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jeudi 3 juillet 2025
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Face aux menaces hybrides, le FFS prône l’unité et l’ouverture démocratique

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Youcef Aouchiche
Après avoir participé à la parodie présidentielle, Youcef Aouchiche se découvre des accents d'opposants.

Dans un discours offensif prononcé lors du Conseil national du Front des forces socialistes (FFS), tenu le 30 mai à Alger, Youcef Aouchiche a livré une lecture lucide et préoccupée de la conjoncture nationale et internationale.

Face aux menaces hybrides, aux ingérences extérieures et aux dérives internes, le Premier secrétaire du FFS plaide pour un sursaut politique fondé sur l’ouverture démocratique, l’éthique publique et un pacte national fondé sur les valeurs partagées. Il met en garde contre les discours de division identitaire et appelle à une refondation du lien entre le peuple et les institutions.

Par-delà la solennité de l’exercice, le discours prononcé par Youcef Aouchiche lors du Conseil national du Front des forces socialistes (FFS) a pris, ce 30 mai 2025, des allures de manifeste politique. Dans une conjoncture marquée par des tensions géopolitiques croissantes, des instabilités régionales inquiétantes et des crispations internes, le Premier secrétaire du FFS a voulu délivrer un message sans détour : la situation est grave, mais la sortie de crise passe par la lucidité, l’unité nationale et l’ouverture démocratique.

Une vision stratégique du chaos international

Pour le dirigeant du plus vieux parti d’opposition du pays, les bouleversements mondiaux actuels ne sont pas sans conséquences directes pour l’Algérie. Les conflits de basse intensité, les ingérences masquées, les guerres informationnelles et économiques sont les nouvelles armes d’une reconfiguration brutale des rapports de force.

Youcef Aouchiche met en garde : l’Algérie est « une cible de convoitises et de manipulations », notamment en raison de sa position stratégique entre Méditerranée et Sahel, et de ses ressources naturelles. « La souveraineté ne peut plus être un simple slogan », martèle-t-il, plaidant pour une réponse fondée sur la cohésion sociale et la démocratie réelle.

Contre les divisions internes, l’appel à l’unité

L’avertissement le plus appuyé du Premier secrétaire vise les discours internes porteurs de division. À mots à peine couverts, Aouchiche dénonce les instrumentalisations identitaires, susceptibles de fragiliser le tissu social. Il cite explicitement l’islam, l’amazighité, l’arabité et la modernité comme « piliers de la personnalité algérienne » et appelle à les considérer comme des forces d’unité, non des lignes de fracture.

Dans la foulée, il fustige la logique de contrôle autoritaire de la société, qu’il qualifie de « danger structurel » pour la résilience du pays. À ses yeux, la fermeture politique, la criminalisation des opinions et les lois liberticides fragilisent bien plus la souveraineté que ne la protègent.

Un pacte national pour la démocratie

Face à cette double menace – extérieure et intérieure vraie ou fausse d’ailleurs – le FFS propose une feuille de route articulée autour de quatre axes: l’ouverture politique, à travers l’abrogation des lois liberticides et la révision des avant-projets de lois encadrant la vie publique ; la refondation du lien de confiance entre citoyens et institutions ; la réforme de la loi électorale pour garantir la représentativité et l’égalité des chances et la promotion d’un pacte national, non basé sur l’unanimisme mais sur un consensus autour des fondamentaux : souveraineté, démocratie, justice sociale.

Le FFS veut redevenir une force centrale

Sur le plan partisan, Youcef Aouchiche annonce une nouvelle phase de «redéploiement politique et organique » du FFS. Une série de rencontres nationales (CPE) sera lancée pour préparer la participation du parti aux prochaines élections législatives et locales. Objectif affiché : faire du FFS une force politique « réaliste, rassembleuse et centrale ».

Enfin, le Premier secrétaire a lancé un appel à toutes les forces vives de la nation : jeunesse, intellectuels, travailleurs, femmes, créateurs. « Le FFS est leur maison », conclut-il, dans un ton volontiers mobilisateur. « L’avenir de l’Algérie a besoin de leur énergie. Ensemble, faisons renaître l’espérance. » Sera-t-il entendu ? Lui qui a participé à la mascarade présidentielle de septembre 2024 que le peuple a d’ailleurs massivement boycottée.

Samia Naït Iqbal

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Atmane Mazouz : « Sans rupture avec le mensonge d’État, il n’y aura pas de futur pour l’Algérie »

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Atmane Mazouz

Atmane Mazouz est né à Akbou, dans la wilaya de Béjaïa, une région profondément marquée par l’héritage culturel amazigh et par des décennies de luttes en faveur des droits démocratiques et identitaires. 

Très jeune, Atmane Mazouz s’engage au sein du Mouvement culturel berbère (MCB), qui milite pour la reconnaissance de l’identité amazighe et pour l’instauration des libertés fondamentales en Algérie. Cette expérience militante forge ses convictions : une Algérie inclusive, démocratique et respectueuse de sa pluralité.

Formé en économie à l’université d’Alger puis à celle de Béjaïa, Atmane Mazouz développe une compréhension fine des défis socio-économiques auxquels le pays est confronté. Cette double approche, militante et académique, alimente sa vision d’un changement fondé sur des réformes structurelles et démocratiques.

Son engagement prend une envergure nationale lorsqu’il rejoint le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), parti fondé en 1989 et connu pour son positionnement clair en faveur de la laïcité, du pluralisme culturel et des libertés démocratiques. Atmane Mazouz y trouve un prolongement naturel à son parcours.

En tant que député de Béjaïa, il s’impose rapidement comme une voix active au sein de l’Assemblée, défendant les préoccupations de ses électeurs tout en portant une critique assumée de la centralisation du pouvoir. Il devient président du groupe parlementaire du RCD, où il renforce son rôle stratégique au sein du parti et dans l’opposition.

En juin 2022, il est élu président du RCD, succédant à Mohcine Belabbas. Cette transition marque une nouvelle étape dans son itinéraire politique, tournée vers le renouvellement générationnel, l’ouverture à la société civile et la structuration d’une alternative démocratique crédible.

