À Marseille, le climat politique s’échauffe déjà à l’approche des municipales de 2026. La présidente du département des Bouches-du-Rhône et de la Métropole Aix-Marseille-Provence, Martine Vassal, a pris une décision symbolique mais lourde de sens : le retrait des délégations qu’elle avait confiées à Nora Preziosi, après que celle-ci a officialisé sa candidature à la mairie de Marseille.
L’arrêté signé le 12 novembre 2025 abroge les missions attribuées à l’élue depuis avril 2024, notamment dans le domaine de la politique de la ville et du Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain (NPNRU). Ce retrait intervient peu après l’annonce de la candidature de Nora Preziosi, en tandem avec Erwan Davoux, dans une démarche se voulant « citoyenne » et indépendante des partis traditionnels.
Sur le plan juridique, Martine Vassal est dans son plein droit. Le Code général des collectivités territoriales lui permet de retirer à tout moment une délégation, mesure qui repose uniquement sur la confiance politique. En d’autres termes, il ne s’agit ni d’une sanction ni d’une illégalité, mais d’un acte administratif fondé sur la rupture d’un lien de confiance.
Sur le plan politique, en revanche, la décision résonne comme une mise au pas. Martine Vassal, déjà fragilisée par des critiques internes et plusieurs départs dans son entourage, adresse un message clair à son camp : toute velléité d’indépendance sera sanctionnée. Ce retrait s’inscrit aussi dans un contexte tendu, marqué par la précédente éviction de Nora Preziosi de la présidence du bailleur social 13 Habitat, décision que la justice avait confirmée malgré son recours.
Cette nouvelle rupture illustre la désunion de la droite marseillaise, déchirée entre fidélité à Vassal et volonté de renouvellement. En tentant d’imposer la discipline, la présidente risque paradoxalement d’accentuer l’image d’un pouvoir autoritaire et d’alimenter la défiance au sein de son propre camp.
À quelques mois du début officiel de la campagne municipale, le dossier Preziosi met en lumière les failles d’un système où la délégation devient un instrument de contrôle politique. Si le droit donne raison à Martine Vassal, l’opinion pourrait y voir une manœuvre défensive, signe d’un leadership fragilisé et d’une droite en quête de souffle.
Rodolphe Saadé, président du groupe maritime CMA CGM, fera son entrée au conseil d’administration de Carrefour le 1er décembre 2025, devenant ainsi le deuxième actionnaire du géant de la distribution avec une participation de 4 % du capital, pour un investissement estimé à 400 millions d’euros.
Rodolphe Saadé remplace Eduardo Rossi, représentant de la holding Peninsula de la famille du milliardaire brésilien Abilio Diniz, décédé en janvier 2024. Le principal actionnaire de Carrefour demeure la famille Houzé, propriétaire des Galeries Lafayette.
Cette opération stratégique revêt une double portée. Pour la famille Saadé, elle renforce sa présence au Brésil, un marché clé où Carrefour est fortement implanté. L’an dernier, CMA CGM avait déjà consolidé son influence dans le pays avec l’acquisition de Santos Brasil, le principal opérateur portuaire brésilien. « Le Brésil est un pays à très fort potentiel, où la croissance est au rendez-vous », souligne Rodolphe Saadé. Pour CMA CGM, désormais numéro trois mondial du transport maritime, avec près de 700 navires et une présence dans 160 pays, cette implantation complète sa force logistique et commerciale dans un pays à forte dynamique économique.
Pour Carrefour, l’arrivée d’un actionnaire stable et influent vise à rassurer les marchés sur la solidité de son actionnariat, alors que le groupe, dirigé par Alexandre Bompard, poursuit sa stratégie internationale et sa transformation numérique. Cette nouvelle présence au capital constitue également un signal fort pour les investisseurs, garantissant une stabilité dans un contexte de concurrence accrue et d’évolution des habitudes de consommation.
Au-delà du transport et de la distribution, l’opération illustre la diversification de la famille Saadé. Déjà très présente dans les médias – BFM TV, RMC, La Provence, La Tribune, et le média vidéo Brut – et dans le cinéma avec 20 % du capital de Pathé, la famille étend désormais son influence à la grande distribution. Cette stratégie d’ouverture à plusieurs secteurs stratégiques, couplée à une implantation internationale, démontre sa capacité à allier vision économique, diversification culturelle et expansion globale.
L’entrée de Rodolphe Saadé au capital de Carrefour, combinée à la présence historique de CMA CGM au Brésil, illustre ainsi une stratégie de long terme où les secteurs de l’industrie, du commerce et de la culture se croisent, renforçant le rôle de la famille Saadé comme acteur incontournable sur plusieurs marchés majeurs et dans la scène économique internationale.
L'écrivain Boualem Sansal condamné à 5 ans de prison a été libéré.
Un écrivain, intellectuel et opposant était entré en prison. C’est un homme de 80 ans qui en ressort. On ne peut pas échapper à cette dimension humaine. La perception qu’on a du visage des gens est directement liée à la réalité qui nous fait face.
On le savait, on le disait mais c’est au moment de l’annonce de sa libération que la réalité m’est venue plus distinctement à mon esprit. Même si on le savait, c’était le fond de l’affaire, son injustice et la personnalité de l’homme qui avaient beaucoup occulté cette réalité d’un homme de 80 ans que seule la lâcheté peut prétendre qu’il soit un danger pour la nation.
Boualem Sansal avait été condamné pour intelligence avec un État étranger. C’est un État étranger qui s’immisce dans la décision des juges algériens par une demande de grâce qui lui est accordée. C’est au nom de la prétention du valeureux sentiment de fierté nationale que la décision avait été prise, c’est au nom de la fausseté de ce sentiment qu’elle s’évapore.
