Résultat du vote à l'Assemblée française sur les accords franco-algériens de 1968:
Coup de tonnerre à l’Assemblée : les députés ont adopté, jeudi 30 octobre, par 185 voix contre 184, une proposition de résolution du Rassemblement national visant à « dénoncer » l’accord franco-algérien de 1968, avec l’appui des groupes LR et Horizons.
Coup d’Etat du RN à l’Assemblée ! Au prix de mille renoncements de la droite classique, il vient d’assouvir la soif de vengeance des nostalgiques de « l’Algérie française ».
« C’est une journée que l’on peut qualifier d’historique pour le RN », s’est aussitôt félicitée la cheffe des députés d’extrême droite Marine Le Pen, soulignant qu’il s’agissait du premier texte de son parti approuvé par l’Assemblée, en dépit des oppositions de la gauche, des macronistes et du gouvernement.
Pourtant, certains évoquent le retour de l’OAS à l’Assemblée. Cette organisation terroriste qui a assassiné des milliers d’Algériens, de pieds noirs et tenté de tuer Charles de Gaulle.
Si la résolution n’a pas de valeur législative, Marine Le Pen a demandé au gouvernement de tenir « compte » du vote du Parlement sur son texte, qui appelle à dénoncer l’accord qui offre aux Algériens des clauses spécifiques en matière d’immigration et de séjour en France. « Nous considérons qu’il n’y a plus rien qui justifie le maintien de cette convention », a-t-elle insisté.
« Honte au RN » qui « continue sans fin les guerres du passé », a grondé en retour le leader Insoumis Jean-Luc Mélenchon, sur X. Le texte a été soutenu par l’alliance RN-UDR, la moitié du groupe les Républicains et la moitié du groupe Horizons, parti d’Edouard Philippe.
🇫🇷 🇩🇿 FLASH | En #France, l'Assemblée nationale a adopté une proposition de #résolution visant à « dénoncer les accords franco-algériens de 1968 ».
La détention de Boualem #Sansal atteint les 348 jours et les politiques français sont de plus en plus enclin à sanctionner #Alger. pic.twitter.com/GRtFLmnb2k
Le patron du PS Olivier Faure a lui fustigé le groupe macroniste. « Ils étaient où les macronistes ? Gabriel Attal absent », a-t-il écrit sur X, à propos de l’ancien Premier ministre, à la fois patron du parti macroniste et du groupe à l’Assemblée. « Il nous a manqué une voix. Cette voix qui nous a manqué pour faire face au RN, c’est celle de Gabriel Attal », a abondé devant les journalistes Cyrielle Chatelain, présidente du groupe écologiste.
Dénonciation de l'accord franco-algérien de 1968 : "Où est Gabriel Attal ? Où sont les députés macronistes ? Ce qu'on vient de vivre dans l'hémicycle, c'est inacceptable", dénonce Cyrielle Chatelain (Ecologiste et social). "L'absence des macronistes a donné une victoire au RN." pic.twitter.com/rKN8jwzSxd
Gabriel Attal a toutefois lui-même appelé à dénoncer l’accord de 1968, en janvier, pour « poser les limites et assumer le rapport de force avec l’Algérie », notamment à l’aune de l’arrestation de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal. Mais son groupe était contre le texte du RN.
Le macroniste Charles Rodwell, auteur d’un récent rapport accablant contre ce même accord de 1968, avait justifié par avance un refus, au prétexte d’un supposé vide juridique qui risquerait de « provoquer un déferlement migratoire » dans l’Hexagone, analyse dénoncée par le RN. Toutefois, seuls 30 députés du groupe macroniste sur 92 étaient présents pour voter contre et trois se sont abstenus. Gabriel Attal était présent jeudi matin à un forum sur la transformation durable du tourisme.
Résolution sur l'accord franco-algérien de 1968 : "En tant que fils d'immigrés algériens, ce qui m'inquiète aujourd'hui, c'est d'entendre des députés qui nous considéreraient presque comme des ennemis de l'intérieur", témoigne @AK_Lahmar. "C'est le retour de l'OAS à l'Assemblée." pic.twitter.com/Z5wwgVql6d
Il a cependant manqué des voix dans tous les groupes, y compris à gauche (52 députés LFI sur 72 ont participé au vote, 53 socialistes sur 69, 32 écologistes sur 38, six députés du groupe communiste et ultramarin sur 17). Douze députés MoDem ont pris part au scrutin (10 contre, deux abstentions) et trois députés Liot sur 22 (deux pour, un contre).
🇫🇷🇩🇿 Le RN a fait adopter, à 185 voix contre 184, la dénonciation de l’accord de 1968 entre la #France et l’#Algérie.
La chasse aux algériens continue en France. Honte aux députés macronistes qui par leur absence ont offert cette victoire. Honte aux députés Horizons et à leur… pic.twitter.com/ZSlgfhyL0j
L’accord-cadre franco-algérien de 1968 et ses avenants
Les relations entre la France et l’Algérie sont dans un moment de fort tension au point que le dossier migratoire, pourtant en veilleuse, est revenu sur le tapis ces derniers mois. Il a été remis sous le feu des projecteurs en 2023 à la faveur d’un rapport à charge pour l’Algérie de l’ancien ambassadeur et âme damnée de l’extrême droite française, Xavier Driencourt. Un rapport destiné au centre de réflexions Fondapol, très marqué à droite, et publié peu après la sortie en librairie de ses mémoires algériennes (L’Énigme algérienne. Chroniques d’une ambassade à Alger, auxÉditions de l’Observatoire, 2022) qu’il conclut en ces termes : « Nous avons trop souvent tendu l’autre joue après avoir reçu une gifle. » Un rapport venu nourrir la volonté exprimée depuis plusieurs mois par des responsables politiques de droite (l’ex-ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau mais aussi les ex-Premiers ministres Edouard Philippe et Gabriel Attal, ou encore Marine Le Pen) de dénoncer l’accord-cadre de 1968.
Signé par Jean Basdevant, haut représentant envoyé par de Gaulle en Algérie, et Abdelaziz Bouteflika, alors ministre des Affaires étrangères, cet accord à la négociation duquel a activement participé le diplomate et ancien résistant Stéphane Hessel, alors ministre-conseiller à Alger, restreint les dispositions des accords d’Évian de 1962 qui prévoyaient la libre circulation et installation des personnes d’Algérie vers la France, Algériens comme Français. La libre circulation entre les deux pays avait déjà été freinée avant cette date en raison de l’entrée importante d’Algériens sur le sol français en 1962 : la clause de libre circulation des Accords d’Évian est suspendue en 1964 (accords Nekkache-Grandval). Et dans l’accord-cadre de 1968 un certificat de résidence est imposé aux Algériens. Ce certificat est l’équivalent des cartes de séjour destinées aux étrangers du régime général. Ils peuvent l’obtenir après trois ans de résidence (et non cinq pour les autres ressortissants hors UE) et il est valable dix ans. En cas de regroupement familial, les membres de la famille reçoivent une carte de résident de la même durée que le titre de la personne qu’ils rejoignent. En outre, les Algériens peuvent s’installer à leur compte dans une activité libérale sans autre formalité.
Mais les Algériens subissent des contraintes spécifiques. Ainsi, les étudiants peuvent moins travailler (à mi-temps, au lieu de 60 % du temps de travail pour les autres nationalités) et doivent obtenir une autorisation de travail.
► Plusieurs avenants
Au cours des années suivantes, cet accord-cadre de 1968 a été amendé à trois reprises : en 1985, 1994 et 2001. Ces trois modifications ont rapproché la situation des ressortissants algériens des dispositions de droit commun. Après l’amendement de 1985, les Algériens sont soumis à l’obtention d’un visa pour entrer sur le territoire français. Après celui de 1994, le certificat de résidence d’un ressortissant algérien périme si ce dernier passe plus de trois ans consécutifs hors du territoire français, disposition qui s’applique aussi dans le droit commun. Enfin, en 2001, un dernier accord instaure des passe-droits — en particulier hospitaliers – destinés à l’élite algérienne.