Reconnu pour ses prises de parole franches, Atmane Mazouz aborde sans détour des sujets sensibles : le recul des libertés fondamentales, l’instrumentalisation religieuse, les blocages institutionnels ou encore l’exclusion politique. Il défend une conception de la laïcité comme cadre garant de la coexistence pacifique entre les croyances, et fait de la diversité culturelle — notamment amazighe — un pilier de l’unité nationale.

Ses interventions publiques, souvent incisives, appellent à la mobilisation citoyenne et mettent l’accent sur la responsabilité collective face aux dérives autoritaires. Il insiste sur la nécessité d’une transition démocratique portée par des garanties institutionnelles, et non par des ajustements de façade.

En décembre 2024, lors d’un meeting à Paris, il s’adresse à la diaspora algérienne, soulignant son rôle décisif dans le soutien aux mouvements démocratiques et dans la circulation des idées. Pour lui, la diaspora n’est pas un simple relais, mais un acteur à part entière du débat politique algérien.

Sur le plan des droits humains, Mazouz dénonce régulièrement les restrictions à la liberté d’expression, les poursuites contre des journalistes ou militants, et appelle à une solidarité accrue autour des prisonniers d’opinion. Il insiste sur l’importance de replacer les droits fondamentaux au cœur du projet national.

À la tête du RCD, il œuvre à la formation de nouvelles générations de militants, à la refondation du discours politique, et à l’articulation d’un projet de société fondé sur la justice sociale, l’égalité, et la transparence dans la gouvernance.

Atmane Mazouz incarne aujourd’hui une génération de responsables politiques engagés dans une quête de refondation. Son parcours — du militantisme culturel à la direction d’un parti historique — témoigne d’une fidélité à des principes ancrés, et d’une volonté de bâtir une alternative à long terme.

Dans un contexte politique sous tension, marqué par la polarisation et les pressions multiples, il s’efforce de maintenir une ligne claire, entre exigence démocratique et dialogue avec les forces vives du pays.

Pour de nombreux observateurs, Atmane Mazouz représente une figure montante de l’opposition politique en Algérie. Son engagement constant, sa capacité à articuler une vision cohérente, et son ouverture à la société civile en font un acteur clé des débats en cours sur l’avenir du pays.

Dans cet entretien, Atmane Mazouz, revient sur son engagement au sein du Mouvement culturel berbère, qui a profondément influencé sa trajectoire politique. Fort de cette expérience, il partage sa vision pour une Algérie ouverte, démocratique et respectueuse de ses diversités. Il évoque les priorités de son parti, les défis rencontrés dans un contexte politique exigeant, et les aspirations d’une jeunesse en quête de renouveau.

Entre exigence de réformes structurelles, attachement aux libertés fondamentales et volonté de dialogue avec toutes les forces vives de la nation, Atmane Mazouz trace les contours d’un projet politique tourné vers l’avenir. 

Le Matin d’Algérie : Votre parcours au sein du Mouvement culturel berbère a marqué vos débuts en politique. Comment cette expérience a-t-elle façonné votre vision pour l’Algérie ?

Atmane Mazouz : Le Mouvement culturel berbère, c’est l’école de l’engagement sans compromis. Ce mouvement, comme les luttes de 1981, 88, 2001 et 2019 m’ont formé non seulement à l’activisme, mais aussi à une pensée politique radicalement démocratique, fondée sur la pluralité, la laïcité et la justice sociale. Tous ces évènements m’ont appris que l’engagement est le socle de toute liberté politique. 

En Algérie, l’histoire nationale a été uniformisée, falsifiée pour servir un pouvoir centralisateur et autoritaire. Le combat du MCB avec toutes ses composantes a donc été à la fois identitaire et universaliste, car il portait l’exigence de reconnaissance de toutes les composantes de la nation.

Ce qui m’a marqué, c’est la capacité de ces différents mouvements à résister, même dans les pires moments, à garder la parole libre quand les institutions la confisquaient. L’école de la liberté qu’a été toute cette période m’a enseigné une chose essentielle : sans rupture avec le mensonge d’État, sans déconstruction de la propagande officielle, il n’y a pas de futur pour l’Algérie.

Le Matin d’Algérie : En tant que président du RCD, quelles sont vos priorités pour renforcer la démocratie et les libertés fondamentales en Algérie ?

Atmane Mazouz : Nous avons trois priorités majeures. D’abord, la refondation de l’État sur des bases démocratiques. Cela implique une rupture nette avec le système autoritaire actuel : séparation effective des pouvoirs, état de droit, respect des libertés individuelles et collectives. Ensuite, l’indépendance de la justice : il n’y aura ni transition ni justice sociale tant que les juges seront soumis à l’exécutif. Enfin, nous voulons restaurer la souveraineté populaire à travers une transition politique réelle, encadrée par des garanties institutionnelles et non par des simulacres électoraux.

Nous avons conscience que sans ces fondements, aucun développement économique, aucune réconciliation nationale n’est possible. Il faut en finir avec la gouvernance par la peur, les prisons et la manipulation.

Le Matin d’Algérie : Le RCD a souvent été en première ligne pour dénoncer l’autoritarisme. Quels sont les principaux défis auxquels vous faites face dans cette lutte ?

Atmane Mazouz : Le premier défi est structurel : nous faisons face à un régime qui n’a jamais rompu avec la logique du tout répressif. Tous les leviers – institutionnels, sécuritaires, médiatiques – sont verrouillés. Il ne gouverne pas avec le consensus, mais par la force, la division et l’usure.

Le second défi, c’est la criminalisation de la politique. Aujourd’hui, exprimer une opinion, manifester pacifiquement, dénoncer une injustice, vous expose à la prison. Ce régime assimile toute contestation à une menace pour « la stabilité ». Mais cette soi-disant stabilité n’est que la façade d’un désordre permanent organisé pour empêcher toute alternative.

Enfin, il y a la lassitude populaire. Après des décennies de mensonges, beaucoup de citoyens ont perdu foi en la possibilité du changement. Notre responsabilité, en tant que force d’opposition, est de raviver cette flamme, de montrer qu’un autre avenir est possible, sans compromission.

Le Matin d’Algérie : Est-ce en raison de votre position actuelle en tant que principal parti d’opposition que vous êtes la cible de campagnes de déstabilisation ?

