digne dans le monde si elle ne maîtrise pas sa propre monnaie. Cela demande de la rigueur, du courage, et surtout une vision. Pas des incantations patriotiques, pas des lois de finances à courte vue.

Alors oui, pour l’instant, nous restons les champions du taux parallèle, les maîtres du double discours et les rois de l’évasion monétaire. Mais rassurez-vous : sur les affiches et dans les cérémonies officielles, l’Algérie reste “victorieuse”. Pas contre l’inflation. Pas contre la fuite des talents. Pas contre la pauvreté. Non. Une victoire de façade, pour un peuple à qui l’on demande d’applaudir pendant qu’on lui vide les poches.

Mohcine Belabbas, ancien président du RCD

Tribune publiée par l’auteur sur les réseaux sociaux

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Relance du barrage vert : le ministre Youcef Cherfa veut accélérer le tempo

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Barrage vert

La réhabilitation du barrage vert, axe majeur de la stratégie algérienne de lutte contre la désertification et de développement durable, entre dans une nouvelle phase d’accélération. Ce mardi, le ministre de l’Agriculture, du Développement rural et de la Pêche, Youcef Cherfa, a réuni les principaux acteurs du dossier pour une réunion d’évaluation à la Direction générale des forêts.

Conservateurs des forêts, directeurs des services agricoles des treize wilayas concernées, responsables du groupe d’ingénierie rurale (GGR), du Bureau national d’études pour le développement rural (BNEDER) et du Haut-Commissariat au développement de la steppe (HCDS) ont passé en revue l’avancement des programmes des années 2023, 2024 et 2025.

Au menu des discussions : l’état des opérations de reboisement, les travaux d’ouverture de pistes d’accès dans les zones enclavées, et la création de points de collecte d’eau, essentiels à la réussite du projet.

Premier point satisfaisant : les objectifs de l’année 2023 ont été entièrement atteints. Un signal positif, selon le ministre, qui appelle désormais à maintenir la pression. Il a fixé un cap clair pour le programme 2024 : toutes les réalisations doivent être réceptionnées avant fin septembre. Une manière d’imprimer un rythme soutenu à ce projet jugé stratégique.

Youcef Cherfa a également insisté sur l’importance de lancer concrètement, avant la fin juin, les opérations prévues pour 2025. « Il est essentiel de ne pas prendre de retard », a-t-il martelé, soulignant l’enjeu environnemental, mais aussi socio-économique du Barrage Vert pour les régions concernées.

Le ministre a salué l’implication des différents intervenants et s’est dit confiant quant à la réalisation des objectifs dans les délais. Une dynamique qu’il entend préserver, pour faire du barrage vert un véritable rempart écologique au service du territoire.

La rédaction

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La République : entre autoritarisme et islamisme politique

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Hirak

Certains journalistes, sous des dehors faussement candides, feignent l’incompréhension du concept de laïcité lorsqu’ils sont face à des démocrates républicains. Dissimulant mal leur parti pris, ces chroniqueurs, sous le charme des thèses de l’islamisme politique, soumettent systématiquement les démocrates, à chacune de leurs interventions, à un véritable interrogatoire.

Sous couvert de neutralité, ils les somment de se justifier sur la promotion explicite de la laïcité dans leur programme, comme s’il s’agissait d’un crime de lèse-religion.

Derrière des interrogations en apparence innocentes, se trame des procès idéologiques avec une brutalité inquisitrice. La laïcité ne serait-elle pas une attaque déguisée contre la foi ? demandent-ils. Ne risque-t-elle pas de heurter la société ? Ne met-elle pas en péril les « valeurs » nationales ?

Par ces questions à peine voilées, on sème le doute sur le bien-fondé et la légitimité de la laïcité, un principe universel et une pratique ancestrale qui, historiquement, a structuré naturellement notre cohésion sociale. Ce faisant, ce ne sont plus les tenants d’une idéologie rétrograde et discriminante qui sont placés sur le banc des accusés, mais bien ceux qui défendent l’universalisme, la liberté de conscience et l’égalité.

Ce simulacre d’objectivité médiatique cache mal une volonté de légitimer un projet politique fondé sur l’exclusion et la régression. À travers ces mises en accusation déguisées, il s’agit en réalité de diaboliser les fondements de l’État démocratique et de préparer insidieusement l’avènement d’un État théocratique, en effaçant les lignes de séparation qui les distinguent.