En 2007, un aménagement (de niche) signé par Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères de Nicolas Sarkozy, et par Mourad Medelci, son homologue algérien, et destiné à faciliter la circulation de détenteurs de passeports diplomatiques en les exemptant de visa, a été « suspendu » par le ministre de l’Intérieur le 17 mars dans le cadre de la « réponse graduée » aux autorités algériennes, répliquant à leur refus d’accueillir leurs ressortissants expulsés du sol français.
Par ailleurs, comme l’accord-cadre de 1968 relève du droit international qui prime sur le droit français, les Algériens vivant en France ne sont pas soumis aux dernières lois (qu’elles soient favorables ou défavorables pour les migrants) votées sur l’immigration depuis 2001. Ils sont ainsi exclus de dispositifs tels que le « passeport talents », qui répond au concept vanté par Nicolas Sarkozy d’une « immigration choisie », ou encore à la régularisation par le travail qui doit passer par le seul exercice d’un métier dit « en tension » ou pour raison humanitaire. « Quand vous mettez tout dans la balance, les ressortissants algériens perdent plus qu’ils ne gagnent et ils auraient intérêt à renégocier ce traité », juge le professeur de droit public Serge Slama.
Que se passerait-il en cas de dénonciation de l’accord-cadre ?
En droit international, seul le président peut dénoncer ou ratifier des traités. « Quand on dénonce un accord international, on n’est pas tout seul à interpréter ses conséquences, explique le politologue Patrick Weil, pour qui une dénonciation serait une erreur. En France, le sénat affirme que les Algériens seraient soumis au droit commun, mais les Algériens, eux, estiment que l’on reviendrait aux accords d’Évian. Dans une situation de tension et de crise, l’Algérie pourrait décider de se replacer immédiatement dans l’esprit des accords d’Évian, et inciter ses ressortissants à se rendre massivement en France. Que ferait la France ? Elle n’a pas intérêt à se placer dans une situation d’incertitude dont la sortie dépendra moins d’elle encore qu’aujourd’hui. »
Dans ce recueil lumineux, Youcef Zirem transforme la douleur de l’exil et les blessures du monde contemporain en force de beauté et de tendresse. Entre lucidité et espérance, ses poèmes célèbrent la bonté, la nature et la fraternité, faisant de chaque mot un geste de résistance, où la poésie devient à la fois refuge et acte de foi en l’humanité.
Les étés sans fin de ton sourire est un recueil de poésie publié en 2025 aux Éditions du Net. Ce livre, empreint de douceur, de mélancolie et d’humanisme, poursuit le long parcours poétique de son auteur, Youcef Zirem, déjà reconnu pour ses œuvres mêlant engagement, exil et quête de sens. À travers ce recueil, Youcef Zirem nous convie à une méditation lumineuse sur la paix, la bonté et la mémoire, tout en explorant les blessures du monde contemporain.
Youcef Zirem, écrivain, poète et journaliste algérien, est une voix singulière de la littérature francophone. Né en Kabylie, il a grandi dans un contexte politique et social difficile, marqué par la censure, la violence et la quête d’identité. Très tôt, il s’impose comme un écrivain de la liberté, refusant la compromission et défendant la vérité de la parole poétique. Contraint par les circonstances, il s’exile en France, où il poursuit son œuvre avec la même ferveur, transformant la douleur du déracinement en source d’inspiration.
Son œuvre est vaste et variée : romans, essais, récits et poésies s’y côtoient dans une cohérence remarquable. Parmi ses ouvrages les plus connus figurent La Cinquième mascarade, Le Sésame d’Alger, Libre, comme le vent et Eveiller les consciences. Tous témoignent de sa fidélité à des valeurs essentielles, la liberté, la dignité, la solidarité, et de sa volonté constante de faire de la littérature un instrument d’émancipation. Chez Youcef Zirem, l’écriture n’est jamais gratuite : elle est un acte de lucidité et de compassion, un moyen de redonner sens à l’existence humaine.
Dans Les étés sans fin de ton sourire, cette exigence morale se double d’une sérénité nouvelle. Le poète, sans renoncer à son engagement, choisit une voie plus apaisée, tournée vers la sagesse et la beauté. Il évoque la guerre, la dictature, l’exil, mais aussi la nature, l’amour, la tendresse et la fraternité comme autant de forces de résistance face à la brutalité du monde. Chaque poème, souvent court et méditatif, semble un fragment de vérité, un éclat de conscience qui invite le lecteur à retrouver la simplicité des émotions essentielles.
Le recueil se déploie comme un voyage intérieur. Youcef Zirem y exprime un profond désir de paix, non seulement entre les peuples, mais aussi au sein de l’individu. Sa poésie est une quête d’équilibre : entre l’ombre et la lumière, entre la colère et la compassion, entre la lucidité et l’espérance. À travers des images récurrentes, la lumière, le sourire, la mer, la montagne, le soleil, l’enfance, il tisse un fil symbolique entre l’intime et l’universel. Ces motifs incarnent la permanence du vivant face à la fragilité du monde.
Le rapport à la nature y joue un rôle fondamental. La montagne, la mer ou la pluie deviennent des miroirs de l’âme, des refuges spirituels où l’homme retrouve son essence. Dans la beauté du monde, Youcef Zirem trouve la force de résister à la laideur de la société moderne. Il s’oppose au vacarme, à la superficialité et à l’indifférence contemporaine en célébrant la lenteur, la contemplation, le silence. Sa poésie, tout en douceur, devient une prière laïque, un espace de réconciliation entre l’homme et l’univers.
L’exil, thème récurrent dans son œuvre, traverse également ce recueil. Mais il n’est plus ici une blessure ouverte : il devient une expérience initiatique. Loin de sa terre natale, le poète apprend à habiter le monde autrement, à transformer la nostalgie en lucidité. L’exil devient le lieu d’une double appartenance, à la fois douloureuse et féconde : l’enracinement dans la mémoire et l’ouverture à l’universel. Ce mouvement entre le souvenir et l’espoir confère à la poésie de Youcef Zirem une dimension profondément humaine et intemporelle.
L’apport majeur de Les étés sans fin de ton sourire réside dans sa capacité à réconcilier la lucidité et l’espérance. Youcef Zirem écrit sans illusions sur l’état du monde. Il dénonce la violence, la corruption, le racisme, la perte de repères et l’égoïsme triomphant. Pourtant, il choisit de croire encore en la bonté et en la beauté. Son regard est clair, mais son cœur reste ouvert. Le titre du recueil illustre parfaitement cette philosophie : malgré la noirceur des temps, il reste des saisons de lumière dans les visages et les gestes humains. Les “étés sans fin” représentent cette chaleur inaltérable de l’amour et de l’espoir que rien ne peut éteindre.
Sa poésie, dépouillée et sincère, rappelle que la résistance ne passe pas toujours par le cri, mais aussi par la douceur. Elle réaffirme que la vraie révolte peut être spirituelle et esthétique : celle qui consiste à préserver sa capacité d’émerveillement malgré la dureté du monde. Chez Youcef Zirem, le poète devient un veilleur, un témoin de la douleur mais aussi un semeur de lumière. Sa parole, claire et musicale, agit comme une flamme fragile mais tenace dans la nuit du désenchantement.
L’impact de cette œuvre s’inscrit dans la continuité d’une poésie engagée mais apaisée, qui s’adresse à la fois aux exilés, aux rêveurs et à tous ceux qui refusent le cynisme contemporain. Youcef Zirem prolonge la tradition des poètes humanistes pour qui l’écriture n’est pas un ornement, mais un devoir moral. Il s’inscrit dans la lignée d’auteurs tels que René Char, Nazim Hikmet ou encore Tahar Djaout, qui voyaient dans la poésie un moyen d’éveiller les consciences et de sauvegarder la dignité de l’homme.