Atmane Mazouz : Absolument. Le pouvoir a toujours procédé par neutralisation : soit il absorbe les formations politiques, soit il les détruit. Le RCD a toujours refusé les compromis qui légitimeraient les fausses solutions. Ce positionnement ferme et sans ambiguïté dérange.

Les attaques que nous subissons ne sont pas le fruit du hasard. Elles sont organisées, systématiques : campagnes de dénigrement, manipulations judiciaires, surveillance, interdictions de réunion, pressions financières. Le régime cherche à nous isoler, à nous diaboliser, car il sait que nous portons une alternative structurée, crédible, enracinée dans l’histoire du pays.

Mais qu’il le sache : ni les intimidations, ni les montages médiatiques ne nous feront taire. S’ils s’acharnent à ce point, c’est parce que nous touchons un nerf à vif : leur illégitimité.

Pour d’autres qui prennent le relais des officines, on connait également toutes les connexions qui existent entre eux.

Que tous ceux-là se rassurent : l’Histoire a toujours réservé une place aux revendeurs de gloire usurpée et aux faussaires de convictions. Le RCD, lui, restera du côté de l’engagement, pas de la contrefaçon. Il ne sera pas l’étal de l’Altava, ni l’associé ou client de la SARL de l’insulte, ni le VTC du tourisme politique.

Libre à certains de monnayer les luttes qu’ils n’ont jamais menées, de travestir l’édition en officine d’insultes et l’engagement en fonds de commerce. Le RCD continuera à déranger ceux qui confondent imprimerie et imprécation. Il est plus grand que les boutiquiers de la polémique en faillite d’idées.

Le Matin d’Algérie : Quelle est votre analyse de la crise diplomatique entre l’Algérie et la France ?

Atmane Mazouz : La relation algéro-française est l’otage d’un double cynisme. D’un côté, une extrême droite qui instrumentalise la question algérienne pour contenir les flux migratoires et sécuriser ses intérêts. De l’autre, le régime algérien agite l’épouvantail colonial à chaque crise interne pour souder artificiellement une légitimité qu’il a perdue depuis longtemps.

Mais au fond, cette crise n’est pas diplomatique, elle est politique. Le pouvoir algérien n’a jamais eu de politique étrangère cohérente. Il réagit, il instrumentalise, mais il ne construit rien. Il en va de même pour sa diplomatie intérieure : elle est fondée sur le mensonge, la diversion, la répression.

L’Algérie a besoin d’un État fort par sa légitimité démocratique, pas par les postures martiales ou les rappels d’ambassadeurs. La souveraineté ne se proclame pas, elle se construit par la transparence, le débat et le respect des droits du peuple.

Le Matin d’Algérie : Quelle est la position officielle du RCD concernant l’affaire des archives, et que répondez-vous aux accusations ou interrogations qui entourent leur gestion ou leur utilisation ?

Athmane Mazouz : Le RCD a toujours été clair, constant et cohérent sur la question des archives : elles appartiennent à l’histoire vivante de ses militants, à leur engagement, à leurs sacrifices et à leurs combats. Elles sont le fruit d’une trajectoire politique assumée, forgée dans l’adversité et consolidée par une éthique militante.

Ceux qui s’agitent aujourd’hui autour de cette question — souvent exclus ou démissionnaires —, parfois avec une indignation aussi soudaine que sélective, ne cherchent ni la vérité, ni la mémoire. Ils tentent d’instrumentaliser un patrimoine politique qui appartient au parti.

Soyons clairs : le RCD n’a de comptes à rendre ni à des officines en mal de reconnaissance, ni à un groupuscule aux ambitions connues et douteuses, qui tentent de se draper dans les oripeaux d’une mémoire qu’ils n’ont ni construite ni défendue. Quand le RCD affrontait la répression, quand ses militants remplissaient les geôles et les tribunaux, où étaient donc ces nouveaux « gestionnaires de mémoire » ?

La mémoire ne s’achète pas, ne se monnaye pas et ne se confie pas à ceux qui n’en ont ni la légitimité ni la probité. Ce que certains appellent « archives » avec gourmandise, nous l’appelons histoire, conscience et continuité.

Le RCD a toujours œuvré à documenter son action, là où d’autres tentaient de l’effacer. Nous le faisons non pas pour flatter l’ego d’historiens d’occasion ou satisfaire la curiosité malsaine de certains frustrés, mais pour transmettre un héritage politique aux générations militantes à venir.

Nous ne céderons ni à la pression, ni à la diffamation, ni à la désinformation.
Enfin, à ceux qui rêvent de vider le combat démocratique de sa substance pour le réduire à des querelles de tiroirs et de cartons, nous disons ceci : pendant que vous fouillez une mémoire sélective, nous construisons l’avenir. Pendant que vous cherchez des anecdotes, nous écrivons une trajectoire.

L’histoire du RCD ne se consulte pas comme un vieux registre : elle s’incarne, elle se vit, et surtout, elle continue.

Le Matin d’Algérie : Comment expliquez-vous l’interdiction des marches du 20 avril, et quelles en sont les causes profondes ?

Atmane Mazouz : Le 20 avril est une date fondatrice, non seulement pour le combat amazigh, mais pour toute l’Algérie démocratique. Ce que le pouvoir craint, c’est la charge symbolique de cette date : elle renvoie à un soulèvement pacifique, légitime, qui a ébranlé l’ordre autoritaire sans armes, par la seule force de la conscience populaire.

L’interdiction des marches est l’aveu d’un régime aux abois, incapable de dialoguer, incapable d’écouter. Derrière cette interdiction, il y a la peur du précédent : si on laisse le 20 avril s’exprimer, demain ce sera le 5 octobre, le 22 février, le 14 juin… Toutes les dates de l’insubordination civique referont surface.

Ce régime ne veut pas de mémoire libre. Il veut une histoire officielle, aseptisée, où seuls ses symboles sont glorifiés et où les voix dissidentes sont effacées. C’est cette falsification que nous refusons.

Le Matin d’Algérie : Quelles mesures concrètes envisagez-vous pour défendre les droits des prisonniers d’opinion et des intellectuels, notamment dans le cas de Boualem Sansal ?

Atmane Mazouz : Le cas de Boualem Sansal est un tournant. Ses propos sont inacceptables et l’incarcérer ne peut être la solution. Nous ne devons pas aller jusqu’à la logique d’épuration intellectuelle.