Qu’a fait cet homme de 80 ans ? Il a violé, assassiné, pris les armes contre son pays ? Non, il a tout simplement écrit des mots et prononcé des paroles. Il avait pourtant le droit de tout écrire et de tout dire sur son pays natal, le sien.
Peut-on imaginer un homme de 80 ans mettre en péril une nation ? C’est avouer sa faiblesse de le faire croire. Boualem Sansal n’est pas le seul incarcéré en Algérie pour opposition politique mais il en est l’arbre qui cache la forêt. Que cet arbre dissimule tout le reste est à prendre en compte mais ne jamais en faire un argument pour ne pas en rendre compte.
Ce n’est pas nouveau dans l’histoire de l’humanité, ce sont les figures les plus connues dans un combat qui en compte bien d’autres qui s’incrustent dans les mémoires. Cela me dérange mais aujourd’hui nous avons à faire à un homme de 80 ans, affaibli et certainement détruit dans sa capacité de combat.
Il est des exils dont on revient disait Napoléon mais il en est qui dont on ne revient plus, cela avait été son cas. Cette comparaison n’est évoquée que pour la généralisation du propos et non pour équivalence des personnages.
Il ne reste à cet homme de quatre-vingt ans que la mémoire d’une brisure ou la tentation d’une vengeance. Ni l’une ni l’autre ne pourront vaincre l’âge si ce n’est à laisser la place à la réflexion.
J’ai été l’un des plus farouches critiques de Boualem Sansal et de Kamel Daoud mais ni pour leur droit à la parole libre ni pour le reniement de leur talent mais d’avoir dérivé dangereusement vers les milieux et opinions de l’extrême droite. Ce qui d’ailleurs est un droit absolu même si je le critique.
Et si cela est à modérer, ils ont certainement donné le flanc à cette idéologie d’extrême droite dont les partisans voulaient les entendre dire ce qu’ils disaient.
Face à un homme de 80 ans, je ne retiendrai que la facette la plus positive. L’âge mûre est celui de la meilleure rencontre avec l’humanité. Il est l’âge de la raison et plus la fougue exposée aux fautes.
80 ans, dans dix ans, j’espère que j’aurais la même sérénité de l’esprit car si, contrairement au malheureux Boualem, je n’ai pas connu la prison, j’aurais moi aussi perdu mon pays.
« Deleuze cite les paroles suivantes de Sartre : « En un mot, la littérature constitue la subjectivité d’une société en état de révolution permanente. ». » (1)
Aller au secours d’un des siens, ce ne peut être qu’une vertu que naturellement tous louent. Mais la victime a réussi à s’attirer les regards de « l’aristocratie du monde » (Régis Debray). Qu’est-ce qui empêche la droite de parler de la vacance du poste d’intellectuel engagé, quand la gauche (pas toute) se désengage de tous ses attributs historiques sans la moindre retenue morale ? Sartre est mort, et je loue sa mort parce qu’il aurait été sali par la vie d’un champ intellectuel où seules quelques tribunes sont diffusées pour défendre les opprimés et où tous prennent leurs distances vis-à-vis des causes humaines. Plutôt en sélectionnent. La solidarité reste une valeur essentielle dont use l’humain pour préserver son humanité et échapper à ce qui vient des dominants. Marie-Claude Blais écrit : « Les idées d’association et de coopération, renforcées par le développement des sciences de la nature, jouent un rôle immense dans l’émergence de la notion de solidarité qui accompagnera toutes les réflexions sur la “science sociale” au cours du siècle. » (1)
Le cas du poète Mohamed Tadjadit et de Boualem Sansal est édifiant. Sansal a atteint l’universalité par le fait d’avoir été emprisonné. L’écho a été bien suivi. La lecture populaire progressiste consacre la rupture avec des concepts creux utilisés comme credo par les chancelleries occidentales et par les espaces où diverses officines exercent. Les intellectuels, on leur accordera les circonstances atténuantes, sont occupés par les guerres menées par les sionistes au peuple palestinien et par la guerre russo-ukrainienne. Rien de cela : silence radio. La scène intellectuelle s’est-elle tellement ringardisée, voire infestée ? Si les détenus d’opinions ne sont pas défendus par les intellectuels progressistes, c’est parce qu’ils auraient été porteurs de messages qui n’intéressent par les chancelleries occidentales. Jamais vu, les détenus sont livrés à la répression exercée par le pouvoir et leur cas n’a pas eu de portée à la mesure de l’universel. Celui-ci n’atteint pas les « corps vivants invisibles ». Claude Obadia écrit : « Transcendantal selon les uns, chimérique selon les autres, l’universel est régulièrement mis au banc des accusés. » (2)
Boualem Sansal écrivain répondant aux standards « internationaux » ; ça suffit. Non ? C’est défendre la lumière et le génie, c’est vaincre le diable qui loge partout dans les pays décolonisés. Certes, Boualem Sansal a défié le pouvoir dans plusieurs de ses interventions médiatiques du temps du président déchu ; mais il n’a pas refusé le confort auquel donnent accès les médias et les divers espaces culturels. Cela se comprend et…se défend.