Sa poésie n’a rien d’élitiste. Par son style limpide et sa musique intérieure, elle s’adresse à tous. La clarté devient ici une forme de résistance à la complexité factice du monde moderne. Dans une époque saturée d’images et de mots vides, Youcef Zirem redonne au verbe sa valeur de vérité. Sa langue est simple, mais elle vibre d’une profonde intensité spirituelle. Elle révèle que la beauté n’a pas besoin d’emphase : elle réside dans la sincérité du regard et la justesse du mot.
Ce qui rend son œuvre particulièrement touchante, c’est sa capacité à unir la pensée et la tendresse. Youcef Zirem ne sépare jamais l’intellect du cœur. Ses poèmes témoignent d’une rigueur de réflexion, il médite sur le temps, la mémoire, la condition humaine, mais aussi d’une grande douceur. L’amour, l’amitié, la compassion et le pardon y occupent une place centrale. Le poète y apparaît comme un être vulnérable mais courageux, conscient de la finitude de l’existence, et décidé à en faire malgré tout un chant d’amour.
Son engagement n’est pas politique au sens étroit du terme : il est moral et poétique. En refusant la haine, il défend une autre forme de lutte, celle de la bienveillance. Il oppose au désespoir du monde la clarté de la poésie. Sa voix s’adresse à tous ceux qui cherchent un sens dans un univers troublé. Ainsi, Les étés sans fin de ton sourire devient un espace de respiration, un lieu où l’on peut encore croire à la beauté des mots, à la fraternité, à la puissance du rêve.
Le rôle du poète, tel que Youcef Zirem le conçoit, est celui du gardien de l’humanité. Il veille sur les valeurs menacées, la liberté, la justice, la bonté, et préserve, par la parole poétique, ce qui reste d’humain dans un monde déshumanisé. Il ne se contente pas de dénoncer la laideur : il travaille à la transfigurer. Il fait de la poésie un art de la réparation, un moyen de redonner au monde un visage plus doux. En ce sens, il est à la fois témoin et guérisseur.
Les étés sans fin de ton sourire est un recueil d’espérance lucide. Youcef Zirem y conjugue la tendresse du cœur et la rigueur de la pensée pour rappeler que, même dans un monde blessé, la poésie demeure un acte de résistance et de foi. Il ne s’agit pas d’un espoir naïf, mais d’une confiance exigeante, conquise au prix de la lucidité. Loin de toute idéalisation, Youcef Zirem choisit de croire en la vie, en la beauté et en la bonté des êtres.
Ce livre prolonge son engagement humaniste et poétique : il invite à ne jamais renoncer à la lumière, à préserver le sourire face aux tempêtes, à voir dans chaque geste de générosité la promesse d’un monde meilleur. Le sourire évoqué dans le titre devient le symbole même de cette philosophie : un sourire qui traverse les épreuves, qui défie la tristesse, qui incarne la persistance du bien.
Les étés sans fin de ton sourire n’est pas seulement un recueil de poèmes, c’est une leçon de vie. Par la clarté de son verbe et la pureté de son regard, Youcef Zirem nous rappelle que la poésie a encore un rôle à jouer dans notre époque : celui de guérir, de relier et d’éclairer. Son livre est une invitation à la tendresse, une célébration du courage tranquille de l’amour, et une foi inébranlable dans la beauté du monde.
Ainsi, à travers ce recueil, Youcef Zirem nous laisse un message d’une actualité brûlante : même dans les heures sombres, il existe toujours un été intérieur, une lumière que rien ne peut éteindre, celle des sourires, des gestes de paix et de la poésie, qui demeure l’ultime refuge de l’humanité.
Brahim Saci
Les étés sans fin de ton sourire, Éditions du Net, 2025
Assimi Goita et son armée accusé encore une fois d'avoir tué des civils.
De nouvelles accusations d’exactions commises par l’armée malienne. Les faits se seraient déroulés le 23 octobre dernier, dans la région de Ségou. Des militaires, appuyés par des chasseurs traditionnels dozos, sont soupçonnés d’avoir tué une trentaine de civils près de Markala, dans le centre du pays.
La majorité des victimes sont des éleveurs venus pour la traversée de leur bétail au niveau du fleuve Niger, dans la région de Ségou au centre du Mali. Un événement qui rassemble annuellement les riverains venus exprimer leur joie et manifester leur solidarité envers ces bergers de retour de la transhumance et qui s’est donc terminé dans un bain de sang.
Les témoins de la scène joints par RFI sont formels. Alors que la traversée du fleuve était en cours ce jeudi 23 octobre dans la matinée, un groupe de militaires maliens, assisté de chasseurs dozos, a fait irruption sur la berge.
Des tirs sans sommation
Le groupe a immédiatement ouvert le feu sans sommation. « En tirant sur les hommes comme sur le bétail » explique un berger qui souhaite garder l’anonymat et qui poursuit : « j’ai survécu parce que j’étais presque arrivé de l’autre côté de la rive ».
Choqué, un autre homme raconte avoir vu son frère tomber sous les balles des soldats. Au sein de la communauté des éleveurs, la colère est grande, car les autorités avaient été informées de cette transhumance et de la traversée du fleuve.
Selon un bilan établi par des sources locales, 32 civils ont été tués. Des riverains du fleuve ont expliqué que dans l’après-midi, les militaires maliens sont revenus et ont enterré les victimes dans deux fosses communes. À ce stade, ni l’armée, ni le gouvernement malien n’ont réagi.
Le projet de résolution américaine sur le Sahara occidental marque une rupture diplomatique majeure. Pour la première fois, un texte soumis au Conseil de sécurité revendique explicitement « le leadership du président Trump » dans le règlement de ce conflit, transformant un dossier multilatéral en instrument d’affirmation hégémonique.
Cette personnalisation du texte consacre une tentative d’américanisation du processus onusien et vise aussi à complexifier le vote, en le faisant porter moins sur la question de la décolonisation que sur la figure du président américain et sa prétendue action pacificatrice, la « Pax trumpana ».
La démarche tend à écarter le multilatéralisme comme cadre de règlement des différends pour le transformer en arène où se rejoue la hiérarchie des puissances. L’inclusion du plan d’autonomie marocain comme « base la plus crédible » opère un renversement de la logique historique des résolutions précédentes, qui, jusqu’ici, maintenaient la référence au droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Derrière les mots policés de la diplomatie se dessine un basculement stratégique : celui de l’institution onusienne elle-même, happée par la tentation unipolaire ressuscitée.
La complexité du vote prévu pour demain (jeudi 30 octobre, Ndlr) sera accentuée par plusieurs facteurs. La position chinoise, longtemps prudente, laisse filtrer les signes d’un réalignement partiel. Le commerce bilatéral sino marocain a bondi de 16,6 % sur les cinq premiers mois de 2025, preuve que l’économie prépare souvent le terrain idéologique. La visite du ministre Bourita à Pékin, en septembre, a débouché sur la création d’un dialogue stratégique permanent : une formule en apparence technique, mais qui institue une continuité d’échanges où le Maroc devient un partenaire de confiance dans l’espace africain. L’exclusion du Polisario des récents forums sino-africains n’est pas anodine ; elle constitue un signal implicite de préférence diplomatique.
Pourtant, Pékin ménage toujours ses principes : l’entretien du 29 octobre entre Wang Yi et Ahmed Attaf réaffirme « la constance » de la position chinoise, appuyée sur la « justice et l’équité ». En langage diplomatique, cette constance équivaut à une latitude : la Chine se prépare à s’abstenir, ce qui, dans le calcul des équilibres, revient à ne pas contrarier Washington sans humilier Alger, qui se contente d’une rhétorique de façade.
