21 avril 2025
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« Houaria », je ne l’ai pas lu !

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Inaam Bayoud
Le livre d'Inaam Beyoud

Non, « Houaria », je ne l’ai pas lu. Faut-il avoir lu un livre pour s’insurger contre le crime le plus condamnable, la bêtise ?

Non, je ne l’ai pas lu et doit-on le faire pour s’apercevoir de la sempiternelle œuvre des gardiens de la morale dans notre pays ? Ils ont un système de déclencheur dans la tête. Ils  surgissent de l’ombre dès qu’un mot, une parole ou un geste passent à la douane des pensées, des réflexions et des créations.

Et pour ce qui est du manuel des censeurs, il n’y a pas grand-chose qui puisse faire grâce à leurs yeux. Tout est obscénité, parjure et attentatoire à ses codes de bonne mœurs. La culture est pour eux blasphématoire.

Beucoup affirment, avec justesse, que les censeurs de ce genre n’ont en général pas lu le livre qu’ils accusent d’obscénité. Je leur répondrai que je ne suis même pas sûr qu’ils aient lu ou compris le livre qu’ils invoquent pour justifier leurs réactions pavloviennes. 

Les censeurs du monde ne réagissent en effet qu’avec l’instinct et le conditionnement. Aucune rationalité ni clémence n’est dans leur vocabulaire. Ils ont cette conviction profonde qu’ils sont investi d’une mission sacrée.

Non, je n’ai pas lu ce roman mais il doit être merveilleux car il les fait réagir. Et tout ce qui les fait réagir est dans le sens d’une humanité libre.

Ils sont bruyants et dangereux mais sont insignifiants et peu armés pour combattre la plus grande des victoires de l’être humain, sa culture et sa liberté. Si petits !

Ils ont peur, peur de ce qu’ils ne comprennent pas. Ils ont peur de ce qu’ils ne peuvent atteindre. Ils ont peur de perdre le seul pouvoir qu’ils pensent avoir, contrôler les esprits. Ils n’ont jamais pu comprendre que l’esprit humain et l’éducation à la liberté leur était inatteignables puisqu’ils n’ont jamais voulu faire un effort pour l’atteindre.

Tiens, moi qui ne l’ai pas lu, le titre de « Houaria » a-t-il un rapport avec ce si joli nom de ma jeunesse dont on dit qu’il est particulièrement oranais ? Ou alors est-ce la traduction du mot arabe « indépendance » ?

Si l’effet de rapprochement homonymique est voulu, je félicite l’auteure. Elle aurait mis en relation une femme, Houria, en concordance avec la liberté et l’indépendance des femmes. Ou alors je dis des bêtises et devrais le lire ou me taire.

« Houaria », un livre que je n’ai pas lu mais faut-il le faire pour être horrifié par l’obscénité des accusateurs. Ils se sont incrustés dans notre beau pays, nous finirons par nous en débarrasser pour qu’il retrouve la splendeur de sa promesse d’avenir qu’il nous avait faite, le sentiment de liberté que nous avions et cet amour du livre que nous mettions au-dessus de beaucoup de choses.

La création de l’esprit est une liberté intouchable, elle définit les êtres humains. On peut librement juger du caractère obscène d’une œuvre si c’est notre propre jugement sans qu’aucun dogme nous l’ait suggéré. « Houria » n’est ni obscène ni insignifiant car c’est le langage de l’esprit.

Non, je ne l’ai pas lu. Mais dois-je lire tout ce qui est censuré par ces personnes ? Il me faudrait trois vies pour y arriver.

Boumediene Sid Lakhdar

« Un si grand brasier « de Kamel Bencheikh, un inventaire sans concession

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Un si grand brasier

Après L’Impasse, un roman sur la guerre d’Algérie, Kamel Bencheikh nous donne à lire cette fois Un si grand brasier, un texte sur l’Algérie au lendemain de l’indépendance.

Comme un miroir sociologique, ce roman met en scène des personnages aux accents d’innocence, bouleversés soudainement par les décisions politiques inconséquentes de leurs nouveaux dirigeants.

Ce roman dresse une sorte d’inventaire sans concession de cette période-là, celle des années soixante-dix, le tout décrit avec une langue savoureuse, qui introduit quelquefois des notes de fantaisie mais où l’utile reste prépondérant. Le récit se décompose en fragments de scènes émaillés de citations classiques, donnant un charme et une élégance qui dénotent l’étoffe littéraire de l’écrivain.

L’histoire se déroule à Ain Abessa, petite bourgade près de Sétif. Une bourgade devenue emblématique d’une Algérie qui se cherche et dont les politiques choisies présageaient déjà des lendemains difficiles.

Le texte s’annonce par une description zolienne des lieux. Une description qui se distingue par le mode de la réalité où l’intuition du lecteur n’est point nécessaire pour reconnaître les endroits puisque le récit évoque chaque lieu, chaque ville, par son propre nom.

Tout commence alors en 1972… Ou plutôt commence l’éveil à l’argent, à la corruption, à toutes sortes de malversations auxquelles personne à Ain Abessa n’est préparé. Les dialogues des personnages, nombreux par ailleurs, prennent l’allure de symptômes de toutes ces maladies qui rongent ou qui, plus tard, rongeront l’Algérie.

Toutes ces pesanteurs de l’administration, les absurdités d’un système créé par des dirigeants sans une conscience élevée de la politique, les immixtions de la religion dans les affaires de la cité etc.

Les errements du pays se font sentir jusqu’à la commission forestière mise en place pour réguler le bois dans cette localité. Une commission toutefois qui touche à des questions multiples.

Mais des personnages comme Amar Tatzuite ne connaissent que les codes de la vie concrète. Ils n’ont que les traditions ancestrales à montrer. C’est peut-être pour cette raison que personne à Ain Abessa ne semble avoir accepté de troquer l’idéal de la vie simple et naturelle à celle, artificielle et hypocrite, que leurs nouveaux dirigeants veulent leur imposer.

Mais Ain Abessa ne semble pas pouvoir échapper à son sort. Ici, dans cette bourgade, miroir d’une Algérie où les victoires se muent en défaites, la bravoure légendaire de ces hommes se transforme en petites intrigues, tout s’embourbe.

Et puis, il y a les alentours qui grondent. Il y a toutes ces brutalités que l’homme s’invente avec toutes les métaphores guerrières pour dominer ―ou prendre sa part comme il aime le dire pour se justifier. Dans ce roman, beaucoup d’échos résonnent.

Échos aux accents existentialistes, politiques, religieux, et ce, jusqu’à ce que ce feu  » prométhéen » surgit pour détruire tout sur son passage, ce feu qui nous montre surtout la grande vulnérabilité de l’être humain. Un roman qui nous donne plus qu’un mélange de réalité et d’illusion sur cette Algérie post indépendance. Il est également plus qu’une chronique d’un village en mal de modernité, trop prisonnier de son passé.

En plus d’avouer ce monde de la dictature avec ses tréfonds obscurs, ce roman met en scène l’homme et (la nature) face à son destin. Un livre qui attache le lecteur aux lacets des mots jusqu’à la fin, ne serait-ce que par son écriture inspirée par l’esthétique classique.

Lounès Ghezali, écrivain.

La démocratie est la gestion des conflits, pas leur suppression

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Démocratie
Image par Markus Winkler de Pixabay

En élargissant l’approche lexicale on pourrait définir la démocratie comme la gestion des différences, l’équilibre des forces et le réceptacle de toutes les humeurs et détestations.

Idéalisée par sa mythique naissance grecque, elle en a été l’image hollywoodienne de l’échange et conciliation des grands esprits et de la philosophie de la sagesse. Une idée qui est à mille lieux de la réalité historique des êtres humains.

La démocratie naît toujours de la douleur, des larmes et du sang. Elle s’installe par refus d’y retomber, pas par la réalité d’une sagesse retrouvée. La démocratie canalise les conflits à travers une  structuration de la représentation politique. Cette canalisation est fondée par la règle du vote, l’égalité des voix et l’efficacité des institutions qui permettent une vie politique et administrative de la cité.

Son installation fait émerger ce qu’il y a de mieux dans les civilisations modernes. Elle est indispensable pour détourner les hargnes par l’éducation à la citoyenneté, par l’élévation du niveau d’instruction, des sciences et de la culture.

C’est la raison pour laquelle la démocratie est l’enfant miraculé des nations. Il faut l’accepter, l’aimer et être en vigilance perpétuelle vis à vis de ses ennemis. Rien n’est jamais acquis, rien n’est solidement arrimé.

