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samedi, 8 novembre 2025
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Yasmine Iamarene : de l’Algérie aux routes de la livraison urbaine française

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Yasmine Iamarene
Yasmine Iamarene

Née et formée en Algérie, Yasmine Iamarene incarne cette génération de talents qui traverse les frontières pour réinventer leur métier et leur environnement. À la tête de Colis Privé, filiale française du groupe CMA CGM, elle devient directrice générale après le rachat de sa start-up Mipi, créée en 2020.

Son parcours, entre audace et pragmatisme, illustre la force tranquille d’une entrepreneuse qui place l’humain et l’innovation au cœur de ses choix.

Avant de fonder Mipi, Yasmine a passé plusieurs années à observer le fonctionnement de la supply chain. Son expérience lui a révélé trois manques essentiels dans la livraison urbaine : l’absence de formation et de valorisation des livreurs, l’insatisfaction des clients, et une quasi-absence de femmes dans un secteur masculin. Elle a choisi de répondre à ces défis en créant une entreprise où chaque décision repose sur la qualité de l’expérience, pour les clients comme pour les équipes.

Chez Mipi, chaque nouveau livreur bénéficie d’une formation complète : sécurité, rigueur, et compréhension de l’expérience client sont enseignées avant même la première livraison. La possibilité de progresser vers des postes de formateur renforce la cohésion et l’esprit d’équipe, réduisant le turnover. Pour Yasmine, le succès d’une entreprise repose autant sur la compétence que sur la considération portée à chacun.

L’inclusion n’est pas un concept, mais une pratique concrète. Quarante pour cent des livreurs sont des femmes, une proportion rare dans ce secteur. Les candidates peuvent découvrir le métier avant de s’engager, un dispositif qui lutte contre la précarité et contribue à répondre à la pénurie de main-d’œuvre. De même, l’engagement écologique traverse toutes les décisions : Mipi combine véhicules électriques, thermiques optimisés et vélos cargo, tandis que l’optimisation des tournées réduit l’empreinte carbone.

En seulement quelques années, Mipi a livré plus d’un million et demi de colis et rassemblé plus de 300 livreurs dans plusieurs grandes villes françaises. L’intégration à Colis Privé, acteur majeur qui a distribué plus de 90 millions de colis en 2024 avec 3 800 livreurs et 400 véhicules électriques, permet à Yasmine d’étendre sa vision à l’échelle nationale et belge.

Le parcours de Yasmine Iamarene est une histoire de détermination et de finesse : elle illustre comment, avec rigueur et humanité, on peut transformer un métier, valoriser les équipes et inspirer confiance aux partenaires internationaux. De l’Algérie à la France, son exemple démontre que l’innovation et la responsabilité sociale peuvent marcher de pair avec la performance économique.

Yasmine Iamarene n’est pas seulement une entrepreneuse accomplie : elle est le symbole de la diaspora algérienne qui réussit à l’étranger, guidée par la réflexion, la prudence et la volonté de bâtir un modèle durable. Dans son parcours, chaque geste et chaque décision raconte une histoire de persévérance, de vision et d’attention à l’autre, offrant une leçon d’ambition mesurée et de réussite inspirante.

Djamal Guettala

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OPEP+ : le JMMC souligne un « haut niveau » de conformité aux limitations de production

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Pétrole

Le Comité ministériel conjoint de suivi (JMMC) de l’OPEP et de ses partenaires (OPEP+) a souligné, mercredi, que la « grande majorité » des pays signataires de la Déclaration de Coopération ont démontré un « haut niveau » de conformité aux engagements de limitation de production arrêtés pour les mois de juillet et août 2025.

Réuni par visioconférence à l’occasion de sa 62e session, le JMMC a constaté que « la grande majorité des pays participants continuent de démontrer un haut niveau de conformité, reflétant ainsi leur attachement aux décisions collectives adoptées dans le cadre de l’OPEP+ », indique un communiqué du ministère des Hydrocarbures et des Mines.

Inscrite dans le cadre du dispositif de suivi de la Déclaration de Coopération, cette réunion a rassemblé les ministres du pétrole des pays membres du Comité, à savoir l’Algérie, l’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, l’Irak, le Koweït, le Nigeria et le Venezuela pour l’OPEP, ainsi que la Russie et le Kazakhstan pour les pays partenaires.

Lors de cette réunion, dont l’Algérie a été représentée par le ministre d’Etat, ministre des Hydrocarbures et des Mines, Mohamed Arkab, les échanges ont porté sur l’examen du respect des engagements de limitation de production arrêtés pour les mois de juillet et août 2025.

A cette occasion, les membres du JMMC ont mis en exergue « les efforts entrepris pour assurer une application stricte des ajustements de production et le règlement des excédents enregistrés », a ajouté la même source.

Ils ont, également, souligné que « l’équilibre et la stabilité du marché pétrolier international demeurent étroitement liés à la cohésion et à la discipline de l’ensemble des pays signataires ».

Il a été convenu, aussi, que la prochaine session du Comité se tiendra le 30 novembre 2025, afin de poursuivre l’évaluation de la situation du marché et du respect des engagements pris, a fait savoir le ministère.