Pour la défense des droits, nos mesures sont à plusieurs niveaux : juridique, en accompagnant les avocats et en défendant chaque cas devant les instances concernées ; politique, en imposant la question des prisonniers comme une priorité dans tout débat public ; et diplomatique, en mobilisant les soutiens partout où c’est possible.

Mais surtout, nous disons clairement : il n’y a pas d’apaisement possible tant que des hommes et des femmes sont derrière les barreaux pour avoir pensé, écrit, ou rêvé autrement. L’amnistie, la vraie, ce sera celle des idées.

Le Matin d’Algérie : La diaspora algérienne joue un rôle clé dans vos efforts de mobilisation. Comment travaillez-vous avec elle pour soutenir les mouvements démocratiques en Algérie ?

Atmane Mazouz : La diaspora est un poumon vital pour notre combat. Elle a la liberté de parole que l’on nous refuse ici. Elle est aussi un laboratoire d’idées. C’est dans la diaspora que se développent souvent les réflexions les plus audacieuses sur l’avenir du pays. Nous œuvrons à structurer ces forces, à les rassembler, à les faire converger avec les luttes locales. La rupture démocratique viendra aussi de cette synergie.

Notre objectif est aussi d’exposer notre vision et nos priorités, organiser des mobilisations et construire des passerelles politiques avec d’autres forces progressistes dans le monde. La diaspora, ce n’est pas un exil passif, c’est une extension active de notre combat démocratique.

Le Matin d’Algérie : Quels sont vos projets à long terme pour le RCD et votre vision pour l’avenir politique de l’Algérie ?

Atmane Mazouz : Notre projet pour le RCD est simple : le préparer à gouverner demain. Cela passe par la formation d’une nouvelle génération de militants, par la rénovation de notre discours et par une ouverture accrue vers les forces de la société civile.

Pour l’Algérie, notre vision est celle d’un État laïc, démocratique et social, respectueux de sa diversité culturelle, garant de l’égalité entre les sexes, protecteur des plus vulnérables. Nous voulons sortir de l’économie de rente et reconstruire sur les bases du savoir, de la création et de la responsabilité.

Il faudra du courage, mais aussi de la méthode. La transition ne se décrète pas, elle se construit par étapes, avec des garanties et avec le peuple comme acteur central, jamais comme spectateur.

Le Matin d’Algérie : Un dernier mot peut-être ?

Atmane Mazouz : Oui. À ceux qui croient pouvoir faire taire le RCD par l’intimidation, je dis ceci : vous vous trompez d’époque. L’Algérie a changé. Vous ne tenez plus que par la peur, mais cette peur s’érode. Vos mensonges ne vous sauveront pas de la vérité.

Notre peuple a montré, par le Hirak, par le 20 avril, par octobre 88, par chaque élan de dignité, qu’il ne renonce jamais. Il faut maintenant traduire cette volonté en action politique durable. Le RCD est prêt à en être l’outil. Mais c’est ensemble que nous arracherons la liberté.

Entretien réalise par Brahim Saci

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« Les larmes de Jimmy », le récit de voyage en Algérie de Marcus Hönig

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Les larmes de Jimmy
Couverture du livre "Les larmes de Jimmy" de Marcus Hönig

De son Ardèche qui a été le cœur battant de bien des luttes, Marcus Hönig est allé, en août 2024, prendre avec une certaine gourmandise le soleil d’Algérie. Le jardinier et auteur à ses heures inspirées voulait surtout découvrir ce pays avec lequel la France était en froid. Il en revient avec un livre, « Les larmes de Jimmy », un récit de voyage en Algérie à « hauteur d’hommes ». Puissant et sincère.

Tout est dans la sobriété dans l’écriture de Marcus Hönig. L’écriture est ciselée et les épanchements sont à minima pour laisser place aux rencontres avec les Algériens.nes.

Le livre est une promesse tenue. Car les nombreux Algériens que Marcus a rencontrés ont insisté : « Raconte aux autres dès ton retour ce que tu as vu, ce que tu as entendu ». Ce message lancé comme une bouteille à la mer dit tout le désespoir d’un peuple qui a le sentiment qu’il est seul, abandonné à son sort face à un régime autoritaire.

Le récit commence le 6 août sur le bateau qui s’ébranle du port de Marseille. Marcus se frotte déjà savoureusement aux premières rencontres. Entre Marseille et Alger, le premier enchantement opère avec la rencontre de Sarah. L’auteur lui confie son projet de traverser l’Algérie. Elle eut cette sentence imparable : « Traverser l’Algérie ! Marcus, mais c’est l’Algérie qui va te traverser ! » La prophétie de Sarah, la fille des deux déserts, se réalisera », écrit Marcus Hönig.

Les paragraphes courent de lieux et de rencontre en surprise. Rien ou presque n’échappe au regard de l’auteur. Alger, Bejaia, Tigzirt, puis retour à Alger. Chaque halte est une station de rencontres tantôt truculentes et tantôt déchirantes. L’auteur voulait aller plus loin, visiter encore plus de régions, pousser jusqu’à Ghardaia, mais ce n’est pas pas possible. On ne visite pas l’Algérie en 10 jours, surtout quand on aime observer la vie des autres et discuter avec les gens comme Marcus Hönig.

Ecrit sous forme d’un journal, ce livre raconte avec un souci de retenue et d’exactitude ce que l’auteur a vu et entendu. Sa prudence confine parfois à la candeur. Il n’y a dans ce récit nul conseil, ni recette pour touristes. Que du vécu brut. Pur. Nul jugement non plus, ni à priori ne transpire des 170 pages.

L’auteur y a transcrit chaque moment, chaque halte ou rencontre avec ce souci de compréhension particulièrement désarmant.

Ce livre est un vrai régal. Un voyage initiatique dans un pays qui a une folle soif de se découvrir et de s’affranchir de l’insoutenable poids des interdictions qui castre son envie de création et de liberté. Les larmes de Jimmy est une main tendue d’un Français qui découvre les Algériens et leur terre. Mais aussi un miroir qui nous renvoie avec un luxe de justesse ce que nous sommes.

