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L’ancien président français Nicolas Sarkozy sort de prison

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Nicolas Sarkozy

L’ancien président français Nicolas Sarkozy est sorti de prison. La cour d’appel de Paris a ordonné, lundi 10 novembre, la remise en liberté de l’ancien président français, incarcéré depuis le 21 octobre 2025 à la Santé après sa condamnation dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle. 

Malgré sa lourde condamnation par la justice, Nicolas Sarkozy ne s’est pas éternisé derrière les barreaux. La prison, « c’est dur, c’est très dur, ça l’est certainement pour tout détenu, je dirais même que c’est éreintant », a déclaré l’ancien président.

Après vingt jours de détention provisoire, l’ancien président est sorti de prison. La cour d’appel de Paris a suivi le parquet général et a décidé, lundi 10 novembre, sa remise en liberté sous contrôle judiciaire. La demande avait été déposée par ses avocats dans les minutes qui ont suivi son entrée en détention à la prison de la Santé à Paris, le 21 octobre.

Estimant que « le risque de pression, de concertation ne pouvant pas être totalement écarté » sur ses coprévenus mais surtout sur « un certain nombre de témoins-clés », particulièrement les ex-dignitaires du régime Kadhafi disséminés à travers le monde, la justice a interdit à l’ex-président de sortir du territoire français. De plus, la cour lui a imposé une « interdiction de contact » élargie, avec d’anciens responsables libyens comme avec de hauts responsables de la justice française, notamment le garde des Sceaux Gérald Darmanin, constatant sa « capacité à actionner différents services de l’État » en tant qu’ex-président.

L’ancien président comparaissait en visioconférence, en veste bleu foncé, pull et chemise. Son épouse, Carla Bruni, et deux de ses fils, Pierre et Jean, ont pris place sur les bancs du public.

Nicolas Sarkozy, 70 ans, avait été incarcéré en raison de sa condamnation à cinq ans de prison ferme avec mandat de dépôt assorti d’une exécution provisoire pour association de malfaiteurs dans le procès libyen, une détention inédite pour un ex-président dans l’histoire de la République française et qui a suscité de vifs débats.

Il s’agit aussi d’une première dans l’Union européenne où aucun ancien chef d’État n’a connu l’emprisonnement. Le 25 septembre, le tribunal correctionnel de Paris l’a reconnu coupable d’avoir sciemment laissé ses collaborateurs démarcher la Libye de Mouammar Kadhafi pour solliciter un financement occulte de sa campagne présidentielle victorieuse de 2007. Il a aussitôt fait appel.

Plus que la condamnation, c’est le mandat de dépôt l’envoyant en prison, non susceptible de recours, qui avait suscité la stupeur. Pour les juges, il est justifié par la « gravité exceptionnelle » des faits. Pour Nicolas Sarkozy, il a été motivé par « la haine ».

Les critères de la mise en liberté en question

Nicolas Sarkozy devra être remis en liberté sous contrôle judiciaire, éventuellement assigné à résidence avec un bracelet électronique. En attendant, en prison, l’ex-président a été placé à l’isolement, mais deux officiers de sécurité étaient installés dans une cellule voisine. Des dispositions justifiées par « son statut » et les « menaces qui pèsent sur lui », selon le ministre de l’Intérieur, Laurent Nuñez.

Fin octobre, Nicolas Sarkozy a reçu la visite du ministre de la Justice, Gérald Darmanin, une entrevue qui a suscité des critiques, notamment de magistrats. Dans une rare prise de position, le plus haut procureur de France, Rémy Heitz, y avait vu un « risque d’obstacle à la sérénité » et donc « d’atteinte à l’indépendance des magistrats » avant le procès en appel.

Parmi les trois condamnés avec mandat de dépôt par le jugement du 25 septembre, la cour d’appel a déjà mis en liberté sous contrôle judiciaire l’ex-banquier Wahib Nacer, 81 ans, mais a maintenu en détention l’intermédiaire Alexandre Djouhri. Pour ce dernier, condamné à six ans d’emprisonnement avec incarcération immédiate et 3 millions d’euros d’amende, la cour a considéré qu’il présentait des garanties « particulièrement faibles » face à son risque de fuite.

Dans son cas, la justice a également considéré que « les risques de pressions continuent d’exister » sur des témoins de l’affaire, notamment l’ancien directeur de cabinet de Mouammar Kadhafi, Bechir Saleh, condamné dans le dossier et en fuite.

Dans les deux cas, le président Olivier Géron a précisé au préalable qu’en statuant sur une demande de mise en liberté, « les critères d’appréciation de la juridiction d’appel sont nécessairement différents de ceux de la juridiction de premier degré » et que ces décisions ne présageaient en rien de l’issue du procès en appel, qu’il devrait diriger.

Très attendu, ce nouveau procès libyen devrait se tenir à partir du mois de mars 2026, même si les dates précises n’ont pas encore été officiellement annoncées.

Avec RFI

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Des « signaux » algériens pour une reprise des relations avec la France, selon le patron de la DGSE

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Macron Tebboune
Macron invite Tebboune-à paris

Le patron de la DGSE, Nicolas Lerner, évoque des « signaux » algériens en faveur d’une reprise du dialogue avec la France. Sommes-nous à la veille d’une détente après un an de crise sans précédent ?

La stratégie de tension a encalminé les relations algéro-françaises. Plus d’un an après le déclenchement d’une grave crise diplomatique entre Paris et Alger, suite à la reconnaissance par la France du plan marocain pour le Sahara occidental, le directeur de la DGSE, Nicolas Lerner, a affirmé lundi 10 novembre percevoir des « signaux » de la part de l’Algérie laissant entrevoir une possible reprise du dialogue entre les deux pays.

Invité sur France Inter, le chef des renseignements extérieurs français a déclaré :

« Aujourd’hui, nous avons des signaux qui viennent de la partie algérienne sur une volonté de reprise du dialogue. »

Il a précisé qu’il s’agissait de « signaux à la fois publics et non publics », tout en réaffirmant la position de la France :

« La France y est prête, la France y a toujours été prête, mais elle rappelle ses exigences, notamment la libération de nos deux compatriotes. »

Une crise née à l’été 2024

Les relations entre Paris et Alger se sont brutalement détériorées à partir de juillet 2024, après plusieurs différends politiques et judiciaires. Pas seulement, le soutien d’Emmanuel Macron pour le plan de Mohammed VI pour le Sahara occidental a mis en rogne le régime algérien qui a rappelé son ambassadeur à Paris. A l’époque, les autorités algériennes, avaient par la voix du ministère des Affaires étrangères algérien, exprimé « leur profonde réprobation ».

La crise avait éclaté dans un contexte de tensions plurielles ravivées et d’accusations croisées d’ingérence, avant de s’envenimer à la suite de l’arrestation de deux ressortissants français en Algérie.

