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Des extrémistes français voulaient empoisonner des aliments halal!

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France

Des extrémistes français voulaient empoisonner des aliments halal!

Trois nouveaux suspects ont été interpellés ce lundi et placés en garde à vue dans l’enquête sur les activités du groupe d’ultradroite « AFO ».

Jusqu’à 96 heures de garde à vue
Ce groupe est soupçonné par la justice de vouloir attaquer des cibles liées à l’islam radical. Les policiers les soupçonnent d’avoir voulu prendre part à un projet d’empoisonnement de nourriture halal dans des supermarchés fréquentés par des musulmans. Des perquisitions sont menées dans leurs domiciles respectifs.

Selon Le Parisien, Sandrine F. a été interpellée à Saint-Pardoux-Morterolles (Creuse) tandis que Sylvie C. et Philippe G. ont respectivement été arrêtés à Nanterre et Garches (Hauts-de-Seine).

Menées par les hommes de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), ces nouvelles arrestations – deux femmes et un homme – sont intervenues à la demande du juge antiterroriste en charge du dossier. Les gardes à vue peuvent s’étendre jusqu’à 96 heures, comme le prévoient les textes en matière de lutte antiterroriste.

Les enquêteurs s’interrogent sur leur rôle éventuel au sein du groupuscule « Actions des forces opérationnelles » (AFO) visé en juin dernier par un important coup de filet.

« Durcir l’action » du groupe
Dix de ses membres présumés dont son probable chef de file, un policier à la retraite qui entendait « durcir l’action » du groupe, ont été mis en examen le 27 juin, notamment pour « association de malfaiteurs terroriste criminelle ».

Ce dernier qui avait sollicité un débat différé sur sa détention provisoire a été remis en liberté sous contrôle judiciaire le 29 juin tout comme un autre membre présumé de la cellule.

Le parquet de Paris a toutefois fait appel de la décision du juge des libertés et de la détention (JLD) concernant le policier retraité. Quatre autres suspects avaient été placés en détention provisoire.

Inspiration survivaliste
Ce groupuscule d’inspiration survivaliste, qui affiche son ambition de lutter « contre le péril islamiste », avait évoqué des projets d’attaques contre des islamistes sortant de prison ou des mosquées radicales.

Trente-six armes à feu et des milliers de munitions ont été retrouvées lors de perquisitions chez des suspects, y compris des éléments entrant dans la fabrication d’explosifs de type TATP.

Des investigations lancées mi-avril par le parquet avaient permis aux policiers de la DGSI d’établir que des membres « cherchaient à se procurer des armes » et que certains « avaient testé des explosifs et des grenades de confection artisanale ».

Sur la base de ces éléments, le parquet avait ouvert une information judiciaire le 14 juin, conduisant à ce coup de filet dix jours plus tard en Corse, en Charente-Maritime, dans la Vienne et en région parisienne.

Auteur
Avec AFP

 




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Özil :« Je suis Allemand quand nous gagnons, mais un immigré quand nous perdons »

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Le joueur d’origine turque met entre parenthèses sa carrière internationale

Özil :« Je suis Allemand quand nous gagnons, mais un immigré quand nous perdons »

Le scandale avait enflammé l’Allemagne bien avant le début de la Coupe du monde en Russie, et elle n’a sans doute pas arrangé les affaires de la Mannschaft, éliminée précocement après des défaites contre le Mexique et la Corée du Sud. Sommé de faire montre de loyauté, le footballeur Mesut Özil, qui s’était laissé prendre en photo avant la compétition aux côtés du président du pays de ses parents, la Turquie, a annoncé dimanche 22 juillet qu’il mettait entre parenthèses sa carrière internationale.

C’est une photo qui a complètement changé les rapports de Mesut Özil avec sa sélection et son pays. Le 15 mai dernier, le meneur de jeu d’Arsenal et de la Mannschaft, avec son coéquipier Ilkay Gundogan, posent en compagnie de Recep Tayyip Erdogan, alors en pleine campagne pour sa réélection à la présidence turque. Des clichés de deux stars allemandes d’origine turque, réutilisés à des fins électorales avant le scrutin du 24 juin, finalement remporté par le chef de l’Etat.

Champion du monde en 2014 avec l’Allemagne, numéro 10 de sa sélection, Özil avait alors subi un flot de critiques. Il s’était d’abord excusé mais cette polémique a peut-être fini par influer sur ses performances, jugées décevantes lors du Mondial, comme celles de ses coéquipiers. En tout cas, le joueur n’a pas digéré les attaques, qui n’ont forcément pas cessé depuis l’élimination des Allemands au premier tour du tournoi (la plus grosse désillusion de l’histoire de cette équipe).

Sur son compte Twitter, l’élégant meneur d’Arsenal a expliqué qu’il ne jouerait plus pour l’Allemagne aussi longtemps qu’il ressentirait « du racisme et du manque de respect à son égard ».

Ce n’est donc pas un choix sportif de sa part. Il cible notamment Reinhard Grindel, le président de la Fédération, qui ne l’a pas soutenu. Et d’expliquer : « Je suis Allemand quand nous gagnons, mais un immigré quand nous perdons », qualifiant M. Grindel d’incompétent.

« Mes racines ancestrales recouvrent plus qu’un seul pays »

Sur le fond, Özil assume totalement. Il explique que cette photo avec le président Erdogan n’était qu’une marque de « respect envers la plus haute fonction du pays de (ses) parents », et qu’il la referait. « Comme beaucoup de gens, mes racines ancestrales recouvrent plus qu’un seul pays. J’ai certes grandi en Allemagne, mais mon histoire familiale a ses racines solidement basées en Turquie. J’ai deux coeurs, un allemand et un turc », plaide le joueur de 29 ans.

«Je suis conscient que la photo a causé d’énormes réactions dans les médias allemands, mais alors que certaines personnes peuvent m’accuser de mentir ou d’être malhonnête, la photo que nous avons prise n’avait aucune intention politique », considère l’international aux 92 sélections tout de même. Après le tournoi, le manager de l’équipe, l’ancienne star Oliver Bierhoff, était allé jusqu’à affirmer qu’il « aurait fallu envisager de se passer d’Özil » pour ce Mondial.

Né dans l’ancien bassin minier de la Ruhr, région qui compte de nombreux Turcs ou personnes d’origine turque depuis les années 1960, Mesut Özil quitte donc la sélection nationale après avoir été l’un des grands artisans de son cinquième titre de champion du monde en 2014 au Brésil. Tout en laissant la porte ouverte, il tire sa révérence sur une note amère, entre l’élimination et cette polémique. «Je ne me sens plus le bienvenu », conclut-il dans son communiqué.

Auteur
RFI

 




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Affaire Alexandre Benalla : la fuite en avant en haut lieu

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France

Affaire Alexandre Benalla : la fuite en avant en haut lieu

Le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, et le préfet de police de Paris, Michel Delpuech, se sont longuement exprimés devant la commission des Lois de l’Assemblée, dotée pour l’occasion de pouvoirs d’enquête sur ce dossier à l’origine de turbulences politiques sans précédent sous le quinquennat.