Il devient donc impératif de rappeler qui, dans le paysage politique national, est véritablement l’intrus. Qui constitue l’anomalie, l’« ovni », en rupture avec les mœurs, les traditions et l’histoire des Algériens. Pour cela, une relecture des origines de l’islamisme politique s’impose, tout autant que l’examen lucide du lourd tribut qu’il a fait payer au pays.

Né des ruines du Califat aboli au lendemain de la Première Guerre mondiale, et nourri du ressentiment suscité par le choc colonial, l’islamisme politique s’est construit en opposition frontale à la modernité. Ses promoteurs sont animés par la volonté d’empêcher la propagation des valeurs dites occidentales, jugées menaçantes depuis qu’elles ont influencé l’empire ottoman, et de restaurer le modèle civilisationnel qui leur permet de faire de la religion un instrument de pouvoir.

Découlant de ce fait historique, l’islam politique prône un projet fondamentaliste aux contours clairement définis. Il vise à modeler la société par une interprétation rigoriste de l’islam, ériger un système juridique distinct, opposé aux principes de l’universalisme et de l’égalité. Ce projet entraine de facto une hiérarchisation des citoyens, discriminant les femmes, les minorités religieuses, les non-croyants et tous ceux qui refusent de se soumettre à la vision absolutiste de la foi. Loin d’être un mouvement spirituel, l’islam politique érige le religieux en carcan juridique répressif et l’interdit en principe de gouvernance.   Il s’agit, en somme, d’un projet totalitaire camouflé sous les habits de la piété.

Ce modèle de totalitarisme se fonde sur l’abandon pour l’individu de sa liberté, son esprit critique et son libre arbitre au profit de réponses dogmatiques cultivant l’hostilité à l’égard de la démocratie et de la modernité et de tout ce qui va à son encontre. Ses promoteurs refusent ainsi d’admettre que l’époque où la société configurait la place de chaque individu est révolue, et que désormais, elle s’organise autour de l’individu en tant qu’entité autonome. 

En rejetant les principes de modernité à la base de l’émancipation individuelle, ils entendent imposer une vision totalitaire de la société conforme à leur doctrine. 

L’essor de ce courant politico-idéologique dans les années soixante-dix ne s’est pas produit dans un vide. Il a été favorisé par le soutien des Etats-Unis, qui l’ont instrumentalisé dans le cadre de la guerre froide. Il a également trouvé un terreau fertile dans les régimes autoritaires arabes en décomposition, eux-mêmes porteurs d’une idéologie nationaliste qui, paradoxalement, a contribué à son émergence.

En rompant avec l’héritage ancestral et en dissolvant les particularismes culturels, le processus d’uniformisation et d’homogénéisation a façonné une société réceptive des thèses fondamentalistes. Les régimes emprunts d ’islamisme n’en sont ainsi que l’aboutissement radicalisé de ce processus. 

Leur programme, demeuré inchangé à ce jour, s’articule autour de luttes incessantes pour le contrôle du pouvoir, s’appuyant sur l’instrumentalisation de la religion et l’exaltation de prétendues valeurs civilisationnelles utilisées comme leviers de légitimation.  D’où leur crainte d’être absorbées par un Occident en pleine expansion, porteur de valeurs culturelles et civilisationnelles incompatibles avec leur socle de légitimité.

Incapables de rivaliser avec lui, ces régimes imposent le repli sur soi, s’isolant du reste de l’humanité au lieu de chercher à s’y insérer. Ce réflexe d’auto préservation, nourri faussement par la crainte identitaire, les conduit à renoncer à l’effort nécessaire pour affronter les défis qui s’imposent à eux. Leur déclin résulte ainsi de leur enferment dans une logique d’autarcie culturelle, d’exclusion linguistique, de rejet de la modernité politique et d’hostilité aux valeurs universelles.

S’agissant de l’Algérie, la conception de la cohésion sociale véhiculée par l’islamisme politique est fondamentalement étrangère à notre socle culturel. Historiquement, notre organisation sociale ne s’est jamais structurée autour de distinctions fondées sur la race, le genre, la religion ou la langue. Elle repose au contraire sur l’universalisme des droits, affirmant de fait une adhésion aux idéaux de la laïcité, bien que ce concept n’ait jamais été formellement énoncé.

Cette tradition repose sur la conviction que les certitudes des dogmes religieux ne sont jamais absolues et que le sacré ne peut, à lui seul, se constituer en juge souverain du bien et du mal.