En revanche, Mohamed Tadjadit évolue dans un espace qui n’intéresse nullement les progressistes : il écrit au peuple peut-être… en l’essentialisant. La solidarité universelle n’est pas le devoir des seuls peuples civilisés. On voit des partis de la droite algérienne s’allier avec le diable pour laisser la répression s’exercer sans moindre résistance. Le cas de Mohamed Tadjadit incarne le pouvoir qu’ont les droites officielles et populistes sur le peuple. Nos progressistes s’enorgueillissent de leur chauvinisme nationaliste. Nous n’avons pas vu des travaux de recherche universitaires liés à la poésie populaire engagée. Une poésie qui, que je sache, n’existe pas. Cela pose de sérieuses problématiques universitaires, philosophiques, sociologiques et éthiques. « La poésie populaire – chant ou chanson – et le conte sont les deux principaux genres de la littérature populaire. Grâce à la mélodie, la poésie est enregistrée dans la mémoire collective et sa transmission de bouche à oreille, d’une contrée à une autre et d’une génération à une autre, reste assurée. Toutefois, les études consacrées à cette poésie, voire à la littérature populaire de manière générale, sont peu nombreuses, comparées à celles faites sur la poésie « classique »i. » (3)
« Les comportements discriminatoires tels que le racisme ou le sexisme s’accompagnent en effet de représentations stéréotypées des groupes à l’égard desquels la discrimination s’exerce… » (4) La stéréotypisation de l’image de l’intellectuel joue contre les poètes populaires. Ceux-ci font intervenir des fragments discursifs sur lesquels les idéologies « nationales » et non « civilisationnelles » ne sont pas en harmonie. Dans l’image occidentale, le poète symbolise la sensibilité la plus extrême et la plus importante ; alors qu’en Algérie, il ne symbolise que l’inverse de la virilité et de la bravoure. Dans ses errances intellectuelles, le sujet algérien colle au poète, pour le discréditer, et à tort, la féminité ; alors que la féminité a ses symboles révolutionnaires et historiques. Si Boualem Sansal est défendu c’est que l’espace sémiotique de l’Occident n’accepte pas que l’intellectuel soit malmené ; mais pour défendre Tadjadit, il faut passer par les réseaux d’influence et les groupes de pression, qui, en Algérie, sont tenus par les conservateurs, toutes tendances confondues, y compris la droite ethnoculturelle. Le poète qui s’exprime en kabyle ou en arabe populaire n’intéresserait jamais les cercles de pression liés à la finance ou au savoir consacré. Ces groupes défendent des thématiques religieuses, d’une part ; et identitaire, d’autre part.
Ecrire en arabe populaire ou en kabyle, c’est se jeter à la marge réservée aux damnés et aux proscrits. Cela nous renvoie directement à la gauche du mouvement d’avril quatre-vingts. La gauche des avrilistes a réussi un coup de maître : chasser l’essentialisation que la droite du mouvement voulait, suite à des tendances pathologiques et à des penchants narcissiques, à tout prix imposer.
En gros, Sansal, c’est Sansal ; Tadjadit, c’est Tadjadit. Tous, dans le système auquel nous appartenons et auquel nous contribuons, savent ce qui les attend : les jeux de coulisses pour certains, des gouttes d’encre pour d’autres, des commentaires de presse pour les journaleux, des fonctionnalités numériques pour les internautes. Et tout se plie en quelques heures. Le système se serait nourri de notre psyché et de notre sang, et tout rentre dans l’ordre. L’imprévu a été prévu. Le commandant de bord ne perd pas son identité ni bio-civil, ni ontique.
Abane Madi
Notes bibliographiques :
Kôjin Karatani, « La fin de la littérature moderne », dans Fabula-LhT, n° 6, « Tombeaux de la littérature », dir. Alexandre Gefen, May 2009,URL : http://www.fabula.org/lht/6/karatani.html, page consultée le 12 November 2025. DOI : https://doi.org/10.58282/lht.138
Blais, Marie-Claude. « Solidarité : une idée politique ? ». Solidarité(s) : Perspectives juridiques, édité par Maryvonne Hecquard-Théron, Presses de l’Université Toulouse Capitole, 2009, https://doi.org/10.4000/books.putc.218.
In OULED HADDAR, S. (2020). La poésie populaire algérienne dans la Revue africaine: Quelles expressions?. مجلة الواحات للبحوث و الدراسات, 13(2), 1569-1587. https://asjp.cerist.dz/en/article/138078
Georges Schadron, « De la naissance d’un stéréotype à son internalisation », Cahiers de l’Urmis [En ligne], 10-11 | 2006, mis en ligne le 15 décembre 2006, consulté le 12 novembre 2025. URL : http://journals.openedition.org/urmis/220 ; DOI : https://doi.org/10.4000/urmis.220
Marseille est de nouveau plongée dans le deuil et l’angoisse. Ce jeudi 13 novembre 2025, le frère du militant écologiste et président de l’association Conscience, Amine Kessaci (sur la photo), a été abattu en plein après-midi dans le 4e arrondissement. La tragédie frappe la famille cinq ans après la mort de Brahim, autre frère d’Amine, retrouvé mort dans une voiture incendiée en décembre 2020, sur fond de narcotrafic.
La victime, âgée de 20 ans, se trouvait au volant d’une Audi Q3, appartenant à sa sœur, devant une pharmacie au rond-point Claudie-Darcy, non loin du siège du Conseil départemental. Vers 14h30, alors qu’il venait de s’arrêter dans ce quartier qu’il fréquentait régulièrement, un commando de deux hommes casqués, juchés sur un trail Yamaha, a surgi. L’un d’eux a ouvert le feu, touchant le jeune homme par trois balles au thorax et une quatrième à la main. Le commando a immédiatement pris la fuite vers le 13e arrondissement, disparaissant malgré la mobilisation rapide des forces de l’ordre.
À l’arrivée des marins-pompiers et du Samu 13, le jeune homme était déjà en arrêt cardiaque. Les équipes médicales ont tenté en vain de le réanimer. Il a été déclaré décédé vers 15h30. Selon La Provence, il rêvait de devenir policier et devait repasser le concours de gardien de la paix le mois prochain. Son nom était surtout connu du grand public en raison de son lien avec Amine Kessaci, engagé depuis la mort de son frère Brahim dans la lutte contre le narcotrafic et le banditisme à Marseille.