Alexandre Benalla, un jeune conseiller d’Emmanuel Macron omniprésent pour tout ce qui concerne la sécurité du candidat et, dans la foulée, du président, a été filmé, coiffé d’un casque de police, en train de frapper un jeune homme et de malmener une jeune femme lors d’une manifestation le 1er mai.

“Fondamentalement, ces événements résultent de dérives individuelles inacceptables, condamnables sur fond de copinage malsain”, a déclaré Michel Delpuech en visant explicitement trois policiers mis en examen dans cette affaire.

Gérard Collomb, dont une partie de l’opposition demande la démission, a lui aussi rejeté toute responsabilité en affirmant que c’était à la préfecture et à l’Elysée de prendre des sanctions — Alexandre Benalla n’avait écopé en mai que de deux semaines de mise à pied après que l’Elysée eut été informée.

Au reproche de n’avoir saisi ni la police des polices, l’IGPN, ni la justice après avoir pris connaissance le 2 mai de l’existence d’une vidéo de la scène, le ministre de l’Intérieur estime que ce n’était pas à lui de le faire.

Une « affaire d’Etat », estime l’opposition

Gérard Collomb dit avoir été prévenu dans l’après-midi du 2 mai par son directeur de cabinet, lequel aurait saisi à la fois le préfet de police de Paris, Michel Delpuech, et le directeur de cabinet d’Emmanuel Macron, Patrick Strzoda.

L’Elysée lui a dit à ce moment qu’il s’agissait “de faits inacceptables et qu’une sanction serait prise”, a-t-il dit. Pour le ministre, “le problème était donc traité au niveau approprié” et dès lors il ne s’en est plus occupé.

Gérard Collomb et Michel Delpuech ont reconnu avoir croisé Alexandre Benalla, mais ont démenti toute proximité.

Ils ont défendu la pratique selon laquelle des “observateurs” – parfois des députés ou des magistrats – sont emmenés sur le parcours des manifestations pour voir comment le maintien de l’ordre se déroule. Mais s’il était normal qu’Alexandre Benalla soit équipé d’un casque, il ne devait pas arborer un brassard police ni disposer d’une radio, ont-ils dit.

Ces explications n’ont guère convaincu l’opposition, qui tient avec ce dossier un redoutable angle d’attaque.

“Nous sommes face à une affaire d’Etat, au coeur de la République, qui pose la question d’une police parallèle, qui pose la question de la régularité des procédures, qui pose la question de la dissimulation d’une affaire dont, monsieur Collomb l’a redit, l’Elysée lui-même était informée dès le 2 mai sans que rien ne se passe avant que la presse ne fasse ces révélations mercredi dernier”, a dit le Républicain Eric Ciotti.

Alexandre Benalla est sorti lundi de son silence par le biais de ses avocats en affirmant qu’il avait aidé les forces de l’ordre à maîtriser “deux fauteurs de trouble qui agressaient les policiers” en marge des manifestations du 1er-Mai.

“Cette action vigoureuse mais menée sans violence n’a causé aucune blessure”, écrivent-ils. “Cette initiative personnelle de Monsieur Benalla (…) sert manifestement aujourd’hui à porter atteinte à la Présidence de la République dans des conditions qui défient l’entendement”.

La réforme des institutions paralysée

L’entourage d’Emmanuel Macron a fait savoir dimanche soir qu’il jugeait “inacceptable” le comportement d’Alexandre Benalla. Un de ses proches a précisé qu’il avait demandé à Alexis Kohler, secrétaire général de la présidence, de travailler à une réorganisation des services internes et du cabinet “pour que ça ne puisse pas se reproduire”.

Mais le chef de l’Etat a prolongé lundi le silence radio qu’il observe depuis que l’affaire a éclaté, et, selon Gérard Collomb, qui l’a rencontré au cours du week-end, il continue à s’occuper des affaires du pays plus que du cas Benalla.

“Le président de la République était plutôt préoccupé de l’avancement de la réforme constitutionnelle et des blocages qui pouvaient exister”, a-t-il dit devant la commission d’enquête.

Mais l’affaire a déjà eu des répercussions sur la vie parlementaire : l’examen du projet de loi de révision constitutionnelle, suspendu dimanche par le gouvernement en raison des répercussions de l’affaire Benalla sur les débats à l’Assemblée, ne reprendra qu’à la rentrée.

Patrick Strzoda et Alexis Kohler seront entendus respectivement mercredi et jeudi par la commission d’enquête mise sur pied par le Sénat parallèlement à celle de l’Assemblée, qui les auditionnera également à une date encore inconnue.

Alexandre Benalla est mis en examen de cinq chefs, dont “violences en réunion”, comme Vincent Crase, gendarme réserviste salarié de Larme qui se trouvait à ses côtés le 1er mai.

Les trois policiers mis en examen, un contrôleur général de la préfecture et deux commissaires suspendus depuis jeudi à titre conservatoire, sont soupçonnés d’avoir extrait illégalement puis communiqué des images de télésurveillance de la Ville de Paris montrant les scènes de la Contrescarpe à “une tierce personne” – en l’occurrence Alexandre Benalla.

Auteur
Reuters

 




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Venezuela: inflation de 1.000.000% d’ici fin 2018 et contraction du PIB de 18%

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Selon les prévisions du FMI

Venezuela: inflation de 1.000.000% d’ici fin 2018 et contraction du PIB de 18%

L’inflation au Venezuela devrait accélérer de 1.000.000% d’ici la fin de l’année et le PIB du pays, en crise financière et humanitaire, devrait se contracter de 18% en 2018, selon des prévisions du FMI publiées lundi.

« Nous projetons une poussée de l’inflation de 1.000.000% d’ici la fin 2018, ce qui signifie que le Venezuela est dans une situation similaire à celle de l’Allemagne en 1923 ou à celle du Zimbabwe à la fin des années 2000 », a commenté dans un blog Alejandro Werner, un des responsables du Fonds monétaire international.

Il souligne en outre que les pays voisins risquent d’être de plus en plus exposés aux répercussions de l’effondrement de l’économie vénézuélienne. 

La pénurie de nourriture, les difficultés croissantes pour accéder aux soins de santé, à l’électricité, à l’eau, aux transports, combinées aux problèmes d’insécurité, ont fait fuir en masse la population qui se réfugie notamment en Colombie et au Brésil.

« Le Venezuela reste englué dans une profonde crise économique et sociale », a résumé Alejandro Werne. Et en 2018, le pays pétrolier enregistrera une récession à deux chiffres pour la troisième année d’affilée, a-t-il précisé. 

La contraction du PIB devrait être pire qu’escompté au printemps (-3 points de pourcentage) et encore plus marqué qu’en 2017 (-16,5%) alors que la production de pétrole, principale ressource du pays, continuer de s’effondrer, a-t-il commenté.

