Eric Zemmour, le chef de Reconquête, repart en guerre contre l'Algérie.
Le polémiste d’extrême droite Éric Zemmour a profité du spectaculaire cambriolage du musée du Louvre pour relancer son discours anti-immigration, ciblant une fois de plus la communauté algérienne en France. Décidément, Zemmour est en manque de carburant !
L’affaire, qui a secoué Paris la semaine dernière, concerne un vol audacieux : quatre individus ont réussi à s’introduire dans le musée le plus célèbre du monde et à dérober, en à peine huit minutes, huit bijoux de la couronne estimés à près de 88 millions d’euros. Deux suspects ont été arrêtés : l’un d’origine algérienne, interpellé à l’aéroport Charles-de-Gaulle alors qu’il s’apprêtait à embarquer pour Alger, l’autre d’origine malienne.
Sans attendre les conclusions de l’enquête, Eric Zemmour saisit l’occasion pour en faire un symbole de sa rhétorique identitaire surannée. Invité sur France 3, le très agité chef du parti Reconquête a lancé : « L’immigration vole les joyaux de la couronne française. » Epatante sortie de cette individu en mal de lumière médiatique.
Sur la plateforme X (ancien Twitter), il a ajouté : « L’Algérie entre en scène dans la saga du Louvre. L’immigration vole nos trésors, notre civilisation. C’est le djihad quotidien. »
Ces propos, jugés incendiaires, ont déclenché une vague de réactions indignées. Journalistes, militants et internautes ont accusé Zemmour d’attiser la haine et de détourner l’attention des véritables crises que traverse la France : inflation, chômage, logement et montée de la précarité.
« À chaque fait divers impliquant un immigré, Zemmour ressort les mêmes obsessions », dénonce une élue de Seine-Saint-Denis. « Mais il se tait face aux violences policières ou aux scandales d’État. »
Nombreux sont ceux qui ont rappelé que le Louvre lui-même abrite des milliers d’œuvres pillées pendant la période coloniale, notamment en Afrique du Nord et en Asie.
« Parler de vol de civilisation quand le musée expose des objets arrachés à l’Égypte, au Bénin ou à l’Algérie relève du cynisme », a commenté un internaute.
Zemmour, déjà condamné à plusieurs reprises pour provocation à la haine raciale, multiplie depuis des années les attaques contre les Algériens. En 2021, il avait affirmé que « la guerre d’Algérie n’était pas terminée » et que la France devait « reconquérir son identité ».
Sa rhétorique, nourrie d’une nostalgie coloniale assumée, s’essouffle pourtant. Si elle séduit un noyau dur d’électeurs, elle lasse une opinion publique préoccupée par d’autres urgences. Certains analystes estiment que Zemmour, faute de projet politique, mise sur le choc médiatique pour exister.
Dans les banlieues françaises, ses propos ravivent un sentiment d’exclusion. « On travaille, on étudie, on vit ici, et pourtant on reste les boucs émissaires », confie un jeune Français d’origine algérienne à Marseille.
Alors que l’enquête sur le braquage du Louvre se poursuit, les mots de Zemmour rappellent combien le débat sur l’immigration en France reste piégé par les vieilles rancunes de l’histoire coloniale. Entre peur et populisme, la haine devient un fonds de commerce politique — et chaque fait divers, un prétexte à rejouer l’éternel procès de l’Autre.
La Cour d’appel de Tunis a reporté au 17 novembre 2025 l’examen en appel du dossier dit du “complot contre la sûreté de l’État”. Cette affaire emblématique, qui implique près de quarante opposants tunisiens, symbolise aujourd’hui la dérive autoritaire de Kaïs Saied et la mise au pas d’une justice.
Parmi les accusés figurent d’anciens ministres, des dirigeants de partis politiques, des militants et des figures médiatiques. En avril dernier, le tribunal de première instance avait prononcé des peines allant de quatre à soixante-six ans de prison, dans un verdict jugé “inique et politique” par la défense. Les avocats dénoncent depuis un procès “taillé sur mesure pour écraser l’opposition”.
Une audience reportée dans le flou et la tension
Selon Me Mohamed Ali Bouchiba, membre du collectif de défense, l’audience d’appel prévue le 27 octobre s’est tenue “dans des conditions opaques et irrégulières”. “Les accusés en liberté n’ont pas été convoqués dans les formes légales, tandis que les détenus n’ont pas été extraits de leurs cellules sans explication de l’administration pénitentiaire”, a-t-il précisé à ultra Tunisie. Le report de la séance au 17 novembre a donc été décidé, faute de présence effective des parties.
La tension était palpable aux abords du palais de justice, placé sous haute surveillance policière. Des avocats et journalistes, y compris ceux de l’agence officielle TAP, ont été empêchés d’accéder à la salle d’audience. Face à cette situation, le bâtonnier Boubaker Ben Thabet a décidé de suspendre toute participation des avocats à la procédure jusqu’à correction des irrégularités et respect des principes d’un procès public.
Une justice à huis clos et un peuple en colère
À l’extérieur du tribunal, les familles des détenus et de nombreux militants ont tenu une manifestation pacifique pour réclamer la fin des procès “à distance” et l’ouverture d’une audience publique et contradictoire. Sur les pancartes et dans les chants, les slogans fusaient : “جلسة حضورية حق موش مزية” (“Une audience publique est un droit, pas une faveur”) ou encore “لا عدالة لا قانون شرفاء في السجون” (“Pas de justice, pas de loi, les honnêtes gens sont en prison”).
La militante Chayma Issa, poursuivie elle-même dans ce dossier, a fustigé une “politique d’intimidation et de harcèlement”. “Les accusés, qu’ils soient libres ou incarcérés, subissent un déni de justice. Nous vivons dans la peur, le chantage et la répression”, a-t-elle déclaré. De son côté, Mounia Ibrahim, épouse du détenu politique Abdelhamid Jelassi, ancien dirigeant du parti Ennahdha, a dénoncé “un procès fabriqué de toutes pièces”. Elle a appelé à ce que “les audiences soient retransmises à la télévision publique, financée par les impôts des Tunisiens”.