L’écrivain franco-algérien Boualem Sansal avait été interpellé le 16 novembre 2024 à Alger et condamné à cinq ans de prison pour « atteinte à l’unité nationale ». Quelques semaines plus tard, le journaliste Christophe Gleizes, correspondant de SoFoot, un hebdomadaire français, était condamné en première instance à sept ans de prison ferme pour « apologie du terrorisme ». Il est accusé d’avoir eu des contacts avec des militants du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie, classé depuis 2021 comme organisation terroriste par le régime. Détenu dans la prison de Tizi-Ouzou, Christophe Gleizes doit comparaître en appel le 3 décembre prochain.

Ces affaires ont entraîné la suspension de plusieurs échanges bilatéraux, la réduction de la coopération sécuritaire et le rappel temporaire des ambassadeurs et diplomates. Paris avait qualifié la situation de « rupture grave de confiance », tandis qu’Alger dénonçait une « campagne hostile » menée par certains médias français.

Des canaux restés ouverts malgré tout

Malgré ce gel diplomatique, Nicolas Lerner a insisté sur le maintien d’un minimum de contacts entre les services des deux pays :

« Les canaux de communication n’ont jamais été coupés », a-t-il assuré, estimant toutefois que la coopération antiterroriste avait atteint « un point extrêmement bas ».

Pour le patron de la DGSE, il n’est dans « l’intérêt d’aucun des deux pays de rester dans cette situation de blocage ». Il dit espérer que les signaux actuels puissent permettre d’amorcer une désescalade progressive.

« Si les services algériens étaient en capacité de détecter une menace sur le territoire national, je veux croire qu’ils la signaleraient », a-t-il ajouté, soulignant l’importance de maintenir une confiance minimale entre partenaires face aux défis sécuritaires communs.

Premier constat : la grâce que pourrait accorder Tebboune à l’écrivain Boualem Sansal suite à la demande du président fédéral allemand constitue le premier signe probant de la volonté des autorités algériennes d’oublier la crise pour aller de l’avant. L’autre constat : c’est la première fois que les médias publics cite Boualem Sansal sans le charger de qualificatifs odieux.

L’occasion, il est vrai, est importante pour passer à côté. Que cela soit pour l’Algérie dont la diplomatie est devenue inaudible ou pour la France dont deux citoyens sont détenus en Algérie. En France, même si l’extrême droite et ses appendices comme Bruno Retailleau et Xavier Driencourt, l’ancien ambassadeur il y a un net changement de ton de la part des officiels.

Même si officiellement les relations sont rompues entre les deux capitales, plusieurs « missi dominici » s’emploient depuis plusieurs mois pour renouer les fils du dialogue entre les deux capitales. Après le rappel de l’ambassadeur d’Algérie en France, Chems-Eddine Mohamed Hafiz, recteur de la Grande mosquée de Paris, est considéré comme la voix officieuse du régime algérien. En face l’archevêque d’Alger, Jean-Paul Vesco, a été reçu plusieurs fois par Tebboune. Ces audiences ne sont pas sans raison dans un travail de coulisses pour rétablir les relations avec Paris. Enfin, la nomination de Laurent Nuñez au ministère de l’Intérieur français en lieu et place de l’anti-Algérie, Bruno Retailleau, a permis de baisser la tension entre les deux pays. Homme de dialogue le nouveau ministre de l’Intérieur a fait montre de beaucoup de tact sur le dossier Algérie.

Sofiane Ayache/AFP

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Le président allemand demande à Tebboune de gracier Boualem Sansal

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Frank Walter Steinmeir
Frank Walter Steinmeir. Crédit : DR

Le Président fédéral d’Allemagne, M. Frank-Walter Steinmeier, a demandé au chef de l’Etat, M. Abdelmadjid Tebboune, d’accomplir un geste humanitaire en graciant l’écrivain Boualem Sansal, détenu depuis un an, indique, ce lundi, un communiqué de la Présidence de la République.

Compte tenu de l’âge avancé de Boualem Sansal et de la fragilité de son état de santé, le Président allemand a proposé que Sansal soit autorisé à se rendre en Allemagne afin d’y recevoir des soins médicaux, précise la même source.

Arrête le 16 novembre 2025, à l’aéroport d’Alger pour ses opinions, il a été placé en détention avant d’être condamné à 5 ans de prison ferme.

Boualem Sansal est un citoyen algérien et français, et lauréat du Prix de la paix des libraires allemands. Le 1er juillet 2025, il a été condamné en appel en Algérie à une peine de prison et à une amende, rappelle le communiqué.

«J’ai demandé à mon homologue algérien la grâce de Boualem Sansal. Un tel geste serait l’expression d’un esprit humanitaire et d’une grande clairvoyance politique. Il refléterait les relations personnelles de longue date que j’entretiens avec le Président Abdelmadjid Tebboune, ainsi que les excellents rapports entre nos deux pays», a déclaré le Président allemand.

Cette demande relayée par les médias publics sonne comme une volonté de libérer cet écrivain de 80 ans dont la détention a éclaboussé l’image du régime algérien.

La rédaction

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« L’Algérie, ma mère et moi », de Smaïn Laacher : un livre tout pudeur

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L'Algérie, ma mère et moi

C’est un livre dense, intimiste et touchant qu’est L’Algérie, ma mère et moi que vient de publier Smaïn Laacher aux éditions Grasset.

Il se situe à mi-chemin entre le témoignage intime et la réflexion sociologique. L’auteur, universitaire et sociologue, explore sa relation avec sa mère, elle-même issue de l’émigration algérienne vers la France en 1952, peu avant la guerre d’indépendance. Il y évoque pêle-mêle le déracinement de la mère, l’installation en France, la difficulté à appartenir pleinement à la terre d’accueil ou à la terre d’origine, l’impérieuse obligation de faire face à la vie, au veuvage et la dure réalité de l’immigration. Ce que l’auteur raconte en pelures sur sa mère est sans doute commun à des milliers de femmes exilées par mariage et confrontées à cet autre pays et univers étrange et étranger.

Avec L’Algérie, ma mère et moi, publié chez Grasset, le sociologue Smaïn Laacher signe un texte à la fois intime et universel. Derrière le récit d’un fils face à sa mère se dessine le portrait d’une génération entière, ballottée entre deux terres et deux langues, entre la mémoire de l’Algérie et la réalité de la France.

Né en Algérie et arrivé enfant en France, Laacher n’en est pas à son premier livre sur la migration. Mais ici, il délaisse les concepts pour le murmure des souvenirs. Sa mère, arrivée en 1952 d’un village des Aurès  pour rejoindre son mari ouvrier, ne s’est jamais vraiment installée. Elle vit, écrit-il, « dans l’imaginaire de son pays de naissance ». Le fils, lui, grandit dans un autre monde : celui de la langue française, de l’école républicaine, de la modernité. Entre eux, un mur invisible : celui des mots qui ne passent pas.

Le récit se lit comme une enquête du cœur. Une photographie de cette mère qui dut mener sa vie, avec ses codes. « Il fallait lui montrer notre allégeance par des mots répétés quasi mécaniquement », écrit Smaïn Laacher. L’Algérie, ma mère et moi est propre histoire écrite sans emphase avec la rigueur du chercheur et la pudeur du fils.