Amine Kessaci, âgé de 22 ans, est devenu une figure locale après ce premier drame familial. Militant écologiste et président de l’association Conscience, il accompagne les familles victimes du narcotrafic et dénonce régulièrement l’emprise des trafiquants sur la ville. Il avait récemment publié un livre, Marseille, essuie tes larmes. Vivre et mourir en terre de narcotrafic, une lettre ouverte à son frère Brahim et un cri contre la violence qui gangrène les quartiers marseillais. Le destin tragique de son jeune frère rend aujourd’hui ce titre particulièrement poignant.
Les services de l’État avaient détecté des menaces contre la famille Kessaci depuis plus d’un mois. Amine bénéficiait déjà d’une protection policière permanente. La brigade criminelle de la DCOS a ouvert une enquête pour tenter de comprendre si le meurtre constitue un message d’intimidation visant la famille ou une erreur de cible. La préfète de police déléguée, Corinne Simon, et le maire de Marseille, Benoît Payan, se sont rendus sur place pour constater l’ampleur du drame et soutenir les proches.
Un proche a confié : « Le petit frère d’Amine était tout aussi engagé que lui dans la lutte contre le narcotrafic. Il accompagnait partout le combat de l’association Conscience. Perdre de nouveau un frère, le plus jeune… c’est un choc terrible. Espérons que toute la famille sera protégée et que justice sera faite. »
Cette nouvelle tragédie relance une fois de plus le débat sur la sécurité à Marseille et la capacité de la ville à protéger ses habitants face aux règlements de comptes liés au narcotrafic. Les familles comme les Kessaci, engagées publiquement contre ces réseaux criminels, restent particulièrement exposées à la violence. Les habitants du 4e arrondissement, choqués par l’attaque en plein jour, témoignent de leur inquiétude face à la montée de la criminalité dans leur quotidien.
Alors que la ville tente de se relever de ce nouvel épisode sanglant, la mémoire de Brahim et de ce deuxième frère assassiné se mêle désormais à celle d’Amine Kessaci, qui continue de porter son combat. La douleur familiale se transforme en cri civique : Marseille, confrontée à ses ombres et à ses violences, ne peut plus ignorer la détresse de ceux qui refusent de plier devant les trafiquants.
Synthèse Mourad Benyahia
Le Matin d’Algérie présente ses sincères condoléances à la famille Kessaci et exprime tout son soutien à Amine Kessaci dans cette épreuve terrible. La rédaction se tient aux côtés de ceux qui, comme lui, s’engagent courageusement contre la violence et le narcotrafic à Marseille.
Dans la nuit du 13 au 14 novembre 2025, les forêts et montagnes de la wilaya de Tipaza, à l’ouest d’Alger, ont été le théâtre d’un incendie spectaculaire et dévastateur. Les flammes se sont propagées rapidement depuis Hadjra El-Ness jusqu’à Damous, touchant également Gouraya, Muslimoun et El-Arhat, des zones boisées qui longent le littoral.
Les conditions météorologiques ont aggravé la situation : des vents puissants ont rendu le contrôle des incendies particulièrement difficile et ont favorisé leur propagation. Les habitants ont décrit la nuit comme un « passage de l’enfer », plusieurs quartiers étant cernés par les flammes, la visibilité réduite et certaines routes coupées.
Les services de sécurité ont procédé à l’évacuation urgente de centaines de familles, en coordination avec la protection civile et la gendarmerie nationale. Des images et témoignages rapportent des scènes d’une extrême gravité, illustrant la complexité et le danger de l’incendie.
Le feu s’est également propagé dans les hauteurs de El-Arhat, créant une série de foyers interconnectés. La direction de la protection civile a renforcé ses équipes avec des moyens venus de Blida et de la wilaya de Tipaza, déployant des hommes et du matériel pour contenir l’incendie dans des lieux tels que le Douar Boukhelija à El-Arhat, la forêt Amarcha à Meselmoun et le Douar Chouala à Beni Mlik.
Au total, la protection civile a recensé 17 incendies sur 10 wilayas au cours de la seule journée, avec plusieurs foyers encore sous surveillance et trois déjà éteints. Tipaza reste la région la plus touchée.
Le ministre en chef Seffi Ghrib s’est rendu sur place à Hadjra El-Ness, accompagné du ministre de l’Intérieur Saïd Sayout, du ministre de l’Agriculture, du commandant de la gendarmerie nationale, du directeur général de la protection civile et du wali de Tipaza, pour superviser les opérations. Le ministre a visité les familles évacuées et a donné des instructions strictes pour assurer leur prise en charge.
La protection civile a appelé la population à rester éloignée des zones à risque et à signaler immédiatement tout nouveau foyer via le numéro d’urgence 14 ou le numéro vert 1021. Les équipes poursuivent leur « bataille pour la maîtrise » des flammes, afin de protéger à la fois le couvert végétal et les zones habitées..
Il y a dans cette affaire Boualem Sansal quelque chose de profondément algérien : une certitude proclamée avec fracas, martelée pendant des semaines, exhibée comme une démonstration de force… puis réduite à un simple pschitt, un effondrement de torse, un de ces dégonflages politiques que personne n’ose assumer.
On avait promis la fermeté, la souveraineté, l’autorité. On se retrouve avec une grâce présidentielle expédiée dans le silence d’un couloir, comme on efface une bêtise en espérant que personne ne l’a remarquée.
Pendant que la machine officielle répétait, la bouche pleine de conviction, que l’emprisonnement de Boualem Sansal était un choix clair, solide, “irréversible”, la réalité préparait déjà sa gifle. Il a suffi d’un froncement de sourcil venu de Berlin pour que tout ce qui tenait lieu de posture s’évapore. Les mêmes voix qui parlaient de principe ont soudain disparu dans une brume commode. Personne n’a expliqué le virage. Personne n’a assumé l’arrière-goût de déculottée. On a juste glissé la grâce comme une petite enveloppe administrative sous la porte, en espérant que le monde applaudirait la générosité du geste.