Les larmes de Jimmy s’achève le 18 août à Marseille. Entretemps, l’auteur aura vécu mille vies et été traversé de mille sentiments empreints parfois de joie et de déchirements.

Hamid Arab

Les larmes de Jimmy, de Marcus Hönig.

Marcus Hönig est l’auteur de deux autres ouvrages : Planète verte et Continuer d’aimer.

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Peut-on débattre ?

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Image par Christine Sponchia de Pixabay

Est-ce une malédiction ou une bénédiction de ce qu’il arrive en Algérie ? Sommes-nous condamnés à subir l’histoire depuis des siècles, sans lever la tête pour dire les choses à nous-mêmes avant de les dire aux autres ? Nous avons une grande part de responsabilité à l’égard de notre histoire et de nos ancêtres !

Nous assistons malheureusement, les mains croisées, à une rupture historique dans notre propre anthropologie. Si nous abordons uniquement les deux derniers siècles, les questions qui empoisonnent nos débats sont : la religion, le nationalisme et l’identité. Je regarde avec amertume des débats dans médias ici et là où sont exprimées des âneries pseudo-scientifiques, piétinant le principe même de l’épistémologie scientifique, confondant ainsi le raisonnement scientifique et l’opinion politique. Un scientifique peut-il affirmer une vérité absolue ? 

Il semble que nous nous trouvons dans une situation où les confrontations d’idées n’ont ni tête ni queue, où les débats nécessaires pour avancer sont comme des mirages inaccessibles. Au moment où l’espace de la parole libre se rétrécit et celui du « clash » s’étale à l’ensemble des catégories sociales algériennes, le débat d’idées s’appauvrit.

Nous n’avons plus de débats d’idées, mais des débats de « convictions ». On n’interroge plus le « système », mais les « sujets » (concept d’Alain Touraine). Nous n’essayons plus de comprendre l’histoire, mais nous l’utilisons pour juger, condamner et mettre au pilori les rares personnes qui tentent d’alimenter le débat ! Kamel Daoud, Boualem Sansal, Said Sadi, Nordine Boukrouh, etc. La liste est longue. Ils essaient chacun à leur niveau d’animer les débats intellectuels sur la société algérienne. Cependant, certains intellectuels ne débattent pas des idées, mais jugent les porteurs d’idées et les mettent au pilori (de trahison, de complicité, etc.).

Quand je lis qu’un écrivain s’est inspiré d’une histoire réelle pour écrire un roman, je me demande : quel auteur ne s’est pas inspiré de la réalité pour construire une romance, un imaginaire ? L’acte d’écriture reste fastidieux et personnel, il nécessite des compétences linguistiques et intellectuelles très personnelles.

Comment peut-on réduire un livre de plusieurs centaines de pages à un plagiat ? Le plagiat consiste à reproduire à la lettre l’écriture de l’autre. Nous avons déjà entendu ces accusations à l’encontre d’écrivains comme Yasmina Khadra, Boualem Sansal (pour 2084), etc. Quelle malédiction touche notre élite ! Faut-il briller dans le cadre nationaliste du moment !

Certes, l’histoire coloniale de l’Algérie a laissé des cicatrices profondes, marquées par la méfiance envers les institutions et une peur de la répression. Cette méfiance a contribué à une culture du silence où les vrais débats sont souvent évités pour préserver la stabilité apparente. Mais jusqu’à quand ? Attendons-nous l’arrivée d’une nouvelle génération formatée par l’idéologie « révisionniste » de notre histoire au point de prétendre une identité qui n’est pas la nôtre ? Les sciences humaines et sociales, enseigné en Algérie, abdiquent-elles (ont-elles abdiquées) devant la pensée religieuse et révisionniste ?

L’absence de débat et/ou la répression politique joue un rôle déterminant dans l’embarras à aborder les questions sensibles, mais fondamentales pour construire un État fort et stable. Les médias, souvent (sous) contrôlés par le pouvoir politique, évitent les sujets controversés pour éviter la censure ou les représailles.

Par ailleurs, les normes sociales et culturelles favorisent la conformité et découragent l’expression d’opinions divergentes et critiques. L’obstruction des pouvoir publique (sous influence du discours nationalistes et religieux) d’aborder les vrais problèmes entraîne une stagnation du développement social.

Les questions telles que la stabilité de l’État, la séparation des pouvoirs, une justice indépendante, les droits des femmes, la liberté d’expression, etc., et les réformes de l’Etat restent en suspens, freinant le progrès de la société.

Lorsque les vrais problèmes sont ignorés, la confiance des citoyens envers les institutions et les dirigeants politiques s’érode. Cette perte de confiance peut mener à un désengagement civique et à une montée du cynisme, créant un cercle vicieux de méfiance et d’inertie.

Le manque de courage pour aborder les vraies questions de société en Algérie est un obstacle majeur au développement du pays. Toutefois, en reconnaissant les origines et les racines de ce problème et en saisissant les opportunités pour le surmonter, l’Algérie peut espérer un avenir où les débats ouverts et honnêtes sont la norme, et où le progrès culturel, social, économique et la réconciliation avec son identité est à la portée de tous ses citoyens. Un vœu pieux !

Y. Haddar

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Ligue des champions : la fin de la frustration du Paris Saint-Germain version Qatar ?

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PSG fan zone

Le PSG, propriété depuis 2011 de Qatar Sports Investments, est en passe de remporter sa première C1 face à l’Inter Milan samedi 31 mai. Retour sur plus d’une décennie de frustrations pour le club de la capitale.

Messi, Neymar, Mbappé, Beckham, Ibrahimovic, Lavezzi, Cavani, Di Maria, Hakimi, Silva, Verratti, Moura, Choupo-Moting. La liste des cadors du ballon rond passés par le PSG est pléthorique depuis l’arrivée du Qatar comme investisseur.

Mais jusqu’à présent, l’objectif initial de soulever au plus vite la Coupe aux grandes oreilles n’a pas été atteint. Si le PSG est passé tout près en 2020, à Lisbonne, face au Bayern Munich en finale (0-1) d’un Final four exceptionnel en temps de Covid 19, il y a eu beaucoup de désillusion en C1. 

