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Mécanique des dictatures arabes

Chronique-Naufrage 

Mécanique des dictatures arabes

Dans la plupart des pays du monde dit arabe, c’est la dictature qui règne. Elle n’est pas cependant nue et directe, mais voilée par les slogans  dorés de «république ». Elle est le fruit de mécanismes complexes, mystérieux, et absurdes. Avec de légères différences, ces dictatures ont la même mécanique dans divers pays dits arabes. Voici comment elles fonctionnent : 

Le premier responsable dans ces  pays n’est pas le président mais l’armée. Le président est une marionnette imposée par une grappe de généraux. Ceux-ci sont entourés de riches hommes d’affaires et de responsables influents.  Le militaire prime sur le politique, l’uniforme sur le costume. Si le président fait la moindre erreur, il sera renversé par un coup d’Etat militaire. Tellement simple qu’un déplacement de pion. Et au suivant !   Ainsi, la politique de ces pays ressemble à un théâtre d’ombres où l’écran blanc cache le vert militaire.  

Le vote est un carnaval, voire une mascarade officielle. Le président est connu à l’avance, choisi par des généraux. Il s’agit plutôt de désignation. En choisissant le président, les militaires se protègent eux-mêmes et protègent leurs propres intérêts. Parce qu’ils se croient les propriétaires légitimes du pays. 

Le peuple est un ensemble de sujets passifs. Des éléments effacés de la scène. Des chiffres. Des riens.  Ils n’ont aucun rôle tant que le vote est un mensonge. Souvent, ils sont maltraités et insultés dans les discours officiels. Leur existence  dans le pays n’est pas un droit : c’est une faveur accordée par le pouvoir. « Tu vis grâce à moi » dit le pouvoir au peuple. Ils n’ont pas droit aux revendications : c’est le pouvoir qui décide lui-même de changer ou non telle ou telle chose dans le pays.  Vu que le peuple est effacé, il n’y a pas de politique. Il y a plutôt un rapport de force entre un pouvoir despotique et des citoyens passifs et opprimés. D’où le mot « pouvoir ». 

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La justice est une illusion. Pas besoin de Codes ou de lois : la seule référence juridique est le téléphone. Grâce à un appel ou un  SMS d’en haut, le juge condamne ou libère quiconque et quand il veut. Les fictions kafkaïennes sont vraisemblables dans ces dictatures : du jour au lendemain, un citoyen innocent se trouve coupable d’un grand délit sans procès, et un grand mafieux devient indemne. 

Les médias, privés ou publics, sont manipulés par le pouvoir. Derrière chaque média privé, se cache un   haut responsable du pays. Les médias servent de propagande et montrent au peuple que tout va bien. Les rares médias indépendants et rebelles qui existent, subissent des intimidations et des pressions pour fermer…ou se caser comme le reste. 

Les  partis de l’opposition sont une illusion. Ils sont crées pour faire semblant que la diversité existe dans le pays, que le vote est transparent, et qu’il s’agit d’une vraie démocratie. En revanche, les pseudo-opposants soutiennent le président désigné. Les dictatures fonctionnent grâce au parti unique, celui du pouvoir : le reste est une imposture. Et quiconque pense différemment du parti unique est inéluctablement  un ennemi du pouvoir, un traitre.  

Les Frères musulmans et les islamistes ne sont pas des ennemis du pouvoir, mais ses précieux alliés. Ils soutiennent la dictature en déclarant que  toute opposition est réfutée par l’islam et que l’Occident peut coloniser la terre à tout moment. En guise de récompense : ils reçoivent argent, logements, projets, et divers cadeaux. Dans les discours officiels, les islamistes et le pouvoir  jouent les ennemis éternels pour leurrer le peuple et ensuite ils font la fête ensemble. En catimini. 

La théorie du complot est une autre arme des  dictatures arabes. Le pouvoir menace le peuple : « si vous vous rebellez, le pays tombera dans le chaos et l’Occident va vous coloniser ». Alors que les hauts responsables du pouvoir ont des logements et des comptes bancaires  en Occident ; ils s’y rendent pour le tourisme et les soins médicaux ; leurs enfants y suivent des études grâce aux bourses du pays…

Les  militants et intellectuels  qui s’opposent au pouvoir sont diabolisés. Le pouvoir  fait une campagne de diabolisation dans les médias et sur Internet pour les décrire de traîtres, d’agents de l’Occident, de collaborateurs d’espions, qui veulent semer le chaos dans le pays et monter un complot. Cette technique sert à semer  le doute et diviser le peuple en deux catégories : pro-pouvoir et anti-pouvoir. Les deux catégories se chamaillent en permanence et le pouvoir gagne ainsi de la tranquillité. Diviser pour régner. 

Résumé.  Dans ces pays, la démocratie est une illusion, un mensonge.  Pour s’en apercevoir il faut cependant un regard aiguisé et profond parce le pouvoir cache sa dictature derrière un masque souriant. Autrement dit, la réalité corrompue et rusée du pouvoir est occultée  par des faux-semblants. Le pays ressemble à un théâtre où les éléments en carton-pâte semblent parfaitement réels. 

La mécanique de ces dictatures ressemble à la mythologie : sur l’Olympe  siège le président, entouré de généraux et d’hommes d’affaires. Chacun d’eux protège sa place et ses intérêts.  Et de temps en temps, tous regardent en bas, non pour écouter le peuple, mais pour le toiser et s’en esclaffer. 

Enfin, tout est illusion et mensonge dans ces dictatures. La  seule vérité c’est la révolution du peuple parce qu’elle naît dans la rue. Et la rue ne ment pas.

Auteur
Tawfiq Belfadel, écrivain-chroniqueur

 




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