Du côté russe, la logique transactionnelle prévaut. L’accord de pêche signé avec le Maroc, incluant les eaux sahraouies, vaut reconnaissance implicite de la souveraineté marocaine — un geste hautement symbolique pour un pays qui, jusqu’ici, avait maintenu une neutralité prudente. Serguei Lavrov parle désormais d’une solution « équilibrée », terme qui, dans le langage moscovite, remplace la référence à « l’autodétermination ».
Mais la Russie n’agit jamais sans calcul global. Les diplomates marocains eux-mêmes admettent que Moscou pourrait user d’un « vote sanction » contre Washington, non pour défendre le Polisario, mais pour négocier ailleurs : en Ukraine, en Syrie ou dans le Sahel.
Dans cette optique, le vote russe au Conseil de sécurité devient un levier de troc, un instrument d’échange dans la diplomatie du donnant donnant entre grandes puissances. L’entretien du 21 octobre entre Attaf et Lavrov relève davantage d’une logique de manœuvre que de partenariat : le Sahara y apparaît comme une monnaie d’ajustement dans un rapport de forces mondialisé, où chaque geste diplomatique s’inscrit dans une stratégie de compensation et de calcul plutôt que dans une réelle coopération. Il reste à s’interroger sur la possibilité que Moscou aille jusqu’à bloquer la résolution, même si, au regard des signaux actuels, l’option la plus probable demeure celle d’une abstention, évitant la confrontation directe avec Washington.
L’enjeu du vote dépasse donc largement la question sahraouie. Il s’agit de savoir si le Conseil de sécurité demeure un organe d’équilibre ou s’il entérine la transformation de l’ONU en prolongement de la diplomatie américaine. La règle est claire : neuf voix favorables suffisent, à condition qu’aucun des cinq permanents ne s’y oppose par un veto. Les États-Unis, confiants, comptent sur l’abstention chinoise et l’absence d’obstruction russe.
Si ce scénario se confirme, la résolution consacrera le plan d’autonomie marocain non plus comme hypothèse, mais comme cadre de référence officiel du règlement.
En un sens, cela reviendrait à enterrer définitivement la perspective du référendum d’autodétermination. Cette évolution placerait l’ONU dans une contradiction institutionnelle : le Conseil de sécurité, dont la responsabilité première est l’établissement et le maintien de la paix, empiéterait sur les prérogatives de l’Assemblée générale. En passant outre l’inscription de la question sahraouie à l’agenda de la Quatrième Commission, en référence aux résolutions 1514 et 1541, il consacrerait un détournement du cadre de décolonisation initialement prévu par la Charte des Nations unies.
Ce basculement signerait la fin d’une époque : celle où l’ONU, malgré ses faiblesses, représentait encore une scène où la légalité internationale pouvait tempérer la puissance. Le texte américain transforme cette scène en tribune ; il ne cherche plus le compromis (diplomatique), mais plutôt, par la logique transactionnelle, un compromis cynique qui consacre les hégémonies régionales, un genre d’établissement d’un féodalisme planétaire.
Si la résolution passe, l’histoire retiendra moins la question sahraouie que le précédent institutionnel : la reconnaissance d’une solution imposée par la diplomatie d’un seul État, au nom d’un réalisme supposé. Ce réalisme là, fondé sur la transaction et la hiérarchie des forces, éloigne un peu plus le droit international de sa raison d’être : servir de rempart contre l’arbitraire des puissants.
Lors de la conférence de presse tenue à l’Hôtel de la Région à Marseille le 28 octobre, le PriMed 2025 a dévoilé sa sélection officielle. Du 29 novembre au 6 décembre, Marseille sera le théâtre de 25 films venus de 15 pays méditerranéens, parmi lesquels 7 inédits en France et 16 réalisés ou co-réalisés par des femmes.
Plus de 30 heures de projections gratuites, avec 20 séances en présence des réalisateurs et 8 séances destinées aux jeunes spectateurs, offriront un regard vibrant et pluriel sur la Méditerranée d’aujourd’hui.
Au cœur de cette édition, La Promesse d’Imane, de Nadia Zouaoui (Canada/Algérie, 52 min, 2024), illumine la programmation. Imane, jeune féministe algérienne de 26 ans, est retrouvée morte dans son appartement. Son blog, intime et politique, racontait la lutte contre les violences faites aux femmes dans un pays où elles sont souvent considérées comme mineures à vie. Avec ce film, Nadia Zouaoui restitue cette voix disparue et l’héritage de son combat, transmis à d’autres voix, d’autres flambeaux. Née en Algérie et installée au Québec, Zouaoui mêle mémoire et engagement, intimité et universel, chaque plan devenant souffle, chaque regard cri.
Le PriMed 2025 fait également résonner les luttes citoyennes et environnementales. La photographe sicilienne Letizia Battaglia, qui a défié la mafia et l’omerta, inspire des combats semblables dans tout le bassin méditerranéen. Que ce soit la dénonciation de la pollution d’une cokerie en Bosnie-Herzégovine (Le Ciel au-dessus de Zenica), ou la mobilisation contre la ligne Lyon-Turin (Transalpin), artistes et militants mettent en images leurs engagements, éveillant les consciences et dessinant des chemins pour un futur commun.
La guerre et la mémoire traversent également la sélection. Dans I Believe the Portrait Saved Me, un simple dessin sauve la vie du peintre Skender Muja au Kosovo. Dans Green Line, Fida, enfant pendant la guerre civile libanaise, part à la recherche d’un milicien qui l’a un jour menacée. Dans Algérie, sections armes spéciales, appelés français et descendants de victimes croisent leurs histoires, tissant une trame où souvenirs et questions s’entrelacent.
Le festival ne néglige pas les espoirs et récits de jeunesse. Echoes from Borderland, A Vol d’Oiseau et Born to Fight racontent les périples, les migrations et les rêves de jeunes femmes et hommes prêts à tout pour un avenir meilleur. D’autres films explorent la solitude et les fractures sociales, comme Je suis la nuit en plein midi, Bosco Grande ou Alice par ci, par là, offrant un regard sur les invisibles et les oubliés.
Le PriMed 2025 remettra 12 prix, décernés par un jury international présidé par Daphné Rozat, par les chaînes de télévision et par plus de 3 000 lycéens du bassin méditerranéen. La cérémonie aura lieu le vendredi 5 décembre à 16h30 au cinéma Artplexe Canebière, ouverte au public et en présence des réalisateurs.
Au PriMed, la Méditerranée devient un miroir poétique et engagé. Chaque film, de La Promesse d’Imane à Transalpin, de Le Ciel au-dessus de Zenica à I Believe the Portrait Saved Me, transforme les vagues en voix, les rivages en combats, et rappelle que mémoire, engagement et espoir continuent de traverser nos générations.
La présidente tanzanienne Samia Suluhu Hassan se présente à une élection présidentielle sans opposition, dans un climat politique étouffé où les principales voix dissidentes ont été écartées, emprisonnées ou réduites au silence.
La Commission électorale nationale a validé la candidature de la cheffe de l’État, investie par le Chama Cha Mapinduzi (CCM), au pouvoir sans discontinuer depuis l’indépendance. En revanche, elle a banni de la compétition le principal parti d’opposition, le CHADEMA, au motif qu’il aurait refusé de signer le code de conduite électoral. Son leader emblématique, Tundu Lissu, est détenu depuis avril, poursuivi pour “trahison” — une accusation jugée politique par ses partisans et plusieurs ONG internationales.
L’autre grande formation d’opposition, ACT-Wazalendo, a elle aussi été neutralisée. Son candidat, Luhaga Mpina, ancien député du CCM ayant fait défection, a été disqualifié pour “irrégularités dans les primaires”. Son secrétaire général, Ado Shaibu, a dénoncé une décision “honteuse” et une “preuve du manque d’indépendance” de la Commission électorale.
Dans ce contexte, Samia Suluhu Hassan affronte uniquement des candidats issus de petits partis sans audience nationale, transformant le scrutin en plébiscite sans suspense. Les rassemblements de l’opposition ont été interdits, les manifestations réprimées et les réseaux sociaux restreints, notamment Twitter (X), bloqué partiellement à la veille du vote.