Des réactions politiques et juridiques en chaîne
Les réactions n’ont pas tardé. Le Parti des travailleurs a dénoncé une “mascarade judiciaire” et un “instrument de vengeance politique”. Le Courant démocratique et le Parti républicain ont parlé d’“une justice aux ordres”, accusant le régime de Kaïs Saïed d’utiliser les tribunaux pour neutraliser toute voix dissidente.
Des juristes ont également pris la parole pour alerter sur la dérive. Sana Ben Achour, professeure de droit public, s’est interrogée dans une tribune sur le sens de ces détentions prolongées et de ces procès d’exception : “Nous assistons à une violation systématique du droit à la défense, au nom d’une raison d’État devenue outil de répression. Les lois d’exception défigurent le droit pénal et piétinent la dignité humaine.”
Un tournant inquiétant pour les libertés en Tunisie
Adopté durant la pandémie de Covid-19, le décret autorisant les procès à distance sert désormais à juger des opposants politiques, sans confrontation directe avec les juges. Pour la défense, ce dispositif, détourné de son objectif initial, “instaure une justice virtuelle et autoritaire”.
Au-delà de cette affaire, c’est toute la question de la séparation des pouvoirs et de la liberté d’expression qui se pose dans une Tunisie de plus en plus verrouillée. Six ans après son arrivée au pouvoir, Kaïs Saïed concentre entre ses mains les leviers exécutif, législatif et judiciaire. Les procès politiques, les arrestations arbitraires et le musellement des médias rappellent, pour beaucoup d’observateurs, les heures sombres de l’autoritarisme d’avant 2011.
En Tunisie, l’autocrate Kaïs Saied fait désormais consensus contre sa personne. Et la “cause du complot” n’est plus seulement une affaire judiciaire. Elle est devenue le miroir d’une démocratie en péril, où les opposants politiques, les avocats et les journalistes paient le prix d’avoir voulu défendre un État de droit que le pouvoir, aujourd’hui, semble vouloir effacer.
Le président sortant, à la tête du Cameroun depuis 1982, Paul Biya a été déclaré vainqueur du scrutin par le Conseil constitutionnel.
Lors d’une audience à laquelle n’étaient pas représentées les chancelleries européennes et américaine, le Conseil constitutionnel ce midi a déclaré Paul Biya vainqueur du scrutin avec 53,66 % des suffrages, devant Issa Tchiroma Bakary, 35,19 %, qui a déclaré ne pas reconnaître ces résultats.
Les résultats du scrutin, qui a eu lieu le 12 octobre dernier, ont été dévoilés au lendemain d’une journée de manifestations et de tensions, après que l’ancien ministre Issa Tchiroma Bakary a revendiqué la victoire.
Selon le Conseil constitutionnel et les chiffres officiels annoncés ce lundi 27 octobre, le chef de l’État sortant, du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) est réélu pour sept ans, en remportant 53,66 % des suffrages, avec plus de 2,470 millions de voix. À la tête du Cameroun depuis 43 ans, Paul Biya, 92 ans, entame donc son huitième mandat.
Le principal adversaire de Paul Biya, Issa Tchiroma Bakary, du Front pour le salut national du Cameroun (FSNC) qui a revendiqué la victoireau lendemain du vote et a appelé dimanche ses partisans à manifester, a lui remporté 35,19 % des suffrages, avec plus de 1,622 million de voix, selon les chiffres de l’institution.
Lors des manifestations dimanche à Douala, la capitale économique, quatre personnes sont mortes, selon les autorités.
Tchiroma Bakary dénonce une « mascarade »
De son domicile à Garoua, entouré de ses partisans, Issa Tchiroma Bakary qualifie la proclamation des résultats officiels ce lundi de « mascarade ».
« Je n’accepte pas ces résultats, le peuple camerounais n’accepte pas ses résultats et le peuple est prêt à livrer bataille aussi longtemps que nécessaire pour récupérer sa victoire.(…) Je me reconnais comme président élu et cette chose-là, j’entends l’assumer. »
Issa Tchiroma Bakary affirme que les tirs des forces de l’ordre ont fait deux morts et des blessés à Garoua et qu’il ne craint pas d’être arrêté.
Le ministre Grégoire Owona, cadre du parti présidentiel, le RDPC, qui a porté la candidature de Paul Biya, appelle l’ancien membre du gouvernement à la raison : « Il est en train de faire une plaisanterie de très mauvais goût en voulant sacrifier des vies. Il y a déjà des morts. Il sait qu’il ne pouvait pas gagner, et qu’il n’a pas gagné cette élection. Il veut faire un putsch. Il n’a pas pu présenter ses procès-verbaux qui sont au centre de tout le processus électoral au Cameroun. Le programme de la grandeur et de l’espérance de monsieur Paul Biya va réconcilier tous les Camerounais, y compris monsieur Tchiroma. »
Selon la loi camerounaise, les résultats proclamés par le Conseil constitutionnel sont définitifs et ne sont pas susceptibles de recours.
À l’audience de proclamation des résultats, à laquelle ne se sont pas fait représenter les chancelleries européennes et américaine, le Conseil constitutionnel a annoncé un taux de participation de 57,76 %.
Cabral Libii, est arrivé troisième de la course avec 3,41 %, suivi de Bello Bouba Maïgari avec 2,45 %, et Hermine Patricia Tomaïno Ndam Njoya, avec 1,66 %
Les chiffres officiels donnent Issa Tchiroma Bakary en tête dans l’Adamaoua, dans la région Nord et dans le Littoral. Le président Paul Biya, lui, fait ses meilleurs scores, selon l’institution, dans le sud (plus de 90 %) dans le nord-ouest (86,31 %) et dans l’est (73 %).