Mais le plus spectaculaire n’est pas la grâce en elle-même. C’est le ballet qui a suivi. Toujours le même : pour compenser l’effondrement, on déploie l’intimidation. Le ministre de l’Intérieur s’est immédiatement replacé dans son rôle d’homme-de-main institutionnel, menaçant quiconque oserait contredire le « Président », comme si hausser la voix pouvait rhabiller un pouvoir pris en flagrant délit de recul. On l’a vu bomber lui aussi un torse cabossé, promettant tempête aux insolents, aux sceptiques, aux observateurs.
L’autorité par procuration : quand le pouvoir chancelle, on crie sur la foule.
Et la meute a suivi. Elle suit toujours. Ceux qui, la veille encore, justifiaient l’incarcération au nom d’une sacro-sainte cohérence nationale, se sont mis à louer la clémence au nom d’une vision stratégique “lointaine”.
Une vision lointaine… vraiment ? Cette formule a été répétée à un tel point qu’elle en est devenue un aveu : plus la vision est lointaine, moins il y a quelque chose à voir. Le pouvoir promet un horizon lumineux, pendant qu’il trébuche sur ses propres contradictions. On parle de stratégie comme on parle de mirage : ça fait illusion, ça occupe, ça rassure ceux qui ont besoin d’être rassurés.
Le plus irritant, peut-être, c’est ce mensonge collectif qui accompagne chaque geste improvisé : cette volonté obstinée de faire passer une défaite pour un acte souverain.
Comme si un pays pouvait fonder son autorité sur des contorsions successives. On aurait pu entendre un mot clair : “On s’est trompé”, “On corrige”, “On assume”. Mais non. On préfère jouer la carte du mystère, cette poudre politique qu’on jette sur le feu pour que la fumée remplace le sens.
Et pendant que Sansal sort de prison, d’autres y pourrissent. Pas des gens connus, pas des têtes passées à TF1 ou à Francfort, pas des plumes traduites en dix langues. Des jeunes. Des sans-parrain diplomatique. Des poètes de la rue, des blogueurs, des gamins qui ont cru que parler était encore un droit.
Mohamed Tadjadit, ce poète du Hirak condamné à cinq ans pour un souffle trop libre, donne à cette histoire son contraste le plus brutal. On dirait presque qu’il prolonge, à lui seul, la peine que Sansal n’a pas faite. Comme si la balance de la répression devait rester stable : un écrivain libéré d’un côté, un poète sacrifié de l’autre. La mathématique du régime : pour chaque grâce sous pression, il faut un exemple sous serrage.
C’est là que la phrase qui suit prend tout son sens, et toute son amertume : si Sansal avait été un simple citoyen, sans réseau, sans signature éditoriale, sans audience internationale, sans photographie avec un président européen, il serait encore derrière les barreaux, en attendant qu’un fonctionnaire se rappelle vaguement son nom. Car la grâce n’est pas une décision politique : c’est un réglage diplomatique. Une concession externe, pas une réforme interne. Une soupape, pas un geste de justice.
Et c’est justement là que l’affaire devient presque parfaite comme satire politique : on a voulu frapper un grand coup, on a fini par se frapper soi-même. On a menacé, grondé, promis la fermeté, et soudain tout s’est dégonflé. Reste un silence, un malaise, et l’image d’un pouvoir qui avance comme un funambule ivre, oscillant entre excès d’autorité et paniques soudaines, incapable de prévoir la conséquence de ses propres gestes.
Alors bien sûr, chacun essaie de sauver la façade. Chacun invente une justification, une logique, un fil rouge dans ce qui ressemble à une navigation au radar. Mais rien n’effacera ce que l’affaire Sansal a exposé : derrière les discours martiaux, derrière les menaces de certains ministres, derrière la mise en scène virile, il n’y a ni stratégie, ni colonne vertébrale, ni vision.
Il n’y a qu’un réflexe : plier quand la pression vient d’ailleurs, punir quand la critique vient d’ici.
Voilà la seule cohérence du système.
Le reste n’est que posture, poudre, et peur mal déguisée.
Soldats kabyles de la Première Guerre mondiale.
Crédit photo : Meziane Lechani
On sait que l’avènement de la Première Guerre mondiale ou de la Grande Guerre s’est produit à l’issue de l’assassinat de l’archiduc François Ferdinand héritier du trône d’Autriche-Hongrie et de son épouse, le 28 juin 1914, à Sarajevo, par un jeune nationaliste serbe sur fond de rivalités politiques et économiques qui animaient les puissances du continent européen.
Ce crime fut l’étincelle qui déclencha le 28 juillet 1914 le conflit militaire le plus meurtrier de l’époque moderne. Il vit s’affronter initialement le bloc allié formé de la France, la Grande-Bretagne et l’Empire russe contre la coalition composée de l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et l’Italie.
Les états-majors d’armées qui tablaient sur une issue rapide par une guerre de mouvement durent rapidement réviser leurs plans, au fur et à mesure du déroulement des affrontements et de leur enlisement dans une interminable guerre d’usure dans les tranchées consommatrice d’hommes : 10 millions, selon les auteurs, de matériels et munitions en quantités notoires.
C’est pour remédier à cet enlisement meurtrier et ses conséquences politiques et socio-économiques désastreuses, que les belligérants européens entreprirent d’internationaliser la guerre, en cherchant de nouveaux alliés.