« Remontada » et claque face aux Red Devils

Le PSG avait touché le fond lors de la première décennie sous l’ère qatari, le 8 mars 2017, avec l’impensable « remontada » (remontée) du FC Barcelone (victoire 6-1 après une défaite 0-4 à Paris à l’aller) au Camp Nou. Une histoire qui colle au PSG comme un chewing-gum sous la chaussure. Et même si le PSG soulève le trophée face aux Italiens, cet épisode restera à n’en pas douter gravé dans toutes les mémoires. À l’époque, les Barcelonais étaient entraînés par un certain Luis Enrique… Jamais un tel renversement n’avait eu lieu dans la formule rénovée de la Ligue des champions. Messi, Neymar et Suarez avaient marché sur l’eau. Le PSG avait coulé. 

Autre épisode mémorable, le huitième de finale retour en 2019 de la formation entraînée par l’Allemand Thomas Tuchel, victorieuse 2-0 à Old Trafford lors de la manche aller, finalement sortie du tournoi par les Red Devils au Parc des Princes (3-1). Paris est la première équipe dans l’histoire de la Ligue des champions à être éliminée malgré une victoire 2-0 à l’extérieur à l’aller.

Pour la troisième saison d’affilée, le PSG version qatarie n’atteignait pas les quarts de finale de la Ligue des champions. Choisi pour remplacer le coach espagnol Unai Emery (2016-2018), Thomas Tuchel devait aider les joueurs parisiens à mieux appréhender les rendez-vous européens. À 41 ans, le respectueux gardien italien Gianluigi Buffon, recruté à l’été 2018 pour apporter son expérience et sa culture de la gagne au PSG, n’avait pas fait l’affaire.

« C’est inadmissible, avait commenté Marquinhos. Encore une fois, au même moment de la saison, on commet les mêmes erreurs et on se fait pénaliser. Ça fait des années qu’on se fait manger à ce moment de la saison. » Malgré les dépenses énormes consenties pour le recrutement de Neymar et Kylian Mbappé à l’été 2017, plus de 400 millions d’euros, le PSG de Nasser Al-Khelaïfi se prenait une nouvelle fois les pieds dans le tapis. 

Demba Ba, le bourreau

Le PSG a aussi connu des fins de partie compliquées et dévastatrices. En 2014, Demba Ba qualifie Chelsea. Cette année-là, le PSG, entraîné par Laurent Blanc, est au stade des quarts de finale. Les Parisiens l’emportent 3-1 à domicile. Mais, au match retour, le PSG s’incline finalement 2-0 en Angleterre. Le but de la qualification pour Chelsea est inscrit par l’ancien international sénégalais à la 87e minute à Stamford Bridge sous les yeux du tacticien José Mourinho. Les Blues valident leur place dans le dernier carré, malgré un déficit de deux buts.

Avec son projet sportif renouvelé, beaucoup considèrent que le PSG version 2024-2025 est désormais en passe de réaliser son objectif. « C’est l’une des meilleures équipes d’Europe », a reconnu Arne Slot, l’entraîneur de Liverpool, après son élimination face au PSG lors des huitièmes de finale, après la séance des tirs au but. 

En battant Arsenal dans le dernier carré, le Paris Saint-Germain va-t-il briller lors de la deuxième finale de son histoire face à l’Inter Milan après des années de déceptions européennes ? « Paris n’est plus une collection de coûteuses images Panini qui attirent l’attention mais ne garantissent pas de titres. Il est une équipe où le collectif compte et où personne n’est assuré d’une place ni d’un rôle classique défini », a écrit La Gazzetta dello Sport.

RFI

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Khaled Bouali, le souffle tragique d’un théâtre étouffé

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Khaled Bouali
Khaled Bouali, un dramaturge né dans les limbes des Aurès.

 Quatre années depuis que Khaled Bouali, dramaturge, poète, nouvelliste et veilleur d’ombres, a quitté la scène de ce monde. Son fils Amedyaz écrivait alors : « Depuis une heure et demie, mon père, mon modèle, mon maître, est passé de la vie à la mort… Ses idées, son savoir, ses expériences ont disparu avec lui. »

Et pourtant, ses mots restent. Vivants. Vifs. Incisifs. Comme une pièce en suspens, dont le dernier acte ne se jouera peut-être jamais.

Dans cet entretien inédit, Khaled Bouali nous parlait avec la franchise blessée de ceux qui ont trop vu, trop espéré, trop attendu.

Le théâtre, ce peuple debout

« Cela dépend de l’état d’âme… mais en tant que citoyen algérien, pris dans le tumulte, je reviens toujours au théâtre, cet art qui se frotte à la vie, à la sueur du peuple», nous disait-il.

Khaled Bouali n’écrivait pas pour plaire. Il écrivait pour témoigner, pour déranger. Enseignant à l’université, puis à l’École des arts dramatiques de Batna, il croyait dans le verbe incarné, dans la scène comme lieu de lutte.

Jugurtha : l’histoire muselée

L’un de ses textes majeurs, Jugurtha, a bien failli ne jamais voir le jour.

Khaled Bouali racontait dans un entretien inédit : « Le théâtre régional de Batna me l’a commandé dans le cadre de ‘Alger, Capitale de la culture arabe’. Mais on m’a imposé un mois et demi de délai, en arabe classique. On voulait m’empêcher d’écrire. J’ai accepté le défi»

Le texte est livré. La pièce est jouée. Mais très vite, le silence. Pas de tournée, pas de festival, pas de prix. « On a supprimé le prix de la création du texte, alors qu’il s’agissait de la seule œuvre originale de l’année», avait-il souligné.

Et pourtant, ce Jugurtha-là parlait aux vivants.

« Il y a bien sûr de la fiction, comme dans toute œuvre. Mais le héros numide y est convoqué dans toute sa grandeur tragique. »

Un livre, un cri

En 25 ans, Khaled Bouali n’a publié qu’un seul recueil : El Bab el Akher (La Dernière Porte), aux éditions Chihab. « Ce livre marque, à mon humble avis, un tournant dans la nouvelle arabe contemporaine. »

Ses autres textes, poèmes et pièces, attendent encore. En vain. « Les éditeurs évitent ce qui ne rapporte pas : poésie, théâtre. Le vrai problème, c’est l’absence d’une politique culturelle digne de ce nom», nous avait-il confié

L’homme de la place publique

À Batna, à Alger, on l’a vu en première ligne à des sit-in d’artistes. Parfois accusé d’être meneur, toujours solidaire.