Il décrit les gestes, les silences, les phrases cassées de cette mère analphabète dans la langue du pays d’accueil. Ce qui l’intéresse, sans doute, ce n’est pas seulement la douleur du déracinement, mais le malentendu durable entre deux cultures qui cohabitent sans se comprendre. La France, écrit-il, a offert à ses enfants la liberté d’apprendre, mais au prix d’une séparation : « Ma mère ne savait pas ce que je devenais. Elle me perdait dans une langue qu’elle ne parlait pas. »

Dans ce texte bref mais dense, Laacher fait dialoguer deux voix : celle du sociologue qui ausculte les migrations, et celle du fils qui tente de sauver, par les mots, ce que le silence a englouti. La relation mère-fils devient le miroir d’une fracture plus large : celle entre les générations d’immigrés et leurs enfants nés en France, entre la fidélité au pays d’origine et l’appel du pays d’accueil.Il confie cette fracture permanente entre la mère et ses enfants.

La prose est simple, limpide. Elle est tout en retenue, pleine de pudeur. Son écriture, dépouillée, presque clinique, n’en est que plus bouleversante. Il y a une considération non feinte à cette maman qui a élevé ses enfants seule dans ce pays qui lui est resté étranger.

On sent la gratitude, mais aussi une certaine mélancolie : celle d’un homme bien conscient que l’intégration n’efface jamais tout à fait la nostalgie du pays perdu, que chaque langue apprise laisse derrière elle un territoire perdu. Que l’apprentissage d’une autre langue pour ces personnes est comme un arrachement à la première. À travers la figure de sa mère, c’est tout un pan de l’histoire franco-algérienne que Laacher fait surgir, dans sa complexité et sa tendresse.

L’Algérie, ma mère et moi questionne notre rapport collectif à la mémoire migratoire. Ce n’est pas un livre sur la guerre d’Algérie, mais sur ses séquelles silencieuses : la difficulté à transmettre, à parler, à se comprendre d’une rive à l’autre. 

Par sa clarté, sa sensibilité et son intelligence, ce texte s’impose comme un hommage discret à ces femmes venues d’ailleurs, souvent muettes dans les récits officiels, mais dont le courage a façonné la France d’aujourd’hui. En refermant le livre, on garde en tête l’image d’un fils penché sur la mémoire de sa mère, comme pour lui redonner, à travers l’écriture, la parole qu’elle n’a jamais eue.

Yacine K.

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Participation aux élections : les partis politiques en ordre de bataille

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Elections en Algérie

À mesure que les prochaines échéances électorales approchent, la scène politique algérienne se transforme en un vaste espace de mobilisation et de recomposition stratégique.

Si les formations de l’alliance présidentielle et les partis islamistes affichent une continuité dans leur participation, les forces du camp démocratique, longtemps en retrait, renouent progressivement avec le processus électoral. Une dynamique contrastée mais révélatrice d’un moment politique clé, à la croisée de la consolidation institutionnelle et de la quête de légitimité populaire.

Les partis de l’alliance présidentielle et islamistes dans la continuité

Pour le Rassemblement National Démocratique (RND) et le Mouvement de la Société pour la Paix (MSP), la participation aux scrutins relève d’une évidence. Ces formations, présentes de manière continue dans les assemblées locales et nationales, s’inscrivent dans une logique de permanence institutionnelle.

Le secrétaire général du RND, Monder Boudene, a récemment multiplié les sorties publiques, mêlant symbolique économique et rhétorique patriotique. Lors d’un meeting à Batna, il a comparé la production locale de pommes à « un symbole de souveraineté économique », une métaphore qui lui a valu autant de critiques que d’applaudissements. Derrière le ton populiste de cette déclaration, le message politique demeure clair : valoriser la production nationale et réaffirmer la rupture avec toute forme de dépendance étrangère, en particulier vis-à-vis de la France.

Le MSP, pour sa part, s’illustre davantage par son positionnement critique vis-à-vis de la politique économique du gouvernement. Contestant avec vigueur le projet de Loi de Finances 2026, le parti islamiste, par la voix de son leader, Abdelaali Hassani Cherif, dénonce un texte « abusif » menaçant les équilibres sociaux. Des rencontres régionales d’encadrement ont été lancées dans plusieurs wilayas pour transformer cette critique en mobilisation populaire. Une démarche qui s’inscrit dans une stratégie duale : défendre les acquis sociaux tout en consolidant la base électorale du parti à l’approche du scrutin.

Les partis du camp démocratique : la fin du boycott

À l’opposé, les formations du camp démocratique — en premier lieu le Front des Forces Socialistes (FFS), le Parti des Travailleurs (PT) et le Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD) — abordent les prochaines élections avec un esprit de reconquête politique. Après plusieurs années de boycott des scrutins post-Hirak, elles réaffirment leur volonté de renouer avec les urnes et de « rendre la parole au peuple ».

Le FFS, par la voix de son premier secrétaire Youcef Aouchiche, plaide pour une « participation large et responsable ». Dans un discours lucide, il a rappelé que « la démocratie ne se décrète pas, elle se construit », insistant sur la nécessité d’une mobilisation citoyenne organisée pour « faire face à la fraude » et œuvrer à une réforme profonde de l’État-nation. Pour le plus ancien parti d’opposition du pays, la participation constitue désormais un acte de résistance démocratique, voire une réaffirmation de son rôle historique.

De son côté, le PT de Louisa Hanoune a officiellement mis fin à sa période de retrait politique. La dirigeante trotskyste, lors d’une rencontre avec les cadres du parti à Alger, a justifié cette décision par la nécessité de défendre le pouvoir d’achat et les droits des travailleurs « à l’intérieur des institutions ». Le retour du PT aux urnes vise aussi à restaurer sa représentativité sociale et son influence parlementaire, après plusieurs années d’absence du débat institutionnel.

Quant au RCD, il avance avec prudence. Bien qu’aucune décision officielle n’ait été annoncée, les signaux internes — réunions locales, réactivation des structures de jeunesse, restructurations organiques — indiquent une préparation active à la participation. 

Le parti, qui reste marqué par sa ligne critique vis-à-vis de la gestion électorale, devrait, une fois encore, insister sur la nécessité de garanties crédibles en matière d’intégrité et de transparence du scrutin. Un  terrain sur lequel le pouvoir sera particulièrement attendu, lui que beaucoup accusent d’avoir longtemps façonné les résultats électoraux à son avantage. L’épisode de la réélection controversée d’Abdelmadjid Tebboune, lors de la présidentielle anticipée de septembre 2024, en est une illustration éloquente.

Vers une reconfiguration du champ politique

Ces repositionnements traduisent un constat partagé : la politique du « siège vide » a montré ses limites. L’absence de forces d’opposition dans les institutions a laissé le champ libre aux partis de l’alliance et aux indépendants, affaiblissant le pluralisme parlementaire. La plupart des analystes estiment désormais que le retour des partis démocratiques pourrait redynamiser la compétition politique, à condition que la participation citoyenne suive.

