5 mai 2024
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Nouveau modèle économique : parlons-en ! 

TRIBUNE

Nouveau modèle économique : parlons-en ! 

Quand les milliardaires sont paralysés et que les élites créatrices sont  inexistantes auxquels s’ajoutent toutes les tares de notre système économique, un nouveau modèle économique est un voeu pieux voire un cauchemar annoncé. Il y aurait mensonge à croire qu’il suffit de vouloir pour pouvoir. 

C’est ainsi que l’autogestion et l’économie socialiste à la Ben Bella n’a fait que partager la pauvreté entre tous les Algériens, que le modèle de Boumediene, avec son industrie industrialisante, a laissé des usines “zombies” à l’image de l’éphémère fleuron de l’acier, El Hadjar, dont plusieurs prédateurs algériens finirent par le faire s’écrouler et qu’un plus gros requin étranger (l’Empire Mittal) l’a mis dans un état d’agonie, après l’avoir repris. Le libéralisme débridé de Bendjedid a ouvert la voie à l’anarchie, à la corruption prédatrice et permit l’émergence de milliardaires spontanés. Les épisodes de Boudiaf et de Zeroual ont été trop courts pour changer quoi que ce soit à cette économie de bazar. Le modèle le plus long a été  celui de Bouteflika qui a abouti à la ruine de l’Algérie et à l’enrichissement sans causes des membres de sa cour. Au final, tous les modèles appliqués à l’économie, n’ont produit qu’une gente supposée disposer de moyens financiers capables de changer de cap, des milliardaires qui sont presque tous en prison, ceux qui ne le sont pas encore, comptent leurs pertes et attendent que tout redevienne comme avant. Aucun bel esprit n’a jamais habité cette frange d’espèces. 

Qui sera alors le moteur de ce nouveau modèle économique ? Les élites créatrices, les diplômés de l’université algérienne ? Les uns et les autres n’ont pas dépassé la ligne d’engagement de l’Ansej, un outil obsolète que le système veut régénérer par des formules magiques : la RESTART pour faire écho à la start-up, des petites entreprises qui deviendront grandes non pas par l’innovation mais par perfusion de financements publics dans les domaines des services et du bricolage. Elles ne dépasseront aucune ligne d’arrivée et ne créeront aucune richesse, tout juste si elles peuvent garantir un revenu suffisant à leurs promoteurs. L’économie numérique, cette puissance technologique, n’a jamais été disponible en Algérie. Elle ressemble moins aux TIC qu’au TOC. Aucun investissement massif dans les plateformes et les outils technologiques, juste de quoi amuser les Algériens avec leurs smartphones et un débit Internet encore à la traîne.

Un pays en jachère technologique, ayant dilapidé 1000 milliards de dollars, l’équivalent du budget d’un petit pays comme la Norvège, consacré exclusivement aux nouvelles technologies pour sa génération future, ne peut pas prétendre à un renouveau économique. Les premiers engagés dans cette aventure, membres du gouvernement et autres têtes dirigeantes des grandes entreprises publiques, ne sont que des intelligences médiocres et tous intronisés dans les hautes responsabilités par cooptation sinon par copinage. C’est non plus de ce côté qu’il faut regarder la sortie de notre désastre économique. 

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In fine, un nouveau modèle économique exige l’existence d’une matrice philosophique, technique, technologique et managériale dont ne dispose pas l’Algérie.

Pour ajouter du malheur au malheur, un virus inattendu paralyse notre seule richesse. Le pétrole et le gaz ne sont plus rentables ni à court, ni à moyen terme. L’or noir a fait de nous, un peuple de fainéants, importateurs, égorgeurs de millions de moutons en une demi-journée, consommateurs frénétiques et gloutons, qui rapidement se retrouver dos au mur. La déchéance du pétrole donne, aux yeux de l’opinion, une mesure angoissante de la paralysie de notre économie alors que d’autres, par posture et imposture, se réjouissent à tort de sa dégringolade. La seule véritable richesse de l’Algérie, pétrole et gaz, est pour beaucoup dans le peu de développement acquis mais elle est catastrophique dans sa distribution. Les Algériens doivent prier que les prix remontent. 

Une majorité d’Algériens survit grâce à l’économie informelle, ce qui les oblige à travailler au jour le jour dans la rue, sur un trottoir, sur les routes et sur les marchés ouverts pour subvenir à leurs besoins. Un jeune qui s’immole, c’est un jeune à qui il a été enlevé le moyen de sa survie. Le bâtiment plonge des millions d’Algériens dans l’inconnu et la désespérance. Le seul marché de devises en Algérie est emporté par les eaux du port Said. Le mois de Ramadan dans le confinement mangera toutes les économies. 

Pour redémarrer une économie à l’agonie, il ne sert à rien de pérorer sur un nouveau modèle économique. Il suffit de constater l’état de ruine du pays et de freiner sa course vers l’abîme.  La survie, parce qu’il ne s’agit que de cela en ces temps de pertes de repères, consiste à faire reprendre aux entreprises et aux gens ordinaires leurs activités économiques. L’agriculture, en premier parce que c’est une activité liée à cette survie, il s’agira dans l’urgence d’accompagner financièrement toutes ses filières impactées par le coronavirus. A court terme, il faudra concevoir une batterie de propositions pour une véritable conquête de notre souveraineté alimentaire. L’industrie, les grands travaux d’infrastructure et certaines activités de services, peuvent reprendre leurs activités à condition que l’Etat les dote, gratuitement, de dispositifs anti-coronavirus notamment la prise de température, le port des masques et le respect d’une distanciation d’un mètre, le lavage des mains… Chaque entreprise adaptera les contraintes de ces protocoles de reprise d’activités, à charge pour l’Etat d’en contrôler l’observance et le respect.