« Nos revendications ? Un changement radical. Théâtre, cinéma, radio, télévision : il faut tout repenser. Redonner sa place à l’artiste», crânait-il avec conviction.

À Alger, devant le Théâtre national, il réclame haut et fort : « Un statut pour l’artiste. Et des hommes compétents, engagés. Je n’ai jamais compris cette hypocrisie autour de la Journée de l’artiste, alors que ses droits sont bafoués. »

Un rêve à voix haute

Lui, l’écrivain rétif aux honneurs, se permet un vœu fou :

« Je voudrais être président. Ou ministre de la Culture. Ou directeur du TNA. Sans prétention. Juste pour montrer que le changement est possible. Depuis l’indépendance, on attend. »

Il disait cela sans amertume, sans orgueil. Comme un homme qui croit encore que l’art peut sauver ce qu’il reste à aimer.

Portrait d’un passeur de mémoire

Khaled Bouali se définissait ainsi, sur les réseaux sociaux : « Zamil fi al-wujoud – un compagnon d’existence, venu dans ce monde sans le vouloir. »

Mais ce monde, il l’a traversé les yeux ouverts, le cœur cabossé, la langue en feu.

Aujourd’hui, ses mots nous reviennent comme une musique lointaine, entre théâtre tragique et chronique lucide. Ils nous rappellent que certains artistes ne quittent jamais vraiment la scène. Ils demeurent dans le silence des coulisses, dans la mémoire des justes, dans la respiration des lecteurs.

Khaled Bouali, dramaturge oublié par l’institution, mais célébré par ceux qui savent écouter l’histoire autrement.

Djamal Guettala  

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Jil Jadid : dénoncer le mal vous mène en prison !

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Prison
Les prisons algériennes sont remplies de détenus d'opinion.

Jil Jadid informe l’opinion publique que Mme Nahima Abbad, secrétaire nationale et coordinatrice de la wilaya de Tipaza du parti, vient d’être condamnée à une année de prison ferme en comparution immédiate à la suite d’une plainte du président de l’APC de Fouka.

Madame Abbad est, depuis plusieurs années, une lanceuse d’alerte concernant la gestion de sa commune de résidence. Elle interpelle les autorités locales par vidéos sur les réseaux sociaux pour dénoncer les failles de gestion tant au plan de l’hygiène publique désastreuse que des différents chantiers locaux douteux qui défigurent le centre-ville depuis plusieurs années devenu impraticable. 

Son tort est d’être sur le terrain avec les citoyens et d’affronter avec des mots les responsables locaux incapables d’agir devant les fléaux que subit sa ville.

Mme Abbad n’est accusée ni de corruption, ni de détournement, ni de malversation. Elle a été condamnée à un an de prison ferme car le PAPC s’est senti atteint dans son amour propre et s’en est plaint auprès du Procureur. Au lieu de prendre ses responsabilités et de résoudre les vrais problèmes dont il a la charge, il s’est abrité derrière le titre de sa fonction pour se venger d’une femme honnête et patriote.

Si le ton qu’elle peut prendre ne plaît pas, cela s’explique amplement par la gabegie, les gestions douteuses et la situation calamiteuse voire catastrophique de la ville. Au lieu d’ouvrir des enquêtes sérieuses sur cette mauvaise gestion, les autorités locales ont préféré punir une citoyenne modèle qui, sous d’autres cieux, aurait eu une médaille du mérite.

Bien entendu, le cas de Madame Abbad n’est pas isolé. Ce n’est ni le premier, ni apparemment le dernier. Les plus hautes autorités du pays devraient normalement s’alarmer de voir ces citoyens qui sont engagés pour le changement subir de tels traitements qui au final poussent à la démission générale. 

La pression exercée sur tous les militants, la neutralisation des médias, la judiciarisation des actes politiques n’augurent en rien d’une stabilité de l’État mais au contraire sont en train de démoraliser la nation et de semer les germes de la contestation.

Jil Jadid refuse et dénonce cette logique du rapport de force contre les citoyens et assure Mme Nahima Abbad de son soutien actif face à cette pénible et injuste condamnation.   

Le Président,

Soufiane Djilali

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Amine Kessaci : « Il faut que la France et l’Europe agissent maintenant à Gaza »

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Amine Kessaci
Amine Kessaci de Europe Ecologie les Verts

C’est sous l’Ombrière du Vieux-Port de Marseille qu’Amine Kessaci, pour Europe Écologie – Les Verts PACA, a pris la parole aux côtés des communistes et des socialistes pour dénoncer les bombardements à Gaza et défendre la cause palestinienne.

À ses yeux, le gouvernement d’extrême droite de Benyamin Netanyahu mène un génocide, et la France comme l’Union européenne doivent cesser de détourner le regard. Dans cet entretien, le militant écologiste appelle à la reconnaissance immédiate de l’État palestinien, à la suspension des accords UE-Israël, à l’arrêt des livraisons d’armes, et à une réponse politique forte. Il se dit fier que les écologistes, de Marseille à Bruxelles, soient « au rendez-vous de l’Histoire ».

Le Matin d’Algérie : Quel message vouliez-vous faire passer en prenant la parole aux côtés des communistes et des socialistes sur la question palestinienne ?

Amine Kessaci : Lors de ce rassemblement le message était clair, la justice n’est pas à géométrie variable pour les écologistes que je représentais. Mais surtout il était important de nommer l’horreur que le gouvernement d’extrême droite de Netanyahu : un génocide.

Le Matin d’Algérie : Vous parlez de génocide à Gaza : pourquoi est-il essentiel d’employer ce terme aujourd’hui ?

Amine Kessaci : Il est important pour plusieurs raisons, le pire que l’humanité puisse commettre est en cours en Palestine, nommer ce massacre en génocide est un fait et surtout cela permettra au moment voulu de condamner les auteurs.

Le Matin d’Algérie : Que changerait concrètement la reconnaissance de l’État palestinien par la France et l’Union européenne ?

Amine Kessaci : La reconnaissance de l’Etat palestinien est une urgence tant pour permettre à ce pays d’intenter des recours auprès des institutions internationales mais surtout il est une urgence car le projet du gouvernement d’extrême droite de Netanyahu est de rayer Gaza de la carte, reconnaitre un Etat c’est reconnaitre des frontières aussi.