L’Autorité Nationale Indépendante des Élections (ANIE) a d’ailleurs rappelé l’importance de la révision des listes électorales et de l’inscription des jeunes électeurs, un enjeu crucial dans un contexte marqué par un désenchantement politique persistant.

En somme, les prochaines élections s’annoncent comme un test majeur pour la classe politique algérienne.

Entre les partis de l’alliance présidentielle et ceux de la mouvance islamiste restés dans l’opposition, qui tous ont participé aux joutes électorales post Hirak, et ceux de la reconquête démocratique, cherchant à renouer avec le vote citoyen, c’est la crédibilité même du jeu électoral qui se joue. La bataille s’engage, non seulement pour des sièges, mais pour la réhabilitation du lien entre urnes et confiance populaire.

Samia Naït Iqbal

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Karim Chikh : « C’est à nous de respecter tamazight pour qu’elle soit respectée par d’autres »

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Kamel Chikh
Kamel Chikh. Crédit photo : DR

Natif de Fenaia-Il Maten, en Basse-Kabylie (Béjaia), Karim Chikh est un ex-animateur à la Radio-Soummam. En tant qu’auteur et chercheur en patrimoine amazigh, il a beaucoup de livres à son actif. Chikh plaide pour une approche populaire participative en vue de la promotion de Tamazight.

Le Matin d’Algérie : On constate, ces derniers temps, une production littéraire très dense en langue berbère. Pensez-vous que le livre en Tamazight est en bonne santé, surtout avec l’avènement de l’internet et des réseaux sociaux ?

Karim Chikh : Déjà, pour commencer, j’apporte cette intéressante précision : vous venez de dire « langue berbère » et j’en conviens. En vérité, je préfère garder cette appellation telle quelle. D’ailleurs, je ne cesse de l’affirmer dans mes divers écrits, car, contrairement à ce que l’on pense, le mot « berbère » ne provient pas « nécessairement » de la terminologie latine « barbare » (sauvage) synonyme du «métèque» (l’étranger dans la Cité ou l’Agora), mais du mot amazigh « avervar», c’est-à-dire un soldat qui se couvre, du tibia jusqu’à sa tête, d’une tenue en acier. Cette tenue s’appelle «tavervart». Et ce mot est resté d’usage jusqu’à nos jours mais réservé uniquement à la couverture du bébé. Nos parents disaient par une sorte de croyance naïve en kabyle : « tavervart att-harev ghef mmi ». (Que cette couverture protège mon fils). Cela dit, la berbérité ou tamazight, c’est avant tout une culture de protection, de résistance, d’immunité contre le danger extérieur. Il suffit de revenir à la lutte des Berbères contre les Romains, par le biais de leur « maillage tribal » pendant plus de quatre siècles.

Le chercheur marocain Abdallah Laroui parle, à ce propos, de la tribu berbère, comme un nécessaire retour à soi. En cens sens, la tribu et la femme berbère sont les seuls gardiens séculaires de l’oralité. Je ferme ici la parenthèse, pour revenir à votre question. Sachez bien que le problème ne se limite pas aux réseaux sociaux, soit comme tremplin ou comme handicap au développement de tamazight, mais se situe ailleurs. Nous avons oublié, à mon sens, notre culture de dialogue ou plutôt de discussion dans le giron familial sur les dictons, les devinettes et les jeux du divertissement au tour du kanoun (un brasier creusé dans le sol pour se réchauffer en hiver).

Autrefois, on trouve dans chaque maison « takwatt ukwras » (un coin pour les livres). Soit, des petits espaces aménagés dans le mur « el k’der », où l’on met des bouquins, des documents de toute sorte, de la vieille paperasse. C’est un trésor familial pour se ressourcer, même si l’oralité avait pris depuis longtemps l’ascendant sur les esprits. 

Tout cela a malheureusement disparu, suite à la culture de l’individualisme et de l’assistanat ayant gangrené notre société. Aujourd’hui, un livre est devenu comme de la « camelote», quelque chose de vraiment accessoire ou « inutile », qui ne servirait plutôt à rien chez certains esprits, alors que, pour éditer un livre, ça coûte vraiment les yeux de la tête et aussi, c’est un véritable parcours de combattant (aspect éditorial)…

Le Matin d’Algérie : Justement pour les difficultés éditoriales, où se situe précisément le problème ? Est-ce un obstacle uniquement matériel ou cela relève-t-il d’autre chose ?

Karim Chikh : Sincèrement, c’est un tout. Il y a d’abord, le côté pécunier parce que pour éditer un livre, il va falloir dépenser de l’argent, parfois des grosses sommes juste pour l’imprimeur. Certains auteurs empruntent de l’argent pour éditer, ce qui est grave ! Et puis, il n’y a pas de garantie de rendement (lectorat sûr), même si l’écrit est en lui-même intéressant : peu de salons littéraires, peu de rencontres en librairies, peu de promotion, la censure, etc. Ajoutons à cela, le regard quasi « méprisant » de la société vis-à-vis des producteurs d’idées et le peu d’encouragement étatique du travail de recherche en patrimoine amazigh. C’est pour cela que, je dis toujours aux auteurs que je croise de ne pas regarder si leur livre leur rapporte de l’argent ou non, mais de penser plutôt à ce qu’ils vont laisser pour les générations à venir.

On doit assumer notre tâche d’éclaireurs, de veilleurs et de vigiles de notre identité. J’avoue que, pour moi, l’écriture en tamazight et pour tamazight est avant tout un acte de résistance…

Le Matin d’Algérie : A travers vos émissions à la Radio Soummam, on découvre un homme de culture tout terrain. Vos reportages attirent, il est vrai, par la variété des sujets traités en lien avec le patrimoine amazigh. Quel est votre bilan personnel de toutes ces années d’exercice professionnel (évolution des mentalités, intérêt des gens pour Tamazight, qualité des moyens mis à la disposition de ceux qui s’intéressent à la culture berbère, etc.) ?

Karim Chikh : Je reste, à vrai dire, très optimiste pour l’avenir, quoique je sois un peu pessimiste pour le présent. Je crois que c’est Jacques Berque qui avait dit cela un jour sur l’Algérie et je trouve son constat compatible pour le cas de tamazight. J’ai fait certes beaucoup d’émissions à la radio, j’ai arpenté le terrain pour collecter les paroles de bergers, de paysans et d’hommes de culture, j’ai fait de mon mieux pour piocher dans notre patrimoine ancestral, mais je pense avec toute modestie que je suis en deçà des attentes. Cela est d’autant plus vrai que le terrain est encore vierge pour celui qui voudrait faire des recherches sur le terrain.