Arrivée au pouvoir en 2021 après le décès de John Magufuli, figure autoritaire mais populaire, Samia Suluhu Hassan brigue un premier mandat électif complet. Première femme présidente du pays, elle avait dans un premier temps tenté d’assouplir la ligne politique de son prédécesseur, en relançant le dialogue avec la communauté internationale et en promettant une ouverture démocratique. Mais à l’approche du scrutin, ces promesses se sont évanouies.
Selon Al Jazeera et Reuters, plusieurs disparitions forcées de militants ont été signalées ces derniers mois. Les organisations de défense des droits humains évoquent une dérive autoritaire, où les institutions sont instrumentalisées pour préserver le pouvoir du CCM. Les observateurs indépendants font état d’un taux de participation faible et d’un climat de peur dans certaines régions, notamment à Dar es Salaam et Zanzibar.
Pour la présidente sortante, ce vote doit “confirmer l’unité et la stabilité de la nation”. Dans un message publié sur X avant les coupures, elle a appelé ses partisans à “maintenir l’unité pour assurer la victoire du CCM”.
Au-delà de la victoire attendue de Samia Suluhu Hassan, cette élection interroge sur l’avenir politique d’un pays longtemps cité comme modèle de stabilité en Afrique de l’Est. La Tanzanie donne aujourd’hui l’image d’un régime verrouillé, où la stabilité semble se payer au prix de la démocratie
Les pourparlers visant un cessez-le-feu durable entre Islamabad et Kaboul se sont soldés par un échec, relançant le spectre d’une guerre ouverte le long de leur frontière.
Les négociations tenues à Istanbul entre le Pakistan et l’Afghanistan ont échoué, fragilisant davantage les efforts de paix dans une région déjà marquée par des tensions récurrentes. Ces discussions visaient à établir un accord durable pour un cessez-le-feu, après les affrontements meurtriers survenus ce mois-ci le long de la frontière commune.
Le récent regain de violence est considéré comme le plus grave depuis le retour au pouvoir des talibans en Afghanistan en 2021. Les combats ont entraîné la mort de centaines de personnes des deux côtés, accentuant le risque d’une confrontation ouverte entre les deux pays.
Le ministre pakistanais de l’Information, Attaullah Tarar, a déclaré que les discussions à Istanbul n’avaient permis aucun « résultat concret ». Selon lui, la délégation afghane « s’est écartée du cœur du problème » et les Talibans afghans ont préféré rejeter la responsabilité plutôt que de proposer des solutions pratiques.
Le principal point de discorde reste la Taliban du Pakistan, basée en Afghanistan et accusée de mener des attaques régulières contre l’armée pakistanaise. Islamabad accuse Kaboul de fournir un refuge sûr à ce groupe et de bénéficier d’un soutien indirect de l’Inde pour déstabiliser le Pakistan. Kaboul, de son côté, affirme ne pas avoir le contrôle total sur cette faction et dénonce les incursions pakistanaises sur son territoire, qui ont provoqué des victimes civiles et une colère populaire.
La frontière, longue de plus de 2 600 kilomètres, a été le théâtre d’attaques répétées. L’armée pakistanaise a mené des frappes aériennes contre des positions afghanes prétendument occupées par la « Taliban du Pakistan », tandis que Kaboul a riposté en bombardant des sites militaires frontaliers pakistanais. Des sources pakistanaises ont fait état de cinq soldats tués et de vingt-cinq insurgés éliminés lors de ces affrontements, révélant la fragilité du cessez-le-feu précédemment négocié à Doha.
Le ministre pakistanais de la Défense, Khawaja Muhammad Asif, a averti que l’échec des pourparlers pourrait déboucher sur une guerre ouverte. Il estime que, bien que l’Afghanistan souhaite la paix, l’absence de consensus risque de précipiter une confrontation indésirable.
Pour les observateurs, le risque de conflit majeur est accentué par la tension régionale entre le Pakistan et l’Inde, la compétition sino-indienne et la fragilité du régime taliban après quatre années de pouvoir en Afghanistan.
La rédaction
Sources : Ultra صوت, Reuters, communiqués officiels pakistanais et afghans, octobre 2025.
À Bagdad, la campagne électorale bat son plein à l’approche des législatives du 11 novembre 2025. Mais cette fois, un acteur majeur manque à l’appel : le courant sadriste.
Ce retrait, inédit dans la vie politique irakienne récente, bouleverse les équilibres internes du camp chiite et rebat les cartes à l’échelle nationale.
Moqtada al-Sadr, chef religieux et figure populaire, avait bâti un mouvement structuré autour d’un discours nationaliste et anti-corruption. En se retirant du jeu, il prive la scène politique de l’une de ses voix les plus influentes et laisse un vide difficile à combler. Selon plusieurs estimations, cette absence pourrait coûter jusqu’à cinq sièges aux forces chiites dans la capitale, profitant ainsi aux listes sunnites et aux candidats indépendants.
Face à cette nouvelle donne, cinq grandes coalitions s’affrontent à Bagdad. L’alliance de Nouri al-Maliki (Dawlat al-Qanun), celle du Premier ministre Mohammed al-Sudani (Al-Imar wa al-Tanmiyah) et le parti du président du Parlement Mohammed al-Halbousi (Taqaddum) dominent le paysage. Abdel Rahman al-Jazaeri, du bloc de Maliki, estime que la présence de leaders expérimentés est essentielle pour « combler le vide laissé par les Sadrists et préserver la cohésion du bloc chiite ».
Mohammed al-Sudani, en campagne active, tente quant à lui de transformer cette absence en opportunité. Il appelle à un scrutin « équitable et transparent » et multiplie les déplacements pour convaincre un électorat fatigué par les crises politiques, la corruption et le chômage.
Mais pour d’autres observateurs, comme Ali al-Freiji, du bloc de Mohsen al-Mandlawy, le retrait sadrist pourrait ouvrir la voie à une nouvelle génération de candidats indépendants, porteurs de projets concrets et plus proches des attentes de la jeunesse. Une recomposition politique semble s’esquisser, portée par la lassitude des électeurs envers les partis traditionnels.
Reste que l’incertitude domine toujours. Ali Fadhlallah, analyste politique, rappelle que le vote à Bagdad demeure imprévisible, fortement influencé par les dynamiques locales et tribales. Selon Munaf al-Mousawi, du Centre de recherches stratégiques de Bagdad, les pertes chiites dans la capitale pourraient être compensées ailleurs, limitant ainsi l’impact global du boycott sadrist.
À l’échelle du pays, ce scrutin s’annonce donc comme un test crucial pour la stabilité politique et la crédibilité du système électoral irakien. Et si Moqtada al-Sadr a choisi le silence, son ombre continue de planer sur une Bagdad en quête de nouveaux repères.
Une nouvelle illustration du partenariat « stratégique global » entre l’Algérie et la Chine s’est manifestée ce mardi à travers un entretien téléphonique entre le ministre d’État, ministre des Affaires étrangères, M. Ahmed Attaf, et son homologue chinois, M. Wang Yi.
Selon le communiqué du ministère algérien des Affaires étrangères, les deux responsables ont passé en revue les multiples volets de la coopération bilatérale et les perspectives de son renforcement, notamment dans le domaine économique. Ce dialogue s’inscrit dans la continuité de la relation privilégiée que les deux pays entretiennent depuis plusieurs décennies, et que leurs dirigeants respectifs s’emploient à élever à un niveau de concertation et d’interdépendance stratégique plus affirmé.
Mais au-delà de cette rhétorique partenariale, la conversation entre M. Attaf et M. Wang Yi a également abordé des questions internationales sensibles inscrites à l’ordre du jour du Conseil de sécurité de l’ONU, au premier rang desquelles « la question de la décolonisation au Sahara occidental », selon la formulation du communiqué.