APS

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GEN Z212 : la génération TikTok qui défie le Makhzen

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Les jeunes Marocains vent debout. Crédit : @_yassine_toumi
Les jeunes Marocains vent debout. Crédit : @_yassine_toumi

On croyait avoir tout vu : les printemps arabes colorés de jasmin, les foules pacifiques du Hirak, les slogans fleuris dans les rues. On croyait qu’après cela, les jeunes allaient rentrer chez eux, refermer l’histoire et attendre l’aumône du pouvoir. Raté.

La nouvelle génération n’a plus de fleurs à brandir, seulement des téléphones. Et croyez-moi, un smartphone peut faire plus trembler un régime qu’une gerbe de jasmin.

On les appelle Gen Z212. Ça sonne comme un code wifi, c’est en réalité une clé d’accès à la révolte. Ils n’ont pas de parti, pas de leader, pas de vieux slogan marxiste ou islamiste. Ils ont mieux : TikTok. Là où le pouvoir colle des affiches de la Coupe du monde, eux collent des vidéos d’hôpitaux délabrés. Le contraste est implacable : des milliards pour les stades, zéro lit pour les malades. Leur poésie tient en trois mots : Santé. Éducation. Dignité. Pas besoin de constitutions interminables, pas besoin de leaders barbus ou cravatés. Juste trois mots, aussi lourds qu’un siècle d’injustice.

Nota bene : Gen Z désigne la génération née entre la fin des années 1990 et le début des années 2010. Le suffixe 212 renvoie à l’indicatif téléphonique du Maroc. Ensemble, Gen Z212 signifie donc « la jeunesse marocaine connectée », celle qui manifeste aujourd’hui dans la rue et sur les réseaux.

Les gouvernants savent négocier avec un syndicat, corrompre un parti, enfermer un leader. Mais que faire d’un mouvement sans tête, sans comité central, qui se multiplie à chaque clic ? 

On arrête un militant, trois vidéos sortent le lendemain. On bloque une page Facebook, dix comptes TikTok naissent dans l’heure. On peut bien réprimer la rue, mais pas l’algorithme. Le palais se découvre soudain impuissant : on ne dialogue pas avec un hashtag, on ne menace pas une story, on ne censure pas un meme qui circule déjà sur des millions d’écrans.

« Le Printemps arabe » avait encore un parfum d’utopie. On parlait de démocratie, de liberté, de chute des dictateurs. La Gen Z, elle, n’a plus le luxe de rêver. Elle veut l’essentiel : se soigner sans mourir dans une salle d’attente, étudier sans mendier, travailler sans s’exiler. Ses slogans ne sentent plus le jasmin, mais la sueur des salles de classe bondées et la poussière des couloirs d’hôpitaux.

Un ministre peut parler une heure à la télévision ; il sera réduit en dix secondes ridiculisées sur TikTok. Les vieilles élites parlent en kilomètres, la jeunesse en secondes de vidéo. La politique autrefois se jouait en tribune, aujourd’hui elle se joue en scroll. Le rire est devenu une arme, le détournement un bouclier, le montage vidéo une barricade.

Et ce qui se joue au Maroc n’est peut-être qu’un prélude. Car ailleurs, d’autres Gen Z s’éveillent déjà. Au Népal, des milliers de jeunes ont défié la police après le blocage des réseaux sociaux : quatorze morts, un Premier ministre poussé à la démission, et une génération entière qui dit non à la censure et à la corruption.

À Madagascar, les coupures d’électricité et l’arrogance présidentielle ont suffi pour que les jeunes descendent dans la rue : le gouvernement a été dissous sous la pression. Au Pérou, une jeunesse fatiguée de la corruption et de la précarité manifeste contre des réformes injustes. Au Kenya, en Indonésie, aux Philippines, au Mali, les ingrédients sont là : une jeunesse hyperconnectée, un État qui promet sans livrer, une colère qui voyage plus vite qu’un avion, à la vitesse du numérique.

Partout, la pyramide des âges penche du côté des jeunes, et partout, les élites vivent comme si le temps leur appartenait. Partout, la fracture se répète : une élite d’en haut qui construit des stades et des palais, une jeunesse d’en bas qui réclame des lits d’hôpital et des bancs d’école. Gen Z212 n’est donc pas une simple crise marocaine. C’est peut-être le premier chapitre d’un nouveau cycle générationnel : pas une révolution romantique, mais une insurrection pragmatique, une politique de survie qui s’écrit en vidéos de quinze secondes.

Alors, verra-t-on la Gen Z ailleurs ? Déjà, à Alger, on murmure l’ombre d’une Gen Z213, enfermée dans ses frontières et ses désillusions. À Tunis, une Gen Z216 suffoque entre chômage et désenchantement, héritière d’une révolution inachevée. Et plus au sud, au Mali, une jeunesse sans avenir pourrait bien devenir la Gen Z223, fatiguée de la guerre et de la misère.

Le Maroc pourrait bien être le théâtre d’un essai grandeur nature. Si Gen Z212 marque un jalon, d’autres « Gen Z-mouvements » pourraient surgir, du Rif à Bamako, d’Alger au Caire. Parce que la colère, quand elle se digitalise, circule plus vite que les frontières.

Zaim Gharnati

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« Un nègre qui parle yiddish » : la traversée des continents et des identités par Benny Malapa

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Benny Malapa

Dans un récit à la croisée des continents et des identités, Benny Malapa raconte, à travers Un nègre qui parle yiddish (Fayard, 2025), l’épopée singulière de sa propre famille, marquée par la colonisation, l’exil, les guerres et le métissage.