Avec Rassa Morra, son premier roman, Ania Mezaguer livre un récit d’autofiction percutant, nourri de son expérience de directrice des ressources humaines. À travers le personnage d’Aziyadé, elle dénonce le harcèlement moral, les jeux de pouvoir et l’hypocrisie managériale qui gangrènent le monde du travail. Ania Mezaguer a accepté cet entretien pour revenir sur les enjeux de son roman et les expériences qui l’ont nourri.
Dans cet échange exclusif, elle raconte comment son vécu professionnel a inspiré son écriture et pourquoi elle a choisi la forme romanesque pour porter un message universel. Elle revient sur le choix du titre, les violences professionnelles qu’elle souhaite exposer et la place des femmes dans le monde du travail.
Rassa Morra sera disponible au SILA, où l’écrivaine fera des séances de dédicaces le vendredi 31 octobre au niveau de l’AARC (Agence Algérienne pour le Rayonnement Culturel), et le 4 novembre au stand Sedía Éditions. Le roman Rassa Morra est également disponible à la librairie L’Arbre à Dires à Alger, La Habana à Tlemcen, Le Tiers Mythe à Paris, ainsi que sur www.leslibraires.fr.
Le Matin d’Algérie : Pourquoi avoir choisi de publier Rassa Morra parmi tous les romans que vous avez écrits ? Qu’est-ce qui vous a poussée à le faire maintenant ?
Ania Mezaguer : Faire paraître Rassa Morra était pour moi une nécessité. J’avais le sentiment que le sujet qu’il explore n’avait jamais été réellement mis en lumière. À travers ce roman, j’ai voulu dénoncer les dérives du monde professionnel, mais surtout éveiller les consciences face à ce que beaucoup vivent en silence.
Le Matin d’Algérie : Votre héroïne, Aziyadé, DRH dans une multinationale, est-elle une projection directe de vous-même ? Ou une synthèse de plusieurs expériences ?
Ania Mezaguer : Mon héroïne, Aziyadé, directrice des ressources humaines, est à la fois le reflet de moi-même et celui de toutes mes consœurs DRH à travers l’Afrique, qui m’ont généreusement autorisée à citer leur nom. J’ai tenu à le faire, à la fois dans l’incipit et au fil du roman, en hommage à leur parcours et à leur courage.
Dans la trame de Rassa Morra, j’ai voulu consolider des faits réels, des vécus multiples, pour en faire une seule épopée, portée par une seule héroïne : Aziyadé, symbole de toutes ces femmes fortes, résilientes et souvent incomprises du monde professionnel.
Le Matin d’Algérie : Comment décririez-vous le climat professionnel que traverse Aziyadé dans le roman ? Est-ce une réalité généralisée dans les grandes entreprises ?
Ania Mezaguer : Le climat professionnel dans lequel évolue mon héroïne est particulièrement tendu. Animée par une réelle volonté de favoriser le bien-être au travail et d’instaurer un environnement harmonieux, elle déploie toutes les méthodes possibles pour y parvenir. Pourtant, le clanisme et les manœuvres de certains collègues malveillants viennent constamment briser cette dynamique positive. Cette situation illustre une réalité universelle, présente dans de nombreuses organisations — qu’elles soient publiques, privées, nationales ou multinationales, même si, bien sûr, toutes n’en sont pas le reflet.
Le Matin d’Algérie : Le titre Rassa Morra est fort, abrupt. Pourquoi ce choix ? Et quel sens exact donnez-vous à cette expression ?
Ania Mezaguer : Le titre Rassa Morra n’est pas de moi à l’origine. Mon titre initial était Nursery pour adultes, ou, en français, Crèche pour adultes. Mais un jour, en discutant avec mon père des magouilles et des jeux de pouvoir qui se tramaient au sein de l’entreprise, il s’est exclamé : « Ce sont des Rassa Morra ! », une expression familière et pleine de sens. Il m’a alors suggéré d’en faire le titre du roman.
RASSA MORRA est en effet un titre fort et volontairement percutant. Dans le dialecte nord-africain, il signifie « race amère » ou « race maudite », et traduit à la fois la dureté du monde professionnel, l’amertume des luttes internes et le cri intérieur de celles et ceux qui en souffrent en silence.
Le Matin d’Algérie : Vous affirmez que tout ce qui est raconté est réel. Pourquoi avoir choisi la forme du roman plutôt que le témoignage ou l’essai ?
Ania Mezaguer : Oui, tout ce que je raconte est vrai. J’ai choisi de l’écrire sous la forme d’un roman d’autofiction, car je suis profondément attachée à ce genre littéraire. Je voulais que les lecteurs puissent vivre aux côtés de chaque personnage, ressentir leurs émotions, suivre leurs péripéties et s’imprégner pleinement de l’histoire. Même si les faits sont réels, leur dimension romanesque les rend universels et plus vibrants.
Le Matin d’Algérie : Quels types de violences professionnelles souhaitiez-vous rendre visibles à travers ce livre ?
Ania Mezaguer : Dans ce livre, j’ai voulu exposer des réalités souvent passées sous silence : le harcèlement moral, le mépris que certains dirigeants affichent envers la fonction RH, les jeux de clans, les calomnies, mais surtout le manque de maturité professionnelle qui gangrène parfois le monde du travail.
Le Matin d’Algérie : Comment votre expérience de DRH a-t-elle nourri votre regard littéraire ? Et inversement, l’écriture vous a-t-elle permis de prendre de la distance ?
Ania Mezaguer : Mon expérience de DRH a profondément nourri mon regard littéraire, car le monde de l’entreprise est un véritable théâtre humain, où se jouent les passions, les rivalités, les ambitions, mais aussi la solidarité et la résilience. En observant les comportements, les silences, les non-dits, j’ai trouvé une matière romanesque inépuisable. L’écriture m’a permis de prendre de la distance, de transformer la colère ou la déception en mots, et de donner du sens à ce que j’avais vécu. Elle est devenue un espace de libération, mais aussi un moyen d’analyse lucide sur la nature humaine et sur la complexité des rapports professionnels.