Je suis toujours gêné de citer une pensée très connue car cela est habituellement réservé à ceux qui n’ont rien à dire par eux-mêmes ou qui veulent illuminer d’un savoir qui est si partagé qu’il en devient éculé. Hélas j’en use parfois plus que je ne devrais comme celle de Winston Churchill : “La démocratie est un mauvais système, mais elle est le moins mauvais de tous les systèmes”

En France le régime de la Vème république est frappé de plein fouet par un événement auquel il n’a jamais été confronté depuis son instauration en 1958. L’Assemblée nationale n’a effectivement jamais connu une répartition sans une majorité absolue.

Elle s’est endormie dans un présidentialisme monarchique et doit retrouver les réflexes d’un réel parlementarisme. On a oublié que les institutions de la Vème république sont, dans leur mécanisme premier un régime parlementaire. C’est comme réapprendre ce qui a été oublié par manque de pratique.

Affirmer qu’il s’agit d’une crise de régime, comme on peut le lire dans beaucoup d’articles et interventions dans les médias audiovisuels, est totalement excessif. Une crise de régime est un blocage institutionnel et politique qui ne permet plus au mécanisme constitutionnel de garantir une continuité du service de l’État.

S’il devait y avoir dans les évènements actuels une crise de régime alors les trois quart du monde le sont par l’existence de troubles et d’instabilité, souvent guerriers et meurtriers.

Par cette position qui tranche avec celle qui est majoritaire, qu’on ne s’affole pas, qu’on ne me jette pas à la Bastille. D’une part, ce ne serait pas une sanction par mon très ancien souvenir de cette rue si chère au cœur des Oranais et d’autre part, je ne supporte pas la douleur. Cette réflexion est générale et l’actualité en France n’est qu’un support pour rappeler le débat institutionnel et politique de toutes les nations et pas un plaidoyer pour qui que ce soit.

La démocratie est un état difficile mais les relations humaines sont faites d’un compromis quotidien entre la colère, la frustration et l’envie de domination par la certitude que la raison est de vôtre côté et d’autre part, le désir de l’apaisement par des accords consentis mais créant inévitablement de la frustration. La démocratie est ainsi conforme aux relations humaines instinctives, ambiguës et versatiles, ce n’est pas une vue fantasmée de l’esprit.

Il faut donc un lieu, une institution, qui mette le combat en scène. Il est le moyen d’une confrontation inévitable et souvent violente des idées mais il évite les deux écueils naturels que nous venons de citer. La démocratie substitue l’arme de guerre par l’arme de la dispute en joutes oratoires et en postures parlementaires. C’est tout de même plus aisé et permet d’avancer.

Dans l’histoire des peuples la navigation entre les deux écueils est impossible sans le risque de  percuter l’un ou l’autre à des moments de gros temps. La démocratie ne résout pas les conflits, elle fournit, autant qu’elle le peut, les outils d’une bonne navigation entre les deux écueils.

La France est en période de mauvais temps car elle n’a plus la compétence de navigation en eaux troubles que fut la sienne dans les deux républiques précédentes. Elle avait oublié ce qu’est un parlement sans une majorité absolue pour un camp ou une coalition. Elle était si assurée de la stabilité des institutions que la démocratie vient de la réveiller par une grosse bourrasque.

La démocratie, ce mauvais système selon le propos de Winston Churchill qui rappelle également qu’il est le moins mauvais. Car si les peuples veulent une forte stabilité, de la manifestation quotidienne d’un bonheur exprimé avec tintamarre, il y a une solution.

Cette solution est le régime autoritaire. Avec lui, pas de crise de régime, pas de désordre, pas de manifestations d’humeurs et pas de problèmes économiques et sociétaux. Les Parlements ne connaissent aucune difficulté à voir se confronter les idées politiques.

Ils débattent sur l’indigence des services sanitaires, les insuffisances de la préparation du baccalauréat et votent à main levée comme un seul homme et s’en retournent chez eux, fièr(e)s comme Artaban, d’avoir participé à la démocratie.

Demain, conscients de l’importance de leur pouvoir, ils reviendront pour débattre de la couleur des rideaux de l’Assemblée. C’est qu’ils sont décidés de ne pas laisser sévir la tyrannie du régime politique. Et ne leur dites jamais qu’ils ne se confrontent pas durement comme l’exige la démocratie, la palette de couleurs pour les rideaux laisse largement place aux conflits des doctrines politiques.

La démocratie est un chemin très difficile. Lorsqu’un pays est en consensus apparent, en sérénité absolue et dans une fraternité exemplaire, c’est que la démocratie a disparu ou n’a jamais existé.

Boumediene Sid Lakhdar

Entretien avec Gilles Kraemer : un éditeur en Palestine

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Jours tranquilles en Palestine

Tout est clair. Pourtant, peu de politiques veulent voir. Le soutien inconditionnel à une quelconque entreprise coloniale ne peut que mener au pire et les Jours tranquilles en Palestine nous l’enseigne clairement : nulle paix ne serait envisageable sans l’égalité totale et inconditionnelle des droits entre les personnes qui vivent en Palestine-Israël.

S’habituer au colonialisme ou parler de la Palestine, vraiment, mais comment ? Voici une drôle de question dans un climat délétère où même de sérieux historiens et universitaires se mettent à parler, à propos d’une situation coloniale séculaire, comme les « experts » (en rien du tout !) et tautologues des médias mainstream (BFMTV, CNews et autres poisons pour l’esprit). Au lendemain du 7 octobre 2023, les réflexes coloniaux rappelant les politiques liberticides du temps des colonies, de la « guerre d’Algérie » surtout, ont refait surface, avec rage : toute contextualisation historique et tentative de comprendre les origines et motivations de la violence des colonisés seraient une « ambiguïté », voire « complicité avec les crimes du terrorisme islamiste ».

Mais, et fort heureusement pour ceux qui continuent de s’accrocher vigoureusement à la notion de vérité, des esprits libres émergent dans les pires moments de désespoir pour rappeler les faits, rien que les faits. Ce réel amer que d’aucuns aimeraient occulter, effacer. Écrites entre les années 2004 et 2015, la republication en un seul volume des chroniques de Gilles Kraemer, Karim Lebhour et Mohammed Kacimi, Jours tranquilles en Palestine (Riveneuve, 2024), apporte un souffle nouveau pour la paix dans un temps de guerre de destruction totale où le « combat pour la civilisation » se prêche par des tapis de bombes, des milliers d’obus lancés intentionnellement sur des civils (déclarés « coupables » du simple fait de demeurer sur leur terre) affamés et sans défense aucune.

Le Matin d’Algérie : Jours tranquilles en Palestine, réédite en un seul volume des chroniques écrites au fil des deux dernières décennies par Karim Lebhour, Mohamed Kacimi et vous-même. Comment faites-vous résonner aujourd’hui le titre de votre collection, alors qu’une guerre de destruction s’est ouverte en Palestine ?

Gilles Kraemer : C’est de la provocation, clairement. En vérité, cette collection, « Jours tranquilles », raconte des jours « pas tranquilles du tout ». Des jours de crise, les drames qui se multiplient de par le monde : à Damas comme à Kaboul et dans nombre de villes, de pays ensanglantés, en révolution. L’objectif de la collection est de dire, sous un jour humain, la vie des êtres au milieu de ces crises. Et la provocation passe par le fait de donner à voir, à rebours des caricatures essentialisantes et déshumanisantes des médias mainstream, des scènes de la vie quotidienne, faire entendre la voix des êtres fragilisés qui s’accrochent à la vie. C’est du moins ce que j’ai fait dans mes chroniques de Ramallah. Me situant à mi-chemin entre la littérature et le journalisme, j’ai rapporté la vie ordinaire palestinienne (les mariages, les jours de marché, les activités culturelles et sportives, etc.) avec ma subjectivité propre, mais en totale fidélité aux faits.

Quelques mois avant le 7 octobre, un éditeur égyptien m’a dit : « Est-ce que la traduction de tes chroniques de Ramallah en arabe aurait un sens ? ». Je les ai relues et j’ai dit :  « oui ». Pourquoi ? Premièrement parce qu’elles démontrent que malgré tout, la vie est possible. Et aussi parce qu’elles témoignent que dans ce que j’ai vu en Palestine, entre 2004 et 2007, toute la catastrophe actuelle était déjà en germe. La situation était intenable. D’ailleurs, elle l’a toujours été.

Aujourd’hui, j’ignore même comment la qualifier… Je pense sincèrement qu’il faut intervenir pour imposer la paix. Sinon, on court vers un suicide assuré, celui des Israéliens comme des Palestiniens. C’est affligeant de voir tout ce qu’on a fait avec les réseaux des Centres culturels français (Gaza, Ramallah, Naplouse, Jérusalem, etc.) partir dans la fumée des obus américains à Gaza, lancés aveuglément sur les civils Palestiniens par l’armée israélienne.

Le Matin d’Algérie : Lues aujourd’hui, vos chroniques de Ramallah nous paraissent décrire, déjà en 2004, la colonisation inhumaine sous laquelle vivent les Palestiniens depuis plus d’un demi-siècle. Comment donc des notations quotidiennes peuvent-elles ainsi mieux faire comprendre cette situation coloniale que bien des analyses géopolitiques se voulant savantes ?