En France, l’idée de faire appel aux colonies revient au Général Galliéni (1849-1916), inspiré par le Général Mangin (1866-1925) promoteur de la Force noire dans un essai éponyme publié en 1910 (1),après avoir puisé dans le corps des réservistes. Ce fut ainsi un effectif près de 650 000 coloniaux qui fut mobilisé pendant quatre ans, le plus souvent de force que de gré, sur les théâtres d’opérations, dès août 1914. Parmi le nombre de conscrits, les historiens avancent les chiffres (2) de 180 000 Algériens, 40 000 Marocains, 80 000 Tunisiens, 43 000 Indochinois, 40 000 Malgache et 215 000 Noirs africains, enrôlés pour compenser les pertes militaires françaises et tenir la ligne de front large de 700 km. De fait, le corps d’armée ainsi constitué se trouva sociologiquement (au sens marxiste du mot), anthropologiquement et physiquement disparate.
Une fois leur transit par Marseille accompli, les troupes coloniales (des fantassins pour l’essentiel) s’illustrèrent courageusement sur leurs fronts d’affectation dont les mémorables batailles de Verdun ( à partir de février 1916 ) , de la Somme (depuis juillet 1916), du Chemin des Dames (avril 1917), de l’Oise (mars 1918 ) ; ou bien encore sur le front oriental, dans l’enfer des Dardanelles, de mars 1915 à janvier 1916 . Autant de noms restés gravés dans le triste panthéon des hauts lieux des victimes de guerre.
Le tribut à payer fut lourd pour les coloniaux. Il est estimé entre 85 000 et 90 000 morts ou disparus d’après le recoupement des sources de Pascal Blanchard et Gilles Manceron (2014).
Parallèlement, pour soutenir l’effort de guerre, à l’arrière, le S.T.O.C. (Service d’organisation des travailleurs coloniaux ) fut créé, en janvier 1916, pour mobiliser les travailleurs des colonies et les prisonniers de guerre dans les arsenaux et usines d’armement, sous surveillance étroite; quand leur force de travail ne fut pas employée dans des travaux agricoles pour répondre aux exigences de main-d’œuvre.
L’Armistice signé au petit matin du 11 novembre 1918, actant la défaite de l’Allemagne et de ses alliés, l’heure était au terrible bilan humain : 18 millions de morts civils ou militaires (sans compter les nombreux mutilés de guerre), et à la démobilisation, nonobstant les derniers Poilus de Silicie en Orient.
De retour en Algérie, les coloniaux rescapés de ce conflit meurtrier retrouvèrent en même temps que leurs proches soulagés, leur condition de dominés en dépit des lois libérales du gouverneur Charles Jonnart (1857-1927), votées en 1919, inspirées par un indigénophile : le ministre de la guerre Georges Clemenceau (1841-1929) (3), en reconnaissance des sacrifices des tirailleurs algériens, malgré l’hostilité du Parti colonial. Sa volonté réformatrice contenue reçut néanmoins, par pragmatisme, les faveurs du mouvement des Jeunes Algériens incarné alors par l’Émir Khaled (1875-1936) revenu du front avec le grade d’officier.
Par leur ampleur timide, les dispositions de la loi Jonnart qui visaient à accorder le droit de vote à une minorité de sujets musulmans aux élections municipales, départementales et aux délégations financières n’étaient pas de nature à rendre justice aux sacrifices des tirailleurs algériens entourés par une indifférence ingrate au moment où la société algérienne était dans un état d’affaissement historique, note l’historien M. Harbi dans 1954, la guerre commence en Algérie (Complexe, 1998).
Tandis que les parades de l’Armistice battaient leur plein dans le camp de la victoire, et que leurs camarades français du front s’organisaient pour faire valoir leurs droits par l’efflorescence d’Amicales et d’Associations d’ anciens combattants, les tirailleurs algériens furent relégués à la marge de toutes les commémorations officielles. Leurs droits ignorés. À la fraternité d’armes qu’il convient de tempérer, succéda une grande désillusion. De guerre lasse d’attendre une reconnaissance fût-elle tardive, un noyau de poilus algériens combatifs décida de pallier cette carence en fondant, en 1928, au village d’Aït Halli (4) la première Ligue de défense des combattants et mutilés de guerre kabyles, nous renseigne le journal La Presse libre d’Alger (5) :
Une ligue d’anciens combattants et de victimes de la guerre, vient d’être créée à Aït Halli (Iraten) dans la commune-mixte de Fort-National. Cette ligue a pour but de resserrer les liens de fraternité et de solidarité entre ses adhérents et les groupements similaires européens et de redresser les erreurs, les omissions, les abus et les violations des lois et règlements dont souffrent ses adhérents. Les 9/10 èmes de nos camarades n’ont pas reçu, depuis bientôt dix ans leur dû, soit par ignorance, soit par inertie administrative qu’une action individuelle n’arrive pas souvent à vaincre.
Combien parmi nous ont obtenu des prêts pour construction, exploitations agricoles ? Combien ont leurs enfants admis comme pupilles de la nation pour les faire bénéficier des avantages accordés à ceux-ci : bourses d’études, etc. ? Combien sont-ils ceux qui ont obtenu une licence de café maure ou de permis de port d’arme, qu’on semble ne réserver qu’aux agents électoraux de certains élus ? Combien d’ascendants ont reçu intégralement les indemnités qui leur sont dues ? Il faut avoir vécu dans nos milieux pour se rendre compte de cet état des choses. Il nous est donc apparu la nécessité impérieuse de nous grouper, de réunir nos énergies pour défendre les droits sacrés que nous tenons de nos sacrifices.