Le roman suit Paul Malapa, fils d’un roi camerounais et d’une mère allemande, et Suzanne Rubin, juive polonaise rescapée des pogroms, à travers un XXe siècle tumultueux où les identités se construisent et se recomposent dans la douleur et la résistance.

Paul Malapa naît à Hambourg en 1914, fruit d’un métissage rare et complexe. Dès son enfance, il est confronté aux regards, aux stéréotypes et aux frontières invisibles que l’Europe impose aux “enfants des colonies”. Benny Malapa restitue avec finesse ces expériences : le racisme latent, les exclusions sociales, la curiosité des uns et la méfiance des autres. Paul apprend très tôt que l’identité n’est jamais donnée, mais négociée, revendiquée, subie parfois. La maîtrise de plusieurs langues — allemand, français, anglais et yiddish — devient pour lui autant un outil de survie qu’une manière d’accéder à d’autres mondes et d’échapper aux enfermements sociaux.

Le roman s’ouvre sur le grand-père, Malapa M’Adeviné, chef des Batangas au Cameroun. Envoyé en Allemagne par les autorités coloniales, il fait la rencontre de Frida, qui devient la mère de Paul. Ce passage souligne non seulement les dynamiques coloniales, mais aussi la rencontre improbable de cultures et de mondes différents. Le lecteur découvre que la famille Malapa est traversée par des déplacements, des exils et des circulations géographiques qui façonnent profondément ses membres. L’expérience de Paul est donc à la fois personnelle et symbolique : elle illustre la manière dont les héritages coloniaux continuent de structurer les vies longtemps après la fin des empires.

La rencontre avec Suzanne Rubin à Paris transforme l’histoire familiale en une fable universelle de résistance et d’humanité. Suzanne, rescapée des pogroms polonais et de la montée du nazisme, représente une mémoire vivante des persécutions européennes. Leur mariage en 1942, célébré dans le XXe arrondissement de Paris, survient au cœur d’une époque où la peur et la haine structurent les rapports sociaux et politiques.

Benny Malapa illustre ainsi comment l’amour et la solidarité peuvent devenir des actes de résistance silencieux face à la barbarie. Les personnages ne sont pas seulement des témoins passifs de l’histoire ; ils agissent, choisissent, s’aiment malgré les interdits et les violences. Le roman souligne que la vie quotidienne, les choix intimes et les engagements personnels peuvent devenir des lignes de fracture ou de résilience face aux traumatismes collectifs.

Le titre, Un nègre qui parle yiddish, résume la singularité de ce récit. Il met en lumière la collision des cultures, des langues et des identités. La maîtrise du yiddish par Paul, métis africain en Europe, devient un symbole de passage et de survie, mais aussi de subversion face aux catégorisations raciales et religieuses. Benny Malapa transforme la langue en arme et en refuge : elle permet de transmettre des souvenirs, de tisser des liens et de résister à l’effacement des identités minoritaires. Le roman montre que la parole est à la fois un outil de libération et un acte de mémoire, inscrivant l’individu dans l’histoire tout en affirmant sa singularité.

Au-delà des histoires personnelles, le roman dessine une fresque des violences et des migrations du XXe siècle. La colonisation, la Shoah, les exils et les guerres sont autant de forces qui traversent les existences de Paul et Suzanne, leur imposant de négocier leur identité, leur sécurité et leur liberté.

Chaque déplacement, chaque rencontre, chaque décision s’inscrit dans cette toile historique, donnant au lecteur un sentiment de continuité et d’interconnexion entre les destins individuels et les grandes transformations du monde. Benny Malapa montre que la littérature peut être un espace de compréhension et de réflexion sur les mécanismes de domination et les résistances silencieuses qui s’y opposent.

L’écriture de Benny Malapa alterne réalisme et sensibilité poétique. Les paysages de Hambourg, de Paris et du Cameroun deviennent des personnages à part entière, portant les mémoires et les tensions des sociétés qu’ils traversent. L’auteur ne se limite pas à raconter, il explore la psyché de ses personnages et les conflits internes générés par l’histoire et la différence.

Paul et Suzanne incarnent la capacité humaine à créer du lien et à se reconstruire dans un monde fragmenté. Leur parcours résonne avec les questions contemporaines de migration, de multiculturalisme et de mémoire.

Enfin, le roman interroge le rôle de la mémoire dans la construction des identités. En retraçant ses ancêtres, Benny Malapa transforme l’histoire intime en outil de réflexion sur les fractures sociales et les potentialités humaines.

Un nègre qui parle yiddish rappelle que la mémoire n’est pas seulement une archive, mais un acte de résistance, un moyen de comprendre les injustices et de réinventer le lien humain. Le récit souligne que, malgré les violences et les exclusions, il est possible de construire des espaces de dialogue, de reconnaissance et d’humanité.

À travers ce roman, Benny Malapa offre une méditation profonde sur le métissage, l’exil et la mémoire. L’histoire de Paul Malapa et Suzanne Rubin devient un miroir pour penser nos propres identités et nos propres engagements dans un monde marqué par la violence, mais aussi par la possibilité de résistance et de rencontre. Un nègre qui parle yiddish s’inscrit ainsi dans une littérature nécessaire, où la fiction et la mémoire dialoguent pour éclairer les complexités du passé et les enjeux du présent.