Cela dit, ce n’est pas derrière son bureau ou par téléphone qu’on puisse avancer. Nos vieilles et nos vieux, nos paysans, nos bergers sont là pour nous accueillir chez eux, mais aussi pour nous inciter à aller vite en besogne. D’ailleurs, je profite de cette occasion pour leur rendre hommage, car, c’est grâce à eux et à mon Nagra, mon poste d’enregistrement, que je suis arrivé à collecter des milliers de mots kabyle usuels, parfois en voie de disparition. Bref, on doit aimer sa propre langue, s’attacher à sa culture, en faire des cérémonies et des rituels avec. C’est à nous de respecter la langue Tamazight pour qu’elle soit respectée par d’autres, et c’est à nous de lui créer des moyens pour la rendre accessible pour les non-berbérophones. Un défi majeur, certes difficile, mais pas impossible !

Le Matin d’Algérie : Revenant sur votre parcours d’auteur et votre fameux calendrier berbère, on a appris que vous avez récemment publié un autre livre qui va dans le même sens que le précédent. Pouvez-vous nous le présenter brièvement? Et puis, quelle est la nouveauté apportée ?

Karim Chikh : Effectivement, je ne cesse de produire malgré le manque de moyens financières (rires…). Aussi suis-je toujours sur mes travaux de recherche sur l’ancien calendrier berbère à 13 mois, 7 saisons, 9 rites culturels. Actuellement, j’envisage une suite de travaux à propos de ce calendrier que j’ai, en quelque sorte, «réinitialisé». Dans cette deuxième partie, on retrouve 21 temps dans le cycle de jour et de nuit, vingt-et-un jours de cycles de travaux agricoles, quatre temps durant l’année, je les cite : le temps des labours de 98 jours, le temps d’hibernation de 70 jours, le temps de la fertilité de 56 jours et le quatrième temps des récoltes de 140 jours. En outre, j’ai préparé deux livres sur les neuf rites culturels : « Nnayer » et « Iwejiven », qui s’ajoutent à ceux sur « Aderyis » et « Azenzi ». Cela dit, sur les neuf rites, j’en ai étudié quatre, auxquels j’ai consacré des livres. Les cinq autres qui restent, j’envisage de les préparer, courant 2026.

Le Matin d’Algérie : Karim Chikh est une voix respectable dans la radio. Vous-mêmes, vous vous définissez comme berger autodidacte. Est-il facile aujourd’hui de se dire « chercheur indépendant » sans une affiliation académique claire?

Karim Chikh : Je n’en sais rien ! Mais une chose étant sûre : le berger est, de mon point de vue, la seule véritable source, dans la mesure où il est en lien permanent avec la nature. Jour comme nuit, il est à l’écoute des échos de son environnement et de son cosmos. C’est pourquoi, mes travaux de recherche s’inspirent de ceux des bergers dont je fais partie. Bien évidemment, je suis autodidacte par rapport aux professeurs et aux académiciens qui avaient cherché, crée, inventé en leurs langue maternelle.

Devant eux, je ne suis qu’un novice d’autant que mes modestes travaux ne sont qu’un prélude, voire une sorte d’introduction à la recherche. Néanmoins, et c’est douloureux de le dire, à ce jour, avec tamazight, il n’y a que des traductions du français vers le berbère. C’est un amer constat à souligner en gras. Depuis maintenant une dizaine d’années de l’officialisation de Tamazight, et plus d’une trentaine d’années de l’entrée de cette langue-là dans le secteur éducatif, je suis navré de dire que c’est presque un désert en matière de recherche scientifique ! La faute à qui ? Je n’en sais rien ! Les slogans creux et le folklore nous tuent à petit feu, alors qu’on doit nous retrousser les manches pour aller de l’avant. Tamazight, c’est le travail continu sur le terrain. Et plus rien d’autre !

Pour l’académie, c’est à mon sens les autodidactes qui doivent former, en premier lieu une académie, parce que notre langue sort à peine de son oralité millénaire pour rejoindre le gotha des langues écrites. Parmi ces « autodidactes », on trouvera à coup sûr écrivains, poètes, chanteurs, artisans, hommes du verbe, citoyens ordinaires de tous bords, etc. C’est une fois que tous ces gens-là donnent, chacun son savoir, que viendra la tâche des linguistes, bien entendu, ceux qui travaillent à 100/100 en langue berbère sans traduction ni interférence avec les autres langues (arabe ou français dans notre contexte). Ces linguistes vont étudier ce qui est dit et décidé par l’académie, comme l’avait fait notre grand linguiste Dr-Hanouz.

Ce dernier avait, pour rappel, créé une académie en 1964, en faisant participer toutes les couches de la société berbère à savoir, entre autres, manœuvres, chauffeurs, poètes-troubadours, chanteurs, etc.

Toutes ces personnes-là travaillaient avec leur langue maternelle, chaoui, kabyle, chenoui, mozabite, rifain, etc. C’est cela le génie, c’est cela la richesse, c’est cela le savoir-faire créateur ! Je m’adresse, à partir de cette tribune qui m’est offerte aujourd’hui, à toutes les universités d’Algérie, en particulier celles de Vgayet, Tizi-Ouzou, et Tuviret pour qu’elles ne marginalisent ni ne mésestiment les travaux de recherche des autodidactes ! C’est un appel du cœur pour ressusciter au quotidien les saveurs de Tamazight de nos ancêtres ! Une donnée importante à prendre en considération, comme le font, d’ailleurs, toutes les universités dans le monde civilisé qui accueillent les autodidactes avec honneur dans leurs centres de recherche…

Propos recueillis par Kamal Guerroua.

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Zohran Mamdani : la vraie gauche triomphe à New York

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Zorhan Mamdani.
Zorhan Mamdani. Crédit photo : @africa_amani

Tout d’abord ne boudons pas notre plaisir : l’élection de Zohran Mamdani à New York lors de l’élection municipale qui s’est tenue dans la plus grande ville états-unienne est un rayon de soleil et une injection d’espoir dans un monde où les mauvaises nouvelles sont légion. 

Zohran Mamdani, qui était quasi-inconnu il y a un an, a mené une campagne progressiste et tenu un discours de gauche véritable sans se laisser intimider par les nombreuses critiques venues non seulement de la droite et de l’extrême droite mais aussi d’une partie des Démocrates dits modérés qui sont la marionnette des milliardaires, ceux que Sanders appelle la « classe des donateurs ». 

Cette élection locale a d’ores et déjà des répercussions nationales voire même internationales. Mamdani avait gagné la primaire démocrate contre Andrew Cuomo, un ancien gouverneur de l’État de New York lequel avait démissionné suite à des accusations de harcèlement sexuel et de malversations. Cuomo décida alors de se présenter comme indépendant contre Mamdani, le candidat de son parti, et fut immédiatement soutenu par les puissances d’argent et Trump qui a même pris position contre le candidat républicain, Curtis Sliwa. 

