13 mai 2024
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Le coupable idéal (IV)

Pistolet

Dans son délire, il se roulait par terre ! Ne sachant comment faire face à cette situation inédite, nos geôliers se concertent. L’un d’eux propose de lui mettre une clef dans la main, un remède du terroir pour tenter de le calmer. Mais Mourad ne se calme pas. Au contraire, il s’excite et délire davantage !

– Je veux le tuer ! l’entend-on dire.

– Tuer qui ? lui demande le brigadier en chef.

Il en profite pour tenter de le faire avouer.

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– C’est toi qui as pris le pistolet de ton frère ?

Mourad n’entend rien. Il insiste :

– Je veux le tuer !

– Mais tuer qui, ya rebbak ? (Au nom de ton Dieu).

Mais Mourad s’en tient à ses délires.

– Je vais te tuer ! Tu te crois plus fort ! Tu auras à faire à moi…

Tout cela prononcé en kabyle. Ce qui exaspérait quelques policiers arabophones qui exigeaient que nous traduisions au fur et à mesure.

Le coupable idéal (III)

Pour eux, les choses étaient claires, ces délires prenaient des allures d’aveux. Inutile d’aller plus loin, on tient le coupable !

Quand Mourad revint à la réalité, il était fiévreux et tremblait comme une feuille sous l’assaut d’une tempête. On le fait s’asseoir. Son frère le couvre de son manteau. Il ne tarde pas à se calmer. Et l’interrogatoire reprend de plus belle.

– Alors tu veux tuer qui ? lui demande-t-on.

– Mais personne. Je ne veux tuer personne !

– Pourtant c’est que tu ne cessais pas de répéter quand tu te roulais par terre !

– Je faisais un cauchemar ! J’étais agressé par un homme qui a pris la fuite. J’avais envie de lui faire payer son méfait !

Un cauchemar ! ? marmonne le brigadier en chef en ricanant. Peu convaincu de ce qui ne pouvait être qu’un mensonge. Un de plus, à charge de Mourad.

Me concernant, j’étais partagé entre pitié et soulagement. Pitié pour mon pauvre compagnon d’infortune qui n’en avait pas fini avec ces bourreaux, et soulagement de n’être plus le point de mire de cette affaire par la grâce d’un policier conscient et apparemment un peu plus éduqué que le reste de ses collègues.

Ce n’est qu’en fin d’après-midi, soit près de vingt-quatre heures après notre arrestation, qu’on décide enfin de nous relâcher, avec l’ordre ferme de nous tenir prêts pour d’autres convocations. Dieu que ce fût bon de se retrouver dehors et de respirer enfin un peu d’air frais après avoir été enfermés pendant une période qui se confondait avec l’infini, à un âge où chaque minute est une éternité. Sans parler du fait que pendant tout le temps de notre enfermement, nous n’avons eu droit à aucun repas ni quelconque casse-croûte. Nous n’eûmes droit qu’à quelques gorgées d’eau, du robinet, évidemment… À suivre

Kacem Madani

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