Djamal Guettala

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De l’Algérie à l’exil : la double voix poétique et photographique de Salah Oudahar

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Salah-Oudahar.
Salah Oudahar. Crédit : Miloud-Macheri.

Salah Oudahar est à la fois poète et photographe, une double casquette qui lui offre un regard unique sur la mémoire. Par l’entrelacement des mots et des images, il explore les traces du passé avec une sensibilité profonde, donnant à sa création une richesse et une complexité où les deux formes d’expression se répondent et se complètent pour mieux révéler l’intime comme le collectif.

Né en Algérie, pays dont il porte en lui les paysages, les souvenirs et les cicatrices, il vit aujourd’hui en France, ce qui lui confère une perspective singulière sur les questions d’exil, d’identité et de transmission. Son œuvre se distingue par cette capacité à mêler étroitement les mots et les images, non pas comme de simples illustrations, mais comme deux langages qui s’enrichissent mutuellement pour donner corps à une mémoire à la fois intime et collective.

Dans Ce pays d’où tu viens & Les galets de l’oubli, publié en 2025 aux éditions d’en bas, Salah Oudahar propose un recueil construit en deux temps, deux cycles poétiques qui se répondent et se complètent. Le premier, Ce pays d’où tu viens, est un retour à l’enfance et à la terre natale, marqué par la lumière méditerranéenne mais aussi par les ombres portées de la guerre et de la violence. Le second, Les galets de l’oubli, adopte une tonalité plus méditative et minérale, où les galets deviennent métaphores d’une mémoire qui résiste à l’effacement et au silence.

À travers ce double mouvement, le poète explore non seulement les blessures historiques, la guerre, la dépossession, la douleur des absents, mais aussi la force de résilience, la nécessité de transmission et la promesse d’un avenir possible. Son lyrisme oscille entre l’éclat du cri et la douceur du murmure, entre la fracture du passé et l’élan vital qui cherche à se réinventer. En mêlant la poésie à la photographie, il invente un espace de rencontre où le visible et l’invisible, le dit et le non-dit, se conjuguent pour former une mémoire vivante, toujours ouverte à la réinterprétation et à la renaissance.

Ainsi, l’œuvre de Salah Oudahar ne se limite pas à une élégie du passé : elle s’affirme comme un acte de résistance poétique, une invitation à se souvenir sans se laisser enfermer, à dire l’indicible et à faire de la mémoire un levier pour la dignité et la liberté.

Salah Oudahar porte en lui un héritage qui nourrit son art et son engagement. Mais son propos dépasse largement le cadre national : il aborde des thèmes universels, tels que la perte, l’exil, la quête de justice, et l’urgence de la transmission. Dans cet échange, il partage avec nous ses réflexions sur le rôle fondamental de la création face à l’oubli, cet ennemi silencieux qui menace d’effacer non seulement les événements du passé, mais aussi les voix et les identités qui leur sont associées.

Le Matin d’Algérie : Votre livre mêle poésie et photographie dans un dialogue très intime. Comment est née cette volonté de faire coexister ces deux langages, et comment travaillez-vous leur articulation ?

Salah Oudahar : Poésie et photographie sont pour moi deux écritures complémentaires de la mémoire et de la trace. Dans Les témoins du temps et autres traces, mon précédent recueil, j’ai commencé à travailler sur ce qui reste après la guerre et le passage du temps : les ruines, les paysages, les gestes, les blessures, les silences. La photographie saisit ce qui est visible et tangible, tandis que la poésie tente de restituer ce qui est invisible, indicible, ce qui habite le regard et le cœur mais ne se fixe pas. Dans Ce pays d’où tu viens/ Les galets de l’oubli, ces deux langages se répondent comme deux voix de mémoire. L’un fixe, l’autre prolonge ; parfois ils se contredisent, comme la mémoire elle-même qui est toujours fragmentaire. C’est un travail d’échos et de respirations, qui laisse au lecteur la possibilité de circuler entre le visible et l’invisible, entre le tangible et le souvenir.

En mêlant, en croisant, des langages différents, mon intention est de créer, tendre à créer des décalages, des failles, faire surgir, imaginer, voir, les failles, voir, faire voir, entendre, faire entendre la langue des failles, des brisures, fissures, des renoncements, des abandons, la langue de la fragilité des temps et des lieux, de la précarité, contingence mais aussi permanence, des êtres et des choses. Interstices inviolés, inattendus dans les marges du monde, de ce monde clos, comme révolu, supposé définitivement clos, révolu, qui ouvrent sur des béances, des zones obscures, mais aussi sur des rêves, de nouveaux rêves, des songes, incursions, percées dans la roche du temps, voyages dans les imaginaires, nouveaux imaginaires, soustrait au poids pesant des guerres, blessures, violences, déterminismes, fatalismes, scissions…

De ma fenêtre, chez moi à Tigzirt, je regardais, aux aurores, le Cap Tédelès, plonger dans la mer, vaisseau en partance en vain, le soleil surgissant de ses flancs. « Il y avait devant (nous) ce qui se photographie. Il y avait autre chose aussi. Quoi ? Un tremblement, un appel au dépassement de ce que la photographie aurait retenu (…) l’éternité » (Guillevic).