Une expression mesurée, presque sibylline, qui rappelle le ton feutré adopté par Alger lorsqu’il s’agit d’évoquer publiquement ce dossier, sans jamais s’écarter de sa ligne traditionnelle de soutien au droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, mais en veillant à ne pas heurter ses partenaires internationaux.
Pékin, tout en demeurant discret sur le fond de la question sahraouie, partage avec Alger une conception commune des principes de souveraineté, d’intégrité territoriale et de non-ingérence — autant de notions qui structurent leur lecture de la gouvernance internationale et de la réforme du système multilatéral.
En conclusion, si le communiqué officiel se garde d’insister ouvertement sur la question du Sahara occidental, se contentant d’y faire référence sous l’expression mesurée de « décolonisation », il n’en demeure pas moins que cette allusion traduit la persistance du sujet dans les priorités diplomatiques d’Alger.
En plaçant l’échange avec Pékin sous le signe du multilatéralisme et de la concertation onusienne, la diplomatie algérienne laisse entrevoir, sans le dire explicitement, la portée stratégique de ce dossier dans le jeu d’alliances et d’équilibres qui façonne désormais sa relation avec la Chine.
Alger cherche ainsi à s’assurer l’appui de Pékin à sa stratégie de défense de la cause sahraouie, dans la continuité de la démarche entreprise récemment auprès de la Russie, lors de l’entretien entre Ahmed Attaf et Sergueï Lavrov.
Une approche qui confirme la volonté d’Alger de consolider un front de soutien parmi les membres permanents du Conseil de sécurité autour du principe de décolonisation au Sahara occidental. Cette position que défend également le Front Polisario sera confrontée à la proposition marocaine d’autonomie du territoire dans le cadre de la souveraineté du royaume chérifien, lors du débat prévu ce vendredi 31 octobre à l’ONU.
Native d’Azazga, en Kabylie et titulaire d’un BTS en Tourisme, Farida Sahoui a signé trois ouvrages à caractère historique : un récit-hommage et témoignages de Familles Kabyles d’Algérie en Tunisie (2017) ; un essai sur le Roi Jugurtha en trois langues (2018-2019) ; et un autre essai, en 2021, « Sur les traces des Kabyles exilés en Tunisie, dont Le Matin d’Algérie avait déjà fait une recension.
Récemment, elle a reçu le premier prix « Rachid Alliche » du meilleur roman amazigh de l’année 2024, pour Aggus, délivré par la Fondation Tiregwa d’Ottawa au Canada. Dans cet entretien, Sahoui aborde non seulement son parcours littéraire, mais la place du livre dans la société, l’art et les artistes, l’écriture en Tamazight, la condition de la femme, les défis de l’avenir pour l’Algérie, ses espoirs de femme…
Le Matin d’Algérie : On commence, de prime abord, par la fin, comment l’idée de l’écriture d’Aggus vous est-elle venue ? C’est-à-dire, on veut bien comprendre d’abord ce basculement de l’essai-récit au roman, puis l’autre basculement de la langue française à Tamazight ?
Farida Sahoui : Ce n’était guère, à vrai dire, difficile pour moi de passer du récit-essai au roman, du moment que l’idée est déjà là. En revanche, c’est la conception qui diffère. Dans le roman, il y a plus de liberté pour l’auteur de s’exprimer et de détailler des faits, vécus ou imaginés soient-ils.
L’acte d’écriture a en soi-même, de mon point de vue, le même effet sur l’auteur, c’est pourquoi l’œuvre est reçue avec la même curiosité de découverte de son contenu par les lecteurs. Pour passer du français à tamazight, cela ne m’avait pas posé de gros problèmes non plus. Je vous rappelle, à cet égard, que mes premières contributions dans la presse écrite avaient été faites en Tamazight, au tout début des années 90 dans le journal Tamurt « La Patrie ».
Ma première édition littéraire fut dans la langue française, mais je n’avais pas tardé à publier un essai intitulé Jugurtha en tamazight pour en écrire d’autres dans la langue française et revenir encore à éditer en «Taqbaylit » (dialecte ou variante kabyle) en 2024, avec le roman Aggus (Ceinture NDLR). Cela dit, je me suis basculé d’un style d’écriture à un autre, au gré de mes penchants littéraires et entre deux langues, sans difficultés réelles.
Quant au roman « Aggus », l’idée m’est venue suite à ce que j’ai pu constater et entendre du vécu des femmes kabyles qui s’étaient battu pour leurs droits dans notre société. Le récit Aggus est tiré d’une histoire vraie. Si, pour la femme actuelle, Aggus, qui veut dire ceinture, est une pièce du tissu qu’elle met autour de sa taille par effet de mode, on le retrouve néanmoins d’un autre usage dans la tradition ancestrale.
En effet, quand une veuve avait un doute qu’elle pourrait bien être enceinte, elle déposait ce morceau du tissu sur le cercueil de son mari, tout en passant au-dessous. C’est une façon pour elle de se protéger en informant les gens qu’elle pourrait être enceinte… Malgré l’observation de ce rituel, dans mon roman, le personnage principal Tassaâdit, n’échappera pas à l’opprobre dans son entourage… Aggus traite plusieurs maux sociaux liés surtout à la femme entre soumission et émancipation. On y trouve différents visages de femmes entre vieille fille, mariée divorcée, veuve, femme victime d’un mariage forcé, femme d’un Agriv « exilé », vieilles entre sagesse et une certaine « sauvagerie ».
Au-delà de l’histoire de Tassaâdit elle-même, je suis allée piocher dans le patrimoine verbal de notre langue entre proverbes, dictons et surtout en quête approfondie d’expressions qu’on risque de perdre de notre lexique. Il me semble qu’il est nécessaire de tout mettre en papier, une façon pour moi de sauvegarder nos trésors linguistiques de la disparition.
Comme premier retour positif, des enseignants universitaires me disent que je viens de réaliser un véritable travail d’anthropologie au féminin et me demandent de faire une traduction dans d’autres langues. D’ailleurs, deux d’entre eux m’ont contacté pour me dire que mon roman mérite d’être adapté au cinéma. Juste un rappel au passage : je viens de remporter avec Aggus le premier prix « Rachid Alliche » du meilleur roman amazigh de l’année 2024, délivré par la Fondation Tiregwa d’Ottawa au Canada.
Le Matin d’Algérie : On sait que la femme algérienne, celle des régions de Kabylie et des Aurès en particulier, a contribué de façon capitale à la pérennité de Tamazight, frappée depuis des siècles par l’oralité. Comment estimez-vous, au juste, le rôle de la femme kabyle dans la construction du récit national ?
Farida Sahoui : Effectivement, la femme rurale, kabyle et chaoui en particulier, a toujours porté le fardeau de la mémoire, du vécu ancestral et de la langue. Encore faut-il préciser son rôle, en tant que courroie de transmission, dans la préservation du patrimoine immatériel. Elle a participé d’une manière remarquable à la pérennité de la langue maternelle et à sa transmission à travers les chants, les proverbes et autres contes et histoires qui ont tendance à disparaitre au fil du temps. C’est grâce à elle qu’on a pu apprendre sur nos traditions et nos valeurs communes. La femme algérienne a su transmettre aux générations futures tout ce que recelait l’oralité comme richesse. Et c’était en tant que telle, c’est-à-dire en tant que paysanne issue du milieu traditionnel, qu’elle a joué ce rôle primordial dans la construction de l’identité nationale.
Tout naturellement, le récit national, qui se construit à partir de narrations parfois romancées, est alimenté en grande partie par toutes ces contributions et ces bribes de mémoire que la femme algérienne a su, tout à son honneur, préserver et transmettre. Par ailleurs, il va sans dire que même les hommes ont ce souci de sauvegarde et de transmission. A titre d’exemple, dernièrement, j’ai entendu parler d’une personne âgée qui cherchait quelqu’un pour recueillir ses poèmes traitant des hommes ayant marqué le XIXème siècle et les conflits enregistrés entre les différents Aârches (tribus NDLR). Cela étant, on peut aussi, tout de même, retrouver chez les hommes d’inestimables trésors sur le patrimoine qu’on n’a pas su ou pu sauver de l’oubli. Hélas, tant de bibliothèques ont quitté ce monde avant que nous les découvrions, et c’est, à notre grand malheur, une partie de nous-mêmes qui est partie avec toutes ces femmes et tous ces hommes de valeur !