G. K : Le format de ces chroniques, rédigées dans un style qui emprunte tant au journalisme qu’à la littérature, fidèles autant que possible aux faits, se terminant généralement par un petit décalage ou un trait d’humour, a l’avantage de dépasser la logique macabre des chiffres et de la statistique froide, la déshumanisation horriblement cynique des Palestiniens.

Je persiste à penser que pour trouver une solution en Palestine, il est urgent de réhabiliter l’humain, l’empathie, se mettre à la place d’un peuple à qui on refuse l’autodétermination. Un nouvel humanisme reste à construire et cela relève de la responsabilité de tous. Les pays occidentaux doivent décider d’une solution puisqu’ils ont créé le problème. Les États-Unis et l’Europe ont l’obligation morale d’arrêter de financer et d’armer la machine de guerre israélienne. Sans des pressions politiques et économiques sur Israël, rien ne sera concédé aux Palestiniens.

Le Matin d’Algérie : Concises, mais extrêmement dense, les chroniques de Karim Lebhour, dépeignent pour leur part le blocus implacable imposé à Gaza par la colonisation israélienne, les restrictions alimentaires, les humiliations quotidiennes au niveau du poste-frontière d’Eretz et de Rafah, mais aussi les assassinats et les bombardements sauvages, la folle intensification de la répression… N’est-ce pas cette offensive coloniale déjà ancienne, bien plutôt que le rapport au Coran ou à la tradition islamique, qui a donné son vrai substrat à la résistance du peuple palestinien ?

G. K : Lorsqu’on se trouve en Palestine, cette Terre triplement sainte, il y a forcément une question religieuse, et donc celle de ses instrumentalisations, de l’aveuglement des ethno-nationalismes irréductibles, de l’exacerbation des intégrismes. Par ailleurs, il n’y a pas que des Palestiniens musulmans qui résistent ; l’histoire de la résistance des Palestiniens chrétiens est tout aussi importante. Mais, le véritable cœur du conflit, c’est la colonisation, la non résolution de l’injustice faite aux Palestiniens depuis la Nakba (l’expulsion massive de plus de 750 000 Palestiniens de leurs terres) : la dépossession, le droit au retour, la réparation des torts et souffrances infligés à l’ensemble à un peuple dont on a longtemps dit qu’il « n’existe pas », etc. Tant que ces problèmes ne sont pas réglés, tout sera bloqué.

Comment serait-il possible d’exiger la raison, la mesure et la modération des Palestiniens, alors qu’un colonialisme messianique, systématiquement soutenus par l’armée et l’État israélien, ne cesse d’avaler les terres de la Cisjordanie depuis 1967 ? Comment peut-on parler de paix tout en finançant et armant le massacre de masse toujours en cours à Gaza ? En 2005, une partie significative des Palestiniens a voté Hamas contre la corruption du Fatah. Mais au lieu de respecter leur choix, Israël, les États Unis et l’Europe (même Chirac n’a pas pu s’y opposer) ont décidé de punir ceux qui auraient « mal voté ». Bien que les élections étaient libres, le Hamas, et avec lui les Palestiniens, a été immédiatement sanctionné.

Alors que les ministères et les administrations étaient fonctionnelles, il a fallu créer de nouveaux organismes pour transférer l’argent des donateurs internationaux (largement européens) aux fonctionnaires. On a créé des para-ministères pour punir les Palestiniens de leurs prétendus mauvais choix électoraux. C’était une absurdité innommable. J’ai quitté mon poste à Ramallah avec le sentiment que les pays occidentaux ne font pas ce qu’il faut. Laissent le chaos colonial prospérer. Après, on s’étonne du déchaînement de la violence des colonisés…

Le Matin d’Algérie : Les chroniques de Mohamed Kacimi témoignent d’une une vie théâtrale et artistique en Palestine d’une extrême richesse. Quelle place occupent, selon vous, le théâtre, mais aussi le cinéma ou la littérature, dans le long cheminement des Palestiniens vers leur libération nationale ?

G. K : La poésie et le théâtre occupent une place très importante en Palestine. Je pense à la figure de Mahmoud Darwich et ses récitals aux milliers de spectateurs comme à d’autres figures littéraires et artistiques. D’ailleurs, c’est très facile d’organiser des soirées poétiques là-bas, chose qui demeure inimaginable en France. Les compagnies théâtrales sont prospères et les clowns fascinent, occupent une place primordiale dans l’imaginaire des enfants palestiniens.

Les festivals de cinéma et de danse se multiplient, la dabké notamment, avec des réappropriations dans le domaine de l’art contemporain. Quand j’étais en poste à Ramallah, j’ai écrit un jour, dans l’un des éditoriaux d’un journal trilingue (arabe, français, allemand) que j’ai créé, que lorsqu’un peuple a tout perdu, seule reste la culture. Les Palestiniens ont compris cette leçon depuis longtemps.

Le Matin d’Algérie : Pour finir, pouvez-vous nous dire, comme directeur des éditions Riveneuve, quel rôle vous assignez au livre dans le combat international pour la paix et la libération des peuples ?

G. K : En dépit de la méfiance, voire du rejet, que suscite la lecture chez de larges couches sociales de par le monde (et même en France !), je persiste à croire que le livre est un formidable outil pour conserver la culture, la mémoire d’un temps, et faire de la transmission.

En tant qu’éditeur, j’ai eu l’occasion de voir cette méfiance et ce rejet à maintes occasions. J’ai pu même la mesurer quand, par exemple, j’ai publié le musicien Kaddour Hadadi (HK) : lors de différents festivals où j’ai tenu un stand de livres, le public manifestait un modeste intérêt pour ses écrits. D’une manière générale, je dirais qu’un éditeur indépendant comme moi, un marginal du livre en quelque sorte, doit croire que, par-delà la vente de pots de yaourts à laquelle se livrent les grandes machines éditoriales, le plaisir du livre consiste à ouvrir les horizons de la pensée et de l’écriture, prendre des risques et publier des créateurs qui continuent de nous fasciner et de nous éclairer sur l’état actuel et l’avenir du monde par des textes novateurs, dérangeants, pétillants et, surtout, inattendus.

Propos recueillis et présentés par Faris Lounis, journaliste indépendant

* Gilles Kraemer, Karim Lebhour, Mohamed Kacimi (préface de Dominique Vidal), Jours tranquilles en Palestine, Paris, Riveneuve, 2024, 456 pages., 19,50 euros

Source :

Twala [توالى], le 16 juillet 2024 : https://twala.info/fr/ethos/un-editeur-en-palestine-entretien-avec-gilles-kraemer/

Les islamistes se déchaînent contre Inaam Bayoud et « Houaria »

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Inaam Bayoud
Inaam Bayoud est la cible d'un lynchage en règle de la part des islamistes

Après le lynchage en règle qu’elle a subie sur Facebook de la part d’individus apparentés au courant islamoconservateur, l’universitaire, poète plasticienne et romancière Inaam Bayoud, lauréate du prix Assia-Djebar pour son roman Houaria est de nouveau la cible d’une charge féroce de la part des partis politiques d’obédience islamiste, à l’instar du MSP et d’Al Bina Al Watani du sinistre Abdelkader Bengrina, deux entités politiques affiliées au courant mondial des Frères musulmans. 

Dans un communiqué sanctionnant la réunion de son comité exécutif national qui s’est tenue, vendredi, au siège du parti, à Alger, le Mouvement pour la société pour la paix (Hamas) a appelé à « prendre des mesures fermes à l’égard de certaines élites qui menacent les  éléments de l’identité nationale et qui visent à commercialiser un vocabulaire vulgaire dans des récits scandaleux  qui ne méritent pas d’honneur », en référence directe au roman « Houaria » et son auteure, Inaam Bayoud.

Des représentants de l’Assemblée populaire nationale ont saisi  le Premier ministre, Nadir Arbaoui  l’appelant à « retirer le roman (du marché) et empêcher sa diffusion car il viole la morale publique ».

Ainsi, le représentant du Mouvement de la Construction nationale à l’Assemblée populaire nationale, Younes Hariz a demandé au Premier ministre, Nadhir Arbaoui, à sevir contre  le roman « Houaria »   en raison du « discours de haine et des propos obscènes  qu’il contient ».

Dans son message le  député Younes Hariz  déclare  exprimer « le mécontentement et la colère des habitants de la wilaya d’Oran en particulier, et des Algériens en général, suite à la grande insulte contenue dans un roman d’une écrivaine  que personne ne connaît, malgré le poste important  qu’elle occupe en tant que directrice de l’Académie arabe de traduction, basée en Algérie, et dont nos étudiants n’ont pas bénéficié malgré plus de deux décennies (depuis 2003) de son occupation de ce poste de responsabilité:.