Le Matin d’Algérie : La mémoire semble être au cœur de votre écriture, mais une mémoire blessée, menacée d’oubli. Pour vous, écrire, est-ce d’abord un acte de sauvegarde, de résistance ?

Salah Oudahar : Oui, sauvegarde et résistance à la fois. Ma poésie est traversée par une méditation récurrente sur la mémoire, la perte et la survivance. Les thèmes de la trace et de la ruine, expression d’une esthétique du fragment et de l’absence, mais aussi d’une tentative de résistance au silence et à l’effacement structure une poétique du temps marqué par les blessures du passé et l’espoir d’une reconstruction par le langage.

La poésie contemporaine, notamment dans les contextes coloniaux et postcoloniaux, se fait souvent le lieu d’un dialogue conflictuel avec l’histoire, la mémoire et les formes de l’oubli. Je m’inscris quelque part dans cette veine en recourant à cette esthétique du fragment évoquée plus haut qui permet d’interroger, au travers des figures de la trace et de la ruine non seulement le passé collectif, souvent douloureux, mais aussi le rôle du poète en tant que gardien d’une mémoire menacée.

Métaphore récurrente d’une mémoire blessée, la trace incarne le signe résiduel d’une présence disparue : elle est marque, empreinte, parfois à peine perceptible, mais toujours signifiante, dont l’enjeu est de sauvegarder l’évanescent, de rendre lisible ce qui fut.

La trace est signal du passé et point d’appui pour le présent. Elle constitue une réponse poétique à la menace de l’oubli, qu’il soit individuel ou collectif. Dans un contexte marqué par l’histoire coloniale et postcoloniale, l’exil, ou les violences de la modernité, la trace devient instrument de résistance, refus de l’effacement, reconstitution par fragments, des contours d’une identité souvent brisée.

À côté de la trace, la ruine constitue un autre motif structurant l’imaginaire mémoriel Chargée d’une valeur symbolique forte, elle représente à la fois la destruction matérielle et la dégradation du sens.

Les ruines que j’évoque dans mes recueils, renvoient souvent à une histoire violente, récente et ancienne : ruines coloniales, de la guerre et de l’après-guerre d’indépendance, vestiges d’un monde ancien, ou encore ruines intérieures d’un sujet marqué par la perte. En cela, elles participent d’une lecture postcoloniale du paysage poétique. Elles traduisent un monde où la continuité a été rompue, où la mémoire s’édifie sur des décombres.

Ce qui unit la trace à la ruine, c’est une même tension entre présence et absence, entre ce qui fut et ce qui persiste, résiste, tenace, ne renonce pas. Cette tension donne naissance à une poétique non pas de la nostalgie, mais du recommencement. À partir de l’épars, du brisé, du partiel, il importe de reformuler un nouvel horizon des possibles, de nouveaux rivages de dignité, de justice, de liberté, l’espoir recommencé, d’un pays habitable, rendu à ses hommes et à ses femmes, à sa jeunesse, à ses paysages, ses mémoires, ses langues, son histoire.

La langue poétique, à son tour, est contaminée par ces motifs : elle devient fragmentaire, elliptique, marquée par le silence et l’interstice, le verbe pressuré, la phrase courte, le vers épuré, La syntaxe hésite, le lexique s’érode, comme si l’écriture elle-même portait les stigmates du passé. Pourtant, c’est précisément cette fragilité qui rend possible une esthétique du ressaisissement. Le poème devient dès lors, un lieu où l’on sauve ce qui peut l’être, un chantier de réparation, de reconstruction, mais aussi de création, d’invention, d’innovation, où chaque mot fait trace, chaque image fait sens.

Le Matin d’Algérie : Dans ce pays d’où tu viens, l’enfance est à la fois lumineuse et tragique. Qu’est-ce que ce retour à l’enfance permet d’exprimer que l’histoire collective ne peut pas dire seule ?

Salah Oudahar : Ma poésie prend sa source dans la mémoire de la guerre d’indépendance que j’ai connue dans mon village des Iflissen/Tigzirt, en Kabylie maritime.

Des décennies après, j’ai ressenti le besoin de revenir et de témoigner sur les traces de mon enfance, à travers diverses empreintes, réelles et imaginaires, physiques et symboliques. En revisitant ces lieux livrés à l’érosion du temps, à l’oubli des pouvoirs et des hommes, j’ai voulu m’adonner à une forme de déambulation, de recomposition mémorielle. Au fil d’une narration intime, j’ai cherché à tisser un récit où s’enchevêtrent souvenirs historiques, remémorations personnelles et perceptions singulières.

Ce retour à l’enfance me permet d’exprimer une dimension intime de la mémoire que l’histoire collective ne peut pas seule restituer. L’enfance, avec ses expériences sensibles — jeux, rires, paysages, gestes familiers — offre un point de vue singulier et émotionnel, capable de traduire la fragilité et l’innocence confrontées à la violence de la guerre et à l’exil. Si l’histoire collective raconte les événements, les dates, les pertes massives, elle reste anonyme et abstraite. L’évocation de l’enfance, en revanche, met un visage, une voix, un corps sur ces événements : la lumière et l’émerveillement côtoient la tragédie, révélant l’impact humain, la douleur, la perte et le déracinement. Elle permet aussi de réinventer la mémoire : en rappelant ce qui a été vécu avant la violence, l’enfance devient un lieu de résistance poétique, un espace où l’individuel et l’universel se rejoignent

Le Matin d’Algérie : Les galets dans la seconde partie du livre deviennent des métaphores puissantes de la persistance et du silence. Pourquoi avoir choisi cette image comme pivot poétique ?