Le Venezuela tire 96% de ses revenus du brut. Or sa production de pétrole s’est effondrée d’au moins la moitié en un an et demi faute de liquidités pour moderniser les champs pétroliers. 

Et la production de brut a poursuivi sa chute en juin, à 1,5 million de barils par jour (mbj), soit son plus bas niveau en 30 ans, a aussi indiqué récemment l’Organisation des pays exportateurs de pétrole. 

Le FMI pointe par ailleurs du doigt la mise en circulation d’un nombre toujours plus grand de billets, ce qui alimente l’hyperinflation.

L’exactitude des prévisions reste toutefois sujette à caution, le Venezuela ne transmettant plus de données à l’institution de Washington depuis plus de dix ans.

Début mai, le FMI avait ordonné à Caracas de lui fournir des données économiques fiables sous peine d’exclure le pays de l’institution dans le cadre d’une procédure de « censure ».

Le FMI, qui compte 189 membres, n’a pas pu effectuer de mission économique dans le pays depuis 2004. Il ne reçoit depuis que des données parcellaires.

Auteur
AFP

 




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«Entendez-vous trembler les Aurès, braves gens ?»

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Affaire Salim Yezza

«Entendez-vous trembler les Aurès, braves gens ?»

Un soir printanier de mai de l’année 2004, le garde communal Amrane  vida le chargeur de son kalachnikov sur le corps frêle de l’adolescent Chouaieb. Des témoins prétendent avoir entendu un sourd grondement venu des montagnes, tel un soupir surgi des tréfonds des Aurès, qui descendit lourdement du mont Hmar Khaddou, traversant djebel Chélia et le mont Bouarif pour parvenir jusqu’aux gorges de Tighanimine et se mélanger, en petites larmes, aux eaux de l’oued El Abiodh. Mais seul l’étrange vieil homme édenté, aux longs cheveux blancs, avait compris la colère des montagnes : le jeune Chouiab fut criblé de balles à l’emplacement même où fut tué l’instituteur Gaël Meurisse, cinquante années plus tôt, le lundi 1er novembre,  dans l’embuscade dressée par les maquisards algériens conduits par Chihani, dit commandant Messaoud.

«Entendez-vous trembler les Aurès, braves gens ? Elles pleurent devant la piètre mémoire des hommes et leur maudite vanité. Ils ont appris à remplacer le sang par le sang, comme pour confirmer qu’ils ne sauraient vivre sans des deuils pour emplir leurs nuits et sans terreur pour noircir nos jours. Nul ne les dissuadera de cette science funeste. Les patriarches sont fatigués et le ciel est désespéré… »       

 ─ Laisse donc les gens tranquilles, El Corbo, et prends garde qu’une voiture ne t’envoie en enfer, lui dit un conducteur qui s’était arrêté à son niveau. On n’a jamais compris ce que tu racontes. Tiens, voilà quelques cigarettes et déguerpis !

 L’étrange vieil homme avait pris le temps de caresser une cigarette avant de l’allumer, puis il s’en était allé par la route qui mène aux gorges de Tighanimine, le bras levé vers les montagnes. On l’entendait qui continuait sa harangue en s’éloignant : « Pourquoi avoir tué Gaël Meurisse si Cheb ne devait pas trouver ses jours parmi vos jours ? Ah, si vous saviez écouter les montagnes…Elles vous disent qu’on échappe rarement aux fantômes, et les fantômes, braves gens, les fantômes n’ont pas d’âge pour mourir. Ils reviennent, parfois, dans votre misérable existence pour se venger de vos outrages, de vos injustices, de vos lâchetés ou de vos silences. Consolez-vous, braves gens : il y a eu crime mais personne n’en est mort, l’indigène n’a pas besoin d’être tué pour ne plus exister.  Et vous êtes restés les indigènes de maîtres que vous avez acceptés car partageant votre religion, votre langue, un peu de votre passé mais rien de votre avenir. Vous êtes toujours le bon peuple sans existence qui ne fait que passer dans cette vie.  Vous êtes sortis de votre guerre aussi anonymes qu’avant. Leur cynisme  ce n’est pas de vous avoir jetés dans la mort, c’est de ne pas vous avoir ressuscités avant…. Vous n’avez ni le privilège de jouir de votre vie ni celui d’être fier de votre mort» 

Amrane ne craignait pas les conséquences de son acte. Tout est du côté des plus forts, dans les pays administrés par l’Ordre du fusil, tout : la police, les juges, les journalistes, les hommes politiques, les riches, les pauvres… Il a définitivement saisi qu’il n’y a pas de place pour les hommes vertueux. Ils n’ont à te proposer que la patience du chameau et la piété du dévot. Dans ce bas-monde, il te faut choisir d’être l’ange ou la canaille, en sachant que chez nous, on ne craint pas les anges, on s’en sert parfois et, dès que l’occasion se présente, on s’en débarrasse sans regrets. Amrane s’était dicté une conduite : «Toi qui n’es pas allé à l’école, instruis-toi de la filouterie de l’ancien, rivalise de ruse avec le renard, de fourberie avec le chacal, d’arrogance avec le lion et de perfidie avec l’hyène ; nourris ton cœur de dédain et ton cerveau de fiel, offre-toi la grandeur que personne n’a songé à te donner, toi le fils de l’homme sans destin, cours arracher ta chance avant que l’armée de chérubins ne bascule dans la crapulerie. Tu aurais alors fort à faire avec une si impressionnante concurrence.

Emplis ta poitrine du souffle de l’ambition et ton regard des flammes de cruauté, médite sur l’habileté et la force de nos anciens colons, ils furent nos devanciers dans la science de dominer, les précurseurs de notre hégémonie, nos maîtres dans l’art d’asservir, nos guides dans la route de la servitude. Cette terre ne se séduit pas ; elle se prend. Elle est promise aux canailles. Qu’attends-tu pour être la canaille ? Cette populace n’aime pas les hommes vertueux aux belles paroles et aux mains vides. Elle leur préfèrera toujours les coquins pécheurs dont elle aime à manger dans la main les fruits du péché. Tel était ton père Bouziane, un homme vertueux aux mains toujours vides.

Alors retiens qu’il n’y a ni public ni mécène pour la vertu. As-tu vu quelqu’un miser un kopeck sur la probité, la sainteté, l’honnêteté ou l’honneur ? Même nos plus pieux reviennent de leurs pèlerinages moins dévots qu’ils n’étaient partis. Sache qu’ici-bas, on ne te consacrera ni pour ta bravoure ni pour ta sainteté, mais seulement pour tes oboles, fussent-elles le produit des pires duplicités et des plus exécrables supercheries.»  Le lendemain du forfait du garde communal Amrane, il s’était déversé sur les rues tristes de la ville de T’kout, une ancienne et terrible colère. La jeunesse locale se révolta parce que tout, dans ce crime, était révoltant, l’arrogance du tueur, la mort d’un jeune innocent, l’impunité déclarée…L’affaire fut classée sans suite la nuit même. Aucune enquête. Aucune autopsie. «Incident collatéral», avait ricané Amrane.  Il avait appris ce mot l’année d’avant, lors de l’invasion de l’Irak par l’armée américaine. Il idolâtre les Américains. Des macs. Enfant, il allait au cinéma juste pour admirer le héros, El Marikani, l’Américain, celui qui sort toujours à son avantage des combats désespérés contre les bandits et les méchants, et toutes sortes de forces du mal… Colombo, Sylvester Stallone, Rambo, Léonardo Di Caprio, Tom Cruise… Des boss ! C’est ce Amrane, nouvelle recrue du camp des plus forts, qui avait foudroyé à bout portant le jeune Cheb.  