Le maire de New York précédent, Eric Adams, était lui aussi impliqué dans diverses affaires et avait bénéficié d’un pardon grâce à l’intervention de Trump. Il avait lui aussi appelé à voter contre Mamdani pour Cuomo. Arrêtons-nous un instant sur cette parfaite illustration de collusion entre deux partis censés être antagonistes : aussi bien Cuomo qu’Adams avaient fait alliance avec Trump qui est supposé être l’adversaire principal des Démocrates. Cette collusion oligarchique existe bien évidemment aussi à l’échelon national. Charles (dit Chuck) Schumer, sénateur démocrate de l’État de New York a lui aussi refusé de soutenir Mamdani et fait porter le soupçon d’antisémitisme à ce candidat musulman pour ses prises de position propalestiniennes. Mamdani quant à lui a affirmé qu’il serait vigilant dans la lutte contre l’antisémitisme, ce qui fait partie du programme de tous les progressistes.

L’élection à la mairie de New York était donc assez atypique car, dans cette ville dominée par les Démocrates, Mamdani avait face à lui un Républicain désavoué par Trump et un ancien démocrate à la moralité douteuse et soutenu par Trump figure repoussoir tant pour la gauche que pour les néolibéraux. Il n’en reste pas moins qu’avec un peu plus de 50 % des voix Mamdani a réussi un exploit. 

Zohran Kwame Mamdani est le fils d’un professeur de l’université Columbia, Mahmood Mamdani, et d’une mère cinéaste reconnue, Mira Nair. Il est né en Ouganda en 1991 et fut naturalisé américain en 2018. Comme il l’a souligné dans son discours de victoire après l’élection, il est donc un immigrant dont la réussite a été fulgurante. Il vient d’une famille privilégiée et intellectuelle mais, en tant qu’immigré et musulman, son discours ne ressemble pas à celui des classes dominantes dont il ne partage pas l’habitus.

Il fait partie du groupe qui s’intitule « Socialistes Démocratiques d’Amérique » qui est considéré comme la gauche du parti démocrate mais dont les idées sont très différentes de la direction du parti, dépendante des financements des ultra-riches. En France ou en Europe plus généralement ce genre de groupe correspondrait à un parti différent de nature social-démocrate. Aux États-Unis le bipartisme quasiment incontournable conduit à la formation de coalitions diverses à l’intérieur des partis. Se revendiquer socialiste aux États-Unis est rare et audacieux tant le mot et l’idée sont vilipendés depuis des décennies. C’est se positionner résolument à gauche. Durant la campagne, Cuomo avait parlé d’une guerre civile dans le parti démocrate et affirmé que les Etats-Unis n’étaient pas un pays socialiste. 

 Dans son discours de victoire Mamdani a cité Eugene Debs le dirigeant socialiste du début du 20e siècle qui a fondé le syndical Industrial Workers of the World et fut candidat à l’élection présidentielle à plusieurs reprises. Debs fut attaqué de toutes parts et emprisonné plusieurs fois. Ce rappel historique est important lorsque l’on pense à la poursuite de la carrière de Mamdani. 

Le programme de Mamdani prévoit des bus gratuits, un gel des loyers dans les immeubles gérés par la municipalité, des magasins d’aide alimentaire, des crèches gratuites, des financements pour les écoles, la construction de logements accessibles pour les travailleurs. Pour financer les programmes sociaux, il promet d’imposer une taxe sur les 1 % les plus riches gagnant plus d’un million de dollars et les entreprises. Le taux d’imposition sur les entreprises de 11,5 % serait, selon son programme, le même qu’au New Jersey, État voisin. Le programme prévoit aussi d’augmenter le salaire minimum à 30 dollars avant 2030. Ce programme est typique de la gauche universaliste et se focalise sur les besoins des classes moyennes ou ouvrière sans distinction de race, genre ou religion. Ceci pourrait sembler aller de soi mais marque une rupture avec les discours néolibéraux sur la diversité ethnique qui effacent ou nient les rapports de classe.

Il est donc fort significatif des évolutions politiques aux États-Unis qu’un candidat très multiculturel par ses racines en Afrique et en Inde et donc « non-blanc » comme l’on dit aux États-Unis, tienne un discours inclusif organisé autour de considérations économiques et écologiques sans oublier les communautés marginalisées. Il réussit la synthèse entre ce que l’on appelle la gauche sociale et la gauche de la diversité et donc permet à chaque groupe de quitter son « silo » de revendications déconnecté des autres groupes. Mamdani a su parler à des gens d’origines diverses sans faire de l’ethnicité un badge ou une barrière. La foule dans ses meetings est fort diverse et inclut, contrairement à ce que disent ses détracteurs, des blancs, des Juifs et surtout des jeunes et des personnes de condition modeste. Plus de 60 % des électeurs entre 18 et 29 ans ont voté pour lui contre 29 % des plus de 65 ans ce qui marque un clivage générationnel. Un candidat ouvertement critique des politiques israéliennes est élu à New York, ceci marque une évolution notoire. 

Bien évidemment un programme représente des intentions et il reste à voir s’il sera appliqué. Dans son discours de victoire Mamdani a cité cette phrase célèbre : « On fait campagne en poésie mais on gouverne en prose. » Il faut espérer que cela n’annonce pas un changement radical à la Obama, candidat de l’espoir qui est devenu un Président « normal » contenu par le complexe militaro-industriel. La tâche qui attend Mamdani est énorme et il doit s’attendre à de très nombreuses attaques. On l’a déjà comparé aux terroristes de 11 septembre 2001 et accusé de vouloir imposer la charia à New York mais on peut remarquer que lorsque Trump reçoit l’ancien djihadiste d’Al Qaïda et de l’État islamique devenu président de la Syrie, al Joulani devenu al-Charaa, les médias dominants ne trouvent rien à redire. Une sénatrice démocrate, Kirsten Gillibrand, a qualifié Mamdani de « djihadiste ». Il faut s’attendre à une multiplication d’attaques de ce genre. L’extrême droite qui vend des armes à l’Arabie saoudite est aussi celle pour qui tout musulman, même le plus pacifique et intégré est un terroriste potentiel. Il est fort probable que Mamdani sera soumis aux mêmes attaques rhétoriques que Jeremy Corbyn qui lui n’était pas musulman mais fut accusé de sympathie pour les terroristes et d’antisémitisme. Mamdani a obtenu les voix d’un tiers de la communauté juive new-yorkaise et n’a jamais fait de déclarations antisémites. Réclamer la justice pour les Palestiniens n’a rien d’antisémite comme le savent les supporters juifs et jeunes de Mamdani mais on peut s’attendre à des campagnes de calomnies. L’organisation ADL (Anti-Defamation League) a créé un instrument de surveillance de Mamdani (Mamdani monitor). 