Salah Oudahar : L’image des galets est centrale dans ce recueil, simple en apparence mais d’une grande puissance symbolique. Ces pierres modestes, polies par l’eau et le temps, incarnent la persistance face à l’oubli. Elles demeurent là où les existences humaines se brisent : guerre, massacres, villages détruits, enfances arrachées, vies fauchées, bêtes éventrées, arbres calcinés.

Leur silence est au cœur de leur force poétique. Les galets ne parlent pas et pourtant ils témoignent. Recouvrant le corps d’un enfant torturé puis exécuté à l’aube (voir le poème « Et la mer éplorée ») bordant l’oued où coule la mémoire des disparus, ils imposent une mémoire muette, irréductible. Leur mutisme devient un langage : il dit l’absence, la douleur, mais aussi la résistance et l’espoir.

Les galets relient ainsi l’intime et le collectif. Ils gardent la trace des souffrances personnelles et, en même temps, portent le poids de l’Histoire partagée d’un peuple. Dans leur immobilité, ils deviennent des archives naturelles, indestructibles et durables.

En choisissant cette image comme pivot poétique, je voulais affirmer une esthétique de la modestie, de l’humilité et de la résilience. Le galet n’a rien de grandiloquent : il est ordinaire, discret, à l’image du peuple des humbles, des petites gens, mais il se souvent, il résiste et dure. Dans ce contraste entre la fragilité de l’humain et la permanence de la pierre, se profile une métaphore universelle de la mémoire : une mémoire silencieuse mais indestructible, qui continue de parler, de nous parler.

Le Matin d’Algérie : Votre œuvre semble s’inscrire dans une lignée d’auteurs algériens engagés, mais elle déborde aussi le cadre national. Vous sentez-vous appartenir à une littérature de l’exil ?

Salah Oudahar : Ma poésie s’inscrit en effet dans une lignée d’auteurs algériens, trouve son ancrage et ses inspirations dans le socle poétique national dans la diversité de ses expressions esthétiques, linguistiques, culturelles et au-delà comme vous le dites.

Dans « Ce pays d’où tu viens/ Les galets de l’oubli « j’évoque, et cite explicitement de nombreux poètes, écrivains, penseurs, artistes, figures politiques – et plus nombreux encore ceux que je n’aurais pas pu citer – qui m’ont inspiré, à un moment ou un autre, dans l’écriture de ce recueil : Kateb Yacine, Günter Anders, Mohamed Mbougar Sarr, Walter Benjamin, Yves Bonnefoy, Tchicaya U Tam’si, Guillevic, Charles Juliet ; Mouloud Mammeri, Rabah Belameri, François Cheng, Abdellatif Laabi, Guy Debord, Tahar Djaout, Etel Adnan, Nabil Fares, Idir, Ali Mecili.

La question de l’exil traverse l’ensemble de mon écriture. Exil comme expérience de l’arrachement mais aussi comme matrice créative. Dans Les Témoins du temps & Autres traces et Ce pays d’où tu viens / Les galets de l’oubli, j’explore l’exil comme expérience de rupture radicale, de deuil nécessaire mais impossible. J’interroge, entres autres, la perte du pays natal, la quête identitaire et la résistance à l’effacement culturel.

Dans Les Témoins du temps & Autres traces je tente de restituer la mémoire d’une terre, d’un pays, des lieux de l’enfance, abimés, dévasté par la guerre. Les ruines, les pierres, les visages figés, dans le temps deviennent des témoins muets d’une histoire effacée, mais persistante. Ce recueil est un chant de l’exil, une traversée du temps et de l’espace où je cherche à rassembler les fragments d’un passé éclaté.

Dans Ce pays d’où tu viens / Les galets de l’oubli, l’exil est abordé sous l’angle de la mémoire vivante. Les galets, symboles de l’oubli, fil rouge du recueil, deviennent des témoins d’un pays à peine advenu et déjà perdu, un pays qui tâtonne, qui cherche, qui se cherche. Le poème devient dès lors un enjeu, un acte de résistance, une manière de dire l’indicible, de maintenir vivante la flamme d’un pays à retrouver, à réinventer, une promesse d’avenir. Pour répondre donc à votre question, oui, pour toutes ces raisons, je pense que ma poésie pourrait se définir, aussi, comme une poésie de l’exil.

Entretien réalisé par Brahim Saci

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L’OM en démonstration face à l’Ajax : le Vélodrome en liesse

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OM Ajax

Mardi soir, l’Olympique de Marseille a frappé un grand coup en Ligue des champions. Devant 65 100 supporters – un record européen pour le club – le Vélodrome a vibré à l’unisson, célébrant un succès éclatant contre l’Ajax Amsterdam (4-0).

Le match, chargé d’histoire, rappelait le quart de finale de 1971, mis en avant par un tifo hommage à Johan Cruyff et Victor Zvunka. Roberto De Zerbi n’a pas hésité à surprendre dans sa composition : Arthur Vermeeren, jeune Belge, au milieu, et Igor Paixao, Brésilien, sur le flanc gauche, laissant le capitaine Leonardo Balerdi sur le banc. Ce choix tactique a payé immédiatement.