La révolte des jeunes dura deux jours et deux nuits. Les montagnes de Taghit portent encore les meurtrissures de ces heures noires où l’on vit régner le feu de la colère puis la lame du bourreau. Subsistera-t-il quelques patriarches à la mémoire intacte pour  raconter, aux enfants à naître, le calvaire des Aurès, cette nuit où l’on se retrouva dans la gueule vorace de la vanité humaine ?  C’était l’année du cinquantième anniversaire d’une guerre d’indépendance dont les hommes n’avaient gardé aucun souvenir,  ou alors juste celui d’un bref instant de bravoure, un moment de folie, avant qu’elle ne fut une date quelconque que l’on avait fini par ne plus célébrer, une guerre dont on avait même oublié si elle avait été gagnée ou perdue et dont avait, cette année-là, négligé de commémorer le cinquantenaire.

Les insurgés ne voulaient plus du mépris colonial.  Et c’était bien avec ce genre de mépris-là, massif, humiliant, dégradant,  que fut traité le meurtre du jeune Cheb.  L’assassin avait, du reste, quitté tranquillement les lieux de l’homicide, une lueur forcenée  dans les yeux, abandonnant le corps perforé de balles dans le silence impressionnant qui suivit le crépitement des balles. Un demi-siècle après la guerre d’indépendance, dans cette république sans mémoire, la mort d’un indigène relevait toujours du fait banal, comme s’il n’y avait pas grande différence entre l’homme et sa dépouille, comme si la guerre d’un peuple n’avait en rien perturbé l’ordre ancien et qu’il y avait toujours le pauvre et le riche, le fort et le faible, le roi et le sujet. Le maître et l’indigène. 

Des barricades bloquèrent la principale route  qui menait à Tkout, afin de faire entendre les deux revendications de la jeunesse locale : une enquête sur le drame ainsi que le départ des gardes communaux. Un ultimatum est lancé à l’adresse de ces derniers pour quitter la ville.

Des convois de l’armée sont dépêchés sur les lieux. On n’en finit pas d’envoyer les troupes dans cette région.  On retournait en 1954, au 2 novembre, quand débarquèrent à Arris, ces bataillons de parachutistes exercés dans la science de la répression.  Pour calmer la colère de la jeunesse, les militaires désarment les gardes communaux et les cantonnent à l’intérieur d’une mosquée tenue sous bonne garde. Cela ne dissuade pas les jeunes d’investir la petite caserne des gardes communaux et de brûler tout ce qui s’y trouvait.

Le feu brûlait de nouveau dans les Aurès.

Au troisième jour de la contestation, vers 19 heures, des troupes impressionnantes de gendarmerie et des forces anti-émeutes, venus de Aïn Yagouth, réputés pour leur cruauté, firent leur apparition à Tkout, à l’heure de la prière…

Les accès à la ville de Tkout furent verrouillés, personne ne devait en sortir, personne ne devait y entrer. Dans le huis-clos terrifiant d’une cité coupée du monde, une population allait d’être livrée à des troupes armées, au regard vengeur. Personne ne devait savoir

Non, personne ne devait savoir

…Mais l’homme à la moustache grisonnante avait frappé à la porte du journal. 
(…)  

L’ordre du fusil. Le libérateur qui devient despote, c’est connu, pas par tous, évidemment, mais au moins par ceux qui ont lu Georges Orwell. On n’établit pas une dictature pour sauvegarder une révolution mais l’on fait une révolution pour établir une dictature. Mais Vétéran Ya n’avait pas lu George Orwell. Il n’avait jamais rien lu, en fait. Il n’avait jamais appris à lire. Dans son hameau de Takhlijt Ath Atsou, sur le flanc du Djurdjura, il n’y avait pas d’école. Il n’avait pas appris à calculer non plus. Alors, il n’a économisé ni ses deniers ni ses forces. Ni les jours qu’il lui restait à vivre. Il s’engagea naturellement dans le combat contre l’occupant Français. Contre l’occupant français et, après l’indépendance, contre l’ordre du fusil. «  Ya, lui avaient dit les anciens du village, qu’est-ce qui te prend ? Nous venons à peine de te récupérer vivant, grâce à Dieu, que te voilà en train de vouloir défier de nouveau la    mort ! Maintenant que tu as chassé les anciens maîtres, que te manque-t-il au juste : l’odeur du sang ou le frisson de la peur ? » Vétéran Ya n’avait rien dit. Il n’y a souvent pas grand-chose à répondre aux questions des hommes. Ces choses-là, il faut les ressentir dans sa propre chair. Elles ne s’expliquent pas. On les sent ou pas. Ceux qui y sont insensibles dorment bien. Mais vétéran Ya ne peut pas envier leur sommeil. Il avait 25 ans. Il rentrait de la guerre. D’une première guerre. Sept années à traquer l’ennemi et à essayer échapper à la mort. Ce n’était pas le plus dur. Le plus dur, et il s’en rappelle encore, le plus dur c’était de se déshumaniser. Durcir son cœur afin d’entrer dans la peau du guerrier. Il n’avait plus droit à aucune faiblesse. Il s’était interdit de penser aux êtres chers, à la mère, à l’épouse, au père, aux enfants.. Il n’avait plus de mère, plus d’épouse, plus de  père, plus enfants. Cela l’avait-il rendu plus fort ? Il ne sait pas. Trop loin, tout ça, trop flou. Il se rappelle juste de sa douleur violemment humaine, sa douleur d’homme, de fils, d’époux, de père s’extirpant de ses amours pour ne devenir plus qu’une machine à tuer. Non, il le sait en fait, cela ne l’avait pas rendu plus fort. L’homme est né pour aimer. C’est par amour qu’il avait choisi de combattre l’armée de l’occupant puis celle des putschistes. Pas par haine. Par amour pour les siens d’abord, ces êtres chers, pour leur éviter de vivre dans l’humiliation et dans la servitude. C’est cela, rien que cela, les terribles raisons qui poussent un homme à choisir l’agonie à la vie. Il avait retrouvé cette vérité auprès de ses petits-enfants, des bambins qu’il ne se lasse pas de prendre dans ses bras, de caresser, de gâter, de jouer à leurs jeux… Il se libérait un peu de cette frustration qu’il gardait en lui depuis l’indépendance : à son retour du maquis, il n’avait pas pris son fils  dans ses bras, s’interdisant un privilège que les compagnons morts au combat n’auront plus jamais l’occasion de connaître.