Pointant du doigt le manque de vigilance du  comité de lecture et de suivi avant la publication du roman « Houaria », le représentant d’Al-Bina pour la wilaya d’Oran s’est s’interroge: « comment un roman d’une telle mauvaise qualité littéraire a-t-il pu gagner la confiance du comité de lecture, recevoir le visa d’impression et d’édition, sous les yeux du ministère de la Culture et  être mis sur le marché sans qu’il y est une d’enquête sur son contenu, ni savoir à qui profite de tels sujets qui  incitent  à la haine entre  les composantes de la société algérienne. »

Plus virulent, le député A. Sid Cheikh Ouahid  du bloc des indépendants à l’APN pour la wilaya d’Oran estime dans une correspondance adressée au Premier ministre Nadir Arbaoui que  « le sujet du roman raconte des faits non  conformes aux traditions et aux coutumes de la société algérienne, et il n’existe aucune   preuve dans la réalité pour en étayer le contenu. »

Selon le député  oranais, « « « le roman insulte notre religion et les croyances des Algériens, et le but que poursuit cette écrivaine n’est pas acceptable »

Il  a ajouté : « Ce n’est qu’une preuve qui révèle l’intention de l’auteur qui veut jouer avec les sentiments de certaines personnes afin d’attirer l’attention autour d’elle ». 

Le représentant du groupe des députés indépendants pour la wilaya d’Oran exige des pouvoirs publics  « d’intervenir et d’enquêter sur cette affaire et de prendre les mesures nécessaires, ainsi que d’ordonner le retrait de ce livre et d’empêcher sa circulation parce qu’il porte atteinte aux bonnes mœurs ». Même la fondation Emir Abdelkader s’est mise de la partie. Elle a interpelé le chef de l’Etat pour qu’il intervienne pour interdire ce roman.

Soutien et solidarité avec « Houaria » et Inaam Bayoud

Immédiatement après la campagne de critiques visant « Hawariya », des écrivains, romanciers et éditeurs ont publié une déclaration dénonçant la « campagne féroce » visant la romancière Inaam Bayoud.

Les signataires de la  pétition diffusée  sur une plateforme électronique ont exprimé leur solidarité  avec l’entreprise éditrice du roman ainsi qu’avec  le jury du prix Assia Djeabar présidé par l’universitaire Abdelmadjid Bourayou

 Les signataires ont condamné ce qu’ils appellent « la violation de la liberté de création, de publication et de promotion des œuvres de création, quelle qu’en soit la source ».

Que raconte « Houaria » ?

Dans des déclaration faites précédemment à une chaîne de télévision,  l’écrivaine Inaam Bayoud avait déclaré vouloir « transmettre dans  « Houaria » l’image et la réalité de gens simples qui n’ont pas une identité qui leur donne l’existence ».

Inaâm Bayoud a également souligné que « son choix de la ville d’Oran se veut une manière  de  véhiculer une image joyeuse de cette ville dans les années qui ont précédé la décennie noire ».

Samia Naït Iqbal

Djawad Rostom Touati : lisons « Houaria »

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Inaam Bayoud
Le livre d'Inaam Beyoud

L’écrivain Djawad Rostom Touati a publié un important texte sur Facebook au sujet de la controverse qui vise honteusement le roman Houaria d’Inaâm Bayoud.

« L’art est éducateur en tant qu’art, non en tant qu’art éducateur. » Antonio Gramsci.

« Houaria », d’Inâam Bayoudh, est l’un des romans les plus beaux et captivants qu’il m’eût été donné de lire, toutes langues confondues.

Un roman polyphonique, où les voix des personnages tissent, par touches successives, la trame de ces destins savamment entrecroisés par l’auteure, qui recourt à un narrateur omniscient pour combler les quelques « blancs » que ne peuvent peindre les personnages, et nous plonger dans l’existence de ces couches marginalisées qui ont subi de plein fouet la décennie noire.

Dans un style de haute facture sans jamais être industrieux, l’auteure saupoudre sa narration de dialogues en dialecte oranais, qui donnent au récit un surcroît de réalisme au point que l’on croit voir les personnages vivre sous nos yeux. Ces passages, parfois crus sans jamais être vulgaires, sont esthétiquement justifiés et jouent un rôle primordial dans la narration: ils donnent de la substance aux personnages, une identité, un réalisme qui leur fait prendre corps et chair au-delà du « type littéraire »: une gageure que peu d’auteurs sauraient soutenir avec un tel brio.

Il semblerait cependant que le procédé, pourtant répandu chez maints grands auteurs (Choukri, Mahfoudh, etc.) eût choqué (vraiment?) quelques esprits bien-pensants, qui se sont empressés, photos à l’appui, de « signaler » ces passages comme indignes de la littérature, « el adab », la polysémie du mot en arabe suggérant une fusion entre littérature et « bonnes manières ».

Pour ces théoriciens de la littérature conventuelle, il faudrait qu’un personnage issu des bidonvilles s’exprimât comme un aède, que ses disputes fussent à fleurets mouchetés, et que les scènes ou dialogues amoureux fussent tirés de « تحفة العروس », ou qu’elles soient réduites au marivaudage.

Les questions esthétiques, notamment celles liées au réalisme, ont été débattues maintes et maintes fois dans tous les pays, mais sur des bases académiques sérieuses, non à partir de « clichés » isolés et offerts en pâture à la vindicte bariolée des contempteurs de la toile: gardiens de la bien-pensance et de la pudeur, envieux, zélateurs d’autres auteurs mis en concurrence, ou simples amateurs de buzz à qui l’on a prostitué la littérature pour en faire la matière de railleries goguenardes et de persiflage revanchard: « C’est donc cela, la littérature? »

Réflexions sur la base matérielle de l’intégrisme, sur le fait qu’il n’ait été que l’idéologie disponible pour habiller le mécontentement et le ressentiment du déclassement et de la paupérisation; sur le rôle réactionnaire de certaines zaouïas, qui exploitent le désespoir et la détresse de ces classes marginalisées pour leur extorquer les maigres sous qu’ils parviennent à épargner; sur le rôle progressiste de l’Islam bien compris, à travers la figure de Mourad, chirurgien brillant et exégète éclairé; sur la faillite de courants progressistes, coupés des préoccupations réelles du peuple réel, car trop occupés à mâchonner une phraséologie creuse ; sur le rapport au corps, à l’amour, à la féminité, à la séduction, à la littérature; sur les espoirs déçus et les désirs réprimés par l’exclusion de classe; sur l’hypocrisie sociale et ses ressorts concrets; réflexions sur bien d’autres thèmes encore: tout cela est passé à la moulinette des Don Quichotte de la littérature lustrale et immaculée, qui ne prennent du réel que ce qui sied au goût de ces sycophantes, et poussent le reste sous le tapis.

Ainsi est sommée Mme Beyoud, et quiconque après elle, de ne peindre du réel que « وين يشوف أحمد ».

Or, les créateurs répondent à une nécessité intérieure, et conduisent leur œuvre selon cette nécessité, et non selon les injonctions des chapelles.

Je me réjouis toutefois de cette polémique: elle permet de dépoussiérer là où ne voit pas Ahmed, de soulever les tapis et pousser les meubles, en somme d’affronter le réel par son plus prestigieux « représentant », au sens où il en fait une représentation: la littérature.

Les mêmes qui raillent, en politique, le procédé qui consiste à faire comme si un problème dont on ne parle pas n’existe pas, voudraient faire de ce procédé la norme en littérature. Vaste programme!

Lisons donc Houaria, pour envisager un pan de la réalité sociale, sans fards, sans complaisance, sans jugements et sans discours idéologique. « Ni rire, ni haïr, ni pleurer, mais comprendre. » La formule de Spinoza est tout de même plus intéressante que l’idéal des zélateurs de « غير وين يشوف أحمد ».

Pour ma part, je vais relire Houaria, entre autres, pour apprendre à écrire: car voilà un roman que j’aurais rêvé de signer.

Djawad Rostom Touati

« Non aux mascarades électorales sous la dictature !… »

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Hirak Tanekra
Les manifestations du Hirak auraient pu servir de catalyseur national. En vain.

Des défenseurs des droits humains, des hommes politiques, des avocats, journalistes ont publié une importante tribune. Cette déclaration ouverte brise la falaise de la peur qu’impose le régime depuis 2020. Les signataires refusent la fatalité et la parodie présidentielle du 7 septembre et appellent à un sursaut national pour sauver l’Algérie.

L’Algérie d’aujourd’hui traverse une situation plus critique qu’avant, avec des perspectives, à court et à moyen termes,encore plus complexes et plus périlleuses.