C’est en sapant les fondements culturels et identitaires que les usurpateurs du pouvoir, alors inféodés au régime égyptien, ont ouvert la voie à l’enracinement de cette idéologie, dont les conséquences se sont révélées désastreuses pour le pays. En inhibant le système immunitaire, ce même système qui avait, par le passé, nourri notre résilience face aux multiples invasions, ils ont ainsi altéré notre capacité à nous protéger de ce corpus idéologique étranger à notre civilisation.

Aux yeux des tenants de ce courant islamo-conservateur, l’enjeu semble avoir changé depuis l’émergence du mouvement populaire (Hirac). L’exigence démocratique, qui est portée à l’échelle nationale, est désormais perçue comme la principale menace, surclassant ainsi leur hostilité à l’égard du pouvoir qu’ils qualifiaient autrefois d’impie. Ils ont, de ce fait, opéré un revirement stratégique pour s’engager auprès de la frange du pouvoir résolue à discréditer l’idéal démocratique. Unis par une même volonté d’étouffer la demande populaire, cette frange du pouvoir, sous l’impulsion de l’ex-chef d’état-major Gaid Salah, a alors composé avec ce courant, en opérant son recyclage idéologique sous une forme hybride où se mêlent les références islamistes et rhétorique nationaliste, et rebaptisée pour la circonstance Novenbrio-Badissia

Cette construction idéologique ambitionne de faire de l’Algérie le sanctuaire d’un islamisme d’Etat. Elle s’emploie à glorifier le régime en place, à sacraliser ses institutions et à disqualifier la démocratie, reléguée au rang de relique néocoloniale prétendument étrangère aux valeurs nationales. Sous couvert d’une authenticité culturelle fabriquée, elle cherche à légitimer une posture autoritaire, tout en neutralisant les aspirations citoyennes à la souveraineté populaire et à la pluralité politique.

Dans cette logique, leurs animateurs s’efforcent même à fabriquer un soubassement historique à leur projet politique qu’ils cherchent à légitimer. Pour ce faire, ils s’acharnent à détourner les textes fondateurs de la Révolution, allant jusqu’à fantasmer un rôle révolutionnaire aux ulémas dont ils prétendent incarner la continuité idéologique. Mais en vain, l’histoire, fidèle à elle-même, résiste à toute falsification. 

Mais, cette idéologie, qu’a-t-elle véritablement apporté au pays pour être ainsi érigée en doctrine quasi-officielle ? Rien, si ce n’est le chaos et la désolation.  Marqué dès l’origine par les motivations rétrogrades, l’islamisme politique demeure enfermé dans la nostalgie pour un passé fantasmé, incapable de formuler un projet d’avenir viable. 

Depuis l’échec de sa tentative de s’emparer du pouvoir par les armes, sa stratégie s’est muée en une entreprise d’infiltration. Il s’efforce de se rendre indispensable au maintien du pouvoir en mal de légitimité, lui apportant un appui chaque fois que celui-ci vacille sous la pression populaire. A au moins deux reprises, ses partisans ont ainsi torpillé les espoirs d’une transition démocratique pacifique, au prix de graves compromissions.

Ils se positionnent, aujourd’hui, en véritable jointure du pouvoir autoritaire, activant à entraver toute dynamique de la société, qu’ils ont méthodiquement investi. Leur action vise à empêcher l’affirmation de la souveraineté populaire dans un cadre démocratique, l’ouverture au monde, ainsi que l’accès à la modernité et au bien-être.

La menace diffuse de la violence, le chantage insidieux exercé au nom de la stabilité par la diabolisation des forces démocratiques, ainsi que la manipulation habile du sentiment religieux constituent les catalyseurs de ce partenariat politique avec le pouvoir, qui, pour sa part, se sert de leur présence comme levier pour contenir les aspirations démocratiques de la population. 

L’islamisme s’impose aujourd’hui comme une mécanique d’aliénation. Il asphyxie le génie créatif et le potentiel d’innovation du peuple, multiplie les interdits, modifie les usages, infléchit les comportements et transforme en profondeur les normes sociales, notamment à travers des codes vestimentaires imposés comme marqueur idéologique.  

Sous leur emprise, l’école, temple du savoir, est transformée en lieu d’endoctrinement. L’éducation, jadis creuset du savoir et de la pensée critique, a été détournée de sa vocation pour ne plus produire que des propagateurs d’une pensée figée et stérile. 