Mais à qui dire cela ? A qui avouer qu’il n’était qu’un homme ? Un homme qui avait besoin de recevoir de l’amour et d’en donner. Par bonheur, il retrouvait, au soir de sa vie, avec ses petits-enfants, toute son humanité nue, brute, apaisante. Il a besoin de leur pureté et de leur force. Il a besoin de leur amour. Il s’abandonne, depuis plusieurs mois, à retomber en enfance, lui qui n’avait connu ni l’insouciance de la jeunesse ni la quiétude de la vieillesse.

La mort attendra !  

 Oui, il avait peur, avait-il envie de répondre, peur de la sombre éternité à laquelle un peuple semblait condamné, vivre et mourir asservis, hier par les anciens maîtres, aujourd’hui par les nouveaux seigneurs que l’on fait mine de ne pas remarquer. La domination serait-elle plus douce quand elle est l’œuvre d’un coreligionnaire ? Ils ont ouvert la porte de l’indépendance, mais ils ont gardé la clé pour pouvoir la refermer à leur guise. N’entendez-vous pas les veuves des martyrs qui nous interpellent : « Ô vous qui vous déchirez pour les butins d’une guerre que vous avez déjà oubliée, rappelez-vous au moins vos propres serments. Pour nous, l’amnésie est interdite : chaque larme de l’orphelin nous renvoie à vos mensonges. S’il vous reste quelque orgueil d’homme, nourrissez-les, ces enfants trahis, ou tuez-les, qu’ils rejoignent enfin le père qui ne reviendra plus. » Que de fois j’ai pleuré, moi qu’aucune épreuve du maquis ne m’a fait pleurer, que de fois j’ai pleuré devant ces centaines de veuves et d’orphelins derrière lesquels je voyais l’ombre de l’époux disparu, du père martyr,  du père qui ne reviendra pas ! S’il y a un homme qui est fatigué de la guerre, s’il y a un homme qui a connu la faim, la peur, la misère, qui a vu les dépouilles de ses compagnons d’armes dévorées par les chacals, c’est bien moi. Penses-tu vraiment que je tiens à arracher le père à sa progéniture enfin retrouvée, l’époux à la femme si longtemps esseulée, le fils à la mère au cœur déchiré ? Mais ils m’ont trompé, Da Ouali. J’errais incognito dans une mémoire qui n’appartenait à personne, jusqu’au soir où ils firent irruption dans mon anonymat pour m’offrir une cause, un fusil et un destin. « Provoque donc l’enfantement du Jour nouveau…Notre victoire sera la tienne. ». Et ils avaient levé la main vers le ciel : « Témoignez, témoignez, témoignez ! » Pour mes compagnons trahis, pour mon fils, pour le tiens, Da Ouali, pour toi aussi, je referai cette guerre qui ne nous a pas libérés. Ce ne sera pas une guerre glorieuse, une guerre n’est jamais glorieuse, même triomphante. Quelle fierté tirer d’un combat quand vaincre un homme est aussi amer que d’en être vaincu, Da Ouali ?

Mais Vétéran Ya n’a rien dit

Ces choses-là on les ressent ou pas

Pendant longtemps, vieilli et désabusé, Vétéran Ya racontait à ceux qui voulaient l’écouter, cette deuxième guerre dont personne ne se souvenait et dont il était le dernier témoin et le seul narrateur. On l’écoutait, les soirs où il faisait beau, sous le figuier de sa maison, raconter ces batailles étranges dont aucun livre scolaire ne faisait mention. « Cette guerre, comment vous dire, cette guerre, on y mourrait pourtant comme dans une vraie guerre, on y souffrait comme dans une vraie guerre, on y pleurait comme dans une vraie guerre, mais pour personne, ce n’était une vraie guerre…Deux années, mon fils, deux années à apprendre à tuer le frère et à succomber de ses balles, en diable oublié, dans la Kabylie aussi féroce dans la haine que dans l’amour, deux années à pleurer le futur orphelin dont nous avions en joue le père, à batailler contre notre temps, la tête bourdonnant à jamais du bruit insupportable de la souffrance humaine, des râles du frère tué par le frère et des cris désespérés des mères ne sachant pas quel cadavre pleurer. Pourquoi a-t-il fallu qu’ils reconstituent l’ordre ancien ? Pourquoi aiment-ils tant singer l’armée de l’occupant, eux les fils et petits-fils d’indigènes ? Qui n’a pas vécu l’expérience du frère qui tue le frère doit remercier Dieu qui l’en a exempté.

Ce furent d’inoubliables mois de combats à l’insu du monde, dans une aventure que nous n’avions pas voulue mais que l’ambition des hommes nous a imposée. Il nous a fallu apprendre à tuer le compatriote, le voisin, parfois le frère, brûler la même chair il nous a fallu apprendre à haïr, ce qui fut le plus dur, haïr notre propre sang, fabriquer de nouveaux orphelins, nous qui en avions déjà tant. (…)

Ainsi parlait Vétéran Ya, quelques-uns de ces soirs où il faisait beau, sous le figuier, d’une guerre oubliée.

Le croyait-on ? Nul ne l’a jamais su. 

(Extrait de «Pieds-noirs » le nouveau livre de Mohamed Benchicou  à paraître prochainement)

Auteur
Mohamed Benchicou

 




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La plus longue éclipse de la lune du 21e siècle visible vendredi

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Astronomie

La plus longue éclipse de la lune du 21e siècle visible vendredi

Une éclipse totale de la lune, la plus longue du 21ème siècle avec une durée de 103 minutes, sera visible vendredi prochain, a indiqué lundi le Centre de recherche en astronomie, astrophysique et géophysique (CRAAG).

Le CRAAG note que les circonstances de cette éclipse en Algérie « seront particulières puisque la lune se lève juste avant le soleil et qu’à ce moment-là, la lune sera partiellement éclipsée déjà », ajoutant que « la lune commencera à entrer dans l’ombre de la terre à 19h24 alors qu’à Alger, elle ne se lèvera qu’à 19h51. Elle n’entrera pleinement dans l’ombre de la terre qu’à 20h30. La phase de totalité durera jusqu’à 22h13, soit 1 heure 43 minutes de totalité ».

La lune prendra alors une couleur rougeâtre et sera rouge sombre autour du maximum de l’éclipse qui aura lieu à 21h22, note le CRAAG qui explique que le phénomène peut être observé à partir de n’importe quel endroit avec un horizon Est dégagé.

Selon le CRAAG, la prochaine éclipse lunaire totale aura lieu le 21 janvier 2019. Elle sera visible très tôt le matin avant le lever du soleil.

Une autre éclipse totale lunaire aura également lieu le 16 juillet 2019 dans presque les mêmes conditions que celle attendue vendredi (27 juillet) prochain.