En effet, le régime a fait rater au pays l’opportunité historique d’un changement démocratique pacifique offerte par la révolution populaire pacifique du 22 février 2019. De plus, la politique du tout-sécuritaire continue de fouler aux pieds la volonté du peuple en imposant par la répression et l’autoritarisme une nouvelle situation de statu quo et d’impasse.

« Le scrutin présidentiel du 12 décembre 2019, marqué par l’intronisation d’un autre « chef d’État sur mesure », a consacré l’illégitimité du pouvoir tout en plongeant l’Algérie dans une ère de non-gouvernance, d’illusions, d’improvisation et d’absurdité.

Près de cinq années plus tard, le haut commandement des forces armées, pouvoir réel, et sa façade civile, en situation de survie, se met en quête de son « salut » au détriment de toute la nation, reproduisant ses « péchés capitaux et clonant ce qu’il y a de pire en lui.
Il a anéanti les abécédaires de la politique, fermé l’espace public, confisqué les libertés fondamentales, individuelles et collectives, et, plus grave encore, légalisé la répression et les arrestations politiques.

Il a avorté l’émergence d’une société civile indépendante et banni les différents contre-pouvoirs, qu’il s’agisse de partis, de syndicats véritables ou de médias libres tout en bloquant les mécanismes de contrôle et d’accountability.

En outre, il a détruit tous les canaux de dialogue, de médiation, de négociation et de résolution des conflits, en fabriquant à chaque fois, ex nihilo, des ennemis interieurs imaginaires pour raisons d’opinions divergentes et/ou d’opposition affichée.

Dès l’abord, le régime a promptement montré son hostilité contre la révolution populaire pacifique malgré ce qu’elle a ostensiblement et immédiatement accompli : unité nationale fortifiée, espoir ravivé et culture de citoyenneté cristallisée dans la diversité, le vivre-ensemble, la tolérance et la construction collective.

Et de surcroît, il fait de ses valeurs partagées et de ses acteurs engagés une grande cible pour sa diabolisation et sa vengeance.

Par la peur, le désespoir et la corruption, il tente de démanteler ce qui reste des jalons de l’édification nationale visant à réaliser le rêve de l’État démocratique et social qui, bien évidemment, mettent en danger les intérêts de ses nébuleuses et clans ayant fait main basse sur les richesses du pays au point d’en faire une propriété privée.

Toutes ces pannes structurelles ont empêché l’Algérie, ce pays-continent, de décoller et l’ont placé en bas de classement mondial dans la majorité des domaines.

Aux niveaux régional et international, en l’absence de visions pragmatiques, le régime a isolé l’Algérie sur les plans diplomatique, économique et géo-sécuritaire, réduisant ainsi sa politique étrangère à de slogans creux présentant le pays comme victime de conspirations extérieures et de menaces permanentes. Et même ce rôle qu’il cherche à jouer à l’échelle internationale, onusienne particulièrement, à propos du génocide et crimes contre l’humanité perpétrés par Israël contre le peuple palestinien à Gaza, il l’a interdit au peuple algérien en l’empêchant de manifester sa solidarité comme il le faisait, hebdomadairement,lors de ses marches pacifiques sur l’ensemble du territoire.

Face à cette obstination rejetant toutes solutions radicales et tangibles et face à cette imposture conditionnant tout « changement politique sérieux » par de miséreux et parodiques cycles électoralistes aux résultats tranchés au préalable, il nous incombe à toutes et à tous, de tracer aujourd’hui d’autres perspectives pour faire front commun contre  » l’incertitude et l’inconnu » qui attendent inéluctablement l’Algérie et son peuple.

Un autre fiasco à venir, la mascarade du scrutin présidentiel du 7 septembre 2024, sera, sans aucun doute, plus désastreuse que les précédentes. Non parce que ce scrutin ne sera qu’une simple auto-validation du pouvoir en place par son vieil clientélisme mis-à-jour mais aussi parce qu’il approfondira les fractures et divisera le peuple selon un agenda visant à perpétuer, vaille que vaille,un régime sans légitimité ni crédibilité encore moins un projet.

Il est, donc, clair que notre responsabilité historique ne se limite pas à un rejet absolu de cette énième mascarade électorale mais exige impérativement de nous la construction d’un rapport de force populaire pacifique et alternatif pour sauvegarder notre entité collective;peuple et patrie. Et ce, dans le cadre de nos droits et libertés tels garantis par la constitution et l’ensemble des pactes et conventions internationaux que l’Algérie a ratifiés depuis des décennies.

Notre présent cri commun puise son esprit et ses références dans la révolution populaire pacifique et reste totalement fidèle à ses objectifs légitimes. Notre résistance démocratique, quant à elle, est par essence plurielle, inclusive, trans-idéologique et imperméable au sectarisme et esprit partisan étroit.

Ce que nous considérons, à juste titre, comme un acquis national à traduire,ensemble, en projet d’une transition démocratique constituante, protégé par le peuple, son unique source de légitimité et collectivement porté par toutes les forces vives de la société ayant foi en l’État de droit et oeuvrant pour la mise en place d’institutions démocratiques légitimes, authentiques et ouvertes sur le monde.

Nous, signataires de cette déclaration politique ouverte, animés par nos convictions et nos luttes, nous nous mettons au service de la volonté du peuple et des objectifs de sa révolution pacifique. Nous ne sommes qu’un maillon dans la chaîne de toutes les luttes nationales pour la libération du pays et la liberté du peuple.

Par conséquent, le despotisme sous toutes formes ne peut être une fatalité devant laquelle nous abdiquerons comme nous refusons catégoriquement ce « présumé destin » que le régime veut imposer ad vitam aeternam à l’Algérie et aux Algériens.

Il est de notre devoir, aujourd’hui plus que jamais, de clamer vigoureusement et d’une seule voix : Non aux mascarades électorales sous la dictature !… Oui à une démocratie véritable et à la souveraineté populaire !

Alger, le 20 juillet 2024

Signataires:
Ali Laskri
Mohamed Hennad
Fetta Sadat
Abdellah Heboul
Karim Tabbou
Said Boudour
Wassila Benlatreche
Mohcine Belabbas
Toufik Belala
Said Zahi
Fodil Boumala

Amar Benhamouche : « Un peuple cultivé ne sera jamais dupé ou dépravé »

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Amar Benhamouche

Amar Benhamouche est natif d’Akbou (Aqbu), une ville et une commune de la wilaya de Béjaïa (Bgayet) dans la vallée de la Soummam. Dans une région célèbre de par son histoire, cette ville est délimitée à l’est par la Soummam, au sud par l’oued Sahel (Asif Ɛebbas) et proche des communes d’Ouzellaguen, d’Amalou, de Bouhamza, d’Ighram, d’Aït R’zine, de Seddouk, de Chellata et de Tazmalt. Autour d’Akbou on trouve l’Azib Benali Chérif, Tifrit, Taharacht et Azaghar.

Amar Benhamouche est psychologue de formation mais c’est la poésie qui l’anime et le passionne. Si cela peut paraître étrange aux non avertis, il n’en est rien en vérité : la psychologie et la poésie se complètent, les deux guérissent par les mots. Comme l’écrivit Confucius : « Trois cents poésies peuvent être résumées en un mot : la pensée pure. » 

Dans son article sur la relation entre psychologie analytique et la création poétique-artistique, Carl Gustav Jung considère que la psychologie et la poésie sont étroitement liées.

Amar Benhamouche est un poète militant. Dans un élan d’amour pour cet art majeur que l’époque avec ces médias lourds tend à ignorer, il porte au-devant de la scène cette parole libre aussi vieille que l’humanité. En 2015 il a publié une pièce de théâtre en kabyle, Irus d Tanatus.

Amar Benhamouche est par ailleurs le secrétaire général de l’association Apulivre, présidée par Hacene Lefki, avec qui il a lancé en 2022 la première édition du festival de poésie « La Tour Poétique ». Il vient de publier, dans le cadre de la troisième édition de ce festival de poésie, « Poésie : Luttes et combats », un ouvrage préfacé par Rachida Belkacem, aux éditions Milot.

« Poésie : Luttes et combats » est un ouvrage collectif poétique. C’est la rencontre de plusieurs écrivains et poètes de différents pays, Amar Benhamouche, Maggy de Coster, Sarah Mostrel, Pedro Vianna, Kamel Bencheikh, Yasmine Madaoui, Geneviève Guevara, Claire Boitel, Arwa Ben Dhia Rachida Belkacem, Hanen Marouani, Leila Elmahi et Alain Pizerra. 

« Poésie : Luttes et combats » est un livre passionnant qui élève et redonne ses lettres de noblesse à la poésie, il est comme une bouffée d’oxygène qui laisse entrevoir un avenir propice où la poésie pourrait reprendre sa place première, sa place d’art majeur.

Le Matin d’Algérie :  Vous êtes psychologue de formation, poète, militant et animateur associatif, qui est Amar Benhamouche ?