Le Matin d’Algérie : Le thème de l’expatriation occupe une place importante. Que dénoncez-vous à travers ce motif ?
Ania Mezaguer : À travers le thème de l’expatriation, je souhaitais dénoncer une réalité souvent passée sous silence dans le monde professionnel africain. Certains expatriés, censés venir pour transmettre leur savoir, contribuer à la gestion de la relève ou à la valorisation des compétences locales, se contentent en réalité de gérer leurs propres intérêts. Leur présence n’apporte pas toujours la valeur ajoutée attendue : ils occupent des postes clés sans réelle volonté de former, de partager ou de construire une continuité durable. Leur priorité devient souvent le transfert de leur salaire vers leur pays d’origine plutôt que la transmission du savoir ou le développement du capital humain local. J’ai voulu mettre en avant cette hypocrisie managériale qui freine la croissance et la professionnalisation de nombreux talents africains. À travers ce thème, je questionne le sens du mot “expatrié” : est-il encore synonyme de mission ou simplement d’intérêt personnel déguisé ?
Le Matin d’Algérie : À qui s’adresse ce roman, selon vous ? Aux femmes cadres ? Aux managers ? Au grand public ?
Ania Mezaguer : Ce roman s’adresse à l’ensemble des professionnels, toutes catégories confondues, pour rappeler que le monde du travail devrait être un espace sain, éthique et épanouissant. Il s’adresse également à toutes les femmes, pour leur dire de rester fortes, dignes et debout face à l’adversité.
Le Matin d’Algérie : Ce premier roman publié en appelle-t-il d’autres ? Travaillez-vous déjà sur un nouveau projet littéraire ?
Ania Mezaguer : Je poursuis l’aventure de l’écriture à travers un nouveau projet littéraire, que je dévoilerai au moment opportun, lorsque le temps et l’inspiration auront pleinement accompli leur œuvre.
Le général Chanegriha remet une distinction à un officier.
Une nouvelle loi, promulguée le 27 octobre 2025 par Abdelmadjid Tebboune, réorganise en profondeur le dispositif des distinctions militaires. Cinq ordres honorifiques voient le jour, consacrant le mérite opérationnel, scientifique et partenarial au sein de l’Armée Nationale Populaire.
L’Algérie tourne une page dans la symbolique militaire. Avec la promulgation de la loi n°25-15 du 27 octobre 2025, publiée au Journal Officiel n°70, le système de distinctions de l’Armée Nationale Populaire (ANP) connaît une refonte majeure. Signée par le président Abdelmadjid Tebboune, la nouvelle législation modernise le cadre de reconnaissance du mérite, en instituant cinq ordres distincts destinés à honorer les compétences, la bravoure et l’innovation.
Les nouveaux ordres sont : le Commandement Opérationnel, réservé aux officiers ayant fait preuve d’excellence dans l’exercice du commandement ; la Lutte contre le Terrorisme et le Crime Organisé, pour les actes de bravoure sur le terrain, y compris à titre posthume ; l’Innovation, récompensant les inventions et améliorations techniques ; l’Excellence Scientifique, dédiée aux chercheurs et universitaires contribuant à la défense nationale ; et enfin le Partenariat avec l’ANP, destiné aux personnalités étrangères œuvrant au renforcement de la coopération militaire avec l’Algérie.
Le pouvoir de décoration revient exclusivement au Président de la République, qui les décerne sur proposition du ministre de la Défense nationale. Ces distinctions, purement honorifiques, ne donnent lieu à aucune prime. Leur port peut être suspendu en cas de condamnation ou retiré en cas de perte des droits civiques.
En abrogeant l’article 3 de la loi de 1990 créant l’Ordre de l’Honneur, ce texte marque la fin d’un dispositif ancien et ouvre une ère nouvelle, où le mérite militaire s’articule autour de la compétence, de l’expertise scientifique et du partenariat international. Des décrets d’application viendront en préciser les modalités.
Le chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune, a procédé à un mouvement partiel dans le corps des walis et walis délégués, conformément aux dispositions de l’article 92 de la Constitution, a indiqué un communiqué de la présidence de la République.
Cette décision s’inscrit dans le cadre du renouvellement régulier des cadres de l’administration territoriale, visant à renforcer l’efficacité de la gouvernance locale et à impulser une nouvelle dynamique dans la gestion des affaires publiques à l’échelle des wilayas et des circonscriptions administratives.
Des mutations à la tête de plusieurs wilayas
Le chef de l’État a ainsi mis fin aux fonctions de M. Mustapha Gueriche, wali de Mila, avant d’opérer une série de permutations entre walis. Parmi les principaux changements, Fodil Douifi quitte Laghouat pour Adrar, tandis que Mohamed Benmalek est muté de Batna à Laghouat. Houria Akroun, jusque-là à Guelma, rejoint la wilaya de Bouira, et Samir Chibani passe d’Oran à Guelma.
D’autres mouvements notables incluent Ali Moulaï, transféré de Tipaza à Béni Abbès, Abdelkrim Laamouri de Bouira à Annaba, Brahim Ouchane de Blida à Oran, Fayçal Amrouche d’In Guezzam à Mila, et Jamel Hachhass de Béni Abbès à Blida.
De nouveaux walis installés
Par ailleurs, Abdelmadjid Tebboune a nommé plusieurs responsables à la tête de nouvelles wilayas. Noureddine Refssa, wali délégué de Dar El Beïda, devient wali d’In Guezzam, tandis que Amine Benchaoulia, wali délégué de Sidi M’hamed, prend la direction de la wilaya de Tipaza. Ben Ahmed Riad, wali délégué de Bou Saâda (wilaya de M’Sila), est nommé wali de Batna.