L’évènement sera couvert par le CRAAG en ouvrant au grand public un stand au niveau des Sablettes (Alger) de 18 à 23 heures.

Auteur
APS

 




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La liste des lauréats sera connue ce lundi soir, selon Benghebrit

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Concours de recrutement d’enseignants du primaire et d’administrateurs

La liste des lauréats sera connue ce lundi soir, selon Benghebrit

L’annonce des résultats finaux du concours de recrutement d’enseignants du primaire et d’agents administratifs au titre de l’année 2018, aura lieu ce soir à 20h00, a affirmé la ministre de l’Education national, Nouria Benghabrit.

«Les résultats du concours de recrutement d’enseignants du cycle primaire et d’agents administratifs, organisé le 12  juin dernier, seront annoncés lundi 23 juillet à partir de 20:00 sur le site web : http://concours.onec.dz », a écrit la ministre sur ses comptes Facebook et Tweeter.  

A rappeler que le ministère de l’Education nationale avait organisé le 12 juin dernier un concours national de recrutement de 8.586 enseignants du cycle primaire et d’agents administratifs, auquel ont participé 740.000 candidats. 

Sur les 8.586 postes à pourvoir, 3.378 postes concernent les enseignants du primaire, 239 les conseillers d’orientation et de guidance scolaire et professionnelle, 213 pour les intendants, 694 postes pour les intendants adjoints, 2.265 autres postes pour les superviseurs de l’éducation, 300  pour les laborantins principaux et 1.407 pour les laborantins.

Auteur
APS

 




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« Ils n’ont pas trouvé mon fils, ils m’ont jeté 40 jours en prison »

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Document. Le père de Salim Yezza :

« Ils n’ont pas trouvé mon fils, ils m’ont jeté 40 jours en prison »

«Ils nous ont alignés après nous avoir déshabillés. Ils nous ont ensuite demandé de nous pencher vers l’avant… ».  Les jeunes s’arrêtent : « Vous nous avez compris, nous n’avons pas besoin de vous expliquer… » L’un des adolescents pleure, sans doute brisé pour la vie. «Puis ils ont menacé de s’en prendre à nos mères, à nos sœurs, à nos femmes. J’ignore ce qui s’est passé ensuite. Les femmes ont peur de parler.» 

Fallait-il oser publier ces témoignages ? Nous sortions à peine d’une élection présidentielle que le président Bouteflika venait de remporter pour la seconde fois et l’Algérie s’était replongée dans la peur des campagnes revanchardes. Oui, qu’est-ce qui nous avait pris de parler de torture ? Je savais que nous serions, une fois de plus, les seuls à rapporter ces récits déchirants, qu’ils nous vaudraient la colère du régime. Mais comment tourner le dos à de si abominables vérités et surtout, comment pourrait-on regarder notre métier après avoir abandonné ces gens dans leur détresse ? Je donnai à chaque fois mon accord. Le lecteur, ahuri, découvrit le lendemain dans Le Matin une impensable infamie commise près de chez lui. 

Nous sommes en Algérie de 2004, pays de bourreaux insoupçonnables, d’adolescents qui hurlent en silence, de mineurs qui se détestent déjà et de dévots qui regardent ailleurs. 

Les adolescents venaient de T’kout, une petite ville de l’est algérien, au sud de Batna, où la population assume son originalité berbère et parle la langue chaouie. Ici comme à Beni-Douala, un jeune homme, Chouaïb Argabi, venait d’être abattu froidement par les gardes communaux; comme à Beni-Douala, le forfait avait suscité la colère d’une population déjà irritée par sa propre misère. Car comme Beni-Douala, T’kout  porte un dénuement qu’elle cache, elle aussi, du regard des hommes en le perchant au sommet d’une montagne rocheuse, sur ces splendides gorges, les gorges de Taghit, du haut des balcons du Roufi, où gît une parcelle d’histoire que les bassins romains de Chennaoura vous racontent à l’ombre du mont Hmar Khaddou, ce mont où il ne pousse jamais rien. T’kout, comme Beni-Douala, est trop pauvre pour s’accommoder du déshonneur, trop fière pour l’ignorer, trop cicatrisée pour l’oublier. T’kout cumule l’orgueil berbère et la témérité des Aurès : le premier coup de feu de la révolution de Novembre 1954 a été tiré à quelques centaines de mètres de là. 

Ici aussi, comme à Beni- Douala, les jeunes indignés par l’assassinat de Chouaïb, sont sortis à l’appel de vingt siècles de bravoure. Les enfants de T’kout ont grandi à la galette noire des montagnes austères et au lait d’une légende, belle et incomparable, d’une autre femme au regard de feu, la Kahina, la reine berbère qui défendit les Aurès au VIIe siècle contre l’envahisseur arabe, une fille du pays. L’abri de repli qu’utilisait l’héroïne dans ses batailles face aux armées de Okba Ibn Nafaâ et de Hasan Ibn al-Nu’man, est à quelques kilomètres de la ville, sur la piste sinueuse qui mène à la bourgade d’El Mahmal. Maudite proximité qui endiabla à jamais cette contrée vouée à la jacquerie éternelle. Les anciens savent en évoquer les épopées légendaires, celle de Mohamed-Ameziane Bendjarallah qui dirigea le premier mouvement de résistance de T’kout en 1879 ou celle, plus typique, des Benzelmat, justiciers locaux qui emballèrent la région au début du XXe siècle et dont la réputation tient autant au mythe des grands bandits d’honneur qu’à celui des indomptables redresseurs de torts. 

«Ils nous ont alignés après nous avoir déshabillés… » La répression qui s’abattit sur T’kout, en ces funestes journées de mai 2004, rappelait, en tous points, celles des bérets rouges de l’armée française La ville est encerclée, isolée des communes avoisinantes, prête à être violée dans le silence. Dans le huis-clos terrifiant d’une cité coupée du monde, les forces de sécurité se livrèrent à l’innommable outrage de la chair et de la dignité humaine. Les maisons sont investies de nuit, à la recherche des meneurs, lesquels avaient déjà rejoint les maquis, comme Salim Yezza dont je me rappelle ce béret à la Che qu’il arborait avec beaucoup de chic. Les femmes et les enfants sont malmenés ;  les hommes arrêtés et parqués au centre de la ville ; les plus jeunes sont conduits à la caserne pour y être torturés.