Une autre approche de Trump et de l’extrême droite a déjà été annoncée : priver la ville de fonds fédéraux. C’est, appliquée aux États-Unis même, la technique utilisée contre le Chili : « faire hurler l’économie ». Trump a appelé Mamdani « communiste » et l’on sait qu’aux États-Unis c’est une insulte qui au temps du maccarthysme pouvait conduire en prison. Il va tout faire pour mettre en échec le maire de la ville qui est aussi celle du magnat immobilier. Il est aussi probable que Trump lance sa police de l’immigration (ICE) contre les migrants à New York ou qu’il envoie des troupes fédérales sous un prétexte ou un autre comme il l’a déjà fait à Los Angeles, Washington ou Chicago. Le prétexte est en général la criminalité et le commerce illégal de la drogue. Le même prétexte que pour préparer la guerre contre le Venezuela. 

Ne doutons pas que Trump mettra toute la force financière, économique et policière de l’État fédéral pour faire échouer Mamdani. 

Son succès électoral n’en est pas moins porteur d’espoir car il accompagne d’autres succès anti-Trump ailleurs dans le pays et montre qu’il existe une forte aspiration à la justice sociale, notamment chez les jeunes. Les campagnes de Sanders en 2016 puis 2020 l’avaient déjà montré. Sanders avait été détruit par des Démocrates fort peu démocratiques mais avait accepté de jouer le jeu du parti. Mamdani qui a montré sa grande intelligence, son contact facile avec les travailleurs et ses qualités de débatteur qui ne cède pas sur ses identités ou ses valeurs est beaucoup plus jeune et instruit par l’histoire récente du parti démocrate livré aux forces d’argent. Avec ses milliers de partisans il saura, espérons-le, déjouer tous les pièges et les attaques dont on voit déjà les grandes lignes.

Pierre Guerlain

Professeur de civilisation américaine, université Paris Nanterre

1) On peut trouver le programme de Mamdani à l’adresse suivante : https://www.zohranfornyc.com/platform 

Cette chronique est réalisée en partenariat rédactionnel avec la revue Recherches internationales à laquelle collaborent de nombreux universitaires ou chercheurs et qui a pour champ d’analyse les grandes questions qui bouleversent le monde aujourd’hui, les enjeux de la mondialisation, les luttes de solidarité qui se nouent et apparaissent de plus en plus indissociables de ce qui se passe dans chaque pays.

Site : http://www.recherches-internationales.fr/ 

https://shs.cairn.info/revue-recherches-internationales?lang=fr

Mail : recherinter@paul-langevin.fr 6, av. Mathurin Moreau; 75167 Paris Cedex 19

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COP30 : entre ombre et lumière

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COP 30

Que peut-on attendre de la COP30, alors que la propagande qui vise à protéger les intérêts liés aux énergies carbonées déforme actuellement la réalité avec l’aide de l’IA ?

La 30e Conférence des parties sur les changements climatiques (COP30) se tient jusqu’au 21 novembre à Belem, au Brésil. Alors que l’année 2025 sera l’une des trois plus chaudes jamais enregistrées, la campagne contre la science climatique bat son plein. Les faits sont pourtant clairs et incontestés parmi les autorités scientifiques. Les années allant de 2015 à 2025 ont été les plus chaudes depuis 176 ans et selon les données provisoires de l’ONU, la température mondiale a dépassé entre janvier et août de 1,42 degré Celsius la moyenne de l’époque préindustrielle.

Cette élévation de température, en créant de la pollution aérienne, des canicules et diverses quantités d’autres choses nuisibles à la santé, aurait des conséquences, qui ont été relevées le 28 octobre par la revue médicale The Lancet. Elle serait responsable de plus d’un demi-million de morts en moyenne par an. « Le changement climatique menace la santé à un niveau sans précédent », affirme le Lancet Countdown, qui est rédigé annuellement à partir de l’état général des connaissances scientifiques par une centaine de chercheurs internationaux coordonnés par l’University College London, en lien avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Nier ou biaiser les faits

Comme chaque année, la désinformation sur le climat augmenterait pendant les semaines qui précèdent la conférence des Nations unies sur les changements climatiques. Le rapport, Deny, Deceive, Delay : Demystified produit par Coalition Against Disinformation, un organisme qui regroupe plus de 80 organismes militants et un organisme brésilien, l’Observatoire pour l’intégrité en information. « Les dépenses de Big Carbon et les algorithmes de Big Tech nous empêchent de nous voir et de nous entendre les uns les autres, en ligne », affirment-ils.

Cette campagne aurait été particulièrement forte au Brésil qui a vu une hausse de plus de 14 000 de ces fausses informations entre juillet et septembre, soit 267 %, selon le rapport publié le 6 novembre. Elles seraient amplifiées par l’intelligence artificielle (IA) et encourageraient même l’hostilité envers la science et les chercheurs.

Chris Wright secrétaire à l’énergie, fondateur de l’une des plus grandes compagnies spécialisées dans la fracturation hydraulique, affirmait le 24 septembre : « Les Nations unies, ainsi que de nombreux pays dans le monde, se sont complètement égarées à propos du changement climatique, en exagérant jusqu’à en faire la plus grande menace pour la planète. »

Protéger la vie

Climatologue à l’École polytechnique fédérale de Zurich en Suisse et vice-présidente du groupe de travail 1 du GIEC, Sonia Seneviratne affirme « On arrive dans une zone dangereuse et inconnue, tant on s’éloigne de plus en plus des conditions que l’on connaissait au XXe siècle ». Selon elle, franchir 1,5 degré Celsius, pourrait entraîner des risques plus importants de franchir des points de bascule. Des éléments du système climatique pourraient alors entrer dans de nouveaux états irréversibles.

« Nous devons agir dès maintenant, rapidement et à grande échelle, afin de limiter autant que possible le dépassement de 1,5 degré Celsius », commente le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui considère que chaque dépassement annuel de 1,5 degré Celsius pourrait causer des dommages irréversibles et des répercussions désastreuses sur les économies de nombreux pays.

Ce dépassement serait presque inévitable selon la secrétaire générale de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), Celeste Saulo, « Cette série sans précédent de températures élevées, combinées à l’augmentation record des niveaux de gaz à effet de serre de l’année dernière, montre clairement qu’il sera pratiquement impossible de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 degré Celsius ces prochaines années », espérant que l’on revient aux objectifs plus ambitieux de l’accord de Paris.

La COP21 aurait d’ailleurs déjà donné des résultats selon plusieurs experts. Avant 2015, les prévisions des modèles climatiques donnaient un réchauffement de 4 degrés d’ici la fin du siècle. Dix ans après l’Accord de Paris, la planète se dirigerait plutôt vers un réchauffement de 2,3 à 2,5 degrés Celsius. Cela ne pourra cependant se produire que si les États respectent leurs engagements actuels. Depuis la signature de cet Accord, la croissance des émissions de GES aurait même ralenti et aurait augmenté d’environ 1 % depuis 2015, alors que c’était plutôt 18 % entre 2005 et 2014.

Rassembler tous les pays de la planète dans un accord sur un enjeu aussi complexe pourrait même être considéré une victoire pour le multilatéralisme. Le fait que les États soient obligés de mesurer leur performance les uns par rapport aux autres pourrait avoir créé une pression morale qui les aurait motivés à agir. Plus de 140 pays se seraient donc dotés en dix ans, d’un programme climatique pour atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 et 2070.