Le Matin d’Algérie : Pourquoi demandez-vous la suspension des accords UE-Israël ? Quels impacts cela pourrait-il avoir ?

Amine Kessaci : L’Europe ne peut pas condamner d’un coté la Russie et de l’autre fermer les yeux sur ce que fait Israël. L’Europe doit défendre la même justice partout où elle intervient.

Le Matin d’Algérie : Quel rôle les écologistes doivent-ils jouer face à ce drame humanitaire ?

Amine Kessaci : Les écologistes se sont rendus en délégation en Cisjordanie mais les écologistes doivent comme nous le faisons au Parlement européen avec Marie Toussaint défendre le droit international et comme nous le faisons à l’assemblée nationale avec Sabrina Sebahi.

Le Matin d’Algérie : Pensez-vous que la France a une responsabilité dans le maintien ou l’aggravation de la situation à Gaza ?

Amine Kessaci : Je pense que, qui ne dit rien consent.

Le Matin d’Algérie : Comment réconcilier engagement local à Marseille et solidarité internationale ?

Amine Kessaci : Marseille n’est pas fâchée avec la solidarité internationale au contraire nous en sommes au cœur, je me souviens lorsque le Liban était en feu les bateaux partaient du port de Marseille acheminent secouristes, matériels etc. La Mairie de Marseille fera voter en juin une nouvelle subvention, c’est un pas de plus.

Le Matin d’Algérie : Que répondez-vous à ceux qui craignent une politisation excessive de la question palestinienne ?

Amine Kessaci : C’est la politique qui a conduit à cette situation, c’est donc à la politique de la régler. N’oubliez pas des vies humaines en dépendent.

Entretien réalisé par Djamal Guettala

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Légende et histoire : Le mausolée de Sidi Zarzour, gardien des Zibans

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Le mausolée de Sidi Zarzour, gardien des Zibans
Le mausolée de Sidi Zarzour, gardien des Ziban

Au cœur des Zibans, région lumineuse et mystérieuse, se dresse le mausolée de Sidi Zarzour, sanctuaire chargé d’histoire et de spiritualité. Bien plus qu’un simple monument, il incarne l’âme de Biskra et témoigne de la foi profonde des habitants, défiant depuis des siècles les forces impétueuses de la nature.

Né au XIe siècle, Sidi Zarzour fut un érudit mystique dont la sagesse traversa le temps. Avant de mourir, il prophétisa que son tombeau, bâti sur le lit de l’oued Biskra, résisterait aux crues, provoquant la division des eaux pour contourner sa sépulture. Ce miracle naturel lui valut le surnom de « Quassam el-Ouidane », le « Coupeur de Rivière ».

Chaque crue semble confirmer cette légende : la rivière se scinde pour préserver le mausolée, symbole d’une foi capable de dompter la nature. L’architecture sobre et élégante du lieu, aux teintes blanches et vertes, s’intègre harmonieusement au paysage aride des Zibans, incarnant la fusion entre l’homme, la nature et le sacré.

Ce sanctuaire attire pèlerins et fidèles en quête de protection et de bénédiction. Au fil des générations, il est devenu un refuge spirituel où le temps suspend son cours et où l’on trouve la paix intérieure.

Ma visite en avril, sous le souffle chaud du désert, m’a révélé la puissance de ce lieu. Le lit de l’oued, calme à cette saison, évoquait la promesse du « Coupeur de Rivière » : la certitude que la force des eaux pluvieuses se plie à la volonté divine. Face au mausolée, j’ai ressenti cette présence intemporelle, cette bienveillance qui protège et apaise.

Depuis 2012, le « Maoussem Sidi Zarzour » célèbre chaque décembre cette mémoire vivante, mêlant traditions, chants et danses dans une fête populaire qui ravive l’esprit des Zibans.

Le mausolée de Sidi Zarzour demeure ainsi un gardien éternel, protecteur d’une terre sacrée, symbole de résilience, de foi et d’héritage culturel, inspirant les croyants et voyageurs en quête de lumière et de réconfort.

Djamal Guettala  

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Un prix national et une école de cinéma en hommage à Mohammed Lakhdar-Hamina

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Prix Mohammed Lakhdar Hamina.
Un Prix Mohammed Lakhdar Hamina institué.

Une cérémonie d’hommage a été organisée, jeudi 29 mai, à l’Opéra d’Alger Boualem-Bessaïeh, en mémoire du réalisateur Mohammed Lakhdar-Hamina, disparu, vendredi 23 mai, à l’âge de 91 ans. L’événement a été marqué par deux annonces majeures destinées à inscrire durablement l’œuvre du cinéaste dans le paysage culturel national : la création d’un prix du cinéma portant son nom et la baptisation de l’Institut national supérieur du cinéma de Koléa à son honneur.

Le ministre de la Culture et des Arts, Zoheir Bellou, a officiellement annoncé la mise en place du Prix Mohammed Lakhdar Hamina pour la créativité cinématographique. Cette distinction, attribuée chaque année, récompensera les meilleures œuvres dans les domaines de la réalisation, du scénario, de la photographie et du théâtre filmé. Le ministre a précisé que ce prix vise à encourager la création cinématographique nationale et à accompagner les talents émergents dans un esprit de continuité artistique.

Dans le même élan, le chef de l’Etat a décidé de donner au principal établissement de formation en cinéma du pays, situé à Koléa, le nom de Mohammed Lakhdar-Hamina. Une manière, selon le ministère, de reconnaître de son vivant la contribution exceptionnelle du cinéaste à la culture algérienne et à son rayonnement à l’international.

Réalisateur de « Chronique des années de braise », unique film algérien à avoir remporté la Palme d’or au Festival de Cannes (1975), Lakhdar-Hamina laisse une œuvre dense et engagée, saluée pour sa portée artistique et historique. Sa carrière a également été marquée par un fort engagement dans la formation et la promotion du cinéma algérien.

La cérémonie s’est clôturée par la projection du film restauré « Chronique des années de braise », en présence de nombreuses personnalités du monde politique, culturel et artistique, ainsi que des proches du défunt.

La rédaction

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