A la manière des paras de l’armée coloniale française, les gendarmes algériens prenaient plaisir à avilir leurs victimes, à leur faire payer leurs actes par l’insulte et le vocabulaire universel des tortionnaires : « Vous détestez le régime algérien, espèce de vermines, eh bien vous allez le regretter ! Maintenant qu’il n’y a plus d’hommes en ville, vous allez voir ce que nous allons faire à vos femmes. »

Les parachutistes du général Massu torturant Henri Alleg ne lui parlaient pas différemment : « Ici, c’est la Gestapo ! Tu connais la Gestapo ? Tu as fait des articles sur la torture, hein, salaud ! Eh bien, maintenant, c’est la 10e DP qui les fait sur toi.» (…)

Dans les cellules souterraines du tribunal, j’appris alors à m’accommoder de l’aléatoire : récupérer un carton pour m’y allonger quand les douleurs se faisaient insupportables ; me faire envoyer, par mon frère Abdelkrim, des journaux et des sandwiches que je partageais avec mes compagnons d’infortune ; me convertir en patient cruciverbiste pour faire passer le temps…. Mais j’ai, surtout appris beaucoup au contact  fécond d’hommes et de femmes de mon peuple, dans toute la diversité de leur misère humaine. Les scènes les plus déchirantes, sans doute les plus inoubliables, étaient celles de ces femmes abattues par leur condition de prisonnières, drapées dans le mutisme et écrasées par une espèce de disgrâce insoutenable qu’on devinait à chacun de leur geste. Mères de famille, cadres, commerçantes, ou prostituées prises en flagrant délit de racolage, ces femmes paraissaient plus accablées par le regard des autres que par leur propre incarcération, comme si elles redoutaient que, dans nos sociétés patriarcales où l’on pardonne plus aisément ses péchés à un homme, elles auraient à traîner toute leur vie l’outrage de l’emprisonnement, en éternelles proscrites. Au reste, durant mon incarcération, j’ai connu deux visages à la détresse : celui de ces femmes et celui des mères de détenus. Je n’en ai pas vus de plus inconsolables.   

J’ai aussi beaucoup parlé, dans les geôles d’Alger, avec les détenus islamistes. Il recherchaient ma compagnie, je ne repoussais pas la leur. Ils se considéraient proches de moi par une sorte de pacte des opprimés. Les victimes frappées d’un même bâton du bourreau trouvent dans la répression un insoupçonnable ciment pour les sympathies. Je prenais soin, cependant, de ne pas m’égarer dans l’ingénuité : nous n’avions pas les mêmes raisons de combattre ce pouvoir et si la prison nous réunissait, les idées, elles, nous opposaient plus que jamais. Je les écoutais cependant avec intérêt, et beaucoup d’émotion, parler de leurs persécutions. Ces hommes ont été atrocement torturés dans les casernes du DRS, outragés, avilis, pendant des semaines, des mois et, pour certains, des années. Tout cela au nom de la lutte antiterroriste, comme si sur cette terre devait encore subsister une fin suffisamment indiscutable pour utiliser la torture comme moyen. Alors, et même s’ils se défendaient de velléités revanchardes, je compris que ces créatures meurtries dans leur âme et dans leur chair porteront à jamais les balafres de la rancune. 

Dans les catacombes souterraines du tribunal d’Alger, on rencontre aussi ces pères de famille piégés par l’ingratitude de la vie, subitement tombés en déchéance, pour un sou qui est venu à manquer ou par la faute d’un dénuement qu’ils n’ont pas vu venir. Ces hommes ne parlent jamais de leur infortune. Leur revanche c’est de n’en rien laisser paraître. Chez nous, les misères de la vie enseignent l’art du silence. 

Et pourtant, je dois le dire, ces démunis, comme tous les exclus que j’ai croisés dans ces lieux, qu’ils soient chômeurs, délinquants ou catins, ces démunis m’ont pourtant toujours offert leur unique richesse : l’amitié. Ils souffraient visiblement de voir enfermé un journaliste pour ses articles et vivaient cette injustice comme une profanation des derniers espoirs sacrés qui maintiennent, dans mon pays, la flamme en des lendemains meilleurs. Ils m’inondaient de réconforts dits à la mode de chez nous : «Ami Moh, il n’y en a plus pour longtemps et tu reprendras bientôt le stylo. Tu sais, il y a Dieu… » Les marginalisés de mon pays ont toujours en réserve un mot ardent pour réchauffer le coeur. J’ai appris dans les geôles d’Alger que les haillons de la misère couvrent d’incroyables vertus. Et qu’il ne manquait pas, au sein de mon peuple, de mains amies pour aider à vaincre les épreuves : mes procès se déroulaient sous le regard attendri de nombreux compagnons, membres actifs du Comité Benchicou pour les libertés dont la présence régulière et assidue relevait autant de l’amitié que d’un devoir de soutien politique, ou citoyens révoltés par l’injustice et qui m’envoyaient, à travers la brume du prétoire, des bises affectueuses. Tous, par leur présence, venaient me signifier que mon calvaire était aussi le leur. Moi qui redoutait d’avoir à compter mes amis, je réalisais, par instants, que j’en avais chaque jour un peu plus.

Ne fût-ce que pour cette riche cohabitation avec la noblesse humaine, les procès de presse que me fit endurer le pouvoir resteront pour moi un supplice rentable. J’en retiens qu’ils furent aussi l’opportunité de serrer dans mes bras, entre deux juges, entre deux couloirs, Naziha, Nassima, Nazim et ma femme Fatiha, ma famille abandonnée. Ces retrouvailles de joie et de larmes volées au bourreau resteront à jamais, sur ma carapace d’homme, les tatouages indélébiles du prix qu’il a fallu payer pour la liberté de penser dans notre patrie. 

Comment ne pas ajouter que ces procès, s’il furent expéditifs et truqués, nous réservèrent aussi de délicieuses surprises ? Si, pour la plupart d’entre-eux, le pouvoir me condamna à des peines sévères, il dût, en revanche, pour d’autres, réaliser qu’il n’était pas toujours aisé pour le mensonge de juger la vérité. Ce fut le cas pour le procès de T’kout, très attendu par l’opinion, et sur lequel reposaient les espoirs de réhabilitation du régime. Parfaitement arrangé, il devait établir le délit de « diffamation » de façon irréfutable. La juge avait, pour sa part, la mission de me frapper d’une peine exemplaire pour « outrage à institution », ce qui aurait innocenté la gendarmerie nationale, victime des « calomnies » du Matin.

L’avocat de la partie civile avait d’ailleurs parfaitement planté le décor en accusant d’emblée le journal d’avoir « colporté des médisances à l’encontre d’une institution de la République ».  Le procureur, une dame acariâtre et arrogante aux vilaines lunettes noires, s’apprêtait à dresser le sévère réquisitoire dont on l’avait instruite quand, à la surprise générale, mon avocat demanda à entendre les témoignages de torturés venus spécialement de T’kout. Les magistrats n’attendaient visiblement pas ces invités incongrus mais la juge, piégée, n’avait pas d’autre choix que de les écouter. Alors, pendant deux heures, défilèrent devant elle des femmes, des hommes, et même des adolescents qui n’avaient qu’une seule formule à la bouche  : 

 –  Le journal n’a rien inventé, madame la présidente, regardez… 

L’un des adolescents enleva ses chaussettes pour dévoiler des pieds aux ongles arrachés.