Le Matin d’Algérie: La femme algérienne d’aujourd’hui est-elle, à votre avis, la digne héritière de ses ascendantes ?
Farida Sahoui : Il faudrait bien noter qu’entre nos aînées et la femme algérienne d’aujourd’hui, il y a eu le passage, entre-temps, de l’oralité à l’écrit avec tout le processus d’instruction et de contact avec les autres en termes de transmission et de mode de vie qui en découle. De nos jours, avec la mondialisation, le high-tech et la mutation des préoccupations sociales grâce aux réseaux sociaux, on assiste à la transformation des éléments culturels (pratiques, traditions, objets, etc.).
Autrement dit, pour les mettre, ces éléments culturels-là s’entend, en avant, d’aucuns les présentent souvent de manière assez pittoresque, disons même folklorique, voire superficielle, sans portée symbolique ni profondeur spirituelle ou historique. Or, le fait de limiter toute une culture et une identité aux quelques aspects les plus extérieurs et souvent stéréotypés, porte atteinte à la chaine de transmission et réduit certains reflexes – jadis primordiaux à la pérennité de notre langue maternelle-à de simples actes ordinaires de « consommation », parfois dans un but touristique ou de valorisation culturelle destinés à un public particulier. Ceci étant dit, je ne suis pas trop sûre qu’actuellement toutes les femmes algériennes puissent s’intéresser pleinement à tout cet héritage dans toute sa dimension. Il est regrettable de constater qu’on a tendance à faire de la folklorisation une priorité, au lieu de nous pencher sur le travail de fond : la recherche, la sauvegarde et la transmission. Cependant, il y a encore, à mon humble avis, des femmes qui essayent de rester fidèles à leurs aïeules pour donner à notre culture un nouveau souffle, à travers l’écriture, le chant et l’art en général, mais cela reste tout de même maigre, insuffisant, face aux défis actuels et futurs. Le monde d’aujourd’hui est dominé par le goût du lucre. Cela dit, il est difficile de parler de l’engagement sérieux dans la culture en l’absence d’un profit financier…
Le Matin d’Algérie : On remarque, ces dernières années, la prolifération des œuvres en divers domaines en langue amazighe. Certains spécialistes jouent sur la quantité de production, jugeant que, dès que l’on produit plus, on donne beaucoup plus de souffle à la langue, même si la qualité fait défaut. D’autres, minoritaires, pensent plutôt que la qualité de production est essentielle pour promouvoir une littérature raffinée, attirante et « exportable ». Quel est votre point de vue ?
Farida Sahoui : Effectivement, ces dix dernières années, la production du livre amazigh connait une forte croissance. Ce qui est bien pour la langue elle-même en premier lieu, mais aussi pour les amoureux de la littérature berbère. Il faut rappeler que cette dernière est relativement toute jeune, si l’on la compare aux autres. Cela étant lié à différentes raisons historique, politique et sociolinguistique dont l’espace ici ne permet pas de développer. C’est pourquoi, je pense que pour qu’on puisse parler de littérature amazighe, pour que celle-ci ait vraiment une place parmi les autres et gagner en visibilité, il faut qu’il y ait au préalable une forte production.
Et il me semble, cela reste bien entendu mon point de vue personnel, qu’à l’état actuel des choses, cette phase est sur le point de connaître son plein essor, même si beaucoup reste à faire. Autrement dit, il est tout à fait légitime de prétendre à une qualité meilleure d’une telle production, que ce soit sur le plan littéraire, esthétique ou bien linguistique. Pour cela, je trouve qu’il n’y a pas de raison de rester avec la même mentalité et les mêmes idées surannées du passé, liées à un contexte bien défini, si on veut vraiment permettre à cette jeune littérature de décoller. Il est plus que nécessaire, aujourd’hui, de nous pencher sur la qualité si on veut vraiment que Tamazight trouve la place qu’elle mérite et celle qu’on lui souhaite.
Aussi est-il important de continuer à produire en cette langue dans divers domaines. Quoique, il faudrait bien se l’avouer, cela demeure insuffisant, car se focaliser sur la quantité au détriment de la qualité ne sert pas à grand-chose. Travailler pour Tamazight n’est pas une fin en soi, il faudrait bien qu’à un moment donné la qualité suive, sinon, on n’est pas sorti de l’auberge ; on risque, et c’est le pire des cas, de tomber dans la facilité et le bricolage… D’après ma propre expérience, il faut dépasser le slogan « l’essentiel, c’est d’y avoir participé!» Il faut prendre au sérieux la qualité du travail présenté aux lecteurs. A l’heure présente, avec le foisonnement littéraire et surtout l’engouement de la jeune génération à écrire en cette langue, on peut parler d’une vraie production littéraire en tamazight qui tend à rivaliser avec la production dans d’autres langues, à savoir l’arabe et le français. C’est une réalité : Tamazight s’impose sur le champ littéraire et devient une vraie concurrente pour ces deux langues en termes de production littéraire !
Le Matin d’Algérie : Dans votre ouvrage Jugurtha, il s’agit en quelque sorte du récit de la saga berbère, avec la mise en évidence de la « figure de l’aguellid résistant» dans une civilisation marquée par la survivance miraculeuse de la langue grâce à l’oralité. Est-ce un « contre-récit historique » de celui des historiens romains ou occidentaux ? Ou au contraire, une simple tentative pour se raconter soi-même, c’est-à-dire se raconter son histoire ancestrale à sa manière, et selon la version locale conçue comme « la plus objective » ?
Farida Sahoui : Il est communément admis que l’histoire est toujours écrite par les vainqueurs ! Notre histoire, plusieurs fois millénaire, n’échappe pas malheureusement à cette règle. Dans ma démarche, lorsque j’aborde toutes ces thématiques en lien avec notre histoire et notre mémoire, je ne peux rester indifférente. Je ne peux passer à autre chose sans que j’éprouve du regret et du ressentiment face à toutes ces entreprises « coloniales » et « néocoloniales » visant à nous réduire, à nous dévaloriser et à nous stigmatiser pour nous ranger dans « la case des sous-peuples ». De ce fait, comme simple réaction, dans mes écrits j’essaie toujours d’appréhender notre histoire avec fierté, armée d’une vision civilisationnelle plurielle mais « dépassionnée », de montrer aux autres que nous sommes comme eux, avec nos hauts et nos bas, nos exploits et nos gloires.
Je m’y prends avec précaution avec les faits historiques, c’est-à-dire avec tout ce que cela exige comme objectivité et respect de l’autre. Mon essai sur le prince Jugurtha ne déroge pas à ce principe, dans la mesure où il n’est pas du tout un contre récit-historique, mais mon propre récit tout simplement, que je voulais présenter aux lecteurs. Je tiens à préciser, au demeurant, que quand j’ai entamé son écriture, je n’avais pas encore lu ni sur Salluste ni moins encore sur son célèbre livre « La guerre de Jugurtha ». Bref, mon élan créatif fut spontané, celui d’une femme profondément ancrée dans son amazighité. Une « chercheuse » qui veut faire revivre l’histoire de ses ancêtres, avec un sentiment d’appartenance sans égal. Pour moi, ce fut plus qu’un besoin psychologique et culturel de le faire : un devoir moral.
Personnellement, au plus profond de moi-même, je me sens une descendante directe de Massinissa et de Jugurtha, donc il est tout à fait normal d’avoir cette fureur de parler des miens. Je les sens proches de nous, ils sont vivants parmi nous, comment ne pas évoquer leurs noms et leurs exploits, comment ne pas écrire sur eux, les chanter, les célébrer ?