Amar Benhamouche : Né en Kabylie dans une modeste famille de paysans. Mon père, un poète et un militant de la cause berbère, m’a initié dès ma tendre enfance à la lutte politique, au combat pour notre notre identité et notre langue berbère et il a accordé un soin particulier à la transmission de l’amour de la lecture.

Diplômé en psychologie clinique (Master II) et d’un autre diplôme en psychologie de l’enfant, je suis auteur de presse, poète, passionné de littérature et féru d’Histoire. Actuellement, je suis le secrétaire général de l’association Apulivre présidée par Hacene Lefki.

Le Matin d’Algérie : Vous êtes très actif, vous faites des allers-retours entre Rouen où vous vivez et Paris, sans jamais vous plaindre, le visage souriant, est-ce la poésie qui vous donne tant d’énergie ?

Amar Benhamouche : Ce n’est pas seulement la poésie, mais toute cette envie de participer à la promotion de la culture, particulièrement du livre et de la lecture. Il ne faut surtout pas oublier que j’ai eu la chance de naître dans une région très active dans domaine culturel ; du village au collège, du lycée à l’université par la suite. Mes diverses expériences dans le mouvement associatif et le privilège que j’ai eu de rencontrer de grandes personnalités actives dans les domaines politiques et culturels m’ont influencé et ont façonné ma personnalité d’aujourd’hui. Je suis le produit d’une Histoire, et je m’estime heureux d’avoir contribué modestement, à l’aune de mes possibilités et de mes savoirs, à enrichir la scène culturelle contemporaine.

Le Matin d’Algérie : Le célèbre psychiatre et psychologue Carl Gustav Jung a noté le lien étroit qu’il y a entre la psychologie et la poésie, quel est votre avis ?

Amar Benhamouche : Freud fait le parallèle entre le rêve et la littérature. Il qualifie toute production littéraire, dont la poésie bien évidemment, de « rêves éveillés « . En effet, la poésie est une forme de catharsis, une libération de nos douleurs et une expression de nos désirs inconscients réprimés, interdits et refoulés à travers un mécanisme de sublimation.

Dans, Malaise dans la Civilisation, Freud écrit «  La sublimation des pulsions est un trait particulièrement saillant du développement de la civilisation, c’est elle qui rend possible que les activités psychiques supérieures, scientifiques, artistiques, idéologiques, jouent un rôle tellement important dans la vie civilisée. »

Ainsi, la poésie peut constituer une thérapie ; individuellement en écrivant et collectivement en la partageant avec les autres.

Le Matin d’Algérie : Il faut du courage et de la ténacité pour s’investir autant autour de la poésie, Parlez-nous du Festival, La Tour Poétique, que vous avez créé.

Amar Benhamouche : Victor Hugo a dit : « Quelques peuples seulement ont une littérature, tous ont une poésie ». La poésie est ce langage universel, cette beauté des mots qui survole les cieux et traverse les frontières pour bâtir des ponts de fraternité et de solidarité entre les peuples.

Paris est une des capitales de la beauté, des arts et de la littérature. La grandeur de la Tour Eiffel, la beauté de Paris, la générosité des parisiens s´ y joignent pour offrir à tous ceux qui la parcourent une balade en vers. D’où le nom du festival « La Tour Poétique « , qui fait référence à la Tour Eiffel.

Cependant les membres de l’association ressentaient fortement le manque d’espaces réservés à la poésie et aux poètes. Ils ont ainsi formulé unanimement l’idée de lancer un festival de poésie. Une année après la création de notre association, nous avons proposé cette idée du festival à la responsable de la MVAC du 15ème arrondissement de Paris (Maison de La Vie Associative et Citoyenne du 15e arrondissement de Paris) Madame M. Thiam, qui a très vite validé la proposition.

Les trois éditions du festival de poésie  » La Tour Poétique  » organisées par notre association « Apulivre « , en septembre 2022, en juin 2023 et en juin 2024, furent des occasions en or pour rencontrer de belles âmes et de belles plumes. Ces trois éditions nous ont permis de conjuguer le verbe écrire en amour, de composer une ode à la tolérance.

Le Matin d’Algérie : Vous venez de publier un bel ouvrage poétique collectif où vous avez réussi à réunir plusieurs écrivains poétes, comment avez-vous pu rendre possible ce beau projet ?

Amar Benhamouche : À la rentrée littéraire de septembre 2023, nous avons débattu, au sein de l’association, l’idée d’un livre collectif à éditer pour la troisième édition du festival. Sur mon initiative, nous avons conçu la thématique « Poésie, luttes et combats », nous avons alors proposé à des auteurs et des poètes parmi la constellation des auteurs du festival de contribuer. Il restait à trouver une maison d’édition.

Au mois d’octobre 2023, j’ai contacté des poètes qui tous montrèrent un vif intérêt et un grand enthousiasme pour ce projet. Un mois plus tard, les éditions Milot acceptèrent ce projet de livre collectif, sous deux réserves : privilégier le qualitatif sur le quantitatif, et créer préalablement un comité de rédaction et de sélection des textes à publier. Vers le mois d’avril les textes furent sélectionnés par le comité et corrigés. Quelques jours avant le festival, comme un cadeau, le livre a été publié sous ma direction, préfacé par l’auteure et poète franco-marocaine Rachida Belkacem et illustré par le peintre et dessinateur Hamid Aftis, ce projet a abouti en seulement six mois. Le livre se structure en trois parties ; une première contient des textes de réflexion, une deuxième, un hommage au poète français Frédéric Tison qui nous a quittés en décembre 2023, et la dernière partie est réservée aux textes poétiques.

Le livre a été publié quelques jours avant le début de la troisième édition du festival de poésie, La Tour Poétique, qui s’est déroulé à Paris, dans le 15ème arrondissement, du jeudi 13 au samedi 15 juin 2024.

Le Matin d’Algérie : Un mot sur l’association, Apulivre, dont le titre est tellement évocateur, justement, comment s’est fait le choix de ce titre ?

Amar Benhamouche : L’idée de l’association Apulivre est née sur les falaises d’Étretat où Hancene Lefki, l’actuel président de l’association, m’a proposé l’idée de lancer une association culturelle. J’ai apprécié cette belle idée et nous avons débattu par la suite avec d’autres amis qui nous ont orientés et aidés dans les démarches administratives.

Le choix du nom de l’association n’a rien d’anodin. En effet, c’est un mot-valise qui emboîte d’une part « Apulée » et d’autre part « Livre ». Et ceci en référence à Apulée de Madaure (Mdaourouch), un orateur, écrivain, philosophe médio-platonicien numide, reconnu comme le premier romancier de l’humanité avec son roman « l’Âne d’or » ou « les Métamorphoses ».

Apulée porte la symbolique de ce pont que nous voulons bâtir entre les deux rives, la rive Sud et Nord de la Méditerranée ; un pont de littérature et de culture pour la fraternité entre les peuples.

Le Matin d’Algérie : Quel regard portez-vous sur la production poétique en général et en Algérie en particulier ?

Amar Benhamouche : Malgré le pessimisme qui règne dans les milieux poétiques en France, je pense que la production est prolifique. Nous constatons surtout qu’il y a de plus en plus de jeunes auteurs. Les contacts que notre association a entretenu avec les maisons d’édition et les poètes ont montré que les gens continuent à écouter et lire la poésie et à acheter des recueils. En ce qui concerne la baisse du nombre des lecteurs, je pense qu’il ne concerne pas seulement la poésie mais toute la production littéraire.  Petit à petit, l’écran a remplacé le livre.

En ce qui concerne l’Algérie, je n’ai pas assez d’informations et de contacts avec des poètes. Mais je sais que la poésie y est moins présente dans les librairies. En effet, ce sont les réseaux sociaux et quelques festivals de poésie organisés ici et là qui permettent aux poètes de faire connaître leur production poétique.

Le Matin d’Algérie : La poésie peut-elle aider à l’émancipation d’une société ?

Amar Benhamouche : Je pense que la poésie est un outil de lutte. Dans ma contribution in « Poésie : luttes et combats », je mets en exergue l’importance de la poésie dans l’éveil des consciences, dans le monde entier, mais plus particulièrement en Kabylie. En effet, j’y parle du rôle important joué par deux poètes et chanteurs, en l’occurrence Lounis Ait Menguellet et Lounes Matoub, dans la conscientisation et l’accompagnement des masses populaires dans la lutte pour la liberté.

Le Matin d’Algérie : “L’Amour, la poésie, c’est par ce seul ressort que la pensée humaine parviendra à reprendre le large.” Disait l’écrivain poète français André Breton, qu’en pensez-vous ?