 –  Ils ont fait ça avec des tenailles, madame la juge… Non, le  journal n’a rien inventé…

Le malaise s’empara de la salle. Le procureur aux vilaines lunettes noires se prit la tête entre les mains. La juge, embarrassée, griffonna des notes puis invita le témoin suivant à venir à la barre. C’était un vieux couple, elle, habillée d’une splendide robe berbère qui lui rendait sa belle jeunesse, lui, fripé mais altier bien que s’appuyant sur une canne. Il regarda la juge dans les yeux :

 –  Ils ressemblaient aux paras français, madame la juge. Ils sont venus de nuit et ils ont tenté de défoncer ma porte. Quand je leur ai demandé s’ils avaient une autorisation, ils m’ont inondé d’insultes et de grossièretés, devant ma femme et mes deux filles. Ils cherchaient Salim, mon fils, et comme ils ne l’ont pas trouvé, ils ont emmené son jeune frère… Puis ils sont revenus me prendre. J’ai passé quarante jours en prison. Et j’ai vu la torture… 

Une femme s’approcha de la barre et regarda fixement la juge : 

 –  Demandez à mon fils ce que lui ont fait les gendarmes. Je le savais, c’est pour cela que j’ai tenté de m’interposer quand ils sont venus le prendre. J’ai résisté, et alors…

La femme n’eut pas la force de poursuivre. La juge, de plus en plus embarrassée mais contrainte à écouter des témoignages accablants qu’elle n’avait pas prévus, opta pour sauver les apparences :

 –  Poursuivez, madame…

  –  Alors ils m’ont frappée et insultée. Cela m’a fait très mal… En 1959, les Français ont tué mon père devant moi mais les soldats ne m’ont pas frappée. Ceux-là, madame la juge, m’ont pris mon fils, il est là aujourd’hui, demandez-lui donc ce que lui ont fait les gendarmes…

Son fils, un adolescent encore marqué par les évènements, ouvrit sa chemise et désigna les cicatrices inaltérables des sévices sur la chair, puis, à voix basse, ajouta :

 –  Ils m’ont fait pire que ça, madame la juge , vous comprenez…

  –  Parlez librement, que vous-ont ils fait ?

  –  Ils m’ont outragé… Je ne l’oublierai jamais.

La juge n’insista pas. Elle comprit que le jeune homme avait été sodomisé, et tenta une diversion :

  –  Pourquoi le médecin qui vous a vu avant votre présentation devant le parquet n’a-t-il rien déclaré ?

 –  Aucun médecin n’est jamais venu nous voir, madame la juge…

Le trouble était général. Le procureur ôta ses lunettes noires pour les essuyer rageusement. Quelle inculpation, quelle accusation prononcer contre les journalistes après tout ça ? Acculée par la tournure que prenait le procès, elle renonça à requérir une peine contre Le Matin. La juge la suivit et nous acquitta : les tortures de T’kout venaient d’être reconnues publiquement ! Le pouvoir perdait, là, une de ses plus décisives batailles contre la presse libre.

(Extrait des « Geôles d’Alger », Mohamed Benchicou, 2007, Editions Inas et Riveneuve)

Auteur
Mohamed Benchicou

 




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« Reste à payer… »

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Affaire Salim Yezza

« Reste à payer… »

«Salim Yezza ne faisait l’objet d’aucun mandat, il n’est ni terroriste, ni trafiquant, ni criminel international », écrit un confrère. C’est peut-être là son seul tort.

Dans le pays où des ministres trafiquants, confondus dans des affaires de détournement d’argent public ou de fraude fiscale et de blanchiment d’argent par le biais de sociétés off-shore, se pavanent librement, dans ce pays décidément plus en plus perdu pour l’État de droit où l’incomparable Djamal Ould Abbès s’amuse à jouer au sénile publiquement, lui dont le fils avait été pris en flagrant délit de commerce de mandats de députés, Salim Yezza fait figure d’une étrange créature humanoïde qui s’occupe, le ballot, à oeuvrer pour des choses bizarres comme les droits de l’homme, l’égalité et j’en passe.

Le système algérien ne supporte pas ces énergumènes indifférents à l’enrichissement frauduleux et qui, plutôt que de se mettre au mode « trafic » persistent à défendre des valeurs surannées. Salim Yezza, citoyen de Tkout, est incarcéré selon des méthodes de l’ex-Stasi pour un délit étrange : il aurait pris part à une manoeuvre de déstabilisation de l’Etat en fomentant une manifestation subversive à Ghardaïa à partir … de Paris où il réside depuis près de dix ans. Ridicule !

En vérité, Salim Yezza traîne une vieille étiquette de « meneur de troupes » depuis les fameuses manifestations de Tkout déclenchées à la suite du meurtre du jeune Chouaïeb par l’agent communal Amar. Le lecteur trouvera ici deux extraits d’ouvrages sur ces évènements qui avaient défrayé la chronique en leur temps.

L’incarcération de Salim n’est-elle pas un « reste à payer » décidé par quelque têtes du régime parmi les plus haineux ?

Demain, Salim passe devant les juges. Que la raison l’emporte enfin sur la haine de l’Algérien. Laissez partir Salim Yezza !

Auteur
Mohamed Benchicou

 




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Le blogueur Merzouk Touati est « en danger de mort »

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En grève de la faim depuis 15 jours

Le blogueur Merzouk Touati est « en danger de mort »

Le comité pour la libération de Merzouk Touati a rendu public un communiqué samedi dans lequel il tire la sonnette d’alarme et revient sur les actions menées ou à venir pour la libération du jeune blogueur Merzouk Touati.

Le comité pour la libération de Merzouk Touati s’est réuni, samedi 21 juillet 2018 au CDDH, il salue l’adhésion des artistes et citoyens à la nuit de la liberté observée jeudi dernier à la place Saïd-Mekbel et invite la population à prendre part à la veillée d’Aokas en soutien au jeune blogueur Merzouk Touati organisée par le collectif des associations d’aokas prévue à l’Esplanade du cinéma de la ville le 26 juillet à partir de 20h.

Le comité appelle également la population à venir massivement au rassemblement pacifique prévu dimanche 29 juillet 2018 à 9h devant le centre pénitencier de Oued Ghir pour réclamer la libération inconditionnelle de Merzouk Touati.

Aujourd’hui, Merzouk Touati est en danger de mort, son état de santé se détériore de jour en jour suite à sa grève de la faim entamée depuis 15 jours. Cependant, nous réitérons notre appel au partis politiques, les députés, élus, syndicats et acteurs de la société civile a plus de mobilisation pour la libération de Merzouk Touati.

Toutes et tous pour sa libération inconditionnelle et immédiate La révolte c’est la vie, la soumission c’est la mort. À l’instant « 

Merzoug Touati (30 ans) est incarcéré depuis janvier 2017. Il a passé hier une autre nuit dans une cellule de la prison d’oued Ghir à Bejaia. Il a été condamné en appel le 21 juin 2018 à sept de prison ferme.

Auteur
La rédaction

 




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