« Les COP ne servent pas à rien. Ça permet aussi de mettre dans le débat certains sujets », affirme le directeur général du groupe de réflexion Écologie responsable, Ferréol Delma, qui considère que ça permet aussi à tous les acteurs de prendre part au sujet.

Marine Braud, experte des enjeux environnementaux commente à ce sujet que depuis la COP16, elles sont toutes celles de la dernière chance. « Chaque demi-degré de réchauffement qu’on n’aura pas, c’est des morts évités, c’est des débats qui sont évités, donc dans tous les cas, il ne faut jamais abandonner le combat. »

Michel Gourd

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Chagos : le gouvernement de transition conteste le traité UK-Maurice et réclame le retour des Chagossiens

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Me Larifou

Le 9 novembre 2025, Me Saïd Larifou, avocat conseil du Gouvernement de Transition de l’archipel des Chagos, a publié un communiqué visant à clarifier la situation politique et juridique autour du traité signé le 22 mai 2025 entre le Royaume-Uni et la République de Maurice.

Selon Me Larifou, ce traité, bien qu’il reconnaisse la responsabilité britannique dans la déportation forcée du peuple chagossien, ne prend pas en compte l’ampleur du traumatisme historique causé par ces crimes coloniaux et ne répond pas aux aspirations légitimes du peuple à retourner sur ses terres.

L’archipel des Chagos, situé stratégiquement dans l’océan Indien, a été le théâtre de déportations massives dans les années 1960 et 1970. Les Chagossiens ont été contraints de quitter leur territoire, laissant derrière eux leur histoire, leur identité et leur culture. Le communiqué souligne que l’accord UK-Maurice a été conclu sans le consentement des Chagossiens et constitue, selon le Gouvernement de Transition, un déni de leur existence et de leurs droits fondamentaux.

Me Larifou rappelle que, malgré la reconnaissance officielle de la responsabilité britannique, les conséquences du passé restent présentes. Les Chagossiens vivent encore les séquelles de l’exil forcé, et leur droit au retour sur leur archipel demeure non réalisé. Le Gouvernement de Transition met ainsi en avant la nécessité d’une démarche qui respecte pleinement la souveraineté et les droits du peuple chagossien.

Outre les actions diplomatiques engagées auprès des Nations Unies, des organisations internationales et panafricaines, le communiqué annonce le lancement d’un recours judiciaire visant à réexaminer la validité du traité UK-Maurice. Le Gouvernement de Transition affirme ne reconnaître aucun effet juridique à cet accord sur le destin de l’archipel et conteste la légalité internationale de l’occupation et des activités menées sur les Chagos sans le consentement de leur population.

Ce communiqué met également en lumière le rôle persistant du droit international dans la reconnaissance des droits des peuples dépossédés. Il s’inscrit dans un combat de longue haleine pour rappeler que le passé colonial continue d’affecter la vie de milliers de Chagossiens, et que leur retour sur l’archipel est non seulement un impératif moral, mais également un droit fondamental à faire valoir sur la scène internationale.

Le message de Me Larifou est clair : tant que le peuple chagossien n’aura pas été consulté et que ses droits ne seront pas pleinement reconnus, tout accord sur le territoire des Chagos reste contesté et juridiquement fragile.

Mourad Benyahia 

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Championnat de Tunisie : malgré un nul face à l’Africain, l’Espérance garde la tête du classement

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L'Espérance de Tunis

Le stade Hammadi Agrebi de Radès a accueilli, ce dimanche 9 novembre 2025, le grand derby de la capitale tunisienne entre l’Espérance sportive de Tunis et le Club Africain, à l’occasion de la 14e journée du championnat de Tunisie de football (Ligue 1 professionnelle).

Un choc très attendu qui s’est conclu sur un score vierge (0-0), sans vainqueur ni buteur, mais riche en intensité et en tension.

Un derby sans buts, mais pas sans enjeu

Devant des tribunes pleines et une ambiance électrique, les deux formations ont livré un match engagé, marqué par la prudence tactique. L’Espérance, solide leader du championnat, cherchait à conforter son avance, tandis que le Club Africain espérait réduire l’écart et s’emparer de la première place.
Malgré quelques opportunités de part et d’autre, aucune des deux équipes n’est parvenue à faire la différence. Les défenses ont pris le pas sur les attaques, et les gardiens ont assuré l’essentiel.

Ce nul permet toutefois à l’Espérance sportive de Tunis de conserver la tête du classement avec 31 points, trois longueurs devant le Club Africain, son éternel rival, qui reste deuxième avec 28 points. Le match, s’il n’a pas offert de but, confirme que la lutte pour le titre s’annonce plus que jamais serrée.

Résultats des autres rencontres de la 14e journée

Dans les autres stades du pays, les rencontres de cette 14e journée se sont également jouées dimanche après-midi. À Métlaoui, le duel entre l’Étoile de Métlaoui et l’Espérance de Zarzis s’est soldé par un score nul et vierge (0-0), un résultat qui n’arrange aucune des deux formations, toujours en quête de régularité.

Du côté de Ben Guerdane, l’Union sportive de Ben Guerdane a réussi l’unique victoire de cette série de matchs, en s’imposant 1-0 face au Stade Tunisien, grâce à un penalty transformé par Ayoub Ben Machareg à la 15e minute. Une victoire importante pour l’équipe du Sud-Est, qui s’éloigne un peu plus de la zone rouge.

Le classement à l’issue de la journée

À l’issue de cette deuxième salve de matchs de la 14e journée, le classement reste dominé par l’Espérance (31 points), suivie du Club Africain (28 points) et du Stade Tunisien (27 points).
Viennent ensuite le Club Sfaxien et l’Union de Monastir (23 points chacun), l’Espérance de Zarzis (21 points) et l’Étoile de Métlaoui (20 points).
En milieu de tableau, on retrouve l’Étoile du Sahel (19 points), l’Union de Ben Guerdane (18 points), puis le trio composé du CS Marsa, de la Jeunesse d’El Omrane et du CAB de Bizerte (16 points chacun).
La Jeunesse de Kairouan suit avec 13 points, tandis que le bas du classement est occupé par Moustakbel Soliman (11 points)Moustakbel Gabès (9 points) et l’Olympique de Béja (8 points), plus que jamais en difficulté.

Dernier match de la journée

La 14e journée se conclura lundi 10 novembre au stade Chedly Zouiten, avec la rencontre entre la Jeunesse d’El Omrane et l’Olympique de Béja. Le match sera dirigé par Mohamed Laâqel, assisté à la VAR par Madji Bellagha.

Si cette journée n’a pas livré de grand bouleversement en tête du classement, elle confirme néanmoins la solidité de l’Espérance, toujours invaincue, et la constance du Club Africain, qui reste son principal concurrent. Le championnat tunisien poursuit ainsi son chemin, rythmé par une rivalité historique qui continue de passionner tout un pays.

D.G

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