Nous entendons lutter sans forfanterie ni défaillance, en usant de tous les moyens que la loi nous permet pour faire obtenir satisfaction à nos camarades lésés (…). Notre champ d’action est bien vaste mais nous avons la certitude, si nous sommes secondés, d’arriver au but que nous nous sommes assignés. La Ligue dont nous jetons les bases ne sera qu’une cellule d’une confédération d’associations d’anciens combattants kabyles (…). Le bureau est provisoirement placé dans un des locaux au café Lechani. La réunion préparatoire a désigné comme président, Lokmane ; Secrétaire, Lechani ; secrétaire-adjoint, Rekhou ; trésorier, Lateb Salem; assesseurs, Zeggane et Lechani Chabane. Nous faisons appel à tous nos camarades mutilés de la commune pour venir grossir nos rangs (…).
Cantonnée au café maure d’Aït Halli (6), la Ligue kabyle ouvrira par la suite, en 1930, une permanence dans les villes de Tizi-Ouzou et Larbâa n Aït Yiraten (anciennement Fort-National), après qu’elle s’étoffa et s’organisa par un travail de sensibilisation et de propagande auprès des anciens poilus et mutilés de Kabylie, et auprès des autorités coloniales pour faire valoir leurs droits légitimes chèrement acquis sur les théâtres de combats. Elle prit alors le nom de Ligue de défense des anciens combattants et victimes de guerre indigènes d’ Algérie. Ses activités amicalistes perdurèrent jusqu’à l’avènement du Régime autoritaire de Vichy qui mit fin à son action, comme à toutes les activités militantes politiques et syndicales de la colonie.
Alors que les anciens poilus français purent compter sur le concours d’œuvres littéraires rédigées par des plumes célèbres impliquées, pour entretenir leur mémoire et le souvenir de leurs sacrifices : comme Charles Péguy, Guillaume Apollinaire, Henri Barbusse ou bien encore Maurice Genevoix dans ses récits puissants réunis dans son ouvrage phare Ceux de 14, qui connurent un grand succès populaire (7).
Rien de tel dans les sociétés coloniales sans tradition scripturaire ou désuète. Qu’elles aient été de langue kabyle, bambara, créole ou annamite c’est par le verbe que la mémoire de cette guerre totale fut transmise, par elles, comme en porte le témoignage fragile ces vers anonymes recueillis dans les Aït Yiraten, en Haute-Kabylie, tirés de productions présentement ensevelies par l’oubli.
Tadyant yexdem uṛumi L’intrigue qu’a échafaudé le Français
Kul taddart yebna llakul En bâtissant une école dans chaque village
Yewwi arraw-nneɣ Il s’est accaparé de nos enfants
Nekkni mebɛid nettmuqul Sous notre regard impuissant
Mi meqqrit d irgazen Une fois devenus hommes
Yewwi-ten tarayul. Il a fait d’eux des tirailleurs.
Yewwet-itt Giyyum deg yigenni Guillaume (8) a bombardé ciel
Simmal d tirni Avec une force redoublée
D Leqbayel i yezwaren i rrṣaṣ Ce sont les Kabyles qui devancèrent le feu
Ɣaḍen-i(yi) leɛsaker imeɣban Ma peine va vers les malheureux militaires
Di lgirra Lalman De la guerre contre l’Allemagne
Wi immuten, yemdel di lfista-s. Leurs morts ont été ensevelis dans leur uniforme (9).
Cet épisode méconnu de l’histoire de l’Algérie contemporaine pour des raisons relevant du silence post-traumatique des acteurs qui a endigué les récits généalogiques, de l’accélération du cours de l’histoire ou encore de la sélectivité de la France officielle , témoigne de la faculté de la société autochtone d’Algérie à s’organiser, au tournant des années 1920-30, telles que les conditions de son temps le leur permettaient, grâce à une mince avant-garde inspirante pour la circulation des opinions anticolonialistes parmi les masses prolétaires sur lesquelles viendront se greffer les luttes de décolonisation.
1- La Force noire, Paris, Hachette, réédition L’Harmattan, 2011.
2- Statistiques officielles du Musée de la Grande Guerre de Meaux.
3- Surnommé pour ses qualités militaires : « le tigre », « le Père la victoire », « Clemenceau le Kabyle » pour avoir nettoyé les rangs de l’armée française avec la même ardeur que mettaient à leur tâche les travailleurs kabyles de la voirie de Paris, dans un climat de xénophobie ; ou bien encore « le Vendéen rouge » par ses adversaires colonialistes.
4- Village de cultivateurs de la confédération des Aït Yiraten de près de 600 âmes alors. Altitude 550 à 600 m. Il fut incendié, en 1857, lors de la Campagne de Kabylie pour avoir opposé une résistance énergique aux troupes du maréchal Randon.
5- Dans sa livraison du 9 septembre 1928, p. 5. 6- Lieu de sociabilité de fortune comme il y en eût dans l’Algérie rurale et miséreuse, érigé à Tazeggwart en branchages solidifiés par de la boue séchée, recouverts de chaume. Lqahwa n we3cuc, en kabyle, fut tenue par Akli Waâli et Mokrane n Ali Oubelkacem. 7- Sous Verdun (avril 1916), Nuits de guerre (décembre 1916), Au seuil des guitounes (septembre 1918), La Boue (février 1921) et Les Éparges (septembre 1921) rassemblés dans Ceux de 14, en 1949, réédition Flammarion, 2020. 8- Le Kaiser Guillaume II (1859-1941) dernier empereur allemand, général major durant la Première Guerre mondiale. Il fut affublé du titre de Hadj Guillaume dans les poésies populaires chantées, en raison de sa supposée conversion à l’islam instillée par la propagande allemande, et certains cercles turcophiles.
9- Allusion à leur enterrement privés du rite musulman et de sépulture, loin des leurs.
Quelques références bibliographiques pour aller plus loin
Antier, C. : Les soldats des colonies dans la Première Guerre mondiale, Ouest-France,2014.
D’Andurain, J. : Les troupes coloniales, une histoire politique et militaire, Passés composés, 2024.