Dans le même mouvement, les fonctions de Mahfoud Bouzertit, wali délégué de Chéraga, ont été interrompues.
Renforcement du maillage administratif
Le communiqué précise également la nomination de plusieurs walis délégués, issus pour la plupart du corps des secrétaires généraux des wilayas, une mesure qui vise à consolider la chaîne hiérarchique et administrative locale.
Ainsi, Abdelfattah Benkerkoura, secrétaire général de Sétif, est nommé wali délégué de Chéraga (Alger), Mahrez Maâmri (Constantine) devient wali délégué de Dar El Beïda, et Abdelmalek Zeïdi, inspecteur général d’Alger, est désigné wali délégué de Sidi M’hamed.
Parmi les autres désignations figurent :
Nacer Zougari, secrétaire général de Biskra, wali délégué de la circonscription de Kantara (Biskra) ;
Djamel Boughezza, secrétaire général de Boumerdès, wali délégué de Bir El Ater (Tébessa) ;
Atal Amrani, secrétaire général d’Illizi, wali délégué de Bou Saâda (M’Sila) ;
Abdelkrim Ben Baba Ali, chef de daïra de Ghazaouet, wali délégué de Laaricha (Tlemcen) ;
Hamid Khalfawi, chef de daïra de Boudouaou, wali délégué de Ksar El Boukhari (Médéa).
Le monde de l’édition algérienne est secoué par une affaire qui met en lumière les tensions persistantes entre la liberté d’expression et les pressions des autorités. Deux maisons d’éditions Koukou éditions et Tafat éditions se sont vues refuser leur participation au Salon international du livre (Sila).
Les éditions Koukou dénoncent, dans un communiqué cinglant, leur exclusion pour la troisième année consécutive du Salon international du livre d’Alger (SILA), prévu du 29 octobre au 8 novembre 2025.
La justice « s’incline » devant un « rapport secret »
La plainte de Koukou Editions pour « Atteinte aux libertés, abus et usurpation de fonctions » s’est soldée par une ordonnance de non-lieu, confirmée par la Chambre d’accusation de la Cour d’Alger. Cette décision empêche la tenue d’un procès public qui aurait pu exposer les pratiques de censure.
L’élément central de cette affaire est la révélation faite par le président de la Commission de censure, M. Tidjani Tama, lors de son audition. Il a affirmé que les mesures punitives contre Koukou Editions avaient été ordonnées par la ministre de la Culture, Mme Soraya Mouloudji, suite à un « rapport secret des services de sécurité ». Ce rapport accuserait les publications de la maison d’édition d’être « destructrices » et de « porter atteinte à l’image de l’Algérie ».
Pour Koukou Editions, cette unique « pièce à conviction » s’apparente à une « lettre de cachet de la police politique ». Le communiqué critique sévèrement le juge d’instruction pour ne pas avoir vérifié l’existence de ce rapport, ni auditionné la ministre pourtant mise en cause, et pour avoir refusé aux plaignants le droit de répliquer et de constituer de nouvelles parties civiles parmi les auteurs exclus.
L’appareil judiciaire est ainsi accusé d’avoir entériné une décision arbitraire, bafouant l’article 54 de la Constitution qui stipule que l’activité des publications ne peut être interdite qu’en vertu d’une décision de justice.
Préjudice moral et deux poids, deux mesures
L’enjeu de la plainte, selon Arezki Aït-Larbi, dépasse le simple « préjudice matériel ». Il insiste sur le « préjudice moral infligé à des dizaines d’auteurs algériens » (universitaires, médecins, avocats, journalistes, officiers de l’ALN, etc.) qui sont empêchés d’aller à la rencontre de leurs lecteurs.
Le directeur de Koukou Editions dénonce un deux poids, deux mesures choquant : alors que leurs ouvrages, spécialisés dans « l’essai politique, le témoignage historique et le document d’actualité », sont exclus, des titres comme le « Manuel du parfait salafiste » d’un auteur saoudien, « Mein Kampf » de Hitler, les « Mémoires de Mussolini », et le dernier livre d’Eric Zemmour étaient, en octobre 2023, « aux honneurs » d’une manifestation officielle.
Une chronique de la répression
Le communiqué est complété par une annexe qui retrace une chronologie des provocations et des tentatives de censure contre KOUKOU Editions depuis 2016, illustrant la persistance des pressions :
Saccage et vol au stand du SILA en 2016. Tentative de saisie illégale (sans décision de justice) d’ouvrages au SILA en 2018. Intervention de douaniers (!) avec une liste d’ouvrages « interdits » au SILA en mars 2022, sans aucune notification écrite. Les livres blacklistés mettaient souvent en couverture des figures patriotiques reconnues (Djamila Bouhired, Hocine Aït Ahmed, Mohamed Khider…).
Exclusion du SILA en 2023 pour « non-respect du règlement intérieur » sans précision.
Retrait des publications par la librairie ANEP à Alger en 2023. Saisie d’un livre (celui de Héla Ouardi, « Les derniers jours de Muhammed ») par la Direction du commerce à Béjaïa en mai 2024 pour motif religieux.
Intervention policière brutale à l’intérieur d’une librairie à Béjaïa en juin 2024, entraînant des interpellations, pour la présentation d’un livre qui s’était pourtant déroulée sans incident à Alger.
Conditionnement de l’autorisation d’un salon du livre à Tizi Ouzou par l’exclusion de Koukou Editions et de ses auteurs reconnus (Tassadit Yacine, Mouloud Mammeri, Mohammed Harbi, etc.) en octobre 2024, forçant les organisateurs à reporter l’événement.
Malgré ces pressions « récurrentes des miliciens de la pensée », Koukou Editions, maison d’édition de droit algérien, affirme sa détermination à maintenir sa ligne éditoriale et à rester un « espace de liberté pour les auteurs autonomes » face au « révisionnisme décomplexé » et à la « répression politique ».