Amar Benhamouche : Aujourd’hui, l’expression de la haine s’étend et est même tolérée partout dans le monde. En parallèle, les conflits internationaux, les crises sociales et le climat de guerre endolorissent le rapprochement entre les humains. Hélas ! Rien de bon ne se présage pour ce monde… Mais fort heureusement, la poésie existe pour contrer la haine et dire non à la guerre. Dans les tréfonds de l’âme du poète surgit l’amour et l’expression de la tolérance. La poésie réunit ce que les idéologies nauséabondes séparent. Dans ma poésie on retrouve l’éloge de l’amour, de la révolution et de la tolérance.

Le Matin d’Algérie : Quels sont les poètes qui vous influencent ?

Amar Benhamouche : Comme mon père était poète, j’ai été précocement bercé par la voix de la poésie. En effet, mon père nous récitait souvent à la maison ses poèmes et nous expliquait leur sens. Les chanteurs-poètes kabyles m’ont fait découvrir davantage la poésie dans sa dimension engagée et révolutionnaire, particulièrement Lounis Ait Menguellet et Lounes Matoub.

Par la suite, j’ai découvert d’autres sommités de la poésie kabyle comme Ahmed Lahlou et Ben Mohamed. L’amour de la langue française m’a aidé à découvrir Kateb Yacine et Tahar Djaout, Victor Hugo, Charles Baudelaire et Jacques Prévert. J’ai aussi voyagé en Amérique Latine en lisant les traductions de deux grands poètes chiliens qui m’ont beaucoup marqué, Pablo Neruda et Nicanor Parra. Je suis bien sûr aussi habité par la beauté de la langue arabe, une langue de poésie que j’ai découvert à travers les mots de Mahmoud Darwich, Ahmad Matar, Nizar Qabbani et Hamouche Tazaghart.

Mon réseau d’amis et de poètes m’a permis de découvrir de belles plumes, Kamel Bencheikh, Arwa Ben Dhia, Rachida Belkacem, Maggy De Coster, Sarah Mostrel, Claire Boitel, Consuello Arriagada et tant d’autres…

Le Matin d’Algérie : Avez-vous de projets en cours et à venir ?

Amar Benhamouche : Effectivement, tant que la vie ne s’arrête pas, les projets ne s’arrêtent pas. Avec mon ami, le sculpteur et le dessinateur Hamid Aftis, nous sommes en train de finaliser le projet d’une bande dessinée sur le chanteur-poète Lounes Matoub. En ce qui concerne la poésie, je travaille actuellement sur mon propre recueil un recueil de poésie bilingue, arabe/français, intitulé « L’Amour et la Révolution ».

Le Matin d’Algérie : Un dernier mot peut-être ?

Amar Benhamouche : Mon dernier mot ne peut être qu’un appel aux parents. Qu’ils fassent de la lecture et de la culture une priorité dans l’éducation de leurs enfants. Un peuple cultivé ne sera jamais dupé ou dépravé.  

Entretien réalisé par Brahim Saci

Qui seront les heureux « lièvres » d’Abdelmadjid Tebboune ?

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Présidence

Conformément aux dispositions de l’article 87 de la Constitution et des articles 249, 250, 251 et 253 de l’ordonnance 21-01 du 10 mars 2021 portant loi organique relative au régime électoral, les postulants à la candidature à l’élection présidentielle du 7 septembre prochain ont déposé leurs dossiers de déclaration de candidature pour la présidentielle du 7 septembre, jeudi 18 juillet, avant minuit, auprès de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) contre remise d’un récépissé. 

Tout ça c’est pour la forme officielle de cette mascarade électorale. Pas moins de 16  candidats à la candidature ont défilé tout au long de la journée de jeudi, munis de leurs formulaires de souscription des signatures individuelles, au siège de l’ANIE, sis au Palais des nations (Alger) où ils ont été accueillis par le président de l’Autorité, Mohamed Charfi. Epatant spectacle d’individus en effet qui s’y croient déjà ! Ou font semblant de l’être.

Il s’agit du candidat « indépendant » Abdelmadjid Tebboune, d’Abdelaali Hassani Cherif (Mouvement de la société pour la paix-MSP), de Youcef Aouchiche (Front des forces socialistes FFS), Tarek Zeghdoud (parti du Rassemblement algérien-RA), M. Chaabi Salem et M. El Abadi Belabbas, de Mme Zoubida Assoul, d’Abdel Hakim Hamadi, Raouf Aib, Belkacem Sahli de l’ANR qui se présente sous la bannière d’un groupement de partis dénommé « Groupe stabilité et réforme », d’Ahmed Gouraya (Front de la jeunesse démocratique pour la citoyenneté), de Bouamrioune Slimane, de Mme Saïda Neghza (femme d’affaires sans parti), de Kamel Hebbal, d’Amar Chekar et de Hichem Baba Ahmed.

Tous ces noms la liste des personnalités désireuses de se porter candidat pour un mandat de président de la République algérienne. Autant dire autrement, pour faire figure de joyeux lièvres à l’élu de l’Etat profond, Abdelmadjid Tebboune.

Cette liste sera certainement, sera sévèrement réduite à l’issue du traitement des formulaires de souscription que l’ANIE. Un travail au hachoir attend donc les très zélés fonctionnaires de cette auguste institution qu’on ne peut accuser de vouloir évidemment favoriser Tebboune. Loin de là !

Cette institution dirigée par l’insubmersible Mohamed Charfi statuera sur la validité de toutes ces candidatures par décision dûment motivée, dans un délai maximum de sept jours, à compter de la date de dépôt de la déclaration de candidature.

Dans un article diffusé par l’agence officielle APS, on apprend quun protocole stricte doit être suivi pour la validation ou le rejet des candidatures par l’ANIE. Voilà qui va rassurer les derniers naïfs qui vont croire à un scrutin démocratique.

Celle-ci, nous assure l’APS transmet à la Cour constitutionnelle ses décisions relatives aux candidatures accompagnées des dossiers des candidats dans un délai n’excédant pas les vingt-quatre heures, à compter de la date de l’annonce de ses décisions.

La décision de l’Autorité indépendante est immédiatement notifiée à l’intéressé.

En cas de rejet, il peut introduire un recours auprès de la Cour constitutionnelle dans un délai, maximum, de quarante-huit heures qui suivent l’heure de la notification.

La Cour constitutionnelle valide, par décision, la liste définitive des candidats à l’élection du président de la République, y compris les recours, dans un délai, maximum, de 7 jours, à partir de la date de transmission de la dernière décision de l’autorité indépendante.

Le retrait du candidat n’est ni accepté ni pris en compte après la validation des candidatures par la Cour constitutionnelle, sauf en cas d’empêchement grave légalement constaté par la Cour constitutionnelle ou en cas de décès de l’intéressé.

Donc une fois la machine est en marche gare aux éventuels lâcheurs ! Pas de retrait qui pourrait décrédibiliser la victoire de Tebboune, car celui-ci a quand même besoin de figurants. Il ne va tout de même pas courir tout seul, comme à l’ère du parti unique !

Toujours sur la forme : une fois leurs dossiers de candidature validés, les candidats commencent à présenter leurs programmes électoraux au cours de la campagne électorale, qui est déclarée ouverte vingt-trois jours avant la date du scrutin et s’achève trois jours avant la date du scrutin. Mais tout ça n’est que du folklore officiel pour faire accroire à une scrutin normal. Les jeux sont déjà faits. L’heureux gagnant est connu.

S’il y a encore quelque personne qui doute, il faut rappeler que Tebboune avait lui-même annoncé sa future visite d’Etat en France pour l’automne. Soit après la présidentielle du 7 septembre. C’est pour dire que pour lui c’est une simple formalité.

Samia Naït Iqbal

« Houaria », d ayamun ilhan i tsekla tazzayrit, i yidles n Tamazɣa !

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Inaam Bayoud
Le livre d'Inaam Beyoud

Ungal « Houaria (Tahewwarit) » (1), iwwi arraz Assia-Djebar 2024, di temsizzelt gar wungalen yuran s taârabt.

S timmad-nneɣ, ur neɣri ungal-nni akken ad nekcem deg wayen illan deg-s. Maca yella-d wawal fell-as.

Di tmurt n Lezzayer, nnan ikker ‘’wayhuh’’ deg uẓeṭṭa (réseaux sociaux) sɣur wid ur neqbil ad d-iffeɣ wungal-nni, ur neqbil arraz-is, zun ungal iffeɣ abrid n leqder (n tinneslemt), d ungal n laâr, d ungal n wuzuf/sexe !

Iɣmisen Le Matin d’Algérie, akked Le Monde di Fransa, uran-d ɣef temsalt-nni.

Tuzzma akked uqejjem ur d-usin sɣur udabu n Lezzayer, maca usan-d sɣur wid isbedden iman-nsen zun « d iaâssasen n tamesgida » (les gardiens du Temple).

Awal n tyita-nsen i sbedden d afakul/argument : Amek tessaweḍ Innam Bayoud ad taru « ayen ur nwata » s tutlayt n taârabt, tutlayt n ddin, di tmurt tineslemt ?