Frémaux, J. : Les colonies dans la Grande Guerre, Combats et épreuves des peuples d’outre-mer, éd.14/18, 2006.
Gastaut, Y., Yahi, N. et Blanchard, P. : « La Grande Guerre des soldats et tirailleurs coloniauxmaghrébins », Migrations Société, 156, 2014.
Lallaoui, M. : Les Poilus d’ailleurs, Au nom de la mémoire,2014.
Manceron, G. : « Les Soldats coloniaux de 14-18, éternels oubliés ? », Mediapart, 10novembre 2014.
Miranville, M. et Bille, S. : Poilus nègres : Soldats créoles et africains en 14/18, Dagan, 2014.
Depuis le 29 octobre 2025, Jaouhar Ben Mbarek, figure de l’opposition politique tunisienne, est en grève de la faim pour protester contre ce qu’il dénonce comme une « arrestation arbitraire » et un « procès inéquitable » dans le cadre de l’affaire dite du « complot sur la sécurité de l’État ».
En Tunisie de l’autocrate Kaïs Saïed, les prisons ne sont pas seulement des lieux de privation des droits, mais des lieux sombres où s’exercent la brutalité et la torture contre les prisonniers d’opinion pour les briser.
Le 11 novembre, des informations alarmantes ont circulé sur des violences dont Ben Mbarek aurait été victime à la prison de Belli à Nabeul. Amnesty International a exprimé sa profonde inquiétude et demandé l’ouverture immédiate d’une enquête indépendante et impartiale, ainsi que la mise en cause des responsables de ces abus. L’organisation a également exigé que Ben Mbarek et les autres détenus politiques aient un accès immédiat à des soins médicaux et soient libérés, rappelant que leur détention résulterait uniquement de l’exercice pacifique de droits politiques.
Sa sœur et avocate, Hanan Khamiri, rapporte qu’à sa visite, Ben Mbarek était dans un état de « fatigue extrême » et incapable de marcher. Elle a constaté des « contusions et une fracture d’une côte », provoquant des difficultés respiratoires. Selon elle, les violences auraient impliqué des agents pénitentiaires et d’autres détenus, et se seraient produites dans un endroit dépourvu de caméras de surveillance. « Il a été frappé, roué de coups, perdant brièvement connaissance avant de subir de nouveaux assauts », précise-t-elle. Elle a également constaté des ecchymoses et des douleurs persistantes au niveau de la cuisse.
Le père de Ben Mbarek, Ezzedine El-Hazki, s’est rendu à la prison de Belli, sans pouvoir voir son fils. Il exige un examen médical indépendant et le suivi judiciaire des auteurs de l’agression. Pour le Parti républicain, qui suit de près l’affaire, ces violences s’inscrivent dans une « politique de répression visant à faire taire toute voix critique ». Wissam Al-Saghir, porte-parole du parti, dénonce une « série de violations visant à étouffer toute expression libre » et affirme que « la bataille est devenue nationale et ne concerne plus uniquement des individus ».
Face à ces accusations, l’administration pénitentiaire tunisienne maintient qu’aucune violence systématique n’a eu lieu et conteste l’existence de grèves de la faim, accusant certains acteurs de diffuser des informations fausses. Des poursuites ont même été engagées contre plusieurs avocats pour propagation de « rumeurs ». Cependant, familles et avocats confirment que Ben Mbarek et d’autres détenus politiques poursuivent leur grève de la faim et que leur état de santé est préoccupant.
Cette affaire met en lumière un enjeu central pour la Tunisie : garantir la sécurité physique et médicale des détenus politiques, assurer la transparence des institutions pénitentiaires et protéger les droits fondamentaux dans un contexte où les accusations de répression et de pratiques arbitraires se multiplient.
Aujourd’hui, le cas de Jaouhar Ben Mbarek incarne les tensions entre les autorités tunisiennes et les acteurs politiques critiques. Il n’est malheureusement pas le seul. Sa grève de la faim et les violences subies attirent l’attention nationale et internationale, et constituent un indicateur clé de la situation des libertés et de la démocratie en Tunisie.
Dix ans après la disparition d’Assia Djebar, figure majeure de la littérature algérienne francophone, son œuvre continue de marquer les esprits et de traverser les générations.
À l’occasion du Salon international du livre d’Alger (SILA), trois de ses romans essentiels – Vaste est la prison, La femme sans sépulture et Le blanc de l’Algérie – paraissent dans une édition inédite, traduite pour la première fois en arabe et publiée simultanément en français en Algérie. Cette double édition offre une nouvelle lecture de l’écrivaine, permettant à un public plus large d’accéder à sa voix singulière, qui a su témoigner des luttes, des mémoires et des identités algériennes, en particulier celles des femmes.
Pour célébrer cette renaissance littéraire, l’Institut français d’Algérie à Constantine organise, dimanche 16 novembre à 16h, une rencontre exceptionnelle. Jalila Djennane Imalhayène, fille d’Assia Djebar, partagera un regard intime sur l’œuvre de sa mère, sa trajectoire et la manière dont son héritage se transmet aux nouvelles générations. Le poète et traducteur Hakim Miloud accompagnera cet hommage par des lectures bilingues d’extraits des romans nouvellement traduits, faisant résonner la voix d’Assia Djebar dans les deux langues et soulignant l’universalité de sa parole.
Cet événement souligne l’importance de revisiter et de rendre accessibles les grandes œuvres littéraires, tout en rappelant le rôle central de Djebar dans l’histoire culturelle algérienne. Son œuvre, à la croisée de la mémoire et de la fiction, continue de dialoguer avec le présent, offrant aux lecteurs une exploration des identités, des violences et des résistances qui traversent l’histoire du pays.
Djamal Guettala
Entrée libre – Institut français d’Algérie, 1 boulevard de l’Indépendance, Constantine
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