Au confinement partiel, rentabilité partielle, c’est mieux qu’un enfermement général et une faillite généralisée. Mais une précipitation désordonnée d’un déconfinement ouvert à tous les vents, sans obligations de sécurité, ne fera qu’augmenter le nombre d’infectés et la charge déjà insuppostable pesant sur nos professionnels de la santé. L’erreur est humaine, mais quand il s’agit de la vie, elle est criminelle.

La fiscalité pétrolière n’étant pas un chapitre secondaire dans le budget de l’Etat, elle s’écroule comme chutent la TVA, l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés. Une Loi des Finances rectificative et immédiate est aujourd’hui une exigence de survie. La Banque Centrale, dans son rôle de dernier ressort, est à interpeller pour injecter dans l’économie des fonds, des titres, des avances et même un mixte avec la planche à billets pour venir en soutien à cette reprise d’activités.

A situation extraordinaire, mesures extraordinaires, c’est en ces moments qu’on retrouve le rôle de l’Etat qui nous rassure, qui bat la monnaie, contrôle les dépôts et les crédits. C’est lui qui prête et donne du crédit. Les dangers de l’inflation que nous ressortent, économistes et experts d’occasion, ne se comptent plus. Les Algériens, ayant dans leur chair tous les stigmates de traumas plus affligeants, sauront survivre à un hypothétique traumatisme surinflationniste, l’urgence n’est-il pas de rester vivant? Peut-être que la planche à billet créera de l’inflation. C’est le prix à payer. 

Pour gérer la relance, la composante actuelle du gouvernement coûte trop chère d’autant que nombreux sont ceux qui gèrent au ralenti leurs Ministères. Pourquoi ne pas faire preuve d’adaptation pour gagner en rapidité et en agilité, deux qualités nécessaires en ces jours de temps suspendu ? Ainsi, un Ministère des finances prendra en charge la gestion des finances, du commerce et de l’industrie. Un Ministère de l’éducation peut aussi bien, aidé par le confinement nécessaire à prolonger pour toutes les filières, gérer écoles, lycées et universités. Un ministère de l’agriculture et un ministère de l’intérieur regroupant les affaires religieuses et les pensions d’anciens moudjahidines. La culture, le tourisme, la com et le sport peuvent être réunis dans un unique Ministère. Une équipe bien resserrée autour d’un chef d’équipe aguerri à la gestion des crises fera plus et mieux que le gouvernement pléthorique actuel. 

Allégée de ces soucis en interne, la Présidence et ses structures auront toute latitude de penser l’après coronavirus, non à perdre son temps à concevoir un nouveau modèle économique mais à saisir les occasions qui se profilent dans l’après-coronavirus et dans la confrontation géopolitique.

Dans les meilleures années à venir, les activités de tourisme joueront un rôle central dans l’économie algérienne. Tout ce potentiel n’attend que des idées et des initiatives innovantes à la préparation de ce secteur créateur de richesse et d’emplois massifs sans compter l’augmentation de son attractivité à l’investissement et à l’image de l’Algérie renaissante.

La toute petite entreprise, la micro-entreprise et l’artisanat feront le reste pour un plein emploi responsable et inséré dans l’économie nationale avec des mécanismes de détection et de rejet de tout retour à l’économie informelle. Un fonds public-privé et autres donateurs internationaux fera mieux que toutes las Ansej et autres Crac…

Les industries du gaz, du pétrole et de toutes autres richesses fossilles ou pas ne doivent plus servir à la vente en brut mais intégrées à une chaîne de transformation de ces matières pour créer de la richesse à haute valeur ajoutée. Le nucléaire pacifique est aussi un secteur de technicité et d’appuis à toutes les activités.

Pour ce qui est de la dette, l’Algérie n’étant que très peu endettée a la chance d’en faire un effet de levier. Un mix de financement extérieur incluant des droits de tirage spéciaux sur le FMI ne remettra en rien notre souveraineté financière, à condition, que ces financements aillent exclusivement aux secteurs sus-cités.

Les Algériens, installés à l’étranger, aux talents reconnus mondialement et insérés dans des économies inventives et scientifiques, par des mesures qui leur sont profitables et attractives, assureront en bonne intelligence avec les talents locaux, cette transformation économique de l’Algérie.

A l’international, l’Algérie gagnerait à consolider l’amitié et la confiance avec la Chine. Préparer une véritable stratégie de coopération et en négocier les termes pour un Pacte Économique à l’horizon 2030. Tous les ingrédients sont là : un projet en suspens à vivifier dans le domaine du transport maritime, la route de la soie à co-investir, un projet de 200 milliards dans le Cloud annoncé par Ali Baba peut très bien, en partie, être capté par l’Algérie pour peu qu’on accepte de partager nos données dans cet espoir de nous faire gagner des points de progrès dans cette guerre numérique. L’industrie de transformation, les filières agricoles et bovines et pourquoi pas de l’élevage de porcs, le tourisme feront les exportations algériennes vers la Chine.

La Russie, un pays sur qui l’Algérie peut compter, offre aussi des occasions nouvelles de partenariat stratégique, sans compter les pays de proximité, l’Europe, l’Angleterre et les opportunités avec les USA. 

Mais une société réussie doit encore gagner la confiance, celle  entre ses membres et ses dirigeants. L’Etat de droit, la liberté d’expression, la sécurité des citoyens en sont les garants. C’est cette confiance-là qui fait la puissance des Etats. Le chemin est long, à chacun d’apporter sa contribution pour l’emprunter sereinement, Silmiya, Sylmiya.

Mail de l’auteur :  technogroupe@yahoo.fr 

Auteur
 Chadli Dahmane

 




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