Sur le plan économique, ils ont impulsé un essor fulgurant à l’économie informelle, qu’ils dominent désormais via le contrôle total du secteur de la distribution. Cette emprise remonte à leur mainmise sur les assemblées élues locales (APC et APW) dans les années 1990, laquelle leur a permis de s’approprier du foncier public. Dès lors, à l’abris de tout cadre légal et fiscal, ils prospèrent dans une opulence insolente, encouragé par une idéologie qui valorise la paresse et dénigre le travail productif. L’exploitation cynique de la religion, soutenue par des fatwas érigées sur commande, sert à justifier et moraliser les pratiques frauduleuses, balayant les scrupules de ceux encore réticents à contourner les règles économiques.

Leur influence s’est également traduite par l’éviction progressive des élites francophones de l’administration et des institutions, vidant ainsi l’Etat de ses compétences les plus expérimentées et provoquant son affaiblissement structurel. La sacralisation de la langue arabe, érigée en vecteur exclusif de légitimité culturelle, couplée à une ruée insensée vers à l’anglais comme substitut au français, illustre la logique idéologique qui prime sur toute démarche de rationalité en terme de politique linguistique.

Quant à la condition des femmes, maintenues dans une position de subordination juridique et assignées, par un Code de la famille rétrograde, à un statut de mineures permanentes, elles demeurent les victimes d’une oppression systémique.  

Ce processus de régression collective est désormais le fait d’un aveuglement collectif autoalimenté, qui entraîne inexorablement le pays sur la voie d’un despotisme comparable à celui imposé par les Talibans en Afghanistan. 

Rejeter, aujourd’hui, la laïcité, c’est s’opposer à l’universalisme, à la liberté, à l’égalité. C’est nier à l’homme sa capacité à penser par lui-même et à être acteur de son destin. Rejeter la laïcité, c’est tourner le dos à la démocratie elle-même ; laquelle ne peut de toute évidence s’épanouir là où le religieux ambitionne gouverner à la place des hommes.

Réhabiliter un courant qui rejette le principe de la séparation entre le politique et le religieux, c’est condamner par avance tout projet national fondé sur l’autonomie, la raison et la liberté.

Si, par ailleurs, le clan du pouvoir qui couve ce courant politique rétrograde persiste à le favoriser et à le protéger, au lieu de s’en émanciper, ou s’il venait à prendre l’ascendant dans l’appareil de l’Etat et au sein des institutions, c’est le vivre-ensemble qui en serait irrémédiablement compromis, et l’Algérie condamnée à connaître les mêmes déchirements que ceux qui ont plongé l’Irak, la Libye ou la Syrie dans le chaos.

Face à un tel péril, les journalistes, qui devraient éclairer l’opinion publique, aussi devront être interpellés, secoués, confrontés à leur propre manque de discernement. Ils ne peuvent rester prisonniers des réflexes inculqués par le régime autoritaire et incapables de nommer les enjeux ou de questionner les certitudes imposées.  

Hamid Ouazar, ancien député de l’opposition

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« Mobilisation générale » : le général Medjahed rassure mais laisse planer le doute

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Le général Abdelaziz Medjahed
Le général Abdelaziz Medjahed

Alors que le Conseil des ministres a validé, dimanche dernier, un projet de loi qui jette les bases juridiques de la mobilisation générale, en lien avec l’article 99 de la Constitution mais jusque-là resté en veille, son apparition soudaine sur la scène politique suscite interrogations et inquiétudes. 

Dans ce contexte, l’intervention du général Abdelaziz Medjahed, directeur général de l’Institut national d’études de stratégie globale, à la Radio nationale, se veut rassurante, sans toutefois dissiper complètement les doutes entourant les enjeux réels de ce texte.

Le général Medjahed a souligné que ce projet de loi ne découle pas d’une situation d’urgence mais s’inscrit dans une vision stratégique visant à renforcer l’organisation de la société face aux défis contemporains. Il le décrit comme un cadre constitutionnel structurant, destiné à définir les responsabilités individuelles et collectives en cas de crise, tout en renforçant l’esprit de citoyenneté et la cohésion nationale.

Cependant, le moment choisi pour relancer ce projet interroge. L’environnement géopolitique régional est instable, et l’Algérie évolue dans une zone marquée par des tensions multiformes, tant sécuritaires qu’économiques. Pour une partie de l’opinion publique, l’introduction de ce texte évoque une préparation implicite à des menaces graves, voire à des scénarios de conflit, sans que les autorités n’en précisent clairement la nature.