Le communiqué se conclut par un appel solennel à « restaurer la hiérarchie des normes juridiques », en assurant la primauté de la Constitution sur les « rapports secrets » et en mettant fin aux « manœuvres clandestines de groupuscules extrémistes qui ont pris les institutions en otage. »
Le fils d'Ali Benflis, ancien chef du gouvernement, est condamné à 20 ans de prison ferme.
La Cour suprême a rendu son verdict final dans l’affaire de corruption et d’atteinte à la sécurité de l’État connue sous le nom de « fuite du cahier des charges d’Air Algérie » et de « renseignement avec des agents étrangers », a rapporté le journal Echourouk dans son édition en ligne.
L’institution judiciaire a rejeté les pourvois en cassation déposés par les accusés, rendant ainsi les peines prononcées définitives et exécutoires, a précisé le média de langue arabe.
Le principal accusé, désigné par les initiales Walid Benflis, fils de l’ancien chef de gouvernement Ali Benflis, a vu sa condamnation de 20 ans de prison ferme confirmée. Cette décision met un terme au processus judiciaire pour ce volet du dossier.
L’affaire, qui avait défrayé la chronique en Algérie, concernait la divulgation d’informations sensibles relatives au cahier des charges de la compagnie nationale, Air Algérie, concernant l’acquisition de 15 nouveaux appareils.
Outre « Walid Benflis, d’autres co-accusés ont également vu leurs peines confirmées ou modifiées par l’arrêt de la Cour suprême :
Le vice-directeur chargé du développement et de la prospective et membre de la commission des marchés d’Air Algérie, identifié comme « H.O. », a été maintenu à une peine de 7 ans de prison ferme.
L’hôtesse de l’air, désignée par les initiales « B.H. », a bénéficié d’une réduction de peine, passant de 7 ans à 3 ans de prison ferme.
Les accusations portées contre le fils de l’ancien chef de gouvernement étaient particulièrement graves. Elles incluaient des chefs d’inculpation pour crime de trahison, établissement de contacts avec des agents de renseignement d’un État étranger susceptibles de nuire à la position militaire ou diplomatique algérienne ou à ses intérêts économiques fondamentaux.
S’y ajoutaient des charges de blanchiment d’argent issu de revenus criminels, de financement d’actes terroristes, de promesse d’avantages indus à un fonctionnaire en échange de l’accomplissement de ses devoirs professionnels, et de financement occulte d’un parti politique.
Le membre de la commission des marchés d’Air Algérie était, quant à lui, poursuivi pour abus de fonction, octroi d’avantages non justifiés dans le domaine des marchés publics, divulgation rémunérée d’informations ou de documents classifiés, et tentative de perception d’un avantage direct lors de la préparation d’un marché public.
Contexte de l’enquête
L’origine de l’affaire remonte à une enquête menée par les services de la Direction Générale de Lutte contre le Sabotage. Les investigations, notamment après l’examen du téléphone de l’accusé principal, avaient révélé des fuites concernant le document stratégique relatif au futur plan d’acquisition d’avions par Air Algérie. Il a été établi que l’hôtesse de l’air aurait transmis le document sensible à « W.B. » par l’intermédiaire du membre de la commission des marchés.
Pour rappel, le procureur général près la Cour d’appel criminelle d’Alger avait initialement requis la peine de mort à l’encontre du fils de l’ancien chef de gouvernement, insistant sur la gravité des faits qualifiés de « renseignement avec une partie étrangère portant atteinte aux intérêts supérieurs de l’État ».
La police politique dicte les livres à exposer au Sila.
La maison d’éditions que dirige Arezki Aït Larbi est interdite pour la 3e année de participation au Salon international du livre (Sila). Dans un communiqué, l’éditeur algérien accuse la police politique d’être derrière cette énième interdiction.
« Il est grand temps de mettre un terme aux manœuvres clandestines de groupuscules extrémistes qui ont pris les institutions en otage », conseille Arezki Aït Larbi.
Une entreprise d’acharnement est menée depuis quelques années pour étouffer Koukou éditions. Cet éditeur est systématique exclu de toute les rencontres littéraires nationale ou régionale. «Pour la 3e année consécutive, KOUKOU Editions est exclue du Salon International du Livre d’Alger sans motif légal», écrit Arezki Aït Larbi dans son communiqué rendu public ce lundi. Evidemment, les autorités se sont affranchies, ici comme dans toutes leurs menées, de tout respect de la légalité et du droit.
En vrai, la cabale contre Koukou éditions est l’illustration parfaite de ce que devient un État quand ses institutions cessent d’être autonomes et de jouer leur rôle : un système de cour, de clientèles où la politique politique tire les ficelles et instrumentalise les ministères, le tout entériné par des juges dociles et exécuté par des censeurs zélés.
Cette entreprise de démantèlement de Koukou éditions révèle une stratégie. Sous couvert de patriotisme et de « préservation de l’unité nationale », un réseau d’idéologues sectaires a transformé la censure en instrument politique. Ceux qui pensent, écrivent ou questionnent l’histoire dérangent ; ceux qui flattent les réflexes identitaires ou religieux sont tolérés, voire encouragés. La « sécurité » sert ici de prétexte à la répression de la liberté d’édition.
Suite à une plainte déposée pour « atteinte aux libertés, abus et usurpation de fonctions, le président de la Commission de censure, M. Tidjani Tama, a révélé devant le magistrat instructeur le 1er juillet dernier que «les mesures punitives prises contre Koukou Editions ont été ordonnées par la ministre de la Culture, Mme Soraya Mouloudji, suite à un « rapport secret des services de sécurité », qui accusent « les publications de cette maison d’édition d’être destructrices » et de « porter atteinte à l’image de l’Algérie » !», rapporte le communiqué de Koukou éditions. Rien que cela !