Le Matin d’Algérie : Revenons maintenant sur votre excellent essai « Sur les traces des Kabyles exilés en Tunisie ». Dans le corps du texte, on a relevé des témoignages extraordinaires sur cette coexistence séculaire entre la diaspora kabyle et les Tunisiens. Vous avez même cité en exemple la famille des Amrouche. Il y a comme un brin de nostalgie. Sincèrement, d’où vient cet intérêt pour la Tunisie ?
Farida Sahoui : Avant tout, je dois rappeler que le travail sur nos exilés en Tunisie est le fruit d’une coïncidence, si je peux le résumer ainsi. En ce sens, ce n’est pas un travail que j’ai cherché à faire. C’est par de simples rencontres que j’ai pris connaissance des faits dramatiques qu’avait subis notre communauté exilée, installée en grande partie en Tunisie. Puis, petit à petit, j’ai pris conscience des conditions pas du tout faciles dans lesquelles cette dernière avait vécu.
En effet, j’ai eu la chance et le privilège de croiser la route de certains descendants directs de ces exilés qui m’avaient raconté beaucoup de choses sur les conditions de leur départ, notamment au lendemain de l’insurrection de 1871. Des témoignages extraordinaires que j’ai pris le soin d’insérer dans mon corpus. Au départ, mon intention ce n’était pas d’en faire un livre, ce n’est qu’à après l’insistance et les vœux émis par ces Kabyles de Tunisie que j’ai décidé de franchir le cap : passer à l’écriture de mon récit quelques années plus tard ! L’essai Sur les traces des Kabyles en Tunisie, est une œuvre qui ne parle pas seulement de la guerre, mais aussi des faits sociaux et politiques tels que la société tunisienne, et la diaspora kabyle en particulier, les avaient vécus. Ceux-ci prennent d’ailleurs une grande place dans le corps du texte. Le volet culturel aussi en a pris une part importante.
A vrai dire, la famille Amrouche est un exemple édifiant de cette coexistence séculaire entre la diaspora kabyle, formée par la deuxième puis la troisième génération de ces exilés, et les Tunisiens. Elle avait marqué son passage en Tunisie par ses productions littéraires, radiophoniques (notamment pour Jean) et même politiques. C’est une famille qui avait donné beaucoup à la Tunisie, mais aussi, il faut bien le souligner en gras : Tunis leur avait donné la chance d’exister dans un espace culturel plus ouvert, métis, cosmopolite. Jugeons-en par les écrits de Jean El Mouhoub qui n’avait pas manqué d’évoquer à chaque occasion sa ville de cœur, « Tunisie de la grâce » disait-il dans un de ses poèmes, pour laquelle il avait composé tant de chants.
Dans cet ordre d’idées, j’ai jugé judicieux de rapporter toutes ces bribes de mémoire, d’autant plus que l’exilé lorsqu’il quitte sa terre, en laissant derrière lui ses biens, il ne prend avec lui que ses chants ; ses dictons ; ses anecdotes ; ses souvenirs. C’est, bien naturellement, avec ce patrimoine immatériel qu’il sera en mesure de supporter son exil et vivre à travers lui sa culture et la faire vivre… A mon sens, un exilé n’est jamais sans mémoire ! Ce travail, je l’ai réalisé avec un grand respect, solidarité et reconnaissance pour tout ce que nos exilés m’avaient confié et transmis comme vécus, faits, événements, mais aussi comme émotions.
Actuellement, je travaille sur un thème proche du premier, entre exil et émigration de notre communauté en Tunisie. J’y évoque l’exil du savoir, quand les Kabyles se rendaient à Tunis pour étudier et n’en revenaient plus, s’investissant dans le journalisme, la culture et aussi la politique, à l’instar d’Abdelaziz Taalibi et la création de son parti politique au début du XXe siècle… Je cite des noms connus dans le domaine de la justice et de la politique, comme El Ghobrini, mais sur une autre période de l’histoire pour nous faire voyager au temps des Hafsides….
Le Matin d’Algérie: Enfin, comment peut-on estimer aujourd’hui l’état des lieux en Algérie : Tamazight, le statut de la femme, la place de l’artiste et de l’intellectuel ? Bref, ne faut-il pas sortir du cercle vicieux des slogans creux et se retrousser les manches pour avancer ?
Farida Sahoui : La situation, telle qu’elle est vue de tous est inquiétante, ni Tamazight, ni la femme ni l’artiste ni l’intellectuel ne sont respectés ! Pour Tamazight, on s’est rendu compte que jusqu’à présent, malgré son institutionnalisation et les textes qui existent, il y a comme une volonté sournoise d’entraver sa promotion et son développement.
Les moyens financiers, humains et logistiques mis à son service restent de loin insuffisants et insignifiants, par rapport aux attentes.
Jusqu’ici, comme il est facile de le constater, Tamazight se tient uniquement grâce à ses enfants et ceux qui la portent dans leurs cœurs.
Certes, la donne a changé, et même si le combat culturel est mené, tant bien que mal, et au quotidien par les différents acteurs, il n’en demeure pas moins que le militantisme politique doive parallèlement reprendre du terrain en urgence, c’est une nécessité !
Pour le statut de la femme, il est clair que la situation en Algérie se dégrade et la femme se voit reculer de plus en plus. La société a comme peur d’elle. Et pourtant, il faut bien savoir que dans une société où la femme perd sa place, c’est l’homme qui se perd avec elle ! On est comme coincés dans des débats dépassés, stériles, qui nous ne mènent nulle part. A l’heure actuelle, le mot « lutte » a perdu son sens, pas uniquement chez nous mais aussi dans certaines sociétés.
On vit au jour le jour et la femme, comme vecteur social du changement, ne se bat plus ; je peux dire même, peut-être je me trompe et je l’espère de toutes mes forces, que la femme algérienne a fait son choix : la soumission ! C’est désolant comme constat : elle subit des pressions au quotidien, elle se voile, elle se cache pour pouvoir sortir… Désolant ! Concernant la place de l’artiste, chez nous, on a tendance à oublier ce terme.
Que reste-t-il d’un chanteur qui ne chante pas dans toutes les villes de son pays, et qui ne peut rien choisir de ses thèmes et parfois de sa langue ? Il est visé de tous, un artiste qui ne peut pas jouer son rôle d’artiste perd, à vrai dire, la place que sa société lui a confiée.
La scène artistique est désertée, elle est remplacée par un discours plutôt méfiant qui refuse malheureusement l’art et l’artiste. Quant à l’intellectuel, il a choisi de se taire dans son propre pays. S’il veut s’exprimer, travailler ou produire, il doit choisir une autre terre, plus clémente. C’est sous d’autres cieux qu’il brille alors que les siens ont besoin de lui sur place.
On vit dans une Algérie où l’oppression est pratiquée comme rituel social : ni liberté d’expression, ni ouverture du champ politique. Personne ne sait pourquoi tout cela survient. Pourquoi fait-on de ses meilleurs enfants ses meilleurs ennemis ? On cherche notre Algérie ! L’Algérie de tous, une Algérie qui se reconstruira dans son espace naturel, historique et géographique. L’Algérie peut être singulière et plurielle, mais aussi ouverte sur le monde, tolérante, accueillante et surtout bienveillante. Face à cela, on doit continuer de travailler : retrousser nos manches et nous mettre à la production avec ce que nous disposons comme moyens, selon nos capacités et acquis du moment, tout en visant d’autres horizons.
Propos recueillis par Kamal Guerroua pour Le Matin d’Algérie.
Plongeant au cœur des manuscrits, des ratures et des fragments, cette exploration révèle un Baudelaire inattendu : non plus l’inspiré fulgurant que la légende...
Plongeant au cœur des manuscrits, des ratures et des fragments, cette exploration révèle un Baudelaire inattendu : non plus l’inspiré fulgurant que la légende...
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