Din i tella tsarut tamezwarut n tuzzma akked isuɣan-nsen : zun ur telli tlelli n yal amyaru, n yal amdan di yal annar ; ma yeffeɣ yiwen/yiwet abrid, azekka zemren ad rnun asurif ɣer sdat, ad smeɣren taɣennant-nsen, ad sserɣen adlis deg ubrid (2), ad sserɣen tanedlist anida i yettnuz, neɣ ad ssiwḍen ɣer tyita neɣ timenɣiwt n temyarut ; ad ddun deg ubrid-nni n FIS akked yerbiben-is n iseggasen n 1990, wid i yenɣan acḥal d amyaru, acḥal d amussnaw.

Tasarut tis snat n isalan, d ayen d-yura di Facebook, s tefransit,  yiwen uselmad n tmaziɣt ɣef wungal-nni :

«… dans un style de haute facture […] l’auteur saupoudre sa narration de dialogues en dialecte oranais, qui donnent au récit un surcroît de réalisme au point que l’on croit voir les personnages vivre sous nos yeux. Ces passages, parfois crus sans jamais être vulgaires, sont esthétiquement justifiés et jouent un rôle primordial dans la narration… » (Yacine Zidane, Facebook, 16/07/2024).

Issefk ad d-tesfi timmist !

Di tmuɣli-nneɣ, d win i d ugur ameqqran i ẓran wid isnekren ‘’ayhuh’’ : i nutni, ur issefk ad taru s tutlayt iddren, tutlayt darǧa n tmurt n Wehran ; issefk ad teqqim kan di « el aârabiyya el lfusḥa , tutlayt n ddin », tin ur nettanef i webrid n « el idab el arabi ».

« Iaâssasen n tamesgida » ẓran tira-nni s darǧa d amihi/danger i udabu-nsen azekka. Maca d ayen ur d-nnin, d ayen iffren deg wawal-nsen, zun ugaden, ur issefk ad d-iffeɣ wawal ɣer tafat, am waâfrit-nni n tmucuha, ma yeffeɣ-d yuɣ tamurt akked igenwan, ur ikeččem ɣer wansi d-iffeɣ.

Aḍris n Mass Zidane ur llint deg-s tkerkas, inna-d ayen iḥulfa netta, « … tamyarut tcebbeḥ-d tira-s s yal adiwenni yuran s tutlayt darǧa tawehranit, armi tira-nni tessaweḍ imeɣri zun ibedd sdat wudmawen-nni, isell-asen, bedden d imdanen iddren sdat wallen-nneɣ..  /  l’auteur saupoudre sa narration de dialogues en dialecte oranais, qui donnent au récit un surcroît de réalisme au point que l’on croit voir les personnages vivre sous nos yeux.« 

Abrid n umezruy ur illi d abrid iseggmen, anida yezmer yiwen ad yefk tiṭ akkin, ad yared ɣer wanida iteddu ubrid-nni.

Abrid n umezruy yezzi, yenneḍ, isdukkel akessar d usawen.

Nezmer ad d-nini ass-a, ungal « Hewwariya » ad issekcem tamsalt n tutlayt darǧa deg unnar ameqqran n tsertit tadelsant, ansi ur d-teteffeɣ, am waâfrit-nni n tmucuha n tmurt tamaziɣt.

Tira ara yeddren azekka di Lezzayer, idis n tutlayt tamaziɣt, d tira s tutlayt darǧa.

D tutlayt n umur n Izzayiren iwumi tekcem tutlayt-nni ; akken di tal tamurt n Tamazɣa, armi yas-gan isem « Tamaɣribit / El meɣribiya ».

Kra n iseggasen izrin, Mas Rabeh Sbaa yura-d ungal s darǧa (« Feḥla »), maca ur iskir wayhuh deg unnar n uzeṭṭa internet azzayri. Ass-a yusa-d wass-is akken ur negguni.

Awal i nezmer ad nini i Massa Inaam Bayoud :

ass-a d kem i yellan deg ubrid issuffuɣen, deg ubrid iddren n yimal n tmurt, mačči d wid yefkan tamuɣli-nsen ɣer deffir, di rétroviseur.

Ass-a tegreḍ asurif amezwaru di tsekla s tutlayt iddren, tin swayes ddren yemdanen d-tesnulfuyeḍ, tutlayt darǧa tazzayrit, d tin i d yiwet tutlayt n uɣref.

Ddu deg ubrid-nni, rnu asurif d usurif akken imeɣriyen ad afen iman-nsen di tira-m, azekka ad am-rren tajmilt seg wul, mačči d aseglef n « yaâssasen n tamesgida ».

Nessaram ugar, ungal-im d-iteddun ad yaru s darǧa yelhan, timserreḥt, seg yixf ar yixf.

D tin i d tiririt-im ifulkin, tin iwatan i wid akk yeshetrifen ass-a.

Nessaram ad tgeḍ aḍref, zun d targa, tin ara yernun ɣer uḥemmal n tegrawla deg tedda tsekla tamaziɣt, d tutlayt tilellit, ur neqqin akka neɣ akkin.    

Ungal d tagersa n tegrawla, tikkal yugar abeckiḍ :

Tadyant n wayhuh i d-isker wungal « Houaria » di tmurt n Lezzayer mačči d tamezwarut deg umaḍal. Di yal tamurt, s wudem imgaraden seg wayen d-iwwi udlis amaynut d-iffɣen, d win i yessengugin tamurt, i yebḍan imdanen, neɣ i yesseɣlin tasertit n tmurt.

Di Tefrikt n Ugafa (Afrique du Sud)

Ad neqqim deg yiwen umedya ameqqran : d yiwen gar yedlisen igan iɣisi di tsertit n Apartheid di Tefrikt n Wanẓul (Afrique du Sud) :

Asmi d-iffeɣ wungal n André Brink (3) di 1974, « looking for darkness / Au plus noir de la nuit / Tillas n yiḍ aberkan », issenhez tamurt n Tefrikt n Wanẓul acku yesban-d udem aberkan n tsertit n apartheid.

Adabu n tmurt-nni ur iqbil ad d-ibedd deg ubrid-is yiwen umyaru (ɣas llan wiyaḍ), ad issexreb tasertit-is : imellalen afella, iberkan tama n wadda.

Mi yedda udabu ad igdel ungal n André Brink, mačči deg unnar-nni n tsertit n apartheid, mačči d war izerfan n iberkanen, mačči d leḥbas iččuren… Nutni sbabben-as tacrurt zun d ungal iffɣen abrid n leqder, d ungal n laâr, n wuzuf / pornographie. Ulac ayen ur sbabben, ulac win ur nerni tiyita, taggara serkcen-as  amɣar n tamesgida, D.J. Vorster, inna :

« … ces écrivains (Brink akked imeddukal-is) ne sont que les jouets inconscients de la conspiration communiste internationale qui utilise à des fins révolutionnaires les intellectuels libéraux dont les goûts dépravés sapent les fondements de la société occidentales … ».

Taggara gedlen ungal-nni , yenfa André Brink.

 Imyura-nni yecban André Brink, Alan Paton,  Breyten Breytenbach, Peters Abrahams, Alex La Guna… d nutni i yesseɣlin adabu yebnan ɣef apartheid, taggara yedda wawal-nni n Mandéla : « un Homme une voix/yan amdan, yat tiɣri ».  

Timerna : d tuttra kan

Aẓeggi yekkren ɣef wungal Houaria, sɣur « ixuniyen n taârabt-tinneslemt », d win ur d-nekki ass-a si tama n udabu. Tewwet tsusmi.

D azaylal kan, mazal d-suffɣen tuccar-nsen ?

Izmer ad yili d azaylal-nni : nutni fkan-as yakan Arraz Assia Djebar i wungal-nni, maca izmer ad yili ur t-ɣrin akken iwata wid iṭṭfen amezrag n ugraw, neɣ wid t-iɣran ur ddin deg usalu n udabu, fernen ungal-nni s lebɣi-nsen.

Ɣer sdat, ad d-ibin wayen illan… wait and see ! 

Aumer U Lamara

Timerna / Notes :

1. Ungal Houaria/Huwariya, Inaam Bayoud, éditions MIM, Oran, 2023.

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/07/18/en-algerie-une-maison-d-edition-se-saborde-apres-une-polemique-visant-l-un-de-ses-romans-juge-immoral_6252095_3212.html

2. Am wungal-nni n Salman Rushdie (Tisurtin n ciṭan/les versets sataniques), win i sserɣen yemdanen ur t-neqbil, deg wacḥal n temdinin di tmura n Iran, Pakistan, Urupa, USA, … sebba-s d lfetwa i yas-iga Ayatollah Khomeini.

3. Au plus noir de la nuit (Looking for darkness), André Brink, 1974, édition Stock, 1976, 538 p.

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