« Cette unique pièce à conviction qui a déclenché la forfaiture, le juge, qui devait instruire à charge et à décharge, n’a pas jugé utile d’en vérifier l’existence pour la verser au dossier, encore moins d’entendre la ministre, pourtant gravement mise en cause par son subordonné», s’indigne l’éditeur. Les charges visant cet éditeur ne s’arrêtent pas là.
En confirmant le non-lieu, la Cour d’Alger n’a pas seulement clos une procédure : elle a condamné la justice à l’impuissance. Ce « verdict », loin de dissiper l’attaque en règle contre cette maison d’édition, confirme que la censure d’État se porte bien, drapée dans un langage juridique qui masque mal la soumission politique.
En effet, « après 18 mois d’une procédure singulière », rappelle la même source, « par cette décision, l’appareil judiciaire refuse le renvoi de l’affaire devant le tribunal correctionnel pour un procès public, même si l’instruction a révélé des pratiques occultes, en violation des lois de la République», lit-on dans le communiqué.
Pour autant, l’éditeur refuse de se résigner : « Malgré les pressions récurrentes des miliciens de la pensée et des patriotes à gages qui ont imposé une idéologie répressive, régressive et sectaire à l’ombre des institutions Koukou Editions refuse d’infléchir sa ligne éditoriale ». L’auteur pointe un «revisionnisme décomplexé qui tente de réécrire l’histoire à l’aune de l’actualité, de répression politique qui a paralysé le présent, et de lourdes hypothèques sur l’avenir, elle s’engage à rester un espace de liberté pour les auteurs autonomes, notamment les universitaires éthiques qui n’ont pas renoncé à leur devoir de critique sociale».
À la veille du 1er novembre, l’ironie est amère : le message fondateur d’émancipation et de dignité est étouffé par les pratiques arbitraires d’un appareil d’État qui ne tolère plus la critique. Arezki Aït Larbi estime que restaurer la hiérarchie des normes, c’est d’abord rappeler une évidence : aucun « rapport secret » ne saurait supplanter la Constitution. Aucune ministre, aucun service de sécurité, ne peut légitimement décider quels livres méritent d’être lus ou interdits. Cela dans un régime qui respecte les institutions et la liberté d’édition et de création. Ce qui est loin d’être le cas de « la nouvelle Algérie » de Tebboune, un pays où les éloges, la suffisance et l’esbroufe étouffent cyniquement les libertés.
«Dans cette séquence décisive pour l’avenir, les discours triomphalistes ampoulés ne peuvent plus occulter les intolérables pratiques de l’ombre qui ont fait trop de mal au pays», cingle Arezki Aït Larbi en conclusion de son communiqué.
Koukou éditions interdit de participation au Sila.
La Justice s’incline devant un « rapport secret » de la police politique, écrit Arezki Aït Larbi, fondateur et directeur des éditions Koukou qui vient d’être encore une fois exclue du Salon international du livre d’Alger. Lire ci-dessous le communiqué intégral de l’éditeur.
« L’activité des publications ne peut être interdite qu’en vertu d’une décision de justice. ». Article 54 de la Constitution.
Pour la 3e année consécutive, KOUKOU Editions est exclue du Salon International du Livre d’Alger (SILA, du 29 octobre au 8 novembre 2025) sans motif légal. Après 18 mois d’une procédure singulière, notre plainte pour « Atteinte aux libertés, abus et usurpation de fonctions » déposée contre le président de la Commission de censure et le Commissaire du SILA, vient de connaitre son épilogue devant la Chambre d’accusation de la Cour d’Alger, qui a confirmé l’ordonnance de non-lieu du juge d’instruction.
Par cette décision, l’appareil judiciaire refuse le renvoi de l’affaire devant le tribunal correctionnel pour un procès public, même si l’instruction a révélé des pratiques occultes, en violation des lois de la République, notamment de la Constitution qui proclame dans son article 54 : « L’activité des publications ne peut être interdite qu’en vertu d’une décision de justice ».
Lors de mon audition, le 13 mars 2025, le juge d’instruction avait voulu circonscrire l’affaire dans un « préjudice matériel subi par une entreprise » qui relèverait de la compétence du tribunal administratif. Dans ma déclaration, enregistrée sur procès-verbal, j’ai recentré le problème sur le « préjudice moral infligé à des dizaines d’auteurs algériens (universitaires, médecins, avocats, journalistes, officiers de l’ALN…) exclus du SILA et empêchés d’aller à la rencontre de leurs lecteurs, alors que le ‘’Manuel du parfait salafiste’’ d’un auteur saoudien, ‘’Mein Kampf’’ de Hitler, les ‘’Mémoires de Mussolini’’ et le dernier livre d’Eric Zemmour avaient les honneurs, en octobre 2023,d’une manifestation officielle.
Entendu à son tour le 1er juillet 2025 par le magistrat, le président de la Commission de censure, M. Tidjani Tama, a révélé que les mesures punitives prises contre KOUKOU Editions ont été ordonnées par la ministre de la Culture, Mme Soraya Mouloudji, suite à un « rapport secret des services de sécurité », qui accusent « les publications de cette maison d’édition d’être destructrices » etde « porter atteinte à l’image de l’Algérie » !
Cette unique pièce à conviction qui a déclenché la forfaiture, le juge, qui devait instruire à charge et à décharge, n’a pas jugé utile d’en vérifier l’existence pour la verser au dossier, encore moins d’entendre la ministre, pourtant gravement mise en cause par son subordonné. Il n’a pas jugé opportun non plus de nous accorder le droit de répliquer à ces allégations calomnieuses, citer nos témoins, et formaliser la constitution de nouvelles parties civiles parmi les auteurs de KOUKOU Editions qui en avaient émis le souhait.
Au-delà des arguties juridiques qui tentent d’enrober l’arbitraire dans un semblant de légalité, l’affaire se résume à une lettre de cachet de la police politique, exécutée par un membre du gouvernement, et entérinée par des magistrats, dont les prérogatives constitutionnelles ont été pourtant bafouées.