Le général a tenté de désamorcer ces lectures anxiogènes, insistant sur la nécessité d’une « participation populaire consciente » et d’un engagement citoyen dans les différentes dimensions de la vie nationale. Pour lui, la mobilisation générale n’est pas synonyme de guerre, mais d’organisation collective, de solidarité et de résilience face à toutes sortes de défis.

Il a aussi salué l’engagement constant de la diaspora, tout en rappelant l’importance du rôle de chaque citoyen dans la préservation de la souveraineté nationale. L’appel à l’unité et à l’héritage des générations fondatrices de l’État indépendant reste central dans son discours.

Mais malgré ce ton rassurant, l’intervention du général Medjahed ne répond pas explicitement aux inquiétudes : pourquoi maintenant ? Quelles menaces pèsent concrètement sur le pays ? À quelles situations ce projet de loi pourrait-il être appliqué dans l’immédiat ?

Ainsi, si le discours vise à ancrer cette initiative dans une dynamique de long terme, il ne parvient pas totalement à lever les équivoques. L’incertitude demeure, et avec elle, une partie de l’opinion reste en alerte, scrutant les développements à venir dans un climat international où les lignes bougent rapidement et où la prudence semble de mise.

Samia Naït Iqbal

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France-Algérie : la demande française de pardon serait la fin du régime

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Drapeau Algérie France

Le pardon de la France à l’Algérie en tant qu’État pour sa responsabilité dans le fait colonial serait légitime, salutaire et la promesse d’une liberté enfin retrouvée pour les Algériens démocrates.

Analysons ces trois qualifications, la dernière étant la conclusion qui justifie le titre de l’article.

La légitime demande du pardon

Légitime car le passé indigne de cette période, ses souffrances et humiliations envers le peuple algérien ne peuvent être discutées par aucune interprétation de l’histoire.

Le pardon au nom de l’état français serait autrement significatif que l’affirmation de la responsabilité d’un régime politique. Tout d’abord parce que la colonisation a vu défiler une succession de régimes politiques sans que l’un d’entre eux ne s’indigne, sinon certains citoyens courageux mais isolés.

Ensuite, en corollaire, parce que la colonisation s’est construite et a perduré au nom d’un état qui a délibérément choisi une colonisation de peuplement avec un enracinement des institutions, d’une culture et des lois françaises.

Les demandes de pardon ont été à plusieurs reprises murmurées si bas qu’on ne pouvait les entendre. En 2017, Emmanuel Macron, alors candidat à la présidentielle, allait enfin déclarer que le passé colonial de la France était « un crime contre l’humanité ». Et de rajouter, « Cela fait partie de ce passé que nous devons regarder en face en présentant aussi nos excuses à l’égard de celles et ceux envers lesquels nous avons commis ces gestes ».

On croyait que le rapport demandé en 2021 à l’historien Benjamin Stora serait la confirmation de sa déclaration antérieure, il n’en fut rien. Le Président s’est engagé à des « actes symboliques » pour le chemin de la réconciliation mais a cette fois-ci clairement exclu « repentance et excuses ». Nous savons ce qu’est devenu cette tentative de réconciliation.

D’autres pays ont également du mal à exprimer ce pardon.

Le pardon, un mot difficile pour certains

Même si les déclarations du Royaume-Uni ont été plus fréquentes et fermement exprimées à propos des humiliations et massacres perpétrés dans les anciennes colonies, le pardon a du mal encore à sortir clairement de la bouche.

« Des actes de violence odieux et injustifiables ont été commis à l’encontre de Kényans alors qu’ils menaient (…) une lutte douloureuse pour l’indépendance et la souveraineté. Et pour cela, il ne peut pas y avoir d’excuse » avait déclaré le souverain britannique au Kenya.

En 2013 déjà, le gouvernement anglais avait exprimé des « regrets sincères » ainsi que le Premier ministre David Cameron qui a qualifié de « profondément honteux » le massacre perpétré en 1919 en Inde, à Amritsar au Pendjab. Mais Londres n’ira jamais vers des excuses complètes.

En 1990 le Japon reconnaît avoir fait subir des exactions à l’encontre de la Corée, ce qui a été compris comme des excuses. Mais l’affaire ne s’est pas présentée d’une manière si simple à cause d’une amertume restée vive. En 2023, le Premier ministre dit avoir « le cœur qui saigne » face aux souffrances des Coréens mais ne présentera pas cette fois-ci des excuses formelles.