La prestation collective a été exemplaire. Pierre-Emerick Aubameyang, auteur d’un but et de deux passes décisives, a orchestré l’attaque avec brio. Mason Greenwood, buteur pour le 3-0, et Igor Paixao, également buteur, ont confirmé l’efficacité offensive marseillaise. Mais c’est surtout l’équilibre et l’intensité de l’ensemble de l’équipe qui ont impressionné. L’OM a su combiner pressing, créativité et solidité défensive pour dominer un adversaire pourtant prestigieux.

Au-delà du score, c’est l’énergie et l’état d’esprit des Marseillais qui ont marqué les esprits. Le public, en fusion avec son équipe, a vécu une soirée exceptionnelle. Ce succès, premier de la saison en Ligue des champions, relance les ambitions européennes de Marseille. Reste désormais à confirmer sur la route pour transformer ce festival offensif en une dynamique durable.

Djamal Guettala

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Thala Bouzrou : la Kabylie en bocaux, entre soleil et artisanat

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La conserverie Thala
L'équipe de la conserverie Thala

Perché au cœur des montagnes du Djurdjura, le village de Thala Bouzrou (commune de Makouda, Kabylie maritime) est le berceau d’une aventure culinaire unique : la Conserverie Thala, fondée en 2013.

Née d’une quête de saveurs nouvelles pour le restaurant Havana à Alger, cette conserverie artisanale transforme aujourd’hui les produits de son terroir en épicerie fine, alliant qualité, créativité et respect des traditions.

Les saveurs du soleil

Thala invite le soleil d’Algérie dans votre cuisine. Ses tomates, poivrons et herbes sauvages du maquis sont sélectionnés pour leur goût intense et leur fraîcheur, tandis que ses confitures artisanales, cuites au chaudron, prolongent l’expérience gustative de la Kabylie. Chaque produit reflète la générosité d’un terroir riche et préservé, où les montagnes et les eaux pures façonnent des saveurs uniques.

Des ingrédients de premier choix

Thala privilégie une sélection à échelle humaine, en lien direct avec des producteurs locaux. Les poivrons et tomates, gorgés de soleil, sont cultivés dans la région, bénéficiant de sols fertiles et d’eaux saines provenant des sommets du Djurdjura. L’ail d’Ain Mlila, réputé pour son parfum puissant, complète ce panel de produits d’exception. Chaque ingrédient est choisi pour son authenticité, sa fraîcheur et sa capacité à révéler les goûts du terroir kabyle.

Une production 100 % artisanale

Chez Thala, tout est réalisé à la main. Du séchage des tomates au soleil à l’étiquetage des bocaux, les femmes kabyles du village sont au cœur du processus. Leur savoir-faire, transmis de génération en génération, garantit un contrôle qualité rigoureux et des produits fidèles à l’artisanat traditionnel. Chaque pot est le fruit d’un travail minutieux où l’humain prime sur la machine.

Durabilité et engagement social

La conserverie Thala s’inscrit dans une démarche durable et responsable. Elle privilégie les produits locaux et de saison, exclut tout procédé industriel polluant et soutient l’économie locale. Dans une région où l’activité est limitée, Thala valorise le talent et le savoir-faire des femmes du village, leur offrant un espace de travail et de reconnaissance. Consommer Thala, c’est donc savourer un produit naturel, artisanal et éthique, tout en participant à un projet social et culturel.

Une invitation à découvrir la Kabylie

Au-delà de la qualité gustative, chaque pot raconte une histoire : celle d’un terroir généreux, d’un soleil qui mûrit les légumes, et d’un village qui perpétue des traditions culinaires uniques. Thala Bouzrou n’est pas seulement une conserverie, c’est une passerelle entre la Kabylie et le palais des consommateurs, une célébration de la nature, de l’artisanat et du goût.

Djamal Guettala

Et pour aller plus loin…

Du 26 septembre au 6 octobre 2025, la Conserverie Thala sera présente à la Foire Internationale de Marseille (Parc Chanot).

Une occasion unique de goûter, partager et découvrir ce produit d’exception, symbole de tradition, de terroir et d’excellence algérienne.

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Malgré la crise et le recul du français, 8 351 étudiants algériens iront en France en 2025

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Campus France

Campus France et l’Ambassade de France en Algérie ont annoncé que 8 351 étudiants algériens ont obtenu un visa d’études pour la rentrée 2025, soit plus de 1 000 de plus qu’en 2024. 87 % de ces visas ont été délivrés via la procédure Études en France.

Cette progression contraste avec un climat diplomatique tendu, marqué par des différends mémoriels, la question migratoire et le gel de certaines coopérations. Elle met en évidence la force d’un lien académique qui résiste aux crispations politiques. La France demeure la première destination des étudiants algériens, autant pour son offre universitaire que pour la reconnaissance internationale de ses diplômes.

Pour Paris, cette dynamique relève du soft power. Un paradoxe apparaît toutefois : alors qu’Alger a réduit la place du français au profit de l’anglais — introduit dès le primaire en 2022 et désormais présent dans l’université, tandis que le cursus français est interdit dans le privé depuis 2023 —, les étudiants continuent de plébisciter les campus français.