KOUKOU est une maison d’édition de droit algérien. ‘’Spécialisée dans l’essai politique, le témoignage historique et le document d’actualité’’, elle active dans la légalité depuis deux décennies. Ses publications ont souvent cristallisé des débats vifs, mais elles n’ont jamais donné lieu à des incidents, hormis ceux provoqués par les censeurs clandestins, au SILA et dans les librairies. (Voir Annexe ci-dessous).
Malgré les pressions récurrentes des miliciens de la pensée et des patriotes à gages qui ont imposé une idéologie répressive, régressive et sectaire à l’ombre des institutions, KOUKOU Editions refuse d’infléchir sa ligne éditoriale. Par ces temps de revisionnisme décomplexé qui tente de réécrire l’histoire à l’aune de l’actualité, de répression politique qui a paralysé le présent, et de lourdes hypothèques sur l’avenir, elle s’engage à rester un espace de liberté pour les auteurs autonomes, notamment les universitaires éthiques qui n’ont pas renoncé à leur devoir de critique sociale.
A la veille d’un 1er novembre perverti par le slogan et l’esbroufe, le message libérateur de la Guerre de libération nationale est heurté par les violations récurrentes des principes fondamentaux de l’Etat de droit. Dans cette séquence décisive pour l’avenir, les discours triomphalistes ampoulés ne peuvent plus occulter les intolérables pratiques de l’ombre qui ont fait trop de mal au pays.
Il est temps de restaurer la hiérarchie des normes juridiques, notamment la primauté de la Constitution sur les ‘’rapports secrets’’ et les lettres de cachet.
Il est grand temps de mettre un terme aux manœuvres clandestines de groupuscules extrémistes qui ont pris les institutions en otage.
Alger, le 28 octobre 2025.
Arezki AÏT-Larbi
Directeur de KOUKOU Editions,
Journaliste free-lance.
Annexe : chronologie des provocations contre KOUKOU Editions
– SILA, octobre 2016 : le stand de KOUKOU Editions est saccagé la veille de l’inauguration officielle ; deux cartons de livres du défunt Ali Koudil, ancien PDG de la CNAN, ont été dérobés. Témoignage inédit sur l’univers carcérale en Algérie, ‘’Naufrage judiciaire’’ est un récit poignant sur sa détention durant huit longues années avant d’être acquitté. Le Commissaire du SILA avait reconnu le préjudice, et présenté ses excuses en proposant un dédommagement avec un chèque de 80.000,00 DA.
– SILA, octobre 2018 : des membres de la Commission de censure se sont présentés au stand de KOUKOU pour saisir l’ouvrage : « Les derniers jours de Muhammed » de l’universitaire tunisienne Hela Ouardi. Sans décision de justice ni notification officielle, nous les avons empêchés de pénétrer dans le stand.
– SILA, mars 2022 : des douaniers (!) se sont présentés au stand de KOUKOU Editions avec la liste d’une vingtaine d’ouvrages « interdits », sans décision de justice, ni notification écrite. Devant notre insistance pour avoir un document officiel, l’officier des douanes a promis d’en « référer à qui de droit ». Par souci d’apaisement, nous avons accepté de retirer temporairement ces livres, en attendant la notification écrite, dans un délai raisonnable. N’ayant rien reçu au bout de 4 jours, nous avons décidé de les remettre sur les présentoirs, en annonçant cette action par un communiqué de presse. Point commun entre la plupart des ouvrages blacklistés par la Commission de censure, des figures patriotiques connues illustrent leurs couvertures : Djamila Bouhired, Hocine Aït Ahmed, Abdelhafidh Yaha, Abdennour Ali-Yahia, Mohamed Khider…
– SILA, 2023 : KOUKOU Editions est exclue du SILA pour « non-respect du règlement intérieur », sans décision de justice ni précision sur les actes qui auraient dicté cette mesure.
A Alger, l’ANEP, propriétaire de la librairie Chaïb Dzair située à l’Avenue Pasteur, retire de la vente les publications de KOUKOU Editions, et refuse d’honorer ses créances qui remontent à 2022.
– Bougie, 22 mai 2024 : Le directeur du… Commerce de la wilaya de Bgayet saisit, contre remise d’un procès-verbal, le livre de Héla Ouardi ‘’Les derniers jours de Muhammed’’. Motif : « pas conforme aux enseignements du Prophète » et « propage des idées empoisonnées » !
– 29 juin 2024 : Toujours à Bgayet, la police intervient brutalement à l’intérieur de la librairie Gouraya pour arrêter la présentation d’un livre, avant d’interpeller l’auteure, son éditeur, le libraire ainsi que toutes les personnes présentes. Le livre, « La Kabylie en partage » de Dominique Martre qui raconte les souvenirs d’une enseignante française dans un collège de Kabylie dans les années 70, a été pourtant présenté l’avant-veille dans une librairie d’Alger-centre, sans incident.
– Ath Ouacif (Tizi Ouzou), octobre 2024, le ministère de la Culture conditionne l’autorisation du Salon livre amazigh par l’exclusion de KOUKOU Editions et de ses auteurs. Parmi eux : Tassadit Yacine, Mouloud Mammeri, Salem Chaker, Ahmed Bachir, Farida Aït Ferroukh et Aomar Oulamara qui ont consacré leur vie à la défense et à la promotion de la langue et de la culture amazighes, et Mohamed Harbi, qui a pris sa retraite politique à l’âge de 90 par la traduction de ses mémoires dans cette langue. Pour ne pas cautionner l’arbitraire, les organisateurs décident de reporter la manifestation en raison de ‘’contraintes administratives’’.
– Alger, octobre 2025 : Pour la 3e année consécutive, KOUKOU Editions est exclu du SILA et de tous les salons du livre organisés sous l’égide du ministère de la Culture.
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