D’autres ont fait le pas

En 1995, Jacques Chirac reconnaît la responsabilité de l’État français dans la déportation des juifs de France durant l’occupation par l’Allemagne.

Cette même Allemagne a demandé pardon au nom de l’État à la Tanzanie pour ses exactions commises, « Je m’incline devant les victimes de la domination coloniale allemande. Et en tant que président allemand, je voudrais demander pardon pour ce que les Allemands ont fait subir ici à vos ancêtres ».

En 1998 la Suède présente des excuses aux Samis, peuple autochtone du nord du pays, pour les avoir chassés de leurs terres pendant la colonisation.

La même année, Ottawa présente ses « sincères excuses » et demande pardon aux peuples autochtones du Canada pour l’envoi de force d’un nombre très important d’enfants amérindiens dans des pensionnats gérés par l’Église sous administration canadienne. En 2022, le pape François, lors d’une visite au Canada, présente ses « excuses ».

En 2008, le Premier ministre australien avait adresse les excuses officielles de l’Australie pour « la peine et la douleur » infligées aux premiers autochtones par le retrait de force d’enfants à leur familles pour un objectif d’assimilation.

La même année, Silvio Berlusconi présente ses excuses à la Libye lors de la signature d’un traité qui mis fin aux fortes polémiques nées de la colonisation.

En 2013, le gouvernement néerlandais s’excuse officiellement auprès de l’Indonésie pour les exécutions sommaires pendant la colonisation.

En 2019, la Belgique a officiellement présenté en 2019 ses excuses pour les injustices commises dans ses colonies africaines. Notamment, là également, pour avoir arraché à leurs mères des enfants métis de père belge au Congo, au Rwanda et au Burundi. Toujours pour la même raison que certains cas précédents, les écarter pour un milieu plus propice à l’assimilation. Tiens, revoilà Poutine et les enfants ukrainiens déportés !

En 2021, après de longues négociations, Berlin reconnaît avoir commis un génocide contre les tribus Namas et Hereros en Namibie, colonisée entre 1884 et 1915.

La demande de pardon serait salutaire

Le pardon serait ensuite salutaire pour tout le monde afin que cette histoire de 63 ans prenne fin des deux côtés des rives de la méditerranée et que le conflit permanent laisse place à une relation apaisée. Il n’est de l’intérêt d’aucun pays ni d’aucun peuple de se condamner éternellement à la guerre même si elle est à basse intensité.

Il ne faudrait à la France qu’une seule petite phrase. Nous savons combien la fierté est grande lorsqu’elle dissimule une gêne et une forte réticence des mouvements de la droite extrême. Mais aujourd’hui les générations ont passé et cela est un entêtement qui ne sert à rien sinon à susciter davantage la crise.

La France perd progressivement son influence dans le monde francophone par cet exemple qui lui est l’un des plus important. Elle se prive d’une coopération économique plus soutenue et n’arrange en rien la relation avec sa population d’origine algérienne devenue française.

L’Algérie pour sa part risque de perdre davantage dans ses relations économiques et aussi dans le risque d’annulation des accords de 1968 dont peu d’Algériens en connaissent le contenu et l’importance d’un régime dérogatoire sur les flux entre les deux pays. Ils se rendraient compte de  la perte considérable d’un avantage qui les relie malgré tout au pays le plus important dans la destination du flux de sortie.

Le pardon serait l’espoir d’une mort du régime algérien

Comment le régime algérien pourrait-il encore tenir avec l’arme du danger de l’ennemi extérieur afin de toujours susciter « l’effet drapeau » ? On sait qu’à chaque fois qu’il hurle au néocolonialisme de la France, les Algériens ne répondent pas seulement à l’appel du soutien, ils y courent.

Plus d’un demi-siècle que la manipulation de la mémoire est rentable pour le régime algérien. Pourquoi s’en priverait-il  alors qu’elle lui permet son maintien au pouvoir et son enrichissement jusqu’au vomi.

Les dirigeants algériens sauront encore un moment prendre avantage malgré les excuses de la France. Elles leur permettraient de légitimer leur obsession dans le culte du symbole révolutionnaire. Mais jusqu’à quand ?

Les gardiens du dogme finiront par mourir, les porteurs de la flamme par s’épuiser et les générations futures par percevoir cette révolution comme aussi lointaine pour eux que Napoléon ou Jésus Christ.

La mort n’est pas seulement pour les humains, elle est également inéluctable pour les dictatures violentes.

Boumediene Sid Lakhdar

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