Cette mobilité traduit à la fois les limites du système universitaire algérien et l’aspiration d’une jeunesse nombreuse à chercher ailleurs de meilleures perspectives économiques et sociales, ainsi qu’un espace plus ouvert en matière de libertés. 

La rédaction

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Sous contrôle judiciaire, Fethi Gharès attend son procès reporté au 7 octobre

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Fethi Ghares

Alger – Une nouvelle étape judiciaire pour l’opposant politique Fethi Ghares. Ce mardi, le tribunal a décidé de placer le coordinateur du MDS (Mouvement démocratique et social) sous contrôle judiciaire et de reporter son procès au 7 octobre 2025. Il est poursuivi pour « outrage à corps constitué » et « diffusion de fausses informations susceptibles de porter atteinte à l’ordre public ».

Dans la salle d’audience, l’atmosphère était lourde mais empreinte de solidarité. Dès les premières heures de la matinée, des proches, militants et simples citoyens avaient fait le déplacement pour marquer leur soutien. À l’appel de son nom, Fethi Ghares s’est avancé, calme mais ferme, visiblement déterminé à affronter ce nouvel épisode judiciaire.

La défense, composée des avocats Fetta Sadat, Mustapha Bouchachi, Nourredine Ahmine et Abdelghani Badi, a plaidé la fragilité des charges retenues. « Ces accusations n’ont pas lieu d’être. Notre client ne fait qu’exercer une liberté fondamentale, la liberté d’opinion et d’expression », a martelé l’un des avocats à la sortie du tribunal.

Le report du procès a suscité un mélange de soulagement et de frustration chez les partisans de Ghares. « On s’attendait à ce que l’affaire avance aujourd’hui, mais nous restons mobilisés. La solidarité ne faiblira pas », confie une militante présente à l’audience.

Sur les réseaux sociaux, de nombreux messages de soutien ont circulé tout au long de la journée, rappelant le combat de Fethi Ghares pour la démocratie et les libertés. Ses proches ont tenu à remercier publiquement les avocats, les présents au tribunal ainsi que tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, témoignent de leur solidarité.

Cette affaire s’inscrit dans un contexte où les poursuites pour « outrage » et « diffusion de fausses nouvelles » se multiplient, visant des militants, journalistes et défenseurs des droits humains. Des organisations locales et internationales dénoncent régulièrement une instrumentalisation de la justice pour restreindre l’espace des libertés en Algérie.

Le prochain rendez-vous est donc fixé pour le 7 octobre. En attendant, ses soutiens réaffirment leur mot d’ordre :

« Liberté pour les détenus d’opinion, liberté pour tous les opprimés. »

Mourad Benyahia 

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Madagascar : DJ président et roi de carnaval !

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Le président Andry Rajoelina
Le président Andry Rajoelina

À Madagascar, on survit avec deux dollars par jour : assez pour acheter un pain sec, pas pour construire un avenir. Deux dollars pour manger, se soigner, respirer.

Pendant ce temps, le président Andry Rajoelina dépense des milliards d’ariary pour célébrer son investiture. Le pays n’a pas d’électricité, mais il a eu droit à un feu d’artifice : un spectacle de lumière jeté au ciel, pendant que les maisons s’éclairent à la bougie.

2025. Antananarivo vit au rythme des coupures : l’eau coupée, la lumière coupée, l’espoir coupé… Mais au palais, on branche les enceintes. Au lieu d’installer des transformateurs, le président installe des buffets. Il ne gouverne pas, il mixe : misère au quotidien, champagne en coulisses.

Le 25 septembre, la jeunesse dit basta. La génération Z, fatiguée des discours réchauffés, descend dans la rue : « Eau, lumière, transparence ! » Rien de révolutionnaire : juste réclamer le minimum vital. Le gouvernement répond par son langage habituel : silence, puis brutalité.

Couvre-feu à 19 heures, comme si tout un pays devait passer au lit avant le journal du soir. Gaz lacrymogènes, balles en caoutchouc, journalistes tabassés, manifestants blessés. Cinq disparus. Pendant ce temps, la colère se défoule : maisons de politiciens pillées, commerces incendiés. Quand on réduit une nation à deux dollars, on récolte une explosion.

Pris de panique, le pouvoir jette le ministre de l’Énergie en pâture. Un fusible, rien de plus. Mais la panne est politique : un régime qui choisit l’apparat au lieu de l’essentiel, la fête au lieu de l’eau potable.

Et dans cette tempête, un symbole surgit : un drapeau pirate coiffé d’un chapeau de paille. Le peuple s’invente un emblème avec trois fois rien, pendant que le président dilapide des fortunes pour son décor. D’un côté, la débrouille et la créativité. De l’autre, l’arrogance d’un pouvoir qui se prend pour Versailles mais ressemble à une fête foraine.

Et Rajoelina ? Absent. À New York, devant l’ONU, il parle de paix mondiale. Ici, le peuple s’éteint ; là-bas, il brille sous les projecteurs. Président-DJ en tournée internationale, chef de carnaval à temps plein.

On peut gazer une foule, mais pas éteindre une génération. Madagascar vacille, mais sa jeunesse se lève, brandissant son drapeau pirate. Face à elle, un président qui se rêve en roi, mais dont la couronne n’est plus qu’un chapeau de paille verni, prêt à se consumer au premier souffle.

